Texte intégral
La jeunesse d'une société ne se mesure pas seulement au nombre de ses "seize à vingt-cinq ans". Certes, elle se juge à l'accueil qu'elle fait à ses jeunes, à l'attention qu'elle porte à leurs besoins, à l'écoute qu'elle réserve à leurs idées. Mais elle s'apprécie aussi à la manière dont elle réagit à l'inédit, dont elle se porte vers le changement, dont elle encourage l'innovation.
C'est pourquoi je suis très heureux d'avoir été, depuis deux heures, présent à vos débats. Les thèmes en sont importants : l'information, les droits, la vie quotidienne des jeunes ; l'emploi, la formation, la citoyenneté. Ces discussions font de l'installation, aujourd'hui, du nouveau Conseil de la jeunesse un moment fort du dialogue que le Gouvernement a voulu instaurer avec les jeunes.
Je voudrais à mon tour m'adresser à vous, qui êtes des jeunes et qui représentez des jeunes, et au-delà à ceux qui dans tout le pays nous voient et nous écoutent à travers l'internet.
Nous voulons aider les jeunes à exprimer le formidable potentiel qui est le leur.
Les jeunes sont une richesse pour notre pays. Ils rassemblent une capacité d'initiative, d'innovation sociale, de générosité dont nous avons besoin pour inventer l'avenir. Plus diplômés et, en général, mieux formés que les générations précédentes, vous avez des capacités, des compétences qui veulent s'épanouir. Vous êtes, plus spontanément que beaucoup d'adultes, en prise directe avec les changements du monde, qui sont en pleine accélération. Et de récentes enquêtes d'opinion le démontrent, la majorité d'entre vous envisagent avec optimisme le futur.
Une de vos grandes forces, c'est la diversité de votre génération. C'est la diversité de jeunes qui, pour la plupart, acceptent plus naturellement que leurs aînés les différences "quelles qu'en soient l'origine ou la nature. Parce que vous avez grandi en vivant au quotidien ces différences, dans une France plurielle. C'est aussi la diversité d'individus dont le premier souci est d'acquérir leur autonomie, d'affirmer leur envie de réussir, de bâtir leur projet de vie. Les jeunes que vous êtes aujourd'hui, ce sont ceux qui militent dans des associations, ceux qui s'engagent pour la solidarité dans notre pays et dans le monde, mais aussi ceux qui se lancent avec les emplois-jeunes dans la recherche de nouveaux services, voire qui deviennent de jeunes créateurs d'entreprise.
Mais cette diversité prend aussi la forme de l'inégalité.
Et vous êtes unis dans un même refus des inégalités. Votre génération exprime collectivement une forte demande de justice. Vous ressentez très vivement les difficultés que beaucoup rencontrent dans leur formation, dans leur recherche d'emploi, dans leur vie quotidienne. Et lorsque vous revendiquez le droit au travail pour tous, le droit à la santé, au logement, à l'éducation ; lorsque vous réclamez l'égalité entre les hommes et les femmes ; lorsque vous refusez le racisme et les discriminations qui touchent souvent les jeunes en tant que jeunes, vous dites votre volonté de voir la société se réformer. Pour mieux respecter les jeunes, les reconnaître, les accueillir. Vous exprimez ainsi une aspiration à l'égale dignité de tous qui renvoie aux valeurs mêmes sur lesquelles notre République affirme être fondée.
C'est pourquoi nous voulons lutter contre ces injustices. Par là nous aiderons les jeunes à faire de cette aspiration à une dignité mieux reconnue le ferment, pour ceux qui le voudront, d'un engagement dans la cité. Ainsi pourra s'exprimer, dans sa diversité, tout le potentiel de votre génération.
Le Gouvernement s'est fixé pour cela des priorités et une méthode.
Nos priorités, ce sont l'emploi, l'éducation, la citoyenneté. Inscrite au premier rang de ma déclaration de politique générale, la lutte pour l'emploi a bénéficié aux jeunes. Un million d'emplois ont été créés depuis juin 1997, le nombre de chômeurs a diminué de 700 000. Le taux de chômage des moins de 25 ans a baissé de six points depuis cette date. La croissance retrouvée y a bien sûr largement contribué. Mais aussi nos politiques volontaristes en faveur de l'emploi. Je suis fier que les emplois-jeunes aient permis d'ouvrir des perspectives à 240 000 d'entre vous. A ceux qui ne disposent pas d'une formation, le programme TRACE "Trajet d'Accès à l'Emploi" offre une chance de trouver le chemin de l'emploi. D'ici 2002, 220 000 jeunes auront bénéficié de ce programme d'insertion.
