Texte intégral
Je suis heureux d'être parmi vous ce soir, à Marseille, où je viens régulièrement, et qui reste pour moi à jamais confondue avec le visage, la personne, l'esprit de mon ami Gaston Defferre.
Je pourrais raconter beaucoup de choses sur cette amitié, laissez- moi seulement vous dire qu'elle me fût précieuse, et que l'action de Gaston, l'homme politique, fût pour moi exemplaire.
L'homme qui avait su, dès la fin de la deuxième guerre mondiale, préparer un projet de sortie de la colonisation pour les peuples d'Afrique noire; lui qui avait réussi à redresser, par une vision forte et toujours rigoureuse, cette cité pour la placer au meilleur rang des villes de France; lui qui prépara la première grande décentralisation de la Ve République; lui qui a su concilier l'existence de populations d'origines diverses et cela en affrontant une crise économique sans égale dans les années 80 - c'est cet homme- là qui m'inspire et à qui je voudrais rendre hommage aujourd'hui.
Permettez- moi ici, à Marseille, où vivent beaucoup de mes compatriotes venus de Corse, de les saluer. Je suis sûr de partager avec eux une commune indignation devant l'attentat criminel dont à failli être victime, à Bastia, Emile Zucarrelli, dont je salue le courage et la fermeté de convictions.
Il ne se laisse pas intimider et ne se laissera pas intimider par ces groupes ultra- minoritaires, adeptes de la violence qui montrent leur vrai visage et qui, hier encore, étaient invités à la table des négociations de Matignon. L'histoire est amère. Il faudra bien, un jour, établir la part des responsabilités de chacun. J'ai pour ma part la conscience tranquille : et je suis avec vous, ce soir, pour vous dire pourquoi j'ai décidé d'aller au combat présidentiel, et combien je suis convaincu que tout est possible.
De quoi a besoin notre pays ? Eh bien d'abord de sens ! La France ne sait plus où elle va. La République est entravée, les valeurs ne sont plus transmises comme il faut, la violence progresse, les relations sociales deviennent chaque jour plus dures, la mondialisation libérale sans règles érode progressivement notre identité et bafoue la souveraineté du peup le. Il faut relever la France. Mais pour ce faire, il faut attaquer le mal à la racine - et la racine, en l'occurence, c'est la tête. C'est le pouvoir présidentiel, c'est l'Etat PS réincarnant l'Etat RPR et peut-être le préparant à nouveau, qui est responsable du déclin de notre pays.
Je veux restaurer la République, donner aux citoyens les conditions d'une vie sûre, revaloriser le travail, faire de la citoyenneté un élément de redressement de la France.
Vous le sentez bien, la sécurité - avec la lutte contre le chômage et la précarité - est devenue une préoccupation majeure de la population. Et pour cause !
1) Je prendrai les moyens d'une politique cohérente de sécurité Il y a quelques jours, un chauffeur de bus a été sauvagement agressé, ici, à Marseille, par une bande de délinquants
.
Voici des années que je dénonce la banalisation d'attitudes aussi scandaleuses qu'intolérables : des mineurs sans repères, ayant perdu le sens du bien et du mal, vivant dans le virtuel, se livrent à des actes de violences sans nom. J'avais mis en garde contre ces " sauvageons " élevés sans tuteur ni jardinier, sans règle et sans loi. La réalité ne cesse, hélas, de confirmer ce diagnostic.
Aucune mesure nouvelle d'ampleur, correspondant au phénomène, n'a été prise.
Lorsque j'étais ministre de l'intérieur, j'ai pu contenir la vague ; le taux de délinquance était stabilisé : + 2% en 1998, mais + 0,07% en 1999. Mais vous le savez, j'ai été empêché d'aller plus loin. Les mesures que je proposais m'ont été refusées au nom d'un angélisme mal placé ", qui laisse le peuple, les gens les plus modestes, à la merci d'une poignée de caïds qui exerce leur petite terreur dans certains quartiers.
La délinquance a augmenté de 7,7% en 2001. 187.000 vols et recels, 170.000 mineurs mis en cause, 306.000 voitures brûlées ! Oh je n'incrimine pas tant mon successeur que la fameuse loi Guigou, qui en posant des obstacles procéduriers aussi nombreux qu'inutiles, a freiné le travail des magistrats et des enquêteurs. Résultat : au moment même où la délinquance explose, le nombre des gardes à vue diminue !
J'avais pourtant remis au premier Ministre le 30 décembre 1998 une longue note de seize feuillets, proposant des mesures claires, pratiques, pour la police comme pour la justice des mineurs, pour prendre la délinquance à bras le corps. J'avais proposé une loi de programmation, le développement des politiques d'accès à la citoyenneté. Non seulement mes propositions ont été écartées, mais la loi Guigou est venue poser de nouvelles entravées à l'action des services de police et de la justice.
Pour en sortir il faudra du courage et d'abord au sommet de l'Etat. Mais il n'y a rien d'inéluctable à la progression de la délinquance. Il manque simplement de la volonté et des mesures nettes.
Je propose d'en finir avec les deux maux symétriques qui paralysent l'action contre la délinquance : · la démagogie, qui se paie de mots, mais n'agit pas. Jacques Chirac vient d'en donner l'exemple, en inventant un " ministère de la sécurité publique ". Les gendarmes resteront rattachés à la défense, les policiers à l'intérieur, les douaniers aux Finances, et une super usine à gaz, une nouvelle machine à coordonner remplacera l'action.
· l'autre danger, c'est l'angélisme. On ferme les yeux, ou trouve des circonstances atténuantes à une délinquance qui pourrit la vie de nos concitoyens les plus modestes. Lionel Jospin indique à présent qu'il est converti à une réforme de l'ordonnance de 1945. Il nous dit qu'il a pêché par naïveté. Etre gouverné par un naïf coûte cher aux milliers de victimes de cette petite délinquance. Comment d'ailleurs pourrait- il modifier cette ordonnance de 1945, puisque ni les socialistes, ni les Verts ni les communistes ne le veulent ? Ils sont prisonniers de l'angélisme.
Pour en sortir, il faut que l'exemple vienne d'en haut : tout détenteur d'une fonction publique doit incarner l'intégrité, la capacité à motiver le civisme des Français, la stimulation de l'esprit de citoyenneté. L'impunité zéro doit valoir partout, y compris au sommet de l'Etat.
Le respect de la loi délibérée en commun peut seul affranchir de la loi du plus fort, de la tyrannie du plus puissant. Mais il faut apprendre cette règles, que manifestement beaucoup de délinquants multirécidivistes ne connaissent pas. L'éducation civique doit figurer au programme de tous les cursus scolaires.
A - Les lois doivent être adaptées à la réalité de la délinquance
Je propose une refonte de l'ordonnance de 1945 : les délinquants mineurs, lorsqu'il y a récidive, doivent être soumis à une comparution immédiate devant le juge. En cas de récidive, l'atténuation de responsabilité à partir de 13 ans ne doit plus valoir. Il faut distinguer le noyau dur des délinquants multirécidivistes mineurs qui ne doivent plus attendre la protection que la loi accorde pour un premier faux pas. En matière correctionnelle, Jacques Chirac a fait supprimer en 1987 la détention provisoire de ces délinquants même récidivistes. Je propose dans les cas de récidive, d'infraction grave, de revenir sur cette dérive.
