Déclarations de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur les énergies renouvelables et sur la politique énergétique de diversification du gouvernement, Paris du 2 au 5 avril 2002.

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Circonstance : Colloque "Global Windpower" à Paris du 2 au 5 avril 2002

Texte intégral

2 avril 2002
[Messieurs les Ministres, ...]
Mesdames, Messieurs
C'est avec un grand plaisir que j'ai accepté d'ouvrir cette conférence internationale sur l'éolien. Je me réjouis de ce qu'elle se déroule en France, et je veux y voir la reconnaissance des efforts de tous les acteurs pour le décollage de la filière dans notre pays. En cinq années de gouvernement, j'ai été un ardent partisan de cette forme d'énergie et un promoteur de son développement.
1. Les énergies renouvelables : une composante essentielle de la politique énergétique.
Les énergies renouvelables constituent une composante essentielle de la politique énergétique française. Elles présentent une contribution significative à notre mix énergétique et j'aime à rappeler que la France, avec 27,5 millions de tonnes équivalent pétrole, est le premier producteur européen d'énergie renouvelable.
Dès sa mise en place en 1997, ce Gouvernement a fait des énergies renouvelables une priorité nationale, parce qu'elles contribuent à ouvrir l'éventail des options énergétiques possibles, et parce qu'elles concourent à la sécurité de nos approvisionnements énergétiques.
Ce Gouvernement a par la suite consenti un effort sans précédent pour les énergies renouvelables.
2. Un cap a été fixé pour l'électricité d'origine renouvelable
La part des énergies renouvelables dans notre consommation d'électricité est de l'ordre de15%. Dans le cadre de la directive européenne sur l'électricité d'origine renouvelable que j'ai personnellement négociée au sein du Conseil Energie au moment où la France assurait la présidence de l'Union européenne, je me suis engagé à ce que cette proportion atteigne 21% en 2010.
Cet objectif est extrêmement ambitieux. Il suppose un effort de maîtrise des consommations sans précédent. Il suppose également un développement sur dix ans des sources d'énergies renouvelables du même ordre de grandeur que le développement de l'hydroélectricité en France au cours du siècle passé !
L'énergie éolienne sera nécessairement la plus grosse contributrice à cet accroissement, parce qu'elle présente en France un potentiel très important. On peut raisonnablement penser que de 20 TWh à 30 TWh d'électricité d'origine éolienne seront nécessaires en 2010 pour tenir nos engagements, ce qui peut représenter jusqu'à 10 000 MW de puissance nouvelle installée, soit 10 milliards d'euros d'investissement.
3. Des moyens importants ont été mis en oeuvre.
Pour atteindre ces objectifs ambitieux, la loi du 10 février 2000 sur le service public de l'électricité a institué un système d'obligation d'achat de l'électricité produite à partir d'énergie renouvelable.
Le tarif de rachat pour l'éolien illustre bien l'approche retenue par le Gouvernement sur ce sujet. Ses conditions tarifaires sont très incitatives, de sorte que la plupart des sites, même moyennement ventés, puissent être accessibles aux éoliennes.
Ces conditions tarifaires représentent un effort très important de la collectivité, en contrepartie duquel j'attends un véritable démarrage industriel de la filière.
Le défi est immense, mais je suis sûr que la profession est prête à le relever.
4. Au delà de l'obstacle économique, la réforme des procédures.
L'obstacle économique étant désormais levé par les tarifs, la réforme des procédures était la dernière pierre de l'édifice à poser afin de libérer les " énergies " entreprenariales de la filière. Je suis heureux d'annoncer ce matin que ce travail est -enfin...- achevé.
D'une part, j'ai choisi de retenir le principe de la mutualisation des coûts de renforcement amont de réseau entre tous les utilisateurs du réseau. Ce principe permettra de ne pas défavoriser la production décentralisée et notamment l'éolien. De même, les modalités de gestion des demandes de raccordement ont été précisées par les gestionnaires de réseaux après approbation de la Commission de Régulation de l'Electricité.