Nous avons redonné en 1997 la priorité à l'éducation. En trois ans, le budget de l'éducation nationale est passé de 324 à 361 milliards de francs, en augmentation de plus de 11 %. Cette priorité est encore affirmée dans le collectif budgétaire dont débattra la semaine prochaine le Parlement et qui propose qu'un milliard de francs soit consacré à l'éducation. Nous amplifierons cet effort dans le cadre du programme pluriannuel destiné à renforcer les moyens de l'éducation nationale, qui trouvera sa première traduction dans le projet de loi de finances pour 2001.
Favoriser la citoyenneté, et donc la participation des jeunes à la vie démocratique demeure un axe essentiel de notre action. Il nous faut pour cela lutter, avec votre aide, contre toutes les discriminations. C'est l'objet des commissions d'accès à la citoyenneté installées récemment dans chaque département par Jean-Pierre CHEVENEMENT. Dans le même esprit, dès mardi prochain, vous pourrez appeler gratuitement un numéro, comme je m'y étais engagé, pour faire connaître les discriminations que vous aurez constatées ou rencontrées.
Notre méthode de travail est celle d'un dialogue avec les jeunes. Dès son arrivée au ministère de la jeunesse et des sports, Marie-Georges BUFFET a lancé une vaste concertation. Les 1700 rencontres locales tenues dans ce cadre ont débouché sur la rencontre nationale de Marly, les 29 et 30 novembre 1997 et sur la création, en janvier 1998, du Conseil permanent de la jeunesse et des conseils départementaux des jeunes. Chargés de suivre la mise en oeuvre des mesures arrêtées à Marly, ces conseils ont permis de nouer un vrai dialogue entre les jeunes et les institutions. Vous avez en leur sein imaginé des actions adaptées aux besoins exprimés par les jeunes. Vos conseils ont ainsi vu s'exercer une citoyenneté concrète. Et vous vous êtes largement mobilisés pour les 1000 projets du premier Festival de la citoyenneté, organisé du 18 au 25 mars de cette année.
Il faut pérenniser le cadre de ce dialogue avec les jeunes. Notre réunion de ce jour constitue le premier Conseil de la jeunesse, où le Gouvernement rencontre les représentants nouvellement désignés des conseils départementaux de la jeunesse et des organisations nationales de jeunes. La présence de nombreux ministres témoigne de l'importance que revêt pour nous ce dialogue. Ce rendez-vous sera désormais annuel et vous permettra d'avoir avec des responsables politiques des échanges directs. Ainsi vous aurez la possibilité de faire entendre vos préoccupations, vos réflexions, vos initiatives.
Nous devons aujourd'hui traduire vos aspirations et vos priorités en décisions.
C'est pourquoi nous voulons à la fois amplifier les actions entreprises et décider de nouvelles mesures.
Nous le ferons autour de trois axes : garantir un égal accès à l'emploi, assurer l'égalité des chances en préparant l'avenir, combattre les inégalités au quotidien.
Réduire l'inégalité face à l'emploi et à la formation reste notre première priorité. Trop de jeunes qui quittent l'école sans qualification sont perdus de vue par l'institution scolaire sans être pris en compte par les services chargés de l'insertion. L'accord cadre que signeront prochainement Martine AUBRY et Jack LANG permettra de suivre ces jeunes dès leur sortie du système éducatif. Les missions locales et l'ANPE seront appelées à prendre le relais de l'école. Il convient que les jeunes qui suivent des formations en entreprise soient mieux encadrés, mieux suivis, afin que ces formations débouchent sur un emploi. C'est le but du protocole national sur les périodes de formation en entreprise auquel travaille Jean-Luc Mélenchon et qui concernera les lycéens des filières professionnelles. Enfin le succès des emplois-jeunes se mesurera à notre capacité à professionnaliser et former ces jeunes. Notre objectif est bien de leur garantir un avenir, que ce soit dans l'entreprise, les associations, les collectivités publiques. C'est avec tous les acteurs de ce dispositif "élus locaux, responsables associatifs, mais aussi les jeunes eux-mêmes" que nous devons trouver les solutions appropriées. Le Gouvernement y travaille "Martine AUBRY au premier chef.