Le tout éducatif a montré ses limites. Il faudra clarifier le rôle du juge protecteur de l'enfance en danger et celui du juge de la délinquance des mineurs. Les sanctions devront être prononcées publiquement et les victimes en seront informées. Il faut mettre un terme à l'arrogance coutumière des multirécidivistes narguant leur victime dès après leur forfait. Responsabiliser les parents exigera de mettre en oeuvre les dispositions légales existantes, par exemple la mise sous tutelle des allocations familiales. Ceux qui exploitent cyniquement les mineurs pour commettre des méfaits, recevront un sérieux coup de semonce.
La loi Guigou doit être décrassée ; les députés socialistes n'en ont pas été capables. Il faudra remettre tout de suite l'ouvrage sur le métier, pour libérer le travail des enquêteurs des entraves inutiles.
Enfin, l'indépendance des Parquets, que j'ai toujours combattue, devra trouver son terme. Elle a abouti à ce que deux cents parquets mènent chacun leur politique pénale. Le taux d'inexécution des peines est alarmant. Une part infime de la délinquance des mineurs fait l'objet d'un jugement ou d'une sanction. Des instructions écrites et publiques remettront de l'ordre dans la maison. Les juges du siège doivent être totalement indépendants ; les parquets doivent être subordonnés à l'autorité légitime, celle du garde des Sceaux, responsable devant le parlement. Je découvre que Jacques Chirac vient de se rallier à cette position après avoir ardemment voulu le contraire ! Le plagiat est médiocre. Mais surtout, si l'on veut réformer, il ne faut pas redouter pour soi- même les foudres de la justice : c'est mon cas ! Je placerai l'intégrité au service de la réforme.
B - Des outils nouveaux seront mis en oeuvre Si je suis élu le 5 mai, je convoquerai le Parlement en session extraordinaire dès juillet.
Je le saisirai de deux lois de programmation : · l'une pour doter la police et la gendarmerie des moyens d'action qui leur sont nécessaires.
Jacques Chirac voulait la municipalisation de la police, comme si la délinquance s'arrêtait aux frontières des communes ! Il a oublié cette mesure dans son programme ; il y reviendrait sans doute demain. Ce dont les citoyens ont besoin, c'est d'une coordination forte pour mener la guerre à la délinquance. Elle doit s'organiser sur le terrain, dans les départements et sous l'autorité des préfets.
· Des moyens nouveaux sont nécessaires pour être plus efficace dans le combat contre la drogue, la délinquance financière, la lutte contre les circuits de blanchiment de l'argent sale qui alimentent les réseaux terroristes, les paradis fiscaux. La police judiciaire doit garder un haut niveau de compétence scientifique et technique.
· une autre loi de programmation devra permettre à la justice de remplir ses missions. Assez de la défausse actuelle ! Le Garde des Sceaux devra prendre ses responsabilités, celles du gouvernement, et coordonnera l'action des procureurs par des instructions publiques et écrites.
· Le Parlement sera saisi du projet de refonte de l'ordonnance de 1945, et du décrassage de la loi Guigou.
· 60 centres de retenue fermés pour délinquants multirécidivistes mineurs seront créés sur décrets d'avance.
· Oui, faire reculer la délinquance est possible : il n'est besoin que de volonté et de courage.
Je n'en manque pas. Et si la volonté et le courage sont au rendez vous, alors les citoyens, sans qui rien ne se fera, prendront part à ce combat. Le civisme doit être réveillé en France ! Naturellement on ne peut pas tout faire reposer sur l'Ecole et les enseignants. Ce sont les familles qu'il faut aussi responsabiliser, y compris par une pénalisation financière des dommages causés par leur progéniture, à proportion bien entendu de leur revenu. Une telle mesure aura un effet dissuasif certain et rétablira efficacement quelques repères simples. C'est ensemble que nous réaliserons le droit, égal pour tous, à la sûreté.
2 - Une grande politique d'accès à la citoyenneté Sécurité et citoyenneté sont étroitement liées. Trop de jeunes, parce qu'ils vivent dans des quartiers populaires, s'estiment stigmatisés. Or, il ne saurait être question, en figeant les jeunes dans un statut de victime, d'en rester au stade des constats amers, des déplorations impuissantes ou d'une énumération compatissante des discriminations.
Il ne s'agit pas non plus de se donner bonne conscience, mais de définir et de mettre en uvre des politiques républicaines d'accès à la citoyenneté.
L'objectif a atteindre consiste à faire de tous les jeunes, vivant sur notre sol, des citoyens capables de prendre en main leur destinée, et cela en faisant fond sur leurs qualités.
Les Commissions d'accès à la citoyenneté (CODAC) que j'avais créées en 1999 doivent être élargis à tous les secteurs de l'Etat. Il faut leur donner davantage de moyens. Une main fraternelle doit aider ces jeunes à franchir les obstacles, comme la xénophobie. L'Etat républicain n'en sera alors que plus fort pour imposer, avec l'égalité des droits, l'égalité des devoirs. Il faut en finir avec les vieux discours d'absolution pour cause de pauvreté ou d'immigration. Etre né pauvre ou dans une famille immigrée ne prédestine pas à la délinquance.
Assez de ces amalgames, entretenus de tous bords ! Nous ne ferons pas l'économie de la fermeté ; nous ne ferons pas non plus l'économie de la générosité.
L'école doit redevenir le lieu d'apprentissage de la citoyenneté. La transmission du savoir doit être replacée au centre des préoccupations. Il faut multiplier les bourses dans l'enseignement secondaire et supérieur.
L'accès à l'emploi est le fondement de toute action durable en matière d'accès à la citoyenneté. Il faut aider les jeunes issus de l'immigration à entrer dans l'administration et les entreprises publiques. Il s'agit non seulement d'offrir aux jeunes des possibilités d'emploi mais aussi de transformer le service public en faisant en sorte qu'il soit plus à l'image de la population. Il faut développer les classes préparatoires au concours, améliorer l'information des jeunes, augmenter les stages en entreprise, développer les parrainages avec le secteur privé... En un mot, irriguer l'ensemble de notre action publique par le souci de l'égalité : faire que l'égalité des chances de tous les jeunes ne soit pas un vain mot. De façon d'ailleurs plus fondamentale, la question de l'égalité est toujours un défi culturel - et vous êtes bien placés, ici, pour en comprendre la signification.
3) Reconquérir notre histoire et notre culture
Ville d'échanges et de métissage, Marseille doit faire vivre harmonieusement ses diverses composantes. Ici plus que partout ailleurs, l'enjeu culturel est décisif.
Toujours sollicitée par le contact des cultures et des croyances, enrichie progressivement dans ses us et coutumes par le passage ou l'installation de migrations provenant aujourd'hui autant du Maghreb, d'Afrique, d'Asie que, hier, du flanc nord de la Méditerranée, Marseille est une mosaïque aux mille couleurs qui doit servir d'exemple au reste de notre pays.