D'autre part, je viens d'adopter, avec mon collègue de l'Environnement, les propositions de simplification remises par un groupe de travail interministériel mis en place à ma demande, et dont les travaux se sont concentrés sur l'éolien terrestre et la petite hydraulique. Les principales mesures sont les suivantes :
- la fixation du seuil de déclenchement des études d'impact et des enquêtes publiques à 2,5MW pour l'éolien, afin que les riverains soient pleinement associés à la conception des projets et pour éviter les réactions de rejet a priori. Dans cette même intention seront créées des instances de concertation régionales... La transparence et la concertation ne doivent pas être l'apanage de la seule énergie nucléaire.
- la clarification des conditions d'application du permis de construire et d'implantation des projets éoliens au regard du droit de l'urbanisme. L'exigence d'un permis de construire pour une éolienne de plus de 12 m sera à même de lever toute ambiguïté et tout risque d'insécurité juridique sur les projets.
- la diffusion dans les services déconcentrés de l'Etat des informations et des directives nécessaires à la mise en oeuvre optimale des procédures applicables, via deux circulaires interministérielles concernant l'éolien et l'hydraulique. Elles préciseront les enjeux du développement de ces filières au regard de l'objectif national de développement des énergies renouvelables, et les inciteront à définir avec les partenaires locaux concernés les perspectives de contribution de leur région à cet objectif national. Elles préciseront les modalités d'applications de la réglementation en vigueur pour les projets, en fixant des délais à tenir pour chaque phase de l'instruction. Enfin des actions de formation des personnels concernés seront mises en place sans délai pour que ces objectifs puissent être tenus.
L'ensemble de ces actions sera conduit au cours du premier semestre 2002.
5. Pour l'éolien off-shore, des appels d'offres.
La programmation pluriannuelle des investissements -outil de pilotage du mix-énergétique qui est sans équivalent en Europe et je crois dans le monde- va fixer des objectifs d'évolution pour chacune des filières de production électrique. Elle fait toute leur place aux énergies renouvelables et sera un outil de suivi particulièrement fort de l'émergence des filières de production renouvelables.
De plus, elle constitue un outil complémentaire aux tarifs puisque, lorsqu'il sera observé que les objectifs de la programmation risquent de ne pas être atteints, le Ministre chargé de l'Energie pourra lancer des appels d'offre pour faire émerger de nouvelles capacités.
Dans ce contexte, je souhaite qu'un effort important soit fourni pour le développement de l'énergie éolienne off-shore. Je demanderai dès la publication de la PPI à la Commission de Régulation de l'Electricité de mettre en oeuvre des appels d'offres pour l'éolien off-shore. Dans la perspective des objectifs que nous avons affichés, j'estime pour ma part qu'il faudra lancer très rapidement un appel d'offres pour une tranche d'au moins 1 500 MW en éolien off-shore.
En conclusion, je suis convaincu que la politique qui a été conduite pour le développement de l'éolien est prête de porter ses fruits. Je crois avoir levé, un à un, les obstacles qui étaient de ma responsabilité :
- les tarifs adoptés ont levé l'obstacle économique,
- les relations au réseau (renforcement, conditions de raccordement) sont clairement établies ;
- la simplification des procédures pour l'instruction des dossiers en région et la sécurité juridique des projets seront désormais garanties.
Le succès repose désormais sur les multiples porteurs de projets ici présents. Je forme très sincèrement des voeux de succès quant à leurs ambitions et je vous souhaite de bons travaux pour cette première conférence du " Global Wind Power ".
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 3 avril 2002)
4 avril 2002
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je remercie le président ANTOLINI de m'avoir invité à ouvrir ce colloque. C'est chaque année avec un grand plaisir et avec un grand intérêt que je réponds à son invitation.
L'année dernière, j'avais eu le plaisir de remettre au président ANTOLINI l'arrêté fraîchement publié qui fixait les conditions d'achat de l'électricité d'origine éolienne. Cette année, c'est la publication du rapport sur les simplifications administratives applicables à l'éolien et à l'hydraulique qui a pu être parachevée, une production plus austère mais certainement indispensable. J'y reviendrai tout à l'heure.
