Texte intégral
Mesdames les Présidentes,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureuse de vous recevoir aujourd'hui avec Dominique GILLOT et d'avoir ainsi l'occasion de rencontrer les syndicats de professionnels paramédicaux exerçant en ville.
Cette rencontre est l'aboutissement d'un travail que nous avons mené ensemble, au cours de ces derniers mois. Vous avez participé avec conviction aux réflexions qui ont été conduites et je voudrais vous en remercier tout particulièrement.
Vos professions savent en effet prendre une part active à la modernisation de leur cadre d'exercice et de leurs pratiques, en un mot prendre leurs responsabilités, aux côtés des pouvoirs publics.
Je m'en félicite car je pense qu'il n'y pas d'autre chemin possible pour faire progresser notre système de santé. La concertation est une méthode longue et exigeante.
C'est la seule qui vaille vraiment. Elle produit des résultats, des résultats durables, et vous le savez bien.
L'exemple des pharmaciens est à cet égard parfaitement éclairant. Voilà une profession qui a accepté de dialoguer et de négocier un accord global avec les pouvoirs publics. Nous avons ainsi progressé avec eux de manière très importante et rénové en profondeur leur cadre d'exercice.
C'est cette méthode que nous utilisons avec vous. Elle conduit à un travail en commun, patient et minutieux. Mais nous avons la certitude qu'elle nous permettra de construire pour l'avenir.
Ce travail commun, nous l'avons commencé l'an dernier : vous avez participé aux travaux menés par François STASSE sur la médecine de ville. Mais la nécessité d'une démarche particulière à vos professions est apparue rapidement.
C'est ainsi que le Gouvernement a décidé, l'an dernier, d'engager une réflexion sans précédent sur l'exercice paramédical libéral. C'est la première fois que les pouvoirs publics abordent les questions qui vous préoccupent de manière cohérente et globale.
Chacune de vos professions présente des spécificités, c'est une évidence. Le monde professionnel que vous représentez est divers : on y trouve principalement la profession d'infirmier (infirmière) et les professions de rééducation.
Mais ce qui vous rapproche est à mon sens plus fort que ce qui vous sépare. On peut dire, je crois, qu'il existe dans notre pays un exercice paramédical en ville.
J'en profite pour vous dire que ce mot "paramédical" - on va le voir tout de suite - ne correspond pas tout à fait à la conception que nous avons de votre activité. Mais c'est le mot le plus courant - avec auxiliaire médical - pour vous désigner.
Nous avons cherché avec vous une nouvelle terminologie mais nous ne l'avons pas encore trouvée. Vous me pardonnerez sans doute de continuer à employer ce terme de professions paramédicales, faute de mieux.
Vous êtes aujourd'hui près de 100 000 professionnels à exercer en ville, et vous êtes donc presque aussi nombreux que les médecins libéraux.
100 000 professionnels : cela justifiait pleinement l'initiative que nous avons prise - deuxième étape de notre démarche - d'engager une réflexion spécifique sur les professions paramédicales en ville. Cette concertation, c'est à Anne-Marie BROCAS que nous l'avons confiée.
Je tiens à la remercier chaleureusement du travail qu'elle a accompli.
Je sais, parce que vous nous l'avez dit à plusieurs reprises, que vous avez apprécié la qualité des travaux qu'elle a animés, dans un climat largement consensuel. Son rapport est riche de propositions et je vais, dans quelques instants, en parler plus en détail. Il marquera, j'en suis sûr, un moment important dans l'histoire de vos professions.
Il incarne en effet une conception renouvelée de votre action de tous les jours, auprès des malades et de leur entourage. Une action de soins indispensable, complémentaire de l'action médicale, réalisée par des professionnels responsables.
Les professionnels paramédicaux libéraux que vous représentez jouent un rôle éminent dans notre système de santé comme dans notre vie quotidienne.
Il faut, et ce n'est pas une formule toute faite, souligner l'importance de vos compétences et saluer la façon dont vous les exercez, comme votre dévouement à l'égard notamment des enfants, des personnes âgées ou encore des malades chroniques.
La technicité de vos interventions en matière de soins ou de rééducation se nourrit d'une dimension relationnelle importante à tous les âges de la vie, et souvent au plus proche des personnes, à leur domicile.