Ce qui fait l'attrait de cette belle cité, c'est ce mélange; ce qui fait sa force, c'est la fusion de tous les apports dans un creuset culturel et identitaire commun, celui des valeurs de la République.
La laïcité doit se vivre, ici, au quotidien. Elle est la condition essentielle du respect de l'autre; elle protège des replis communautaires, de l'intolérance confessionnelle.
Marseille est aussi un lieu de mémoire. Non pas seulement au nom des vingt-six siècles qui caractérisent son histoire, mais aussi, et plus quotidiennement au prix de l'histoire contemporaine : ici, à Marseille, un monument à la mémoire des Pieds-Noirs commémore le passé douloureux et pourtant si riche qui a tissé les relations entre la France et le Maghreb, la France et l'Algérie.
Quant je parle de Marseille et de la culture, comment oublier ce passé ?
Ce fût une histoire grande, parfois tragique, toujours passionnée. Elle ne peut être réduite à la litanie de la repentance.
Aussi devons-nous resituer l'histoire de la France en Algérie dans sa juste perspective, avec le souci d'aider les jeunes nés sur notre sol de l'immigration algérienne à mieux se situer dans la société française, et en rendant aux Pieds Noirs la légitime fierté de l'oeuvre accomplie par leurs aïeux de l'autre côté de la Mer. L'indépendance de l'Algérie était nécessaire mais elle n'efface pas l'histoire. La formation d'une nation est toujours douloureuse et nous devons toujours nous souvenir que l'Algérie indépendante a à peine quarante ans.
Un jeune qui se contenterait de lire le journal aujourd'hui, pourrait croire que l'Histoire de la France en Algérie se résume à une histoire de torture, de viols et de massacres. Pour moi qui ai passé plus de deux ans là-bas à cette époque, je puis déjà témoigner que tel ne fut pas le comportement de l'immense masse de nos soldats. Trois millions d'appelés ont fait leur devoir.
Ils l'ont fait sans joie, avec le sentiment de devoir accompagner une transition historique douloureuse.
Injustifiable a été l'abandon des harkis, mais la guerre d'Algérie ne résume pas toute l'histoire de la France en Algérie. Elle a duré cent trente-deux ans. Elle a certes entraîné souffrances, humiliations, aliénations. Mais en même temps elle a permis la mise en valeur de l'Algérie dont elle a fait un des pays les plus modernes dans le monde arabe. Les Pieds Noirs peuvent être fiers de l'oeuvre accomplie outre Méditerranée. Elle a brassé nos deux nations plus profondément que deux peuples le furent jamais. Deux millions et demi de franco-algériens, un million de pieds noirs de ce côté-ci de la Mer, une francophonie qui n'a jamais été plus développée de l'autre côté de la Méditerranée, témoignent de la profondeur des liens créés par l'Histoire, quelles qu'aient été les souffrances endurées des deux côtés. Et ce sont des atouts pour l'avenir !
C'est pourquoi nous n'avons pas à ressasser éternellement nos griefs réciproques. Nous devons au contraire nous tourner audacieusement vers l'avenir. Il serait bon qu'un jour une Commission d'historiens français et algériens se réunisse pour écrire une histoire si possible commune de cette guerre et de ce qui l'a précédée.
Quant aux enfants de l'immigration, souvent perdus entre les deux rives - je pense à certain d'entre eux qui, un soir, ont sifflé la Marseillaise au Stade de France - ils doivent apprendre que leur avenir est en France, comme citoyens français à égalité de droits et de devoirs. Ce n'est pas leur rendre service que de vouloir les constituer en minorité, avec une mémoire particulière, à l'écart des autres citoyens. C'est leur assigner le ghetto comme horizon ! La République, ce n'est pas la juxtaposition des communautés, c'est l'égalité de tous les citoyens quelle que soit leur origine, avec la conscience d'appartenir à une même communauté politique. Là encore, rien n'est plus important pour la France que de se réapproprier toute son histoire avec ses ombres mais aussi avec ses lumières. Ainsi tous les jeunes quels que soient leurs origines retrouveront la fierté de chanter la Marseillaise !
En 1999, j'ai lancé une Consultation qui doit enfin donner à l'Islam, un statut et une représentation semblables à ceux des autres religions au sein de la République. Le 26 mai prochain, les citoyens de confession musulmane éliront leurs représentants au Conseil de l'Islam de France. La reconnaissance de l'Islam se fera dans le cadre des lois de la République et du principe de laïcité. Les immigrés de confession musulmane pourront alors se sentir pleinement acceptés et reconnus. C'est cela la citoyenneté !
Qui sommes- nous en effet ?
Eh bien la réponse est simple : nous sommes tous des citoyens français avec notre passé, riche de heurts et de passions contradictoires, mais également désireux de faire vivre les principes républicains et de poursuivre ensemble notre histoire 4) Ouvrir la France vers le Sud Marseille est aussi concernée, plus qu'aucune autre ville, par la politique française et européenne en Méditerranée.
Or la Méditerranée est une zone de profonde fractures : sociale, économique, démographique et culturelle. Elle est aussi une zone de conflits ouverts : Moyen-Orient, ex-Yougoslavie, poussée récurrente de l'intégrisme au Maghreb et au Machrek, réflexes xénophobes en Europe...
Ces antagonismes radicalisent les différences identitaires entre les deux rives. Pour sortir de ce cercle infernal, la France doit entraîner l'Union Européenne et parier sur la modernisation des sociétés du Sud de la Méditerranée. Elle doit les aider :
· en favorisant la construction d'Etats de droit ;
· en créant, au-delà de la zone de libre-échange prévue par la déclaration de Barcelone, une véritable zone de co-développement et de prospérité ;
· en encourageant ces sociétés à trouver elles- mêmes les voies de leur modernisation culturelle dans le respect de l'identité et de la dignité de chaque peuple.
C'est ainsi seulement que nous éviterons que les problèmes d'identité se transforment en antagonismes violents.
Mais cela suppose un autre regard sur les relations Nord-Sud. Nous avons depuis plusieurs décennies tourné nos yeux surtout vers le Nord de l'Europe et, aujourd'hui, d'abord vers l'Est.
Certes, l'élargissement à l'Est est nécessaire. Mais il ne doit pas devenir un nouveau prétexte pour continuer à s'aveugler sur le Sud. Ce ne serait bon ni utile pour personne.
Vous le savez, en 1995, a été lancé le processus dit de Barcelone. Celui-ci vise l'établissement d'une zone de libre échange en 2010. Six ans après seulement, ce processus euro- méditerranéen fait l'objet de fortes critiques de la part des pays de la rive Sud; ils dénoncent notamment l'unilatéralisme de la Commission Européenne dans la gestion de la coopération financière qui leur est destinée. Ils redoutent les effets de l'élargissement à l'Est de l'Union européenne, dont ils redoutent de faire indirectement les frais.
Au sein de l'Union, seules, la France, l'Espagne et l'Italie, appuyées par la Grèce et le Portugal, accordent une importance réelle aux enjeux méditerranéens. Ces pays ont donc un rôle particulier à jouer pour mobiliser leurs partenaires européens autour d'un objectif stratégique : la création d'un véritable marché commun euro-méditerranéen.
