Texte intégral
Jean-Pierre Galland, porte-parole du CIRC, a été condamné en 2001 à 90000 francs d'amende à cause du logo du Collectif d'information et de recherche cannabique (Circ), représentant une feuille de cannabis. Olivier Besancenot l'a rencontré. Extraits.
- Jean-Pierre, tu as été été condamné à verser 90000 francs d'amende à l'Etat à cause du logo du Circ. Comment vas-tu réagir ?
Jean-Pierre Galland - Si, le 27 février, je n'ai pas payé cette amende, je suis censé aller en prison. Je vais faire un recours en grâce présidentielle, la campagne est le bon moment pour aborder la question des drogues.
Olivier Besancenot - Je soutiens Jean-Pierre et le Circ. Alors que Chirac devrait passer devant les juges, des milliers de fumeurs peuvent se retrouver en prison pour quelques grammes d'herbe. Nous allons poser le problème politique et transgresser la loi qui nous interdit d'en parler (article L 670 de la loi de 1970). Sur le fond, la prohibition est responsable d'une économie parallèle, source de violences.
J.-P. Galland - La réglementation du commerce de cannabis est complexe. Au bout de la filière, certains vivent, mal, de cette activité. Il faudra intégrer ceux-là dans le futur système de distribution. La Hollande a créé 30 000 emplois ; on peut en escompter 80 000 en France. Certaines régions (Ardèche, Ariège, Pyrénées) vivent déjà en partie de ce commerce. Je préfère acheter à un paysan qu'à un buraliste. Deux systèmes devront cohabiter : un système d'Etat et un réseau coopératif pour que les paysans produisent un cannabis de qualité.
O. Besancenot - Je suis d'accord avec ces propositions, mais en ce qui concerne les petits revendeurs, c'est la question de la précarité qui est posée. Les jeunes doivent avoir de vrais emplois et non des jobs sous-payés. La prohibition repose sur une grande hypocrisie au regard de la consommation existante. C'est aussi un problème générationnel. Au bureau de poste où je travaille, dire que le vin est une drogue légale, c'est toucher à une question culturelle. Pourtant, le problème de la dépendance se pose. Une société de plus en plus libérale, aux rapports sociaux violents, favorise la recherche de paradis artificiels. L'alcoolis-me au travail existe, des syndicats prennent en charge médicalement ce problème. Mais pour s'y attaquer, il faut que la santé publique ait les moyens de faire des campagnes sérieuses de prévention du danger de l'alcool en particulier et des drogues en général.
J.-P. Galland - Le cannabis ne pose pas tous ces problèmes sanitaires. Le rapport Roques place l'alcool et l'héroïne au même niveau, et le cannabis est reconnu comme la drogue la plus facile à gérer. Si sa distribution est réglementée, nous sommes favorables à des mesures de prévention (interdiction au moins de 16 ans, dans les lieux publics...). Mais l'usage des drogues dangereuses doit aussi être dépénalisé, c'est une liberté de disposer de son corps.
O. Besancenot - Nous sommes pour la dépénalisation de l'usage des drogues dures. Concrètement, cela signifie qu'on ne met pas deux cars de CRS derrière celui de Médecins du monde qui distribue des seringues propres et des médicaments aux usagers : dans ces conditions, ils ne viennent pas et peuvent aussi se transmettre le virus du sida.
J.-P. Galland - La mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie souligne qu'aller chercher son "shit" dans une cité expose l'usager à ce qu'on lui propose une drogue beaucoup plus difficile à gérer. C'est pour ça que la Hollande a créé les coffee shops. C'est une politique pragmatique : on sépare les réseaux et on garantit la qualité des produits vendus.
O. Besancenot - Si la qualité des drogues douces ne pose pas de grands problèmes sanitaires, la situation est catastrophique quand il s'agit des drogues dures. Nous voulons un contrôle public de santé sur le circuit des drogues dures et nous faisons bien la différence entre drogues dures et drogues douces. On va casser les préjugés du style "qui fume un pétard se "shoote" à l'héroïne", comme si on ne pouvait pas boire un verre sans vider la bouteille ! On va se battre contre la démagogie qui surfe sur la campagne sécuritaire. Notre slogan, ce pourrait être : "Un joint ça va, trois verres, bonjour les dégâts."
- Jean-Pierre, te présenteras-tu aux élections comme en 1999 ?
J.-P. Galland - Je laisse Les Verts se battre pour leurs circonscriptions. J'ai dit à leur direction nationale : "C'est à vous d'imposer ma candidature si vous en voulez." Ils n'en ont pas voulu.