Cette proximité confère ainsi à l'infirmière, au masseur-kinésithérapeute, à l'orthophoniste, à l'orthoptiste ou au pédicure podologue une place de choix dans le coeur de nos concitoyens.
Cela justifierait, s'il en est encore besoin, que vous exerciez collectivement des responsabilités professionnelles propres, afin de garantir la qualité des soins que vous prodiguez et de participer au bon fonctionnement du système de santé, y compris dans sa dimension économique.
Les propositions du rapport BROCAS vont dans ce sens. Renforcement de l'autonomie des professionnels, promotion des règles déontologiques, développement des bonnes pratiques : autant d'axes pour permettre aux professionnels paramédicaux d'exercer pleinement leur rôle au sein du système de santé.
Le Gouvernement a décidé, vous le savez, de donner suite à plusieurs des propositions formulées par Anne-Marie BROCAS. Nous allons donc vous faire part des décisions de principe arrêtées par Dominique GILLOT et moi-même.
En premier lieu, vont être modifiées les conditions de la prescription médicale. Il s'agit d'aménager la complémentarité des interventions médicales et paramédicales.
Le médecin sera appelé à formuler la prescription d'une intervention paramédicale, pour une indication donnée, sans détailler la nature et le nombre des actes à réaliser.
Bien évidemment, le médecin pourra néanmoins, s'il le souhaite, notamment en raison de compétences acquises dans le domaine spécifique de la rééducation envisagée, préciser sa prescription. Cela liera dès lors le professionnel paramédical.
Interviendra alors l'établissement par le paramédical d'un bilan et d'un plan de soins et, à l'issue des soins, d'un compte-rendu de traitement.
Le paramédical recevra le patient et, compte tenu de l'indication du médecin, établira un bilan et un plan de soins à partir des recommandations de bonne pratique et des stipulations de la nomenclature. En particulier, le paramédical de rééducation calibrera le volume de soins nécessaire.
Certaines professions procèdent déjà ainsi. Ce sera désormais la règle commune.
Le bilan et le plan de soins seront transmis pour information au médecin traitant et au malade.
Afin d'alléger les procédures, cette procédure se fera sans entente préalable, à l'heure où nous sommes engagés dans un mouvement général d'allégement de ce type de procédures, en accord avec la CNAMTS.
Le médecin pourra quant à lui intervenir à tout moment : au début du traitement, pour proposer une modification du plan de soins, et en cours de traitement s'il souhaite l'interrompre ou modifier sa prescription initiale, notamment en cas d'élément médical nouveau.
Tout naturellement, le renouvellement de la prescription sera de la responsabilité du médecin, qui l'autorise.
J'ajouterai, et c'est une évidence, que les transmissions par voie électronique devraient largement faciliter le travail dans cette phase et favoriser la circulation de l'information.
J'engage d'ailleurs les professions qui ne l'ont pas encore fait à conclure avec l'assurance maladie des accords permettant l'indemnisation pérenne des télétransmissions.
Au-delà de la télétransmission, l'informatisation des professionnels de santé est un élément important de la modernisation du système de santé en France. Vous connaissez mon attachement à promouvoir la mise en réseau des professionnels, grâce à une informatique communicante.
Plus que jamais, les échanges entre le monde paramédical, le monde médical et le monde des établissements devront s'intensifier, au bénéfice du malade.
En corollaire à cette responsabilité nouvelle des professionnels, le gouvernement est décidé à mettre en oeuvre un pouvoir de prescription par le professionnel paramédical, sauf indication expresse du médecin, des matériels, produits et petits appareils qu'il utilise.
Cette possibilité ne saurait être absolue et la liste des matériels pouvant être prescrits doit être limitative. Je propose d'adopter en cette matière une démarche progressive et de commencer par un petit nombre de matériels. Nos services vous soumettront très prochainement des propositions.
Pour clore ce chapitre du renforcement de la responsabilité professionnelle, je voudrais aborder la question de la responsabilité économique, indissociable du renforcement de l'autonomie professionnelle des paramédicaux.
Cette question s'inscrit dans le cadre général de la réflexion menée par le Gouvernement sur la régulation des dépenses de ville. J'ai annoncé que nous réfléchissions à un nouveau dispositif, qui trouverait sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce dispositif laissera une large place aux prérogatives conventionnelles.