Des politiques d'investissement significatives doivent être mises en place pour créer les infrastructures nécessaires au développement du Sud de la Méditerranée. L'aide aux petites et moyennes industries devrait aller de pair avec la possibilité donnée aux produits agricoles du Sud d'accéder à nos marchés.
Les programmes européens de soutien à la coopération décentralisée ont été abandonnés par la Commission. Ils sont pourtant essentiel pour dynamiser les relations entre les deux rives.
La ville de Marseille et la région PACA le savent bien qui mènent dans ce domaine des actions exemplaires. Depuis deux ans, la région conduit avec son homologue marocaine de Tanger un partenariat qui touche de très nombreux secteurs : développement rural, environnement, coopération universitaire, développement économique etc. La ville de Marseille conduit de nombreux projets avec les trois pays du Maghreb.
Il est essentiel que la France plaide au sein de l'Union européenne pour la reprise des programmes de coopération décentralisée. Elle doit aussi soutenir la candidature de Marseille pour l'accueil de la Banque euroméditerranéenne qui doit voir le jour comme filiale de la Banque européenne d'investissement. Cet outil incontournable renforcera la position de nos entreprises régionales et désignera Marseille comme la plate-forme du commerce euro-méditerranéen.
Et puis, vous le mesurez ici plus que partout ailleurs, les rapports avec Sud, c'est aussi une gestion responsable, réaliste, ouverte, des flux migratoires. J'ai toujours pensé que cette question devrait être au cur du partenariat euro- méditerranéen. Sur la période 2000/2010 les pays de la rive Sud devront absorber un accroissement de leur population active de l'ordre de 4 à 5 millions par an. Cette forte progression démographiq ue coïncide avec l'ouverture commerciale des pays de la rive Sud, qui font un lien direct entre le libre échange et la libre circulation des personnes.
Pour ma part, je crois nécessaire de réorienter nos politiques par l'organisation de flux de migrations temporaires. Le développement passe en effet par la formation des hommes autant que par les flux financiers.
L'aspect nouveau, c'est que, de plus en plus, la demande migratoire vient des étudiants formés dans les pays du Nord mais aussi de couches souvent déjà intégrées dans leurs pays (cadres, techniciens, médecins, etc.). Or ces couches constituent l'épine dorsale du développement dans leur pays. On ne peut pas juguler totalement cette demande, mais on ne doit pas pour autant la laisser se développer de façon anarchique, au risque de favoriser un nouveau pillage des pays pauvres. C'est la raison principale pour laquelle nous devons envisager sérieusement l'organisation de migrations temporaires.
La France ne peut rester indifférente à la violence sans précédent qui règne au Moyen-Orient.
Les liens historiques de notre pays avec le monde arabe, sa tradition d'indépendance lui commandent de peser de tout son poids pour la paix. Il lui faut entraîner ses partenaires européens, mobiliser les autres grandes puissances (Russie, Chine) pour que cette région du monde ne soit pas livrée à l'unilatéralisme. Il y va de la paix mondiale.
La politique française au Moyen-Orient doit avant tout défendre l'idée d'une paix juste, fondée sur la reconnaissance du droit lé gitime du peuple palestinien à un Etat viable et du droit d'Israël à vivre dans la sécurité.
Enfin, l'embargo qui frappe le peuple irakien est profondément injuste et cruel. Il a détruit l'un des Etats les plus modernes du monde arabe. Le plus laïque aussi. La France devrait donner l'exemple en levant unilatéralement l'embargo pour ce qui concerne tout ce qui n'est pas lié aux armements. Rien ne justifie les bombardements anglo-américains sur l'Irak. Il faut qu'ils cessent.
La France doit en outre s'opposer à toute nouvelle intervention militaire contre l'Irak. Ce pays doit retrouver sa place au sein de la communauté internationale et la France devra tout faire pour l'y aider.
Mais tout ceci implique que la France réapparaisse sur la scène du monde, et qu'elle parle haut et fort pour la justice et l'égalité. Je suis au regret de le constater, mais les deux têtes du couple exécutif s'épaulent plutôt dans l'effacement de la France. Et pourtant, en 1997, on aurait pu espérer un ressaisissement. Jospin promettait de " faire en tous domaines retour à la République ". Trois ans après, la République est à l'encan partout.
En réalité, la politique de Jospin n'a pas été différente de celle préconisée par Chirac. Tous deux sont ralliés au libéralisme inégalitaire. Lionel Jospin a fait la politique dont la droite rêvait : plus de privatisations que les deux derniers gouvernements de droite réunis, développement du travail précaire et de la flexibilité, etc...
Au dernier Conseil européen, à Barcelone, les deux candidats ont accepté de brader les services publics, d'allonger l'âge de départ à la retraite. Les deux prétendent vouloir préserver la retraite par répartition mais se prononcent l'un pour des fonds de pension à la française (Chirac) l'autre pour un complément de retraite par capitalisation (Jospin). Vous connaissez la différence ?
Ne cherchez pas : il n'y en a pas !
Dès leur entrée en campagne, les deux candidats ont confisqué le débat.
Un exemple : le temps d'antenne constaté par le CSA en janvier et février à été pour moi de 1h48 et 18 secondes contre 7h52 et 46 secondes pour Chirac et 8h59 pour Jospin. Ils m'ont interdit d'antenne en utilisant sans vergogne les médias.
En outre, les deux candidats font tout pour faire émerger les candidatures ext rêmes.
Ces candidatures n'ont aucune crédibilité : personne ne peut imaginer qu'un Le Pen ou une Laguiller présidera un jour la France.
Chirac-Jospin : je vous propose de sortir de cette fausse alternative.
Vous connaissez mon intégrité. Je fais ce que je dis et je dis ce que je fais. Mon action est basée sur trois principes :
· l'égalité : il n'y a pas de République sans égalité. Devant la loi, devant la justice. En Corse, comme dans nos banlieues. Au sommet de l'Etat, comme dans un village. Egalité entre les enfants, quelle que soit l'école où ils se trouvent. Egalité des salaires entre hommes et femmes.
· La fraternité : cela peut se dire aujourd'hui : solidarité. Non pas l'assistance ou l'aumône, mais la justice sociale. Le relèvement des bas salaires. La garantie des retraites. Et pour les jeunes, des bourses, des études rémunérées, des prêts à taux zéro qui leur permettent d'entrer debout dans la vie. Dignement. Et non en "personnes assistées".
· La liberté : croyez- vous qu'elle est respectée quand les deux candidats sortants utilisent à leur seul profit les médias ? Est-elle respectée quand ils volent ainsi l'élection ? Et que devient la liberté quand on craint pour son emploi, pour la sécurité de ses enfants, dans la rue ou à l'école ?
Je vous appelle au sursaut républicain face aux candidats du déclin. En votant pour moi, je vous appelle à voter utile. Je suis le seul à même de casser la machine RPR-PS.
Ne vous laissez pas abuser par les candidats qui prétendent s'opposer au " système " : en réalité, ils le renforcent en stérilisant vos voix.
Je vous le dis simplement, je suis le seul à offrir un changement véritable. Un changement possible. Un changement nécessaire à la France.