Sur le terrain de l'emploi, je voudrais faire écho à ce qui est pour les jeunes nés avant 1979 une préoccupation : l'accomplissement de leur service national. La professionnalisation complète de nos armées ne sera achevée qu'en 2002. C'est pourquoi la présence d'appelés sous les drapeaux est aujourd'hui encore nécessaire. Mais je sais quelles difficultés cette obligation peut créer pour des jeunes déjà entrés dans le monde du travail. Dès à présent, les titulaires d'un emploi stable doivent pouvoir bénéficier naturellement d'un report et s'ils répondent aux critères requis avoir l'assurance que ce report sera prolongé. En outre, le Gouvernement demandera aux commissions régionales compétentes que les critères d'octroi des reports soient interprétés de la façon la plus favorable et que les situations personnelles difficiles soient examinées avec la plus grande bienveillance. Il est également indispensable que le passage sous les drapeaux de ceux qui effectuent leur service national soit valorisé en tenant compte autant que possible de leur souhait d'affectation. Alain RICHARD, qui conduit cette importante réforme du service national, y veillera tout particulièrement.
Il faut aussi assurer, demain, aux jeunes l'égalité des chances.
Nous voulons garantir à chacun un égal accès aux nouvelles technologies. Nous ne pouvons laisser une " fracture numérique" s'instaurer entre ceux qui ont accès à l'information, source croissante de richesses, et ceux qui en seraient exclus. Pour l'éviter, nous avons accompli d'importants efforts. D'abord à l'école. Le nombre d'ordinateurs par élève a plus que doublé depuis 1997. En moyenne, chaque jour, 40 nouveaux établissements se relient à internet. En trois ans, nous aurons élevé le taux de connexion de 40 à 100 %. Et à la rentrée 2000, tous les lycées et collèges seront connectés au réseau. Il faut maintenant faciliter l'usage de ces outils et intégrer pleinement le multimédia dans la pédagogie.
Cette action ne doit pas toucher les seuls jeunes scolarisés. C'est pourquoi le Gouvernement entend offrir aux jeunes les moyens d'un accès gratuit à internet. Pour atteindre cet objectif, 600 sites du réseau information jeunesse "bureaux information jeunesse, points information jeunesse" seront d'ici la fin de l'année dotés des équipements nécessaires et leurs personnels formés. Cent de ces sites seront installés dans les quartiers concernés par la politique de la ville que conduit Claude BARTOLONE. 40 millions de francs seront consacrés à cette opération. Je serai d'ailleurs conduit prochainement à m'exprimer à nouveau sur ces sujets.
Les inégalités doivent aussi être combattues au quotidien : dans les transports, le logement, les loisirs. Des transports collectifs moins coûteux sont une juste revendication des jeunes. Nous poursuivrons notre politique de réduction des tarifs. En Île-de-France, la carte "ImaginR", créée à l'initiative de Jean-Claude GAYSSOT en partenariat avec la région, sera désormais utilisable pendant les vacances de la Toussaint, de Noël, de février et de Pâques. De plus, les jeunes que le programme TRACE aide à s'insérer sur le marché du travail bénéficieront à la rentrée prochaine de cette carte "ImaginR" avec une réduction de plus de 80% par rapport aux cartes annuelles. Dans les autres régions, je me réjouis que le groupement des autorités responsables de transport "le GART" soit également disposé à amplifier les réductions tarifaires.
En matière de logement, le Gouvernement s'attache aussi à prendre en compte les besoins spécifiques des jeunes. Conformément aux propositions de Louis BESSON, les aides au logement versées aux jeunes titulaires de contrats à durée déterminée seront majorées de 25%. En outre, le projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbain offrira un véritable statut de locataires aux résidents logés en foyers, dont beaucoup sont des jeunes.
Il faut aussi favoriser au quotidien l'accès au sport, aux loisirs, à la culture. C'est pourquoi à la demande de Marie-Georges BUFFET, et compte tenu du succès rencontré par le "coupon sport", qui permet de réduire le coût de l'adhésion aux clubs sportifs, nous doublerons l'effort budgétaire consacré à cette mesure "soit 20 millions de francs supplémentaires. La culture, c'est d'abord pour les jeunes la musique "les musiques" d'aujourd'hui. Au dernier Printemps de Bourges, j'ai retrouvé la vitalité des interprètes, la chaleur des publics, la richesse de cette culture vivante. Le Gouvernement poursuivra sa politique d'implantation de scènes de musiques actuelles sur tout le territoire. Elle permet de faire émerger de jeunes talents et de populariser de nouveaux langages musicaux. Aller au cinéma est aussi important pour beaucoup d'entre vous. Mais le cinéma a son langage, ses codes, ses techniques. J'ai demandé à Jack LANG de réfléchir à un plan qui offrirait à l'ensemble des collégiens et lycéens français une véritable éducation cinématographique. L'argent ne doit pas être un obstacle entre les jeunes et la culture. La fixation, le jeudi, d'un tarif à 50 francs ouvre ainsi à un large public l'accès aux spectacles aux théâtres nationaux. Dans le même souci, nous avons instauré un dimanche par mois la gratuité des visites des musées nationaux et des monuments historiques. Au-delà, Catherine TASCA se propose d'examiner avec les collectivités locales les moyens d'adapter au secteur culturel les formules de cartes-jeunes.