En tout état de cause, pour les professionnels paramédicaux, il convient de prévoir des garde-fous individuels par le développement des recommandations de bonnes pratiques comportant, le cas échéant, la définition de références strictes pour le nombre d'actes ou de séances par indication.
La forfaitisation de la rémunération de l'intervention du professionnel doit être offerte aux partenaires conventionnels, sur le modèle de ce qui a été fait pour les médecins en LFSS 99.
La voie de l'expérimentation, par segments, d'une rémunération au forfait dans le cadre des conventions paraît une voie intéressante. Des dispositions législatives seront proposées au Parlement.
Il convient de surcroît de prévoir des garde-fous collectifs à négocier dans le cadre conventionnel. L'introduction du bilan, rémunéré ou non, doit se faire dans le cadre du montant global fixé pour les dépenses.
Enfin, il semble judicieux de donner explicitement aux conventions un rôle de suivi des dépenses et d'introduire le principe des bilans aux 4ème, 8ème et 12ème mois de dépenses.
Il est clair de notre point de vue que le renforcement de l'autonomie des professionnels doit s'accompagner d'une amélioration de la coordination des soins. Vous nous avez souvent entendus parler de réseaux ; à nos yeux, en effet, notre système souffre d'un défaut d'organisation préjudiciable d'abord à la qualité des soins.
Les paramédicaux occupent une place importante dans la coordination des soins. Proches des malades et de leurs familles, ils apportent une contribution précieuse au bon fonctionnement de la prise en charge. Nous le savons bien, et d'expérience.
C'est pourquoi nous souhaitons étendre à l'ensemble des professions paramédicales la disposition prévue pour les infirmiers qui "communiquent au médecin prescripteur toute information en sa possession susceptible de concourir à l'établissement du diagnostic ou de permettre une meilleure adaptation du traitement en fonction de l'état de santé du patient et de son évolution".
Nous entendons également procéder par la loi à l'extension aux professionnels paramédicaux des réseaux expérimentaux relevant de la procédure du Conseil d'orientation des filières et des réseaux expérimentaux présidé par Raymond SOUBIE.
Le bénéfice de ces dispositions expérimentales est aujourd'hui réservé aux médecins. C'est une anomalie que nous allons corriger.
Autonomie accrue, place renforcée dans la coordination des soins : autant de mouvements qui appellent un développement des règles déontologiques et des règles de bonne pratique.
L'ANAES, au-delà du travail accompli jusqu'ici, devra s'atteler à formuler des recommandations dans le domaine des soins paramédicaux, notamment en matière de rééducation. Il convient de même d'assurer la promotion de ces recommandations auprès de l'ensemble des professionnels.
Le rapport d'Anne-Marie BROCAS propose d'aller plus loin encore et de créer un office des professions paramédicales, commun aux différentes professions paramédicales et cumulant certaines des fonctions qui relèvent pour les professions médicales des ordres et des unions régionales des médecins.
L'office, organisé régionalement et disposant d'une instance nationale, serait chargé de proposer et contrôler le respect des règles professionnelles et enfin, de diffuser et contrôler les règles de bonne pratique.
La création d'une telle structure, à l'heure où l'on parle - enfin - des droits des malades, serait particulièrement la bienvenue. Dans la configuration proposée par Anne-Marie BROCAS, l'office serait compétent pour les professionnels libéraux comme pour les professionnels salariés.
Nous avons consulté les organisations représentant ces derniers qui nous ont fait part de leur souhait que les spécificités de l'exercice salarié soient respectées.
C'est pourquoi, la création d'un office nécessite que soit réalisée au préalable une étude de faisabilité, en liaison avec les représentants des professionnels libéraux mais aussi salariés, afin d'en déterminer les contours possibles.
Le Premier ministre, sur notre proposition, a accepté que soit confiée à un parlementaire une mission exploratoire sur ce sujet. La nomination de Philippe NAUCHE, député, interviendra dans les tous prochains jours, de manière qu'il puisse se mettre au travail sans délai.
La réforme de la composition du Conseil supérieur des professions paramédicales sera conduite en parallèle. Vous avez eu connaissance de ses grandes lignes : suppression de la voix délibérante de l'administration, meilleur équilibre entre les composantes professionnelles.
