Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Commissaire,
Mes chers collègues,
La réforme de la politique commune de la pêche (PCP) est, Monsieur le Commissaire, sans aucun doute nécessaire. Pour autant, et j'ai écouté comme vous les réactions soulevées par votre projet dans la communauté des pêcheurs, celui-ci ne suscite pas, loin sans faut, l'adhésion du secteur.
Or, c'est bien de l'adhésion la plus large possible des pêcheurs de l'Union européenne dont nous aurons besoin si l'on souhaite résoudre les problèmes souvent très sérieux qui se posent à l'application de l'actuelle politique commune de la pêche.
En d'autres termes, la réforme devra se faire avec les pêcheurs, non pas contre eux.
Si la politique commune de la pêche n'a pas atteint au cours des 20 dernières années l'ensemble des objectifs qui lui était assigné, c'est moins en raison du comportement des pêcheurs eux-mêmes, comme cela apparaît parfois dans les attendus de votre réforme, qu'en raison de dispositions réglementaires mal adaptées et mal appliquées.
Notre PCP s'est caractérisée au fil du temps par un excès de réglementations je dirais même un empilement de textes qui n'avaient pour objet que de masquer leur déficit d'application.
A cet égard, je crois que le moment est venu de retrouver les fondamentaux qui doivent guider notre politique commune. Ces fondamentaux sont : une gestion durable de la ressource qui s'appuie principalement sur l'instrument des TAC et des quotas ainsi que sur des mesures techniques pertinentes, le tout assorti d'une politique de contrôle efficace et équitable.
Il m'apparaît essentiel de simplifier notre gestion et d'éviter des superpositions de règles qui se révèlent soit incompatibles entre elles soit inapplicables. Je pense notamment aux propositions visant à associer la gestion par les TAC et quotas et celle par l'effort de pêche ou encore les propositions qui visent à faire reporter sur la gestion de la flotte l'objectif de gestion durable de la ressource.
A ce stade je trouve la réforme qui nous est proposée beaucoup trop déséquilibrée entre la nécessaire protection de la ressource et la non moins nécessaire prise en compte de la dimension socio-économique et territoriale de la pêche. Je la trouve également beaucoup trop globalisante face à une réalité par nature complexe et constituée d'une addition de particularités.
Enfin, je suis convaincu que, si nous voulons qu'elle soit un succès, notre réforme devra se garder de deux écueils : un excès de provocation vis-à-vis du secteur dans sa forme et une trop grande brutalité dans la mise en uvre des solutions proposées sur le fond.
Vous l'aurez compris, Monsieur le Commissaire, le projet qui nous est soumis ne répond absolument pas, en l'état, aux attentes de la France. Ce n'est qu'au prix de profondes modifications qu'il pourra être avalisé.
Aussi je souhaite qu'un important travail de réflexion soit engagé pour répondre aux différentes préoccupations que j'ai évoquées afin que les pêcheurs de l'Union européenne aient bien le sentiment que cette réforme est d'abord faite dans leur intérêt.
A ce stade, Monsieur le Président, je ne me livrerai pas à une analyse détaillée de l'ensemble des textes qui nous sont soumis mais j'exposerai simplement les grandes lignes de mes premières réactions.
Tout d'abord, je voudrais marquer ma satisfaction sur un certain nombre d'orientations proposées par la Commission dans son document de synthèse.
En effet, une amélioration du rendu des avis scientifiques pour l'évaluation des stocks halieutiques, la recherche d'une meilleure efficacité et d'une plus grande équité dans la politique des contrôles et la volonté d'une plus grande implication des différents acteurs, et notamment des pêcheurs, dans les processus de décision, me semblent positives et vont clairement dans le bon sens.
Les propositions concernant les règles d'accès à la ressource, et notamment le régime des 6/12 milles me paraissent sages.
De même, la réaffirmation du principe de la stabilité relative dans la répartition des possibilités de capture entre les Etats membres m'apparaît essentielle même si certaines formulations contenues dans les propositions de règlement demanderont à être clarifiées. Il n'est à cet égard pas question, dans mon esprit, de modifier les clés de répartition historiques existantes.