Lutter contre les inégalités, ce n'est pas seulement répondre à une exigence de justice. C'est lever les obstacles qui freinent l'intégration de certains jeunes : c'est faire comprendre à chacun qu'il peut et doit trouver sa place dans notre société.
C'est ainsi vouloir donner à tous les moyens d'accéder à la citoyenneté. La famille est le premier lieu d'éducation et de citoyenneté. La nomination, il y a deux mois, d'une ministre déléguée à la famille et à l'enfance "Ségolène ROYAL" témoigne de la volonté du Gouvernement de conforter cette institution essentielle et d'accompagner les profondes évolutions qu'elle connaît aujourd'hui. L'apprentissage de la citoyenneté est aussi une mission de l'école. La création des conseils de la vie lycéenne, réunissant à parité jeunes et adultes, permettra un dialogue entre les lycéens et les équipes éducatives sur tous les sujets de leur vie quotidienne. Ils seront mis en place à la rentrée prochaine. Pour la première fois, les lycéens éliront directement et pour deux ans leurs représentants. Ces"journées citoyennes "donneront lieu à un véritable apprentissage de la démocratie. Les crédits du fonds d'aide à la vie lycéenne "soit 50 millions de francs" seront mobilisés dans le même but.
Si les jeunes doivent être rendus conscients de leurs devoirs, il faut aussi mieux les informer de leurs droits. Un guide des droits du salarié destiné aux bénéficiaires d'emplois-jeunes sera adressé dans les prochains jours à chacun des jeunes concernés. Plus largement, trop de jeunes connaissent mal les dispositifs créés pour les aider. Mis à disposition dans tous les réseaux accueillant les jeunes, un cédérom réunissant les informations sur leurs droits en matière de loisirs, de logement, de transport, de formation et d'emploi permettra d'y remédier. Il sera porté dans les meilleurs délais sur internet. Dans le domaine de la santé, Dominique GILLOT travaille à la création d'un site"web santé-jeunes " et au renforcement de la ligne téléphonique "Fil santé-jeunes".
Le mouvement associatif occupe entre l'Etat et les citoyens un espace médian où s'apprend la démocratie participative. C'est pourquoi nous encourageons les jeunes à s'engager dans les associations, en particulier en favorisant la création d'associations par les mineurs. Des difficultés juridiques "l'impossibilité pour les mineurs d'engager des dépenses" freinaient l'essor de ces dernières : il n'y a aujourd'hui que 23 associations-juniors. Ces difficultés sont maintenant levées grâce à l'action d'Elisabeth GUIGOU. Sans modifier l'âge légal de la majorité, l'adhésion au réseau national des associations-juniors "formé en 1999 autour de la Ligue de l'enseignement, de la Fédération nationale des centres sociaux et de la Confédération des maisons de jeunes et de la culture" permettra désormais aux jeunes de gérer leurs associations en engageant des dépenses dans la limite d'un seuil autorisé. Cinq millions de francs ont été dégagés pour aider à la création d'associations-juniors. Un guide pratique sera diffusé cet automne dans les lycées pour informer les jeunes des conditions dans lesquelles ils peuvent les constituer.
Il faut aussi encourager les jeunes majeurs à prendre des responsabilités dans les associations. Trop peu d'entre eux y accèdent. Votre Conseil permanent a élaboré une charte sur l'accès des jeunes aux instances statutaires des associations. Dans le cadre du partenariat entre les pouvoirs publics et les associations, je signerai sous peu une circulaire interministérielle afin de promouvoir une meilleure représentation des jeunes dans leurs organes de décision. Le ministère de la jeunesse et des sports y veille d'ores et déjà dans les conventions d'objectif qu'il établit avec les associations subventionnées.
Mesdames, Messieurs,
Faire reculer les discriminations, faire progresser concrètement l'égalité, encourager chacun à prendre part à la vie démocratique, c'est vouloir assurer à tous les jeunes leur juste place dans la République. Cette ambition est au coeur de l'action que conduit depuis 1997 ce Gouvernement. Lorsque celui-ci s'est formé, j'ai affirmé avec force notre volonté de refonder le pacte républicain avec tous les Français. En particulier avec les jeunes "avec vous.
Ce contrat renouvelé ne peut s'appuyer que sur le partage d'idées et de valeurs communes, sur la rencontre des volontés, sur l'élaboration collective de projets. Nous continuerons d'y travailler avec vous, pour mettre en uvre les objectifs que nous venons d'évoquer ensemble. Parce que chaque injustice reconnue et réparée ; chaque jeune qui remet le pied à l'étrier ; chaque responsabilité nouvelle dont vous faites la conquête retisse les liens qui forment la trame humainement ressentie et vécue du pacte qui fonde notre République.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 15 mai 2000).