Le projet de décret qui vous a été présenté en commission interprofessionnelle du Conseil supérieur est en cours de signature et sera donc très prochainement publié.
J'en terminerai par la question démographique, qui préoccupe à juste titre certains d'entre vous. Cette question n'a pas de réponse simple et nous devons concilier des impératifs divers. En tout état de cause, il n'y a pas de réponse globale, qui soit commune à l'ensemble des professions paramédicales.
Je rappellerai les travaux en cours visant à affiner les données disponibles sur l'évolution démographique des professions, qui nous ont permis de décider, depuis deux ans, de la nécessaire augmentation des quotas d'entrée dans les instituts de formation en soins infirmiers et de la baisse du nombre des futurs étudiants masseurs-kinésithérapeutes, afin de mieux répondre aux besoins.
Je connais les problèmes liés aux diplômés belges. La libre circulation en Europe est un principe important. C'est au niveau bilatéral que des solutions doivent être recherchées.
Les autorités belges sont aussi conscientes que nous du problème posé, qui se traduit pour elles par des charges financières accrues. Comme vous le savez, des contacts ont été établis entre la France et la Belgique. Nous venons d'être informés de ce que la Belgique avait décidé de modifier les règles de financement des écoles en réponse à ce problème.
Pour les masseurs kinésithérapeutes, l'idée a été avancée d'introduire une période complémentaire de formation ou de stage avant tout exercice autonome. Nous souhaitons mettre à l'étude une telle formule dans un groupe de travail réunissant la profession, l'Etat et l'assurance maladie. Au vu des conclusions de ce groupe de travail, des décisions pourraient être prises.
Voilà donc, Mesdames et Messieurs, le programme que vous propose le Gouvernement. Il étend le champ de vos droits comme celui de vos devoirs. Il vise à moderniser vos pratiques pour améliorer la qualité des soins et vos rapports avec le système de santé pour en améliorer le fonctionnement.
Je ne doute pas de notre volonté commune de faire progresser les choses. Vous pouvez être assurés de celle du Gouvernement de persévérer dans la voie ainsi tracée.
Mesdames et Messieurs, je vous remercie.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 7 septembre 1999)
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureuse de vous recevoir aujourd'hui avec Dominique GILLOT et d'avoir ainsi l'occasion de rencontrer les syndicats de professionnels paramédicaux exerçant en ville.
Cette rencontre est l'aboutissement d'un travail que nous avons mené ensemble, au cours de ces derniers mois. Vous avez participé avec conviction aux réflexions qui ont été conduites et je voudrais vous en remercier tout particulièrement.
Vos professions savent en effet prendre une part active à la modernisation de leur cadre d'exercice et de leurs pratiques, en un mot prendre leurs responsabilités, aux côtés des pouvoirs publics.
Je m'en félicite car je pense qu'il n'y pas d'autre chemin possible pour faire progresser notre système de santé. La concertation est une méthode longue et exigeante.
C'est la seule qui vaille vraiment. Elle produit des résultats, des résultats durables, et vous le savez bien.
L'exemple des pharmaciens est à cet égard parfaitement éclairant. Voilà une profession qui a accepté de dialoguer et de négocier un accord global avec les pouvoirs publics. Nous avons ainsi progressé avec eux de manière très importante et rénové en profondeur leur cadre d'exercice.
C'est cette méthode que nous utilisons avec vous. Elle conduit à un travail en commun, patient et minutieux. Mais nous avons la certitude qu'elle nous permettra de construire pour l'avenir.
Ce travail commun, nous l'avons commencé l'an dernier : vous avez participé aux travaux menés par François STASSE sur la médecine de ville. Mais la nécessité d'une démarche particulière à vos professions est apparue rapidement.
C'est ainsi que le Gouvernement a décidé, l'an dernier, d'engager une réflexion sans précédent sur l'exercice paramédical libéral. C'est la première fois que les pouvoirs publics abordent les questions qui vous préoccupent de manière cohérente et globale.
Chacune de vos professions présente des spécificités, c'est une évidence. Le monde professionnel que vous représentez est divers : on y trouve principalement la profession d'infirmier (infirmière) et les professions de rééducation.
Mais ce qui vous rapproche est à mon sens plus fort que ce qui vous sépare. On peut dire, je crois, qu'il existe dans notre pays un exercice paramédical en ville.