Propos recueillis par Emiliano Nuñez
(Source http://www.olivierbesancenot.org, le 5 avril 2002)
- Jean-Pierre, tu as été été condamné à verser 90000 francs d'amende à l'Etat à cause du logo du Circ. Comment vas-tu réagir ?
Jean-Pierre Galland - Si, le 27 février, je n'ai pas payé cette amende, je suis censé aller en prison. Je vais faire un recours en grâce présidentielle, la campagne est le bon moment pour aborder la question des drogues.
Olivier Besancenot - Je soutiens Jean-Pierre et le Circ. Alors que Chirac devrait passer devant les juges, des milliers de fumeurs peuvent se retrouver en prison pour quelques grammes d'herbe. Nous allons poser le problème politique et transgresser la loi qui nous interdit d'en parler (article L 670 de la loi de 1970). Sur le fond, la prohibition est responsable d'une économie parallèle, source de violences.
J.-P. Galland - La réglementation du commerce de cannabis est complexe. Au bout de la filière, certains vivent, mal, de cette activité. Il faudra intégrer ceux-là dans le futur système de distribution. La Hollande a créé 30 000 emplois ; on peut en escompter 80 000 en France. Certaines régions (Ardèche, Ariège, Pyrénées) vivent déjà en partie de ce commerce. Je préfère acheter à un paysan qu'à un buraliste. Deux systèmes devront cohabiter : un système d'Etat et un réseau coopératif pour que les paysans produisent un cannabis de qualité.
O. Besancenot - Je suis d'accord avec ces propositions, mais en ce qui concerne les petits revendeurs, c'est la question de la précarité qui est posée. Les jeunes doivent avoir de vrais emplois et non des jobs sous-payés. La prohibition repose sur une grande hypocrisie au regard de la consommation existante. C'est aussi un problème générationnel. Au bureau de poste où je travaille, dire que le vin est une drogue légale, c'est toucher à une question culturelle. Pourtant, le problème de la dépendance se pose. Une société de plus en plus libérale, aux rapports sociaux violents, favorise la recherche de paradis artificiels. L'alcoolis-me au travail existe, des syndicats prennent en charge médicalement ce problème. Mais pour s'y attaquer, il faut que la santé publique ait les moyens de faire des campagnes sérieuses de prévention du danger de l'alcool en particulier et des drogues en général.
J.-P. Galland - Le cannabis ne pose pas tous ces problèmes sanitaires. Le rapport Roques place l'alcool et l'héroïne au même niveau, et le cannabis est reconnu comme la drogue la plus facile à gérer. Si sa distribution est réglementée, nous sommes favorables à des mesures de prévention (interdiction au moins de 16 ans, dans les lieux publics...). Mais l'usage des drogues dangereuses doit aussi être dépénalisé, c'est une liberté de disposer de son corps.
O. Besancenot - Nous sommes pour la dépénalisation de l'usage des drogues dures. Concrètement, cela signifie qu'on ne met pas deux cars de CRS derrière celui de Médecins du monde qui distribue des seringues propres et des médicaments aux usagers : dans ces conditions, ils ne viennent pas et peuvent aussi se transmettre le virus du sida.
J.-P. Galland - La mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie souligne qu'aller chercher son "shit" dans une cité expose l'usager à ce qu'on lui propose une drogue beaucoup plus difficile à gérer. C'est pour ça que la Hollande a créé les coffee shops. C'est une politique pragmatique : on sépare les réseaux et on garantit la qualité des produits vendus.
O. Besancenot - Si la qualité des drogues douces ne pose pas de grands problèmes sanitaires, la situation est catastrophique quand il s'agit des drogues dures. Nous voulons un contrôle public de santé sur le circuit des drogues dures et nous faisons bien la différence entre drogues dures et drogues douces. On va casser les préjugés du style "qui fume un pétard se "shoote" à l'héroïne", comme si on ne pouvait pas boire un verre sans vider la bouteille ! On va se battre contre la démagogie qui surfe sur la campagne sécuritaire. Notre slogan, ce pourrait être : "Un joint ça va, trois verres, bonjour les dégâts."
- Jean-Pierre, te présenteras-tu aux élections comme en 1999 ?
J.-P. Galland - Je laisse Les Verts se battre pour leurs circonscriptions. J'ai dit à leur direction nationale : "C'est à vous d'imposer ma candidature si vous en voulez." Ils n'en ont pas voulu.
Propos recueillis par Emiliano Nuñez
(Source http://www.olivierbesancenot.org, le 5 avril 2002)