C'est pourquoi je suis très heureux d'avoir été, depuis deux heures, présent à vos débats. Les thèmes en sont importants : l'information, les droits, la vie quotidienne des jeunes ; l'emploi, la formation, la citoyenneté. Ces discussions font de l'installation, aujourd'hui, du nouveau Conseil de la jeunesse un moment fort du dialogue que le Gouvernement a voulu instaurer avec les jeunes.
Je voudrais à mon tour m'adresser à vous, qui êtes des jeunes et qui représentez des jeunes, et au-delà à ceux qui dans tout le pays nous voient et nous écoutent à travers l'internet.
Nous voulons aider les jeunes à exprimer le formidable potentiel qui est le leur.
Les jeunes sont une richesse pour notre pays. Ils rassemblent une capacité d'initiative, d'innovation sociale, de générosité dont nous avons besoin pour inventer l'avenir. Plus diplômés et, en général, mieux formés que les générations précédentes, vous avez des capacités, des compétences qui veulent s'épanouir. Vous êtes, plus spontanément que beaucoup d'adultes, en prise directe avec les changements du monde, qui sont en pleine accélération. Et de récentes enquêtes d'opinion le démontrent, la majorité d'entre vous envisagent avec optimisme le futur.
Une de vos grandes forces, c'est la diversité de votre génération. C'est la diversité de jeunes qui, pour la plupart, acceptent plus naturellement que leurs aînés les différences "quelles qu'en soient l'origine ou la nature. Parce que vous avez grandi en vivant au quotidien ces différences, dans une France plurielle. C'est aussi la diversité d'individus dont le premier souci est d'acquérir leur autonomie, d'affirmer leur envie de réussir, de bâtir leur projet de vie. Les jeunes que vous êtes aujourd'hui, ce sont ceux qui militent dans des associations, ceux qui s'engagent pour la solidarité dans notre pays et dans le monde, mais aussi ceux qui se lancent avec les emplois-jeunes dans la recherche de nouveaux services, voire qui deviennent de jeunes créateurs d'entreprise.
Mais cette diversité prend aussi la forme de l'inégalité.
Et vous êtes unis dans un même refus des inégalités. Votre génération exprime collectivement une forte demande de justice. Vous ressentez très vivement les difficultés que beaucoup rencontrent dans leur formation, dans leur recherche d'emploi, dans leur vie quotidienne. Et lorsque vous revendiquez le droit au travail pour tous, le droit à la santé, au logement, à l'éducation ; lorsque vous réclamez l'égalité entre les hommes et les femmes ; lorsque vous refusez le racisme et les discriminations qui touchent souvent les jeunes en tant que jeunes, vous dites votre volonté de voir la société se réformer. Pour mieux respecter les jeunes, les reconnaître, les accueillir. Vous exprimez ainsi une aspiration à l'égale dignité de tous qui renvoie aux valeurs mêmes sur lesquelles notre République affirme être fondée.
C'est pourquoi nous voulons lutter contre ces injustices. Par là nous aiderons les jeunes à faire de cette aspiration à une dignité mieux reconnue le ferment, pour ceux qui le voudront, d'un engagement dans la cité. Ainsi pourra s'exprimer, dans sa diversité, tout le potentiel de votre génération.
Le Gouvernement s'est fixé pour cela des priorités et une méthode.
Nos priorités, ce sont l'emploi, l'éducation, la citoyenneté. Inscrite au premier rang de ma déclaration de politique générale, la lutte pour l'emploi a bénéficié aux jeunes. Un million d'emplois ont été créés depuis juin 1997, le nombre de chômeurs a diminué de 700 000. Le taux de chômage des moins de 25 ans a baissé de six points depuis cette date. La croissance retrouvée y a bien sûr largement contribué. Mais aussi nos politiques volontaristes en faveur de l'emploi. Je suis fier que les emplois-jeunes aient permis d'ouvrir des perspectives à 240 000 d'entre vous. A ceux qui ne disposent pas d'une formation, le programme TRACE "Trajet d'Accès à l'Emploi" offre une chance de trouver le chemin de l'emploi. D'ici 2002, 220 000 jeunes auront bénéficié de ce programme d'insertion.