J'en profite pour vous dire que ce mot "paramédical" - on va le voir tout de suite - ne correspond pas tout à fait à la conception que nous avons de votre activité. Mais c'est le mot le plus courant - avec auxiliaire médical - pour vous désigner.
Nous avons cherché avec vous une nouvelle terminologie mais nous ne l'avons pas encore trouvée. Vous me pardonnerez sans doute de continuer à employer ce terme de professions paramédicales, faute de mieux.
Vous êtes aujourd'hui près de 100 000 professionnels à exercer en ville, et vous êtes donc presque aussi nombreux que les médecins libéraux.
100 000 professionnels : cela justifiait pleinement l'initiative que nous avons prise - deuxième étape de notre démarche - d'engager une réflexion spécifique sur les professions paramédicales en ville. Cette concertation, c'est à Anne-Marie BROCAS que nous l'avons confiée.
Je tiens à la remercier chaleureusement du travail qu'elle a accompli.
Je sais, parce que vous nous l'avez dit à plusieurs reprises, que vous avez apprécié la qualité des travaux qu'elle a animés, dans un climat largement consensuel. Son rapport est riche de propositions et je vais, dans quelques instants, en parler plus en détail. Il marquera, j'en suis sûr, un moment important dans l'histoire de vos professions.
Il incarne en effet une conception renouvelée de votre action de tous les jours, auprès des malades et de leur entourage. Une action de soins indispensable, complémentaire de l'action médicale, réalisée par des professionnels responsables.
Les professionnels paramédicaux libéraux que vous représentez jouent un rôle éminent dans notre système de santé comme dans notre vie quotidienne.
Il faut, et ce n'est pas une formule toute faite, souligner l'importance de vos compétences et saluer la façon dont vous les exercez, comme votre dévouement à l'égard notamment des enfants, des personnes âgées ou encore des malades chroniques.
La technicité de vos interventions en matière de soins ou de rééducation se nourrit d'une dimension relationnelle importante à tous les âges de la vie, et souvent au plus proche des personnes, à leur domicile.
Cette proximité confère ainsi à l'infirmière, au masseur-kinésithérapeute, à l'orthophoniste, à l'orthoptiste ou au pédicure podologue une place de choix dans le coeur de nos concitoyens.
Cela justifierait, s'il en est encore besoin, que vous exerciez collectivement des responsabilités professionnelles propres, afin de garantir la qualité des soins que vous prodiguez et de participer au bon fonctionnement du système de santé, y compris dans sa dimension économique.
Les propositions du rapport BROCAS vont dans ce sens. Renforcement de l'autonomie des professionnels, promotion des règles déontologiques, développement des bonnes pratiques : autant d'axes pour permettre aux professionnels paramédicaux d'exercer pleinement leur rôle au sein du système de santé.
Le Gouvernement a décidé, vous le savez, de donner suite à plusieurs des propositions formulées par Anne-Marie BROCAS. Nous allons donc vous faire part des décisions de principe arrêtées par Dominique GILLOT et moi-même.
En premier lieu, vont être modifiées les conditions de la prescription médicale. Il s'agit d'aménager la complémentarité des interventions médicales et paramédicales.
Le médecin sera appelé à formuler la prescription d'une intervention paramédicale, pour une indication donnée, sans détailler la nature et le nombre des actes à réaliser.
Bien évidemment, le médecin pourra néanmoins, s'il le souhaite, notamment en raison de compétences acquises dans le domaine spécifique de la rééducation envisagée, préciser sa prescription. Cela liera dès lors le professionnel paramédical.
Interviendra alors l'établissement par le paramédical d'un bilan et d'un plan de soins et, à l'issue des soins, d'un compte-rendu de traitement.
Le paramédical recevra le patient et, compte tenu de l'indication du médecin, établira un bilan et un plan de soins à partir des recommandations de bonne pratique et des stipulations de la nomenclature. En particulier, le paramédical de rééducation calibrera le volume de soins nécessaire.
Certaines professions procèdent déjà ainsi. Ce sera désormais la règle commune.
Le bilan et le plan de soins seront transmis pour information au médecin traitant et au malade.