Mais au préalable, je voudrais essayer de remettre en perspective l'action du Gouvernement au cours de ces cinq dernières années.
1.Le bilan
Dès la mise en place de ce Gouvernement, je me suis engagé dans une politique sans faille et sans ambiguïté en faveur des énergies renouvelables. Leur développement a constitué un axe fondamental de la politique énergétique, en rupture avec ce qui s'était passé au cours des deux décennies précédentes.
De plus, la Directive sur l'électricité issue d'origine renouvelable marque un véritable tournant dans l'approche communautaire du sujet. Sous Présidence Française de l'Union Européenne, j'ai pu obtenir un accord politique unanime et " par le haut " au sein du Conseil Energie. Vous le savez tous, l'objectif que j'ai accepté de prendre au nom de la France (21 % de notre consommation devra être satisfaite d'ici 2010 par des sources d'électricité d'origine renouvelable) est particulièrement ambitieux.
Pour y parvenir, le Gouvernement a mis en uvre des moyens sans précédant notamment à travers la loi électrique du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.
L'un des principaux outils est l'obligation d'achat. A la suite d'une vaste concertation avec les parties concernées, les principaux tarifs ont été publiés, concernant l'éolien, l'hydroélectricité, le photovoltaïque, l'incinération des déchets, la captation du gaz des décharges et les installations de production à partir des déchets animaux bruts ou transformés. Les tarifs retenus ont été reconnus par la profession et par le Syndicat comme globalement aptes à développer la production. En particulier pour la filière éolienne, qui constituera nécessairement la majeure partie de l'accroissement pour atteindre notre objectif de 21%, ils sont de l'avis unanime particulièrement incitatifs.
L'autre outil est la programmation pluriannuelle des investissements de production électrique -la " PPI "-. Conformément aux dispositions de la loi électrique, je m'apprête à arrêter et à publier la première " PPI ". Celle-ci a fait l'objet d'un rapport au Parlement au début de l'année 2002 et elle est examinée aujourd'hui même par le Conseil Supérieur de l'Electricité et du Gaz (CSEG). Véritable instrument de la politique énergétique, elle est complémentaire des tarifs. En effet, lorsqu'il sera observé que les objectifs de la programmation risquent de ne pas être atteints, le Gouvernement pourra lancer des appels d'offres de nouvelles capacités pour y remédier.
Dans ce contexte, j'ai déjà identifié un effort important à fournir pour le développement de l'énergie éolienne off-shore. J'ai d'ores et déjà décidé la mise en uvre d'un appel d'offres qui nous permette d'atteindre une puissance installée en 2010 d'au moins 1 500 MW.
Tous ces développements auront un coût, supporté par l'ensemble des consommateurs d'électricité. Les différents scénarios envisageables se traduisent à l'horizon 2010 par un coût global de 1,5 à 2 milliards d'euros par an, soit une augmentation de l'ordre de 5% du prix du kWh pour le consommateur non-éligible. Ce coût, il nous faut l'assumer. Il est le reflet d'un engagement réel et sincère vers le développement de ces filières et vers la diversification de nos approvisionnements. En regard de cet effort de la collectivité, j'attends que la profession réalise d'importants gains de compétitivité sur la période.
Par ailleurs, les principaux points relatifs à l'accès au réseau ont été traités ou clarifiés. Pour faciliter l'installation de nouveaux producteurs, le Gouvernement, a choisi de retenir le principe de la mutualisation du coût de renforcement des réseaux. L'ensemble des utilisateurs du réseau paiera ces coûts, seule la partie aval étant à la charge du producteur. Les modalités de gestion des demandes de raccordement ont en outre été précisées par les gestionnaires de réseaux.
2. La simplification du cadre juridique et administratif
Il est vite apparu que d'autres obstacles risquaient de contrarier le développement des filières. Dès avril 2001 un groupe de travail interministériel a été chargé, à ma demande, d'évaluer le cadre législatif et réglementaire existant et de faire des propositions de simplification, pour l'éolien, et pour l'hydraulique, dont le développement était également contrarié, de plus longue date.
