Déclaration de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, sur le soutien de la France au Niger dans le cadre du partenariat de lutte contre la pauvreté, l'encouragement au renforcement de la démocratie et les acquis de la coopération, Niamey le 8 avril 2002.

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Circonstance : Voyage de M. Charles Josselin au Niger les 8 et 9 avril 2002 à l'occasion de la XXIIè session de la Commission mixte franco-nigérienne de coopération

Texte intégral

Madame la Ministre
Messieurs les Ministres
Madame l'Ambassadrice
Monsieur l'Ambassadeur
Madame et Messieurs les Maires,
Mesdames et Messieurs
Deux ans ! Deux ans déjà depuis ma dernière visite dans votre pays. Vous savez mon attachement au Niger. Je suis sincèrement heureux d'avoir l'occasion d'être aujourd'hui à Niamey pour ouvrir cette session de la Commission mixte franco-nigérienne qui ne s'était pas réunie depuis 1994 !
Je mesure avec vous le chemin parcouru depuis ma dernière visite et je m'en réjouis. Félicitons-nous de ce bilan politique, économique et social dont peut s'enorgueillir légitimement, Madame la Ministre, le gouvernement dont vous êtes un des éléments les plus actifs.
Mise en place des institutions de la Vème République et élection du président Mamadou Tandja et d'une majorité présidentielle issue des scrutins libres et incontestés de novembre 1999 : ce processus de retour à la démocratie à abouti à une normalisation politique, justement saluée par l'ensemble de la communauté internationale. Cette stabilité retrouvée crée les conditions favorables pour nous permettre de mieux travailler ensemble.
Dans ce contexte, je constate en particulier que le retour de la démocratie s'est accompagné d'un renforcement de la place des femmes dans la société nigérienne, comme l'atteste la présence au sein de l'actuel gouvernement de quatre femmes, exerçant des responsabilités de première importance. De même, le vote de la loi du 7 juin 2001 qui fixe pour les femmes un quota minimum de 10 pour cent pour les fonctions électives et de 25 pour cent dans la fonction publique, constitue une autre manifestation du souci affirmé des plus hautes autorités de l'Etat d'assurer la promotion de la femme. Pour paraphraser Aragon "Au Niger aussi, la femme est l'avenir de l'homme".
Venons-en, si vous le voulez bien, à nos préoccupations dans le domaine économique. L'année 2001, marquée par une saison des pluies favorable, s'est terminée par un bilan très positif, le meilleur depuis plus de quinze ans.
La croissance économique est en effet estimée à 5,1 pour cent par le Fonds monétaire international, et en termes macro-économiques, votre pays a traversé avec succès la première année du programme FRPC (Facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance) signé avec le F.M.I., fin 2000.
Un satisfecit a d'ailleurs, Madame la Ministre, été donné à votre gouvernement par le Fonds, et je m'en réjouis, car ce n'est que justice rendue au travail accompli, à vos efforts d'assainissement et de bonne gouvernance, que bien sûr nous vous encourageons à poursuivre.
Elément essentiel du développement, le climat social est globalement apaisé, même si des difficultés demeurent. Nous avons apprécié par exemple la reprise du paiement régulier des salaires des agents de l'Etat depuis janvier. Mais, vous le savez trop bien, la pauvreté demeure hélas une réalité forte dans votre pays. A présent, les conditions sont réunies pour que tous nos efforts soient destinés à la combattre. A cet égard, l'initiative du président Tandja, de mettre en place un programme spécial visant à doter les campagnes d'infrastructures de base, de barrages, de puits, de cases de santé, de classes d'école, mérite d'être saluée.
Cette priorité accordée par les plus hautes autorités de votre pays à la lutte contre la pauvreté s'est aussi traduite par l'élaboration d'un Document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP). Son adoption fournit un cadre de référence pour la politique économique et sociale de votre gouvernement. L'accueil favorable qu'il a reçu de la part du FMI et de la Banque mondiale ouvre indéniablement la voie à une action concertée et coordonnée associant l'Etat et les partenaires au développement.
Ce n'est d'ailleurs pas un hasard, Madame la Ministre, si nos deux pays ont choisi ensemble ce moment particulier pour sceller, dans le cadre de cette Commission mixte, les termes du partenariat qui vont guider notre coopération pour les prochaines années.
La mise en uvre du document stratégique de lutte contre la pauvreté va permettre d'orienter de manière efficace les ressources dégagées par l'allégement de votre dette dans le cadre de l'initiative PPTE. Elle constitue en effet une étape importante pour le développement de votre pays, et la France souhaite être à vos côtés dans cette démarche.
Il importe maintenant que vos priorités soient traduites en programmes dans les secteurs concernés. Déjà des travaux sont en cours à cet effet en matière de justice et de décentralisation.
Et dans ce domaine, auquel j'attache personnellement beaucoup d'importance, nous suivons avec intérêt les progrès du débat à l'Assemblée nationale sur la mise en uvre des réformes qui vont conduire à la préparation prochaine d'élections locales. Pour ce qui concerne l'éducation, vous disposez d'ores et déjà d'un plan décennal et notre coopération, active dans ce secteur, continuera à s'inscrire dans ce cadre.