Source : www.chevenement2002.net, le 2 avril 2002)
Je pourrais raconter beaucoup de choses sur cette amitié, laissez- moi seulement vous dire qu'elle me fût précieuse, et que l'action de Gaston, l'homme politique, fût pour moi exemplaire.
L'homme qui avait su, dès la fin de la deuxième guerre mondiale, préparer un projet de sortie de la colonisation pour les peuples d'Afrique noire; lui qui avait réussi à redresser, par une vision forte et toujours rigoureuse, cette cité pour la placer au meilleur rang des villes de France; lui qui prépara la première grande décentralisation de la Ve République; lui qui a su concilier l'existence de populations d'origines diverses et cela en affrontant une crise économique sans égale dans les années 80 - c'est cet homme- là qui m'inspire et à qui je voudrais rendre hommage aujourd'hui.
Permettez- moi ici, à Marseille, où vivent beaucoup de mes compatriotes venus de Corse, de les saluer. Je suis sûr de partager avec eux une commune indignation devant l'attentat criminel dont à failli être victime, à Bastia, Emile Zucarrelli, dont je salue le courage et la fermeté de convictions.
Il ne se laisse pas intimider et ne se laissera pas intimider par ces groupes ultra- minoritaires, adeptes de la violence qui montrent leur vrai visage et qui, hier encore, étaient invités à la table des négociations de Matignon. L'histoire est amère. Il faudra bien, un jour, établir la part des responsabilités de chacun. J'ai pour ma part la conscience tranquille : et je suis avec vous, ce soir, pour vous dire pourquoi j'ai décidé d'aller au combat présidentiel, et combien je suis convaincu que tout est possible.
De quoi a besoin notre pays ? Eh bien d'abord de sens ! La France ne sait plus où elle va. La République est entravée, les valeurs ne sont plus transmises comme il faut, la violence progresse, les relations sociales deviennent chaque jour plus dures, la mondialisation libérale sans règles érode progressivement notre identité et bafoue la souveraineté du peup le. Il faut relever la France. Mais pour ce faire, il faut attaquer le mal à la racine - et la racine, en l'occurence, c'est la tête. C'est le pouvoir présidentiel, c'est l'Etat PS réincarnant l'Etat RPR et peut-être le préparant à nouveau, qui est responsable du déclin de notre pays.
Je veux restaurer la République, donner aux citoyens les conditions d'une vie sûre, revaloriser le travail, faire de la citoyenneté un élément de redressement de la France.
Vous le sentez bien, la sécurité - avec la lutte contre le chômage et la précarité - est devenue une préoccupation majeure de la population. Et pour cause !
1) Je prendrai les moyens d'une politique cohérente de sécurité Il y a quelques jours, un chauffeur de bus a été sauvagement agressé, ici, à Marseille, par une bande de délinquants
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Voici des années que je dénonce la banalisation d'attitudes aussi scandaleuses qu'intolérables : des mineurs sans repères, ayant perdu le sens du bien et du mal, vivant dans le virtuel, se livrent à des actes de violences sans nom. J'avais mis en garde contre ces " sauvageons " élevés sans tuteur ni jardinier, sans règle et sans loi. La réalité ne cesse, hélas, de confirmer ce diagnostic.
Aucune mesure nouvelle d'ampleur, correspondant au phénomène, n'a été prise.
Lorsque j'étais ministre de l'intérieur, j'ai pu contenir la vague ; le taux de délinquance était stabilisé : + 2% en 1998, mais + 0,07% en 1999. Mais vous le savez, j'ai été empêché d'aller plus loin. Les mesures que je proposais m'ont été refusées au nom d'un angélisme mal placé ", qui laisse le peuple, les gens les plus modestes, à la merci d'une poignée de caïds qui exerce leur petite terreur dans certains quartiers.
La délinquance a augmenté de 7,7% en 2001. 187.000 vols et recels, 170.000 mineurs mis en cause, 306.000 voitures brûlées ! Oh je n'incrimine pas tant mon successeur que la fameuse loi Guigou, qui en posant des obstacles procéduriers aussi nombreux qu'inutiles, a freiné le travail des magistrats et des enquêteurs. Résultat : au moment même où la délinquance explose, le nombre des gardes à vue diminue !
J'avais pourtant remis au premier Ministre le 30 décembre 1998 une longue note de seize feuillets, proposant des mesures claires, pratiques, pour la police comme pour la justice des mineurs, pour prendre la délinquance à bras le corps. J'avais proposé une loi de programmation, le développement des politiques d'accès à la citoyenneté. Non seulement mes propositions ont été écartées, mais la loi Guigou est venue poser de nouvelles entravées à l'action des services de police et de la justice.
Pour en sortir il faudra du courage et d'abord au sommet de l'Etat. Mais il n'y a rien d'inéluctable à la progression de la délinquance. Il manque simplement de la volonté et des mesures nettes.
Je propose d'en finir avec les deux maux symétriques qui paralysent l'action contre la délinquance : · la démagogie, qui se paie de mots, mais n'agit pas. Jacques Chirac vient d'en donner l'exemple, en inventant un " ministère de la sécurité publique ". Les gendarmes resteront rattachés à la défense, les policiers à l'intérieur, les douaniers aux Finances, et une super usine à gaz, une nouvelle machine à coordonner remplacera l'action.
· l'autre danger, c'est l'angélisme. On ferme les yeux, ou trouve des circonstances atténuantes à une délinquance qui pourrit la vie de nos concitoyens les plus modestes. Lionel Jospin indique à présent qu'il est converti à une réforme de l'ordonnance de 1945. Il nous dit qu'il a pêché par naïveté. Etre gouverné par un naïf coûte cher aux milliers de victimes de cette petite délinquance. Comment d'ailleurs pourrait- il modifier cette ordonnance de 1945, puisque ni les socialistes, ni les Verts ni les communistes ne le veulent ? Ils sont prisonniers de l'angélisme.
Pour en sortir, il faut que l'exemple vienne d'en haut : tout détenteur d'une fonction publique doit incarner l'intégrité, la capacité à motiver le civisme des Français, la stimulation de l'esprit de citoyenneté. L'impunité zéro doit valoir partout, y compris au sommet de l'Etat.
Le respect de la loi délibérée en commun peut seul affranchir de la loi du plus fort, de la tyrannie du plus puissant. Mais il faut apprendre cette règles, que manifestement beaucoup de délinquants multirécidivistes ne connaissent pas. L'éducation civique doit figurer au programme de tous les cursus scolaires.
A - Les lois doivent être adaptées à la réalité de la délinquance
Je propose une refonte de l'ordonnance de 1945 : les délinquants mineurs, lorsqu'il y a récidive, doivent être soumis à une comparution immédiate devant le juge. En cas de récidive, l'atténuation de responsabilité à partir de 13 ans ne doit plus valoir. Il faut distinguer le noyau dur des délinquants multirécidivistes mineurs qui ne doivent plus attendre la protection que la loi accorde pour un premier faux pas. En matière correctionnelle, Jacques Chirac a fait supprimer en 1987 la détention provisoire de ces délinquants même récidivistes. Je propose dans les cas de récidive, d'infraction grave, de revenir sur cette dérive.