Afin d'alléger les procédures, cette procédure se fera sans entente préalable, à l'heure où nous sommes engagés dans un mouvement général d'allégement de ce type de procédures, en accord avec la CNAMTS.
Le médecin pourra quant à lui intervenir à tout moment : au début du traitement, pour proposer une modification du plan de soins, et en cours de traitement s'il souhaite l'interrompre ou modifier sa prescription initiale, notamment en cas d'élément médical nouveau.
Tout naturellement, le renouvellement de la prescription sera de la responsabilité du médecin, qui l'autorise.
J'ajouterai, et c'est une évidence, que les transmissions par voie électronique devraient largement faciliter le travail dans cette phase et favoriser la circulation de l'information.
J'engage d'ailleurs les professions qui ne l'ont pas encore fait à conclure avec l'assurance maladie des accords permettant l'indemnisation pérenne des télétransmissions.
Au-delà de la télétransmission, l'informatisation des professionnels de santé est un élément important de la modernisation du système de santé en France. Vous connaissez mon attachement à promouvoir la mise en réseau des professionnels, grâce à une informatique communicante.
Plus que jamais, les échanges entre le monde paramédical, le monde médical et le monde des établissements devront s'intensifier, au bénéfice du malade.
En corollaire à cette responsabilité nouvelle des professionnels, le gouvernement est décidé à mettre en oeuvre un pouvoir de prescription par le professionnel paramédical, sauf indication expresse du médecin, des matériels, produits et petits appareils qu'il utilise.
Cette possibilité ne saurait être absolue et la liste des matériels pouvant être prescrits doit être limitative. Je propose d'adopter en cette matière une démarche progressive et de commencer par un petit nombre de matériels. Nos services vous soumettront très prochainement des propositions.
Pour clore ce chapitre du renforcement de la responsabilité professionnelle, je voudrais aborder la question de la responsabilité économique, indissociable du renforcement de l'autonomie professionnelle des paramédicaux.
Cette question s'inscrit dans le cadre général de la réflexion menée par le Gouvernement sur la régulation des dépenses de ville. J'ai annoncé que nous réfléchissions à un nouveau dispositif, qui trouverait sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ce dispositif laissera une large place aux prérogatives conventionnelles.
En tout état de cause, pour les professionnels paramédicaux, il convient de prévoir des garde-fous individuels par le développement des recommandations de bonnes pratiques comportant, le cas échéant, la définition de références strictes pour le nombre d'actes ou de séances par indication.
La forfaitisation de la rémunération de l'intervention du professionnel doit être offerte aux partenaires conventionnels, sur le modèle de ce qui a été fait pour les médecins en LFSS 99.
La voie de l'expérimentation, par segments, d'une rémunération au forfait dans le cadre des conventions paraît une voie intéressante. Des dispositions législatives seront proposées au Parlement.
Il convient de surcroît de prévoir des garde-fous collectifs à négocier dans le cadre conventionnel. L'introduction du bilan, rémunéré ou non, doit se faire dans le cadre du montant global fixé pour les dépenses.
Enfin, il semble judicieux de donner explicitement aux conventions un rôle de suivi des dépenses et d'introduire le principe des bilans aux 4ème, 8ème et 12ème mois de dépenses.
Il est clair de notre point de vue que le renforcement de l'autonomie des professionnels doit s'accompagner d'une amélioration de la coordination des soins. Vous nous avez souvent entendus parler de réseaux ; à nos yeux, en effet, notre système souffre d'un défaut d'organisation préjudiciable d'abord à la qualité des soins.
Les paramédicaux occupent une place importante dans la coordination des soins. Proches des malades et de leurs familles, ils apportent une contribution précieuse au bon fonctionnement de la prise en charge. Nous le savons bien, et d'expérience.
C'est pourquoi nous souhaitons étendre à l'ensemble des professions paramédicales la disposition prévue pour les infirmiers qui "communiquent au médecin prescripteur toute information en sa possession susceptible de concourir à l'établissement du diagnostic ou de permettre une meilleure adaptation du traitement en fonction de l'état de santé du patient et de son évolution".
Nous entendons également procéder par la loi à l'extension aux professionnels paramédicaux des réseaux expérimentaux relevant de la procédure du Conseil d'orientation des filières et des réseaux expérimentaux présidé par Raymond SOUBIE.