En revanche, plusieurs propositions majeures ne sont pas acceptables.
Tout d'abord, en ce qui concerne la conservation et l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la PCP, la France ne peut soutenir les propositions de la Commission relatives, d'une part à la mise en place de plans de gestion pluriannuels quasiment généralisés à l'ensemble des stocks halieutiques et, d'autre part, au transfert de compétences du Conseil vers la Commission en matière de fixation des autorisations de captures et de mesures techniques.
En effet, si l'on peut concevoir pour les stocks réellement en difficulté sur un plan biologique la mise en place de plans de restauration, en revanche, la généralisation de tels dispositifs ne saurait être acceptée pour des stocks où une simple mesure pluriannuelle de fixation des TAC et des quotas est suffisante. Méfions-nous, comme je l'ai évoqué précédemment, d'approches trop globalisantes.
En outre, il n'est pas concevable que le Conseil abandonne, sur des sujets aussi importants que la gestion de la ressource, ses pouvoirs au profit de la Commission. Dans ce domaine, les décisions sont politiques et non pas techniques.
En second lieu, les propositions relatives au financement et à l'encadrement de la flotte communautaire ne sont pas acceptables en l'état.
Ainsi, la suppression brutale, dès le 1er janvier 2003 de l'ensemble des aides publiques, nationales et communautaires, à la construction et à la modernisation des navires de pêche, conduirait à la disparition du secteur de la pêche artisanale dans notre pays, comme dans bon nombre d'autres Etats membres. Contrairement à ce qui est largement affirmé dans les considérants et les exposés des motifs des propositions de la Commission, les aides publiques ne sont pas en tant que telles responsables de la surcapacité, elles sont seulement l'élément indispensable au maintien d'une flotte de pêche communautaire diversifiée, répartie harmonieusement sur l'ensemble de notre littoral.
Avec une certaine solennité, je souhaite affirmer que la suppression des aides publiques à la flotte et le dessaisissement des pouvoirs du Conseil en matière de gestion de la ressource constituent deux propositions non négociables par la France dans le cadre de cette réforme.
J'ajoute également que l'élargissement des mesures d'urgence susceptibles d'être prises par les Etats membres dans les eaux qui relèvent de leur juridiction, ainsi que la mise en place de comités consultatifs régionaux, devront être examinées avec la plus grande attention.
En effet, je ne pourrais pas accepter de mesures qui se révèleraient discriminatoires ou qui conduiraient à une certaine forme de renationalisation de la PCP
Par ailleurs, je souhaiterais, avant de conclure, faire trois observations :
- la première concerne le traitement des régions ultra périphériques et de la méditerranée. En effet, si la Commission semble reconnaître les besoins spécifiques des régions ultra périphériques, et donc des départements d'Outre-Mer, je souhaite que ces engagements trouvent leur application concrète dans la mise en uvre de la nouvelle politique commune des pêches.
De la même façon, il conviendra que la Commission prenne, dans ses propositions à venir, pleinement en compte les spécificités de la pêche méditerranéenne.
- la seconde concerne la problématique de la pèche minotière. En effet, lorsque la ressource halieutique est rare, il convient de privilégier l'exploitation destinée à la consommation humaine et de veiller à préserver un bon équilibre des écosystèmes. Une simple étude d'impact de cette pêche comme le propose la Commission, ne me paraît ni adaptée ni suffisante.
- la troisième concerne le financement de la réforme. A ce stade, j'observe un déficit de crédits disponibles. Cette impasse budgétaire ne peut que me conforter dans mon souhait d'une réforme beaucoup plus progressive dans le temps que celle qui nous est proposée.