Le tout éducatif a montré ses limites. Il faudra clarifier le rôle du juge protecteur de l'enfance en danger et celui du juge de la délinquance des mineurs. Les sanctions devront être prononcées publiquement et les victimes en seront informées. Il faut mettre un terme à l'arrogance coutumière des multirécidivistes narguant leur victime dès après leur forfait. Responsabiliser les parents exigera de mettre en oeuvre les dispositions légales existantes, par exemple la mise sous tutelle des allocations familiales. Ceux qui exploitent cyniquement les mineurs pour commettre des méfaits, recevront un sérieux coup de semonce.
La loi Guigou doit être décrassée ; les députés socialistes n'en ont pas été capables. Il faudra remettre tout de suite l'ouvrage sur le métier, pour libérer le travail des enquêteurs des entraves inutiles.
Enfin, l'indépendance des Parquets, que j'ai toujours combattue, devra trouver son terme. Elle a abouti à ce que deux cents parquets mènent chacun leur politique pénale. Le taux d'inexécution des peines est alarmant. Une part infime de la délinquance des mineurs fait l'objet d'un jugement ou d'une sanction. Des instructions écrites et publiques remettront de l'ordre dans la maison. Les juges du siège doivent être totalement indépendants ; les parquets doivent être subordonnés à l'autorité légitime, celle du garde des Sceaux, responsable devant le parlement. Je découvre que Jacques Chirac vient de se rallier à cette position après avoir ardemment voulu le contraire ! Le plagiat est médiocre. Mais surtout, si l'on veut réformer, il ne faut pas redouter pour soi- même les foudres de la justice : c'est mon cas ! Je placerai l'intégrité au service de la réforme.
B - Des outils nouveaux seront mis en oeuvre Si je suis élu le 5 mai, je convoquerai le Parlement en session extraordinaire dès juillet.
Je le saisirai de deux lois de programmation : · l'une pour doter la police et la gendarmerie des moyens d'action qui leur sont nécessaires.
Jacques Chirac voulait la municipalisation de la police, comme si la délinquance s'arrêtait aux frontières des communes ! Il a oublié cette mesure dans son programme ; il y reviendrait sans doute demain. Ce dont les citoyens ont besoin, c'est d'une coordination forte pour mener la guerre à la délinquance. Elle doit s'organiser sur le terrain, dans les départements et sous l'autorité des préfets.
· Des moyens nouveaux sont nécessaires pour être plus efficace dans le combat contre la drogue, la délinquance financière, la lutte contre les circuits de blanchiment de l'argent sale qui alimentent les réseaux terroristes, les paradis fiscaux. La police judiciaire doit garder un haut niveau de compétence scientifique et technique.
· une autre loi de programmation devra permettre à la justice de remplir ses missions. Assez de la défausse actuelle ! Le Garde des Sceaux devra prendre ses responsabilités, celles du gouvernement, et coordonnera l'action des procureurs par des instructions publiques et écrites.
· Le Parlement sera saisi du projet de refonte de l'ordonnance de 1945, et du décrassage de la loi Guigou.
· 60 centres de retenue fermés pour délinquants multirécidivistes mineurs seront créés sur décrets d'avance.
· Oui, faire reculer la délinquance est possible : il n'est besoin que de volonté et de courage.
Je n'en manque pas. Et si la volonté et le courage sont au rendez vous, alors les citoyens, sans qui rien ne se fera, prendront part à ce combat. Le civisme doit être réveillé en France ! Naturellement on ne peut pas tout faire reposer sur l'Ecole et les enseignants. Ce sont les familles qu'il faut aussi responsabiliser, y compris par une pénalisation financière des dommages causés par leur progéniture, à proportion bien entendu de leur revenu. Une telle mesure aura un effet dissuasif certain et rétablira efficacement quelques repères simples. C'est ensemble que nous réaliserons le droit, égal pour tous, à la sûreté.
2 - Une grande politique d'accès à la citoyenneté Sécurité et citoyenneté sont étroitement liées. Trop de jeunes, parce qu'ils vivent dans des quartiers populaires, s'estiment stigmatisés. Or, il ne saurait être question, en figeant les jeunes dans un statut de victime, d'en rester au stade des constats amers, des déplorations impuissantes ou d'une énumération compatissante des discriminations.
Il ne s'agit pas non plus de se donner bonne conscience, mais de définir et de mettre en uvre des politiques républicaines d'accès à la citoyenneté.
L'objectif a atteindre consiste à faire de tous les jeunes, vivant sur notre sol, des citoyens capables de prendre en main leur destinée, et cela en faisant fond sur leurs qualités.
Les Commissions d'accès à la citoyenneté (CODAC) que j'avais créées en 1999 doivent être élargis à tous les secteurs de l'Etat. Il faut leur donner davantage de moyens. Une main fraternelle doit aider ces jeunes à franchir les obstacles, comme la xénophobie. L'Etat républicain n'en sera alors que plus fort pour imposer, avec l'égalité des droits, l'égalité des devoirs. Il faut en finir avec les vieux discours d'absolution pour cause de pauvreté ou d'immigration. Etre né pauvre ou dans une famille immigrée ne prédestine pas à la délinquance.
Assez de ces amalgames, entretenus de tous bords ! Nous ne ferons pas l'économie de la fermeté ; nous ne ferons pas non plus l'économie de la générosité.
L'école doit redevenir le lieu d'apprentissage de la citoyenneté. La transmission du savoir doit être replacée au centre des préoccupations. Il faut multiplier les bourses dans l'enseignement secondaire et supérieur.
L'accès à l'emploi est le fondement de toute action durable en matière d'accès à la citoyenneté. Il faut aider les jeunes issus de l'immigration à entrer dans l'administration et les entreprises publiques. Il s'agit non seulement d'offrir aux jeunes des possibilités d'emploi mais aussi de transformer le service public en faisant en sorte qu'il soit plus à l'image de la population. Il faut développer les classes préparatoires au concours, améliorer l'information des jeunes, augmenter les stages en entreprise, développer les parrainages avec le secteur privé... En un mot, irriguer l'ensemble de notre action publique par le souci de l'égalité : faire que l'égalité des chances de tous les jeunes ne soit pas un vain mot. De façon d'ailleurs plus fondamentale, la question de l'égalité est toujours un défi culturel - et vous êtes bien placés, ici, pour en comprendre la signification.
3) Reconquérir notre histoire et notre culture
Ville d'échanges et de métissage, Marseille doit faire vivre harmonieusement ses diverses composantes. Ici plus que partout ailleurs, l'enjeu culturel est décisif.
Toujours sollicitée par le contact des cultures et des croyances, enrichie progressivement dans ses us et coutumes par le passage ou l'installation de migrations provenant aujourd'hui autant du Maghreb, d'Afrique, d'Asie que, hier, du flanc nord de la Méditerranée, Marseille est une mosaïque aux mille couleurs qui doit servir d'exemple au reste de notre pays.
Ce qui fait l'attrait de cette belle cité, c'est ce mélange; ce qui fait sa force, c'est la fusion de tous les apports dans un creuset culturel et identitaire commun, celui des valeurs de la République.