Nous avons redonné en 1997 la priorité à l'éducation. En trois ans, le budget de l'éducation nationale est passé de 324 à 361 milliards de francs, en augmentation de plus de 11 %. Cette priorité est encore affirmée dans le collectif budgétaire dont débattra la semaine prochaine le Parlement et qui propose qu'un milliard de francs soit consacré à l'éducation. Nous amplifierons cet effort dans le cadre du programme pluriannuel destiné à renforcer les moyens de l'éducation nationale, qui trouvera sa première traduction dans le projet de loi de finances pour 2001.
Favoriser la citoyenneté, et donc la participation des jeunes à la vie démocratique demeure un axe essentiel de notre action. Il nous faut pour cela lutter, avec votre aide, contre toutes les discriminations. C'est l'objet des commissions d'accès à la citoyenneté installées récemment dans chaque département par Jean-Pierre CHEVENEMENT. Dans le même esprit, dès mardi prochain, vous pourrez appeler gratuitement un numéro, comme je m'y étais engagé, pour faire connaître les discriminations que vous aurez constatées ou rencontrées.
Notre méthode de travail est celle d'un dialogue avec les jeunes. Dès son arrivée au ministère de la jeunesse et des sports, Marie-Georges BUFFET a lancé une vaste concertation. Les 1700 rencontres locales tenues dans ce cadre ont débouché sur la rencontre nationale de Marly, les 29 et 30 novembre 1997 et sur la création, en janvier 1998, du Conseil permanent de la jeunesse et des conseils départementaux des jeunes. Chargés de suivre la mise en oeuvre des mesures arrêtées à Marly, ces conseils ont permis de nouer un vrai dialogue entre les jeunes et les institutions. Vous avez en leur sein imaginé des actions adaptées aux besoins exprimés par les jeunes. Vos conseils ont ainsi vu s'exercer une citoyenneté concrète. Et vous vous êtes largement mobilisés pour les 1000 projets du premier Festival de la citoyenneté, organisé du 18 au 25 mars de cette année.
Il faut pérenniser le cadre de ce dialogue avec les jeunes. Notre réunion de ce jour constitue le premier Conseil de la jeunesse, où le Gouvernement rencontre les représentants nouvellement désignés des conseils départementaux de la jeunesse et des organisations nationales de jeunes. La présence de nombreux ministres témoigne de l'importance que revêt pour nous ce dialogue. Ce rendez-vous sera désormais annuel et vous permettra d'avoir avec des responsables politiques des échanges directs. Ainsi vous aurez la possibilité de faire entendre vos préoccupations, vos réflexions, vos initiatives.
Nous devons aujourd'hui traduire vos aspirations et vos priorités en décisions.
C'est pourquoi nous voulons à la fois amplifier les actions entreprises et décider de nouvelles mesures.
Nous le ferons autour de trois axes : garantir un égal accès à l'emploi, assurer l'égalité des chances en préparant l'avenir, combattre les inégalités au quotidien.
Réduire l'inégalité face à l'emploi et à la formation reste notre première priorité. Trop de jeunes qui quittent l'école sans qualification sont perdus de vue par l'institution scolaire sans être pris en compte par les services chargés de l'insertion. L'accord cadre que signeront prochainement Martine AUBRY et Jack LANG permettra de suivre ces jeunes dès leur sortie du système éducatif. Les missions locales et l'ANPE seront appelées à prendre le relais de l'école. Il convient que les jeunes qui suivent des formations en entreprise soient mieux encadrés, mieux suivis, afin que ces formations débouchent sur un emploi. C'est le but du protocole national sur les périodes de formation en entreprise auquel travaille Jean-Luc Mélenchon et qui concernera les lycéens des filières professionnelles. Enfin le succès des emplois-jeunes se mesurera à notre capacité à professionnaliser et former ces jeunes. Notre objectif est bien de leur garantir un avenir, que ce soit dans l'entreprise, les associations, les collectivités publiques. C'est avec tous les acteurs de ce dispositif "élus locaux, responsables associatifs, mais aussi les jeunes eux-mêmes" que nous devons trouver les solutions appropriées. Le Gouvernement y travaille "Martine AUBRY au premier chef.
Sur le terrain de l'emploi, je voudrais faire écho à ce qui est pour les jeunes nés avant 1979 une préoccupation : l'accomplissement de leur service national. La professionnalisation complète de nos armées ne sera achevée qu'en 2002. C'est pourquoi la présence d'appelés sous les drapeaux est aujourd'hui encore nécessaire. Mais je sais quelles difficultés cette obligation peut créer pour des jeunes déjà entrés dans le monde du travail. Dès à présent, les titulaires d'un emploi stable doivent pouvoir bénéficier naturellement d'un report et s'ils répondent aux critères requis avoir l'assurance que ce report sera prolongé. En outre, le Gouvernement demandera aux commissions régionales compétentes que les critères d'octroi des reports soient interprétés de la façon la plus favorable et que les situations personnelles difficiles soient examinées avec la plus grande bienveillance. Il est également indispensable que le passage sous les drapeaux de ceux qui effectuent leur service national soit valorisé en tenant compte autant que possible de leur souhait d'affectation. Alain RICHARD, qui conduit cette importante réforme du service national, y veillera tout particulièrement.