Comme vous venez de le constater, Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mes chers collègues, la France sera exigeante dans le cadre de cette négociation qui s'engage. Elle est disposée à contribuer à l'émergence d'une réforme positive, ambitieuse, qui ouvre de réelles perspectives d'avenir à l'ensemble de la pêche et de l'aquaculture communautaires.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 19 juin 2002)
Monsieur le Commissaire,
Mes chers collègues,
La réforme de la politique commune de la pêche (PCP) est, Monsieur le Commissaire, sans aucun doute nécessaire. Pour autant, et j'ai écouté comme vous les réactions soulevées par votre projet dans la communauté des pêcheurs, celui-ci ne suscite pas, loin sans faut, l'adhésion du secteur.
Or, c'est bien de l'adhésion la plus large possible des pêcheurs de l'Union européenne dont nous aurons besoin si l'on souhaite résoudre les problèmes souvent très sérieux qui se posent à l'application de l'actuelle politique commune de la pêche.
En d'autres termes, la réforme devra se faire avec les pêcheurs, non pas contre eux.
Si la politique commune de la pêche n'a pas atteint au cours des 20 dernières années l'ensemble des objectifs qui lui était assigné, c'est moins en raison du comportement des pêcheurs eux-mêmes, comme cela apparaît parfois dans les attendus de votre réforme, qu'en raison de dispositions réglementaires mal adaptées et mal appliquées.
Notre PCP s'est caractérisée au fil du temps par un excès de réglementations je dirais même un empilement de textes qui n'avaient pour objet que de masquer leur déficit d'application.
A cet égard, je crois que le moment est venu de retrouver les fondamentaux qui doivent guider notre politique commune. Ces fondamentaux sont : une gestion durable de la ressource qui s'appuie principalement sur l'instrument des TAC et des quotas ainsi que sur des mesures techniques pertinentes, le tout assorti d'une politique de contrôle efficace et équitable.
Il m'apparaît essentiel de simplifier notre gestion et d'éviter des superpositions de règles qui se révèlent soit incompatibles entre elles soit inapplicables. Je pense notamment aux propositions visant à associer la gestion par les TAC et quotas et celle par l'effort de pêche ou encore les propositions qui visent à faire reporter sur la gestion de la flotte l'objectif de gestion durable de la ressource.
A ce stade je trouve la réforme qui nous est proposée beaucoup trop déséquilibrée entre la nécessaire protection de la ressource et la non moins nécessaire prise en compte de la dimension socio-économique et territoriale de la pêche. Je la trouve également beaucoup trop globalisante face à une réalité par nature complexe et constituée d'une addition de particularités.
Enfin, je suis convaincu que, si nous voulons qu'elle soit un succès, notre réforme devra se garder de deux écueils : un excès de provocation vis-à-vis du secteur dans sa forme et une trop grande brutalité dans la mise en uvre des solutions proposées sur le fond.
Vous l'aurez compris, Monsieur le Commissaire, le projet qui nous est soumis ne répond absolument pas, en l'état, aux attentes de la France. Ce n'est qu'au prix de profondes modifications qu'il pourra être avalisé.
Aussi je souhaite qu'un important travail de réflexion soit engagé pour répondre aux différentes préoccupations que j'ai évoquées afin que les pêcheurs de l'Union européenne aient bien le sentiment que cette réforme est d'abord faite dans leur intérêt.
A ce stade, Monsieur le Président, je ne me livrerai pas à une analyse détaillée de l'ensemble des textes qui nous sont soumis mais j'exposerai simplement les grandes lignes de mes premières réactions.
Tout d'abord, je voudrais marquer ma satisfaction sur un certain nombre d'orientations proposées par la Commission dans son document de synthèse.
En effet, une amélioration du rendu des avis scientifiques pour l'évaluation des stocks halieutiques, la recherche d'une meilleure efficacité et d'une plus grande équité dans la politique des contrôles et la volonté d'une plus grande implication des différents acteurs, et notamment des pêcheurs, dans les processus de décision, me semblent positives et vont clairement dans le bon sens.
Les propositions concernant les règles d'accès à la ressource, et notamment le régime des 6/12 milles me paraissent sages.
De même, la réaffirmation du principe de la stabilité relative dans la répartition des possibilités de capture entre les Etats membres m'apparaît essentielle même si certaines formulations contenues dans les propositions de règlement demanderont à être clarifiées. Il n'est à cet égard pas question, dans mon esprit, de modifier les clés de répartition historiques existantes.