La laïcité doit se vivre, ici, au quotidien. Elle est la condition essentielle du respect de l'autre; elle protège des replis communautaires, de l'intolérance confessionnelle.
Marseille est aussi un lieu de mémoire. Non pas seulement au nom des vingt-six siècles qui caractérisent son histoire, mais aussi, et plus quotidiennement au prix de l'histoire contemporaine : ici, à Marseille, un monument à la mémoire des Pieds-Noirs commémore le passé douloureux et pourtant si riche qui a tissé les relations entre la France et le Maghreb, la France et l'Algérie.
Quant je parle de Marseille et de la culture, comment oublier ce passé ?
Ce fût une histoire grande, parfois tragique, toujours passionnée. Elle ne peut être réduite à la litanie de la repentance.
Aussi devons-nous resituer l'histoire de la France en Algérie dans sa juste perspective, avec le souci d'aider les jeunes nés sur notre sol de l'immigration algérienne à mieux se situer dans la société française, et en rendant aux Pieds Noirs la légitime fierté de l'oeuvre accomplie par leurs aïeux de l'autre côté de la Mer. L'indépendance de l'Algérie était nécessaire mais elle n'efface pas l'histoire. La formation d'une nation est toujours douloureuse et nous devons toujours nous souvenir que l'Algérie indépendante a à peine quarante ans.
Un jeune qui se contenterait de lire le journal aujourd'hui, pourrait croire que l'Histoire de la France en Algérie se résume à une histoire de torture, de viols et de massacres. Pour moi qui ai passé plus de deux ans là-bas à cette époque, je puis déjà témoigner que tel ne fut pas le comportement de l'immense masse de nos soldats. Trois millions d'appelés ont fait leur devoir.
Ils l'ont fait sans joie, avec le sentiment de devoir accompagner une transition historique douloureuse.
Injustifiable a été l'abandon des harkis, mais la guerre d'Algérie ne résume pas toute l'histoire de la France en Algérie. Elle a duré cent trente-deux ans. Elle a certes entraîné souffrances, humiliations, aliénations. Mais en même temps elle a permis la mise en valeur de l'Algérie dont elle a fait un des pays les plus modernes dans le monde arabe. Les Pieds Noirs peuvent être fiers de l'oeuvre accomplie outre Méditerranée. Elle a brassé nos deux nations plus profondément que deux peuples le furent jamais. Deux millions et demi de franco-algériens, un million de pieds noirs de ce côté-ci de la Mer, une francophonie qui n'a jamais été plus développée de l'autre côté de la Méditerranée, témoignent de la profondeur des liens créés par l'Histoire, quelles qu'aient été les souffrances endurées des deux côtés. Et ce sont des atouts pour l'avenir !
C'est pourquoi nous n'avons pas à ressasser éternellement nos griefs réciproques. Nous devons au contraire nous tourner audacieusement vers l'avenir. Il serait bon qu'un jour une Commission d'historiens français et algériens se réunisse pour écrire une histoire si possible commune de cette guerre et de ce qui l'a précédée.
Quant aux enfants de l'immigration, souvent perdus entre les deux rives - je pense à certain d'entre eux qui, un soir, ont sifflé la Marseillaise au Stade de France - ils doivent apprendre que leur avenir est en France, comme citoyens français à égalité de droits et de devoirs. Ce n'est pas leur rendre service que de vouloir les constituer en minorité, avec une mémoire particulière, à l'écart des autres citoyens. C'est leur assigner le ghetto comme horizon ! La République, ce n'est pas la juxtaposition des communautés, c'est l'égalité de tous les citoyens quelle que soit leur origine, avec la conscience d'appartenir à une même communauté politique. Là encore, rien n'est plus important pour la France que de se réapproprier toute son histoire avec ses ombres mais aussi avec ses lumières. Ainsi tous les jeunes quels que soient leurs origines retrouveront la fierté de chanter la Marseillaise !
En 1999, j'ai lancé une Consultation qui doit enfin donner à l'Islam, un statut et une représentation semblables à ceux des autres religions au sein de la République. Le 26 mai prochain, les citoyens de confession musulmane éliront leurs représentants au Conseil de l'Islam de France. La reconnaissance de l'Islam se fera dans le cadre des lois de la République et du principe de laïcité. Les immigrés de confession musulmane pourront alors se sentir pleinement acceptés et reconnus. C'est cela la citoyenneté !
Qui sommes- nous en effet ?
Eh bien la réponse est simple : nous sommes tous des citoyens français avec notre passé, riche de heurts et de passions contradictoires, mais également désireux de faire vivre les principes républicains et de poursuivre ensemble notre histoire 4) Ouvrir la France vers le Sud Marseille est aussi concernée, plus qu'aucune autre ville, par la politique française et européenne en Méditerranée.
Or la Méditerranée est une zone de profonde fractures : sociale, économique, démographique et culturelle. Elle est aussi une zone de conflits ouverts : Moyen-Orient, ex-Yougoslavie, poussée récurrente de l'intégrisme au Maghreb et au Machrek, réflexes xénophobes en Europe...
Ces antagonismes radicalisent les différences identitaires entre les deux rives. Pour sortir de ce cercle infernal, la France doit entraîner l'Union Européenne et parier sur la modernisation des sociétés du Sud de la Méditerranée. Elle doit les aider :
· en favorisant la construction d'Etats de droit ;
· en créant, au-delà de la zone de libre-échange prévue par la déclaration de Barcelone, une véritable zone de co-développement et de prospérité ;
· en encourageant ces sociétés à trouver elles- mêmes les voies de leur modernisation culturelle dans le respect de l'identité et de la dignité de chaque peuple.
C'est ainsi seulement que nous éviterons que les problèmes d'identité se transforment en antagonismes violents.
Mais cela suppose un autre regard sur les relations Nord-Sud. Nous avons depuis plusieurs décennies tourné nos yeux surtout vers le Nord de l'Europe et, aujourd'hui, d'abord vers l'Est.
Certes, l'élargissement à l'Est est nécessaire. Mais il ne doit pas devenir un nouveau prétexte pour continuer à s'aveugler sur le Sud. Ce ne serait bon ni utile pour personne.
Vous le savez, en 1995, a été lancé le processus dit de Barcelone. Celui-ci vise l'établissement d'une zone de libre échange en 2010. Six ans après seulement, ce processus euro- méditerranéen fait l'objet de fortes critiques de la part des pays de la rive Sud; ils dénoncent notamment l'unilatéralisme de la Commission Européenne dans la gestion de la coopération financière qui leur est destinée. Ils redoutent les effets de l'élargissement à l'Est de l'Union européenne, dont ils redoutent de faire indirectement les frais.
Au sein de l'Union, seules, la France, l'Espagne et l'Italie, appuyées par la Grèce et le Portugal, accordent une importance réelle aux enjeux méditerranéens. Ces pays ont donc un rôle particulier à jouer pour mobiliser leurs partenaires européens autour d'un objectif stratégique : la création d'un véritable marché commun euro-méditerranéen.