Il faut aussi assurer, demain, aux jeunes l'égalité des chances.
Nous voulons garantir à chacun un égal accès aux nouvelles technologies. Nous ne pouvons laisser une " fracture numérique" s'instaurer entre ceux qui ont accès à l'information, source croissante de richesses, et ceux qui en seraient exclus. Pour l'éviter, nous avons accompli d'importants efforts. D'abord à l'école. Le nombre d'ordinateurs par élève a plus que doublé depuis 1997. En moyenne, chaque jour, 40 nouveaux établissements se relient à internet. En trois ans, nous aurons élevé le taux de connexion de 40 à 100 %. Et à la rentrée 2000, tous les lycées et collèges seront connectés au réseau. Il faut maintenant faciliter l'usage de ces outils et intégrer pleinement le multimédia dans la pédagogie.
Cette action ne doit pas toucher les seuls jeunes scolarisés. C'est pourquoi le Gouvernement entend offrir aux jeunes les moyens d'un accès gratuit à internet. Pour atteindre cet objectif, 600 sites du réseau information jeunesse "bureaux information jeunesse, points information jeunesse" seront d'ici la fin de l'année dotés des équipements nécessaires et leurs personnels formés. Cent de ces sites seront installés dans les quartiers concernés par la politique de la ville que conduit Claude BARTOLONE. 40 millions de francs seront consacrés à cette opération. Je serai d'ailleurs conduit prochainement à m'exprimer à nouveau sur ces sujets.
Les inégalités doivent aussi être combattues au quotidien : dans les transports, le logement, les loisirs. Des transports collectifs moins coûteux sont une juste revendication des jeunes. Nous poursuivrons notre politique de réduction des tarifs. En Île-de-France, la carte "ImaginR", créée à l'initiative de Jean-Claude GAYSSOT en partenariat avec la région, sera désormais utilisable pendant les vacances de la Toussaint, de Noël, de février et de Pâques. De plus, les jeunes que le programme TRACE aide à s'insérer sur le marché du travail bénéficieront à la rentrée prochaine de cette carte "ImaginR" avec une réduction de plus de 80% par rapport aux cartes annuelles. Dans les autres régions, je me réjouis que le groupement des autorités responsables de transport "le GART" soit également disposé à amplifier les réductions tarifaires.
En matière de logement, le Gouvernement s'attache aussi à prendre en compte les besoins spécifiques des jeunes. Conformément aux propositions de Louis BESSON, les aides au logement versées aux jeunes titulaires de contrats à durée déterminée seront majorées de 25%. En outre, le projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbain offrira un véritable statut de locataires aux résidents logés en foyers, dont beaucoup sont des jeunes.
Il faut aussi favoriser au quotidien l'accès au sport, aux loisirs, à la culture. C'est pourquoi à la demande de Marie-Georges BUFFET, et compte tenu du succès rencontré par le "coupon sport", qui permet de réduire le coût de l'adhésion aux clubs sportifs, nous doublerons l'effort budgétaire consacré à cette mesure "soit 20 millions de francs supplémentaires. La culture, c'est d'abord pour les jeunes la musique "les musiques" d'aujourd'hui. Au dernier Printemps de Bourges, j'ai retrouvé la vitalité des interprètes, la chaleur des publics, la richesse de cette culture vivante. Le Gouvernement poursuivra sa politique d'implantation de scènes de musiques actuelles sur tout le territoire. Elle permet de faire émerger de jeunes talents et de populariser de nouveaux langages musicaux. Aller au cinéma est aussi important pour beaucoup d'entre vous. Mais le cinéma a son langage, ses codes, ses techniques. J'ai demandé à Jack LANG de réfléchir à un plan qui offrirait à l'ensemble des collégiens et lycéens français une véritable éducation cinématographique. L'argent ne doit pas être un obstacle entre les jeunes et la culture. La fixation, le jeudi, d'un tarif à 50 francs ouvre ainsi à un large public l'accès aux spectacles aux théâtres nationaux. Dans le même souci, nous avons instauré un dimanche par mois la gratuité des visites des musées nationaux et des monuments historiques. Au-delà, Catherine TASCA se propose d'examiner avec les collectivités locales les moyens d'adapter au secteur culturel les formules de cartes-jeunes.