En revanche, plusieurs propositions majeures ne sont pas acceptables.
Tout d'abord, en ce qui concerne la conservation et l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la PCP, la France ne peut soutenir les propositions de la Commission relatives, d'une part à la mise en place de plans de gestion pluriannuels quasiment généralisés à l'ensemble des stocks halieutiques et, d'autre part, au transfert de compétences du Conseil vers la Commission en matière de fixation des autorisations de captures et de mesures techniques.
En effet, si l'on peut concevoir pour les stocks réellement en difficulté sur un plan biologique la mise en place de plans de restauration, en revanche, la généralisation de tels dispositifs ne saurait être acceptée pour des stocks où une simple mesure pluriannuelle de fixation des TAC et des quotas est suffisante. Méfions-nous, comme je l'ai évoqué précédemment, d'approches trop globalisantes.
En outre, il n'est pas concevable que le Conseil abandonne, sur des sujets aussi importants que la gestion de la ressource, ses pouvoirs au profit de la Commission. Dans ce domaine, les décisions sont politiques et non pas techniques.
En second lieu, les propositions relatives au financement et à l'encadrement de la flotte communautaire ne sont pas acceptables en l'état.
Ainsi, la suppression brutale, dès le 1er janvier 2003 de l'ensemble des aides publiques, nationales et communautaires, à la construction et à la modernisation des navires de pêche, conduirait à la disparition du secteur de la pêche artisanale dans notre pays, comme dans bon nombre d'autres Etats membres. Contrairement à ce qui est largement affirmé dans les considérants et les exposés des motifs des propositions de la Commission, les aides publiques ne sont pas en tant que telles responsables de la surcapacité, elles sont seulement l'élément indispensable au maintien d'une flotte de pêche communautaire diversifiée, répartie harmonieusement sur l'ensemble de notre littoral.
Avec une certaine solennité, je souhaite affirmer que la suppression des aides publiques à la flotte et le dessaisissement des pouvoirs du Conseil en matière de gestion de la ressource constituent deux propositions non négociables par la France dans le cadre de cette réforme.
J'ajoute également que l'élargissement des mesures d'urgence susceptibles d'être prises par les Etats membres dans les eaux qui relèvent de leur juridiction, ainsi que la mise en place de comités consultatifs régionaux, devront être examinées avec la plus grande attention.
En effet, je ne pourrais pas accepter de mesures qui se révèleraient discriminatoires ou qui conduiraient à une certaine forme de renationalisation de la PCP
Par ailleurs, je souhaiterais, avant de conclure, faire trois observations :
- la première concerne le traitement des régions ultra périphériques et de la méditerranée. En effet, si la Commission semble reconnaître les besoins spécifiques des régions ultra périphériques, et donc des départements d'Outre-Mer, je souhaite que ces engagements trouvent leur application concrète dans la mise en uvre de la nouvelle politique commune des pêches.
De la même façon, il conviendra que la Commission prenne, dans ses propositions à venir, pleinement en compte les spécificités de la pêche méditerranéenne.
- la seconde concerne la problématique de la pèche minotière. En effet, lorsque la ressource halieutique est rare, il convient de privilégier l'exploitation destinée à la consommation humaine et de veiller à préserver un bon équilibre des écosystèmes. Une simple étude d'impact de cette pêche comme le propose la Commission, ne me paraît ni adaptée ni suffisante.
- la troisième concerne le financement de la réforme. A ce stade, j'observe un déficit de crédits disponibles. Cette impasse budgétaire ne peut que me conforter dans mon souhait d'une réforme beaucoup plus progressive dans le temps que celle qui nous est proposée.
Comme vous venez de le constater, Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mes chers collègues, la France sera exigeante dans le cadre de cette négociation qui s'engage. Elle est disposée à contribuer à l'émergence d'une réforme positive, ambitieuse, qui ouvre de réelles perspectives d'avenir à l'ensemble de la pêche et de l'aquaculture communautaires.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 19 juin 2002)