Madame la Ministre,
Votre gouvernement s'est mobilisé pour la mise en oeuvre de ces politiques et pour l'instauration dans ce cadre de mécanismes de concertation entre l'Etat, les donateurs, et la société civile. Cette démarche répond clairement aux préoccupations de la coopération française, qui entend bien sûr tenir compte des politiques et des programmes définis par ses partenaires. Cette démarche est un signe de maturité de notre partenariat. Pour donner un exemple précis de cette approche, et répondre à un souhait que vous avez exprimé, je vous confirme que la France est disposée à répondre à vos besoins d'expertise dans le cadre des travaux d'élaboration de vos politiques sectorielles.
Avant de tracer quelques perspectives pour le futur de notre relation, je voudrais revenir, pour les souligner, sur les acquis importants de ces deux dernières années. Au cours de cette période, nous avons tenté ensemble de donner un nouveau souffle à notre coopération, en recherchant des démarches originales, plus proches de vos attentes et de vos besoins.
Je voudrais à cet égard mentionner l'évolution de notre dispositif d'assistance technique. Lorsque j'étais venu en 2000 relancer notre coopération, j'avais tout particulièrement souhaité que l'on apporte une réponse plus ciblée à vos besoins. J'avais demandé que l'on fasse davantage appel aux compétences nationales nigériennes, experts ou opérateurs nationaux. Déjà plusieurs exemples témoignent de ce changement.
Je citerai ainsi, dans le secteur rural, le projet d'appui au développement du Nord-Niger dont la mise en uvre est assurée par une jeune ONG nigérienne particulièrement efficace. Je mentionnerai également l'éducation, où place a été faite à des compétence nationales nigériennes, confortées par une réelle dynamique de la société civile. Nous devons continuer dans ce sens, puisque ces premiers résultats donnent satisfaction.
L'implication et la responsabilisation de l'ensemble des acteurs concernés, dans la définition et la préparation des projets, est également un sujet sur lequel je veux insister. Qu'il s'agisse des administrations partenaires, des opérateurs ou de leurs bénéficiaires directs, cette démarche doit continuer à être encouragée, tout spécialement dans les nouveaux secteurs où nous souhaitons répondre mieux à votre demande. Je pense notamment à la justice et à la décentralisation.
Je voudrais avant de conclure dire un mot particulier d'un domaine qui me tient à cur, celui de la coopération décentralisée. La présence dans ma délégation d'André Bussery, maire honoraire de Juvisy, président du groupe Niger au sein de CUF et de Patrick Boullet vice-président du conseil général des Côtes d'Armor, témoigne de mon attachement à ces initiatives locales. Tissant et se nourrissant des liens forts entre les hommes et les femmes de nos pays, elles sont le ferment de relations de solidarité durables. Ces partenariats sont encore trop peu nombreux entre la France et le Niger. Nous allons tous ensemble nous employer à les développer. Et je vous invite, à travers votre ambassade en France notamment, à provoquer des occasions de créer de nouveaux liens. Car ces relations humaines dans tous les domaines tels que la culture, la recherche scientifique, les travaux universitaires, la formation, sont importants pour contribuer au désenclavement de votre pays.
Aussi important que le nécessaire développement des infrastructures, également à l'ordre du jour de cette commission mixte.
Enfin, et ce message s'adresse tout particulièrement aux représentants français de la société civile présents autour de cette table, il me paraît aussi important que le partenariat franco-nigérien conjugue les efforts de l'ensemble des acteurs intéressés par le développement du Niger.
Je pense à la contribution essentielle que pourront apporter, le moment venu, les collectivités locales françaises à la formation des élus locaux et du personnel des nouvelles entités territoriales. Je pense également au rôle fondamental du secteur privé pour accompagner le développement du Niger et conforter la reprise de la croissance.
S'agissant de la présente session, je voudrais souligner l'exemplarité de la concertation entre l'ensemble des administrations nigériennes concernées, les administrations françaises, notre ambassade à Niamey et votre ambassade à Paris et je mentionne ici les excellentes relations que nous entretenons avec vous, ma chère Mariama, parce qu'il est essentiel de savoir d'où l'on vient pour savoir ou l'on va.
Le travail de cette commission mixte a été préparé en profondeur par une évaluation conjointe de la coopération franco-nigérienne sur les dix dernières années.
C'est justement à partir de cette réflexion que les documents que vous allez examiner ont été élaborés. Je me félicite de la méthode suivie et de la qualité du contenu de ces documents. Ils ont clairement identifié deux axes prioritaires : la promotion de la bonne gouvernance et la décentralisation, ainsi que le développement social et économique. Il s'agit là de bons choix parfaitement adaptés à vos besoins, et qui correspondent à cette conception nouvelle de notre coopération que le gouvernement français s'est efforcé de mettre en oeuvre depuis cinq ans.
Madame la Ministre,
Avant de laisser place aux travaux de la commission, je voudrais tout simplement vous redire le bonheur que j'ai toujours à revenir dans votre pays, auquel vous le savez, des liens personnels et anciens m'unissent. C'est donc avec un plaisir particulier que j'ouvre avec vous cette session à laquelle je souhaite plein succès. Soyez assurée, Madame, du soutien constant et amical de mon pays dans la mise en uvre de cette nouvelle phase de notre partenariat et de l'attention que je continuerais à lui porter quel que soit le cadre dans lequel demain j'inscrirai ma propre action.
Merci à tous et bon travail.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 avril 2002)