Des politiques d'investissement significatives doivent être mises en place pour créer les infrastructures nécessaires au développement du Sud de la Méditerranée. L'aide aux petites et moyennes industries devrait aller de pair avec la possibilité donnée aux produits agricoles du Sud d'accéder à nos marchés.
Les programmes européens de soutien à la coopération décentralisée ont été abandonnés par la Commission. Ils sont pourtant essentiel pour dynamiser les relations entre les deux rives.
La ville de Marseille et la région PACA le savent bien qui mènent dans ce domaine des actions exemplaires. Depuis deux ans, la région conduit avec son homologue marocaine de Tanger un partenariat qui touche de très nombreux secteurs : développement rural, environnement, coopération universitaire, développement économique etc. La ville de Marseille conduit de nombreux projets avec les trois pays du Maghreb.
Il est essentiel que la France plaide au sein de l'Union européenne pour la reprise des programmes de coopération décentralisée. Elle doit aussi soutenir la candidature de Marseille pour l'accueil de la Banque euroméditerranéenne qui doit voir le jour comme filiale de la Banque européenne d'investissement. Cet outil incontournable renforcera la position de nos entreprises régionales et désignera Marseille comme la plate-forme du commerce euro-méditerranéen.
Et puis, vous le mesurez ici plus que partout ailleurs, les rapports avec Sud, c'est aussi une gestion responsable, réaliste, ouverte, des flux migratoires. J'ai toujours pensé que cette question devrait être au cur du partenariat euro- méditerranéen. Sur la période 2000/2010 les pays de la rive Sud devront absorber un accroissement de leur population active de l'ordre de 4 à 5 millions par an. Cette forte progression démographiq ue coïncide avec l'ouverture commerciale des pays de la rive Sud, qui font un lien direct entre le libre échange et la libre circulation des personnes.
Pour ma part, je crois nécessaire de réorienter nos politiques par l'organisation de flux de migrations temporaires. Le développement passe en effet par la formation des hommes autant que par les flux financiers.
L'aspect nouveau, c'est que, de plus en plus, la demande migratoire vient des étudiants formés dans les pays du Nord mais aussi de couches souvent déjà intégrées dans leurs pays (cadres, techniciens, médecins, etc.). Or ces couches constituent l'épine dorsale du développement dans leur pays. On ne peut pas juguler totalement cette demande, mais on ne doit pas pour autant la laisser se développer de façon anarchique, au risque de favoriser un nouveau pillage des pays pauvres. C'est la raison principale pour laquelle nous devons envisager sérieusement l'organisation de migrations temporaires.
La France ne peut rester indifférente à la violence sans précédent qui règne au Moyen-Orient.
Les liens historiques de notre pays avec le monde arabe, sa tradition d'indépendance lui commandent de peser de tout son poids pour la paix. Il lui faut entraîner ses partenaires européens, mobiliser les autres grandes puissances (Russie, Chine) pour que cette région du monde ne soit pas livrée à l'unilatéralisme. Il y va de la paix mondiale.
La politique française au Moyen-Orient doit avant tout défendre l'idée d'une paix juste, fondée sur la reconnaissance du droit lé gitime du peuple palestinien à un Etat viable et du droit d'Israël à vivre dans la sécurité.
Enfin, l'embargo qui frappe le peuple irakien est profondément injuste et cruel. Il a détruit l'un des Etats les plus modernes du monde arabe. Le plus laïque aussi. La France devrait donner l'exemple en levant unilatéralement l'embargo pour ce qui concerne tout ce qui n'est pas lié aux armements. Rien ne justifie les bombardements anglo-américains sur l'Irak. Il faut qu'ils cessent.
La France doit en outre s'opposer à toute nouvelle intervention militaire contre l'Irak. Ce pays doit retrouver sa place au sein de la communauté internationale et la France devra tout faire pour l'y aider.
Mais tout ceci implique que la France réapparaisse sur la scène du monde, et qu'elle parle haut et fort pour la justice et l'égalité. Je suis au regret de le constater, mais les deux têtes du couple exécutif s'épaulent plutôt dans l'effacement de la France. Et pourtant, en 1997, on aurait pu espérer un ressaisissement. Jospin promettait de " faire en tous domaines retour à la République ". Trois ans après, la République est à l'encan partout.
En réalité, la politique de Jospin n'a pas été différente de celle préconisée par Chirac. Tous deux sont ralliés au libéralisme inégalitaire. Lionel Jospin a fait la politique dont la droite rêvait : plus de privatisations que les deux derniers gouvernements de droite réunis, développement du travail précaire et de la flexibilité, etc...
Au dernier Conseil européen, à Barcelone, les deux candidats ont accepté de brader les services publics, d'allonger l'âge de départ à la retraite. Les deux prétendent vouloir préserver la retraite par répartition mais se prononcent l'un pour des fonds de pension à la française (Chirac) l'autre pour un complément de retraite par capitalisation (Jospin). Vous connaissez la différence ?
Ne cherchez pas : il n'y en a pas !
Dès leur entrée en campagne, les deux candidats ont confisqué le débat.
Un exemple : le temps d'antenne constaté par le CSA en janvier et février à été pour moi de 1h48 et 18 secondes contre 7h52 et 46 secondes pour Chirac et 8h59 pour Jospin. Ils m'ont interdit d'antenne en utilisant sans vergogne les médias.
En outre, les deux candidats font tout pour faire émerger les candidatures ext rêmes.
Ces candidatures n'ont aucune crédibilité : personne ne peut imaginer qu'un Le Pen ou une Laguiller présidera un jour la France.
Chirac-Jospin : je vous propose de sortir de cette fausse alternative.
Vous connaissez mon intégrité. Je fais ce que je dis et je dis ce que je fais. Mon action est basée sur trois principes :
· l'égalité : il n'y a pas de République sans égalité. Devant la loi, devant la justice. En Corse, comme dans nos banlieues. Au sommet de l'Etat, comme dans un village. Egalité entre les enfants, quelle que soit l'école où ils se trouvent. Egalité des salaires entre hommes et femmes.
· La fraternité : cela peut se dire aujourd'hui : solidarité. Non pas l'assistance ou l'aumône, mais la justice sociale. Le relèvement des bas salaires. La garantie des retraites. Et pour les jeunes, des bourses, des études rémunérées, des prêts à taux zéro qui leur permettent d'entrer debout dans la vie. Dignement. Et non en "personnes assistées".
· La liberté : croyez- vous qu'elle est respectée quand les deux candidats sortants utilisent à leur seul profit les médias ? Est-elle respectée quand ils volent ainsi l'élection ? Et que devient la liberté quand on craint pour son emploi, pour la sécurité de ses enfants, dans la rue ou à l'école ?
Je vous appelle au sursaut républicain face aux candidats du déclin. En votant pour moi, je vous appelle à voter utile. Je suis le seul à même de casser la machine RPR-PS.
Ne vous laissez pas abuser par les candidats qui prétendent s'opposer au " système " : en réalité, ils le renforcent en stérilisant vos voix.
Je vous le dis simplement, je suis le seul à offrir un changement véritable. Un changement possible. Un changement nécessaire à la France.
Source : www.chevenement2002.net, le 2 avril 2002)