J'ai eu l'occasion d'annoncer les principales mesures que nous avons décidé avec mon collègue de l'Environnement lors du " Global Windpower conference and exhibition " que j'ai eu le plaisir d'ouvrir ce mardi même.
Elles porteront notamment sur les règles d'urbanismes, qui seront clarifiées, sur une plus grande transparence, avec l'exigence d'une étude d'impact et d'une enquête publique dès 2,5 MW pour l'éolien. Ces règles clarifiées et simplifiées seront très prochainement communiquées au préfets par circulaire, en soulignant les enjeux du développement des énergies renouvelables. Vous trouverez le détail de ces mesures dans le rapport du groupe de travail qui est mis en ligne aujourd'hui sur le site internet de mon ministère.
Si les travaux de ce groupe ont ainsi permis d'avancer très sensiblement sur les procédures applicables à l'éolien terrestre, ils ont aussi mis en évidence les difficultés que rencontre la petite hydraulique pour laquelle le poids croissant des contraintes environnementales constitue une entrave et stérilise le potentiel de développement nouveau issu des tarifs d'achat. Ce point devrait être prioritairement exploré.
3. Des moyens sans précédents pour les ENR thermiques
J'ai beaucoup parlé de l'électricité, mais ce Gouvernement s'est aussi attaché à développer les filières renouvelables thermiques, celles qui produisent de la chaleur.
Je ne vais pas traiter ici de l'ensemble des filières thermiques, le temps nous manquerait, mais je ne peux m'empêcher d'évoquer la filière bois, chère à l'élu des Vosges que je suis, et également la filière solaire thermique dont la montée en régime est exemplaire.
Le Plan bois-énergie a ainsi été étendu à tout le territoire et à tous les usages du bois combustible : industriels, collectifs mais aussi individuels, avec la mise en place de normes et de labels de qualité. La charte " Flamme Verte " signée en 2001 par les professionnels constitue un premier pas dans cette démarche volontaire, et sera suivie par la production d'une norme de performance pour les équipements bois en 2002.
Le Plan soleil pour sa part vise à l'horizon 2006 l'installation cumulée de 550 000 m2 de panneaux solaires thermiques. Après de premiers balbutiements, les efforts consentis ont permis en 2001 un démarrage spectaculaire, avec un triplement de l'installation de chauffe-eau solaires en habitat individuel et le doublement du nombre de planchers solaires installés.
4. Sans oublier la préparation du futur
Pour accélérer encore la nécessaire recherche de compétitivité et pour préparer les filières du futur, des programmes ciblés de recherche dotés de moyens importants ont été mis sur pieds.
L'ADEME consacre à la recherche plus de 15% de ses ressources. Son budget R D total a crû de 20% en 2001, avec plus de 15M consacrés aux seules énergies renouvelables. Il s'agit là de crédits incitatifs, à fort effet multiplicateur puisqu'ils ne financent que partiellement des projets conduits dans des centres de recherche publics ou privés.
J'ai également demandé au CEA, dans le cadre de son contrat d'objectifs, de mettre en place un plan d'action "nouvelles technologies de l'énergie" (systèmes photovoltaïques, hydrogène comme vecteur énergétique et pile à combustible, utilisation rationnelle de l'énergie). Partant d'un niveau inférieur à 10M?, les montants consacrés par le CEA à ces filières ont atteint en 2001 25M? et devraient dépasser en 2004 les 40M.
Conclusion
Les énergies renouvelables sont un enjeu important, en termes de diversification énergétique, de sécurité d'approvisionnement ainsi que de protection de l'environnement. Je crois avoir mis en place, en ce qui relève de ma responsabilité, toutes les conditions pour leur développement rapide.
Je forme des voeux de succès et de réussite envers tous les acteurs de votre profession avec qui j'ai eu un réel plaisir de travailler pendant ces cinq dernières années.
Cette journée symbolise en quelque sorte un passage de témoin de ce Gouvernement, dont le travail s'achève, aux acteurs économiques et industriels, dont les réalisations vont pouvoir rejoindre les desseins que nous avions imaginés ensemble avec le Syndicat des Energies Renouvelables et son président, M. ANTOLINI.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 8 avril 2002)