Le bénéfice de ces dispositions expérimentales est aujourd'hui réservé aux médecins. C'est une anomalie que nous allons corriger.
Autonomie accrue, place renforcée dans la coordination des soins : autant de mouvements qui appellent un développement des règles déontologiques et des règles de bonne pratique.
L'ANAES, au-delà du travail accompli jusqu'ici, devra s'atteler à formuler des recommandations dans le domaine des soins paramédicaux, notamment en matière de rééducation. Il convient de même d'assurer la promotion de ces recommandations auprès de l'ensemble des professionnels.
Le rapport d'Anne-Marie BROCAS propose d'aller plus loin encore et de créer un office des professions paramédicales, commun aux différentes professions paramédicales et cumulant certaines des fonctions qui relèvent pour les professions médicales des ordres et des unions régionales des médecins.
L'office, organisé régionalement et disposant d'une instance nationale, serait chargé de proposer et contrôler le respect des règles professionnelles et enfin, de diffuser et contrôler les règles de bonne pratique.
La création d'une telle structure, à l'heure où l'on parle - enfin - des droits des malades, serait particulièrement la bienvenue. Dans la configuration proposée par Anne-Marie BROCAS, l'office serait compétent pour les professionnels libéraux comme pour les professionnels salariés.
Nous avons consulté les organisations représentant ces derniers qui nous ont fait part de leur souhait que les spécificités de l'exercice salarié soient respectées.
C'est pourquoi, la création d'un office nécessite que soit réalisée au préalable une étude de faisabilité, en liaison avec les représentants des professionnels libéraux mais aussi salariés, afin d'en déterminer les contours possibles.
Le Premier ministre, sur notre proposition, a accepté que soit confiée à un parlementaire une mission exploratoire sur ce sujet. La nomination de Philippe NAUCHE, député, interviendra dans les tous prochains jours, de manière qu'il puisse se mettre au travail sans délai.
La réforme de la composition du Conseil supérieur des professions paramédicales sera conduite en parallèle. Vous avez eu connaissance de ses grandes lignes : suppression de la voix délibérante de l'administration, meilleur équilibre entre les composantes professionnelles.
Le projet de décret qui vous a été présenté en commission interprofessionnelle du Conseil supérieur est en cours de signature et sera donc très prochainement publié.
J'en terminerai par la question démographique, qui préoccupe à juste titre certains d'entre vous. Cette question n'a pas de réponse simple et nous devons concilier des impératifs divers. En tout état de cause, il n'y a pas de réponse globale, qui soit commune à l'ensemble des professions paramédicales.
Je rappellerai les travaux en cours visant à affiner les données disponibles sur l'évolution démographique des professions, qui nous ont permis de décider, depuis deux ans, de la nécessaire augmentation des quotas d'entrée dans les instituts de formation en soins infirmiers et de la baisse du nombre des futurs étudiants masseurs-kinésithérapeutes, afin de mieux répondre aux besoins.
Je connais les problèmes liés aux diplômés belges. La libre circulation en Europe est un principe important. C'est au niveau bilatéral que des solutions doivent être recherchées.
Les autorités belges sont aussi conscientes que nous du problème posé, qui se traduit pour elles par des charges financières accrues. Comme vous le savez, des contacts ont été établis entre la France et la Belgique. Nous venons d'être informés de ce que la Belgique avait décidé de modifier les règles de financement des écoles en réponse à ce problème.
Pour les masseurs kinésithérapeutes, l'idée a été avancée d'introduire une période complémentaire de formation ou de stage avant tout exercice autonome. Nous souhaitons mettre à l'étude une telle formule dans un groupe de travail réunissant la profession, l'Etat et l'assurance maladie. Au vu des conclusions de ce groupe de travail, des décisions pourraient être prises.
Voilà donc, Mesdames et Messieurs, le programme que vous propose le Gouvernement. Il étend le champ de vos droits comme celui de vos devoirs. Il vise à moderniser vos pratiques pour améliorer la qualité des soins et vos rapports avec le système de santé pour en améliorer le fonctionnement.
Je ne doute pas de notre volonté commune de faire progresser les choses. Vous pouvez être assurés de celle du Gouvernement de persévérer dans la voie ainsi tracée.
Mesdames et Messieurs, je vous remercie.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 7 septembre 1999)