Lutter contre les inégalités, ce n'est pas seulement répondre à une exigence de justice. C'est lever les obstacles qui freinent l'intégration de certains jeunes : c'est faire comprendre à chacun qu'il peut et doit trouver sa place dans notre société.
C'est ainsi vouloir donner à tous les moyens d'accéder à la citoyenneté. La famille est le premier lieu d'éducation et de citoyenneté. La nomination, il y a deux mois, d'une ministre déléguée à la famille et à l'enfance "Ségolène ROYAL" témoigne de la volonté du Gouvernement de conforter cette institution essentielle et d'accompagner les profondes évolutions qu'elle connaît aujourd'hui. L'apprentissage de la citoyenneté est aussi une mission de l'école. La création des conseils de la vie lycéenne, réunissant à parité jeunes et adultes, permettra un dialogue entre les lycéens et les équipes éducatives sur tous les sujets de leur vie quotidienne. Ils seront mis en place à la rentrée prochaine. Pour la première fois, les lycéens éliront directement et pour deux ans leurs représentants. Ces"journées citoyennes "donneront lieu à un véritable apprentissage de la démocratie. Les crédits du fonds d'aide à la vie lycéenne "soit 50 millions de francs" seront mobilisés dans le même but.
Si les jeunes doivent être rendus conscients de leurs devoirs, il faut aussi mieux les informer de leurs droits. Un guide des droits du salarié destiné aux bénéficiaires d'emplois-jeunes sera adressé dans les prochains jours à chacun des jeunes concernés. Plus largement, trop de jeunes connaissent mal les dispositifs créés pour les aider. Mis à disposition dans tous les réseaux accueillant les jeunes, un cédérom réunissant les informations sur leurs droits en matière de loisirs, de logement, de transport, de formation et d'emploi permettra d'y remédier. Il sera porté dans les meilleurs délais sur internet. Dans le domaine de la santé, Dominique GILLOT travaille à la création d'un site"web santé-jeunes " et au renforcement de la ligne téléphonique "Fil santé-jeunes".
Le mouvement associatif occupe entre l'Etat et les citoyens un espace médian où s'apprend la démocratie participative. C'est pourquoi nous encourageons les jeunes à s'engager dans les associations, en particulier en favorisant la création d'associations par les mineurs. Des difficultés juridiques "l'impossibilité pour les mineurs d'engager des dépenses" freinaient l'essor de ces dernières : il n'y a aujourd'hui que 23 associations-juniors. Ces difficultés sont maintenant levées grâce à l'action d'Elisabeth GUIGOU. Sans modifier l'âge légal de la majorité, l'adhésion au réseau national des associations-juniors "formé en 1999 autour de la Ligue de l'enseignement, de la Fédération nationale des centres sociaux et de la Confédération des maisons de jeunes et de la culture" permettra désormais aux jeunes de gérer leurs associations en engageant des dépenses dans la limite d'un seuil autorisé. Cinq millions de francs ont été dégagés pour aider à la création d'associations-juniors. Un guide pratique sera diffusé cet automne dans les lycées pour informer les jeunes des conditions dans lesquelles ils peuvent les constituer.
Il faut aussi encourager les jeunes majeurs à prendre des responsabilités dans les associations. Trop peu d'entre eux y accèdent. Votre Conseil permanent a élaboré une charte sur l'accès des jeunes aux instances statutaires des associations. Dans le cadre du partenariat entre les pouvoirs publics et les associations, je signerai sous peu une circulaire interministérielle afin de promouvoir une meilleure représentation des jeunes dans leurs organes de décision. Le ministère de la jeunesse et des sports y veille d'ores et déjà dans les conventions d'objectif qu'il établit avec les associations subventionnées.
Mesdames, Messieurs,
Faire reculer les discriminations, faire progresser concrètement l'égalité, encourager chacun à prendre part à la vie démocratique, c'est vouloir assurer à tous les jeunes leur juste place dans la République. Cette ambition est au coeur de l'action que conduit depuis 1997 ce Gouvernement. Lorsque celui-ci s'est formé, j'ai affirmé avec force notre volonté de refonder le pacte républicain avec tous les Français. En particulier avec les jeunes "avec vous.
Ce contrat renouvelé ne peut s'appuyer que sur le partage d'idées et de valeurs communes, sur la rencontre des volontés, sur l'élaboration collective de projets. Nous continuerons d'y travailler avec vous, pour mettre en uvre les objectifs que nous venons d'évoquer ensemble. Parce que chaque injustice reconnue et réparée ; chaque jeune qui remet le pied à l'étrier ; chaque responsabilité nouvelle dont vous faites la conquête retisse les liens qui forment la trame humainement ressentie et vécue du pacte qui fonde notre République.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 15 mai 2000).