Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur l'amélioration du système de prévention des risques professionnels et la meilleure prise en compte des nouveaux risques tant au niveau de leur prévention que de leur réparation, Paris le 14 février 2002.

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Circonstance : Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels à Paris le 14 février 2002

Texte intégral

Monsieur le Président
Mesdames, Messieurs,
Le combat permanent pour l'emploi ,que nous avons encore renforcé ces dernières semaines du fait du ralentissement conjoncturel que notre pays traverse, comme tous nos partenaires, doit aller de pair avec notre volonté commune de tout faire pour assurer à chacun de nos concitoyens la préservation de sa santé au travail et le bénéfice de conditions de travail de qualité.
Je vous l'ai dit l'an dernier, la politique de prévention des risques professionnels s'inscrit dans la lutte que je mène pour améliorer la protection de chacun contre les risques de la vie. Cette politique avait besoin d'évoluer. C'est ce que nous avons commencé à faire cette année.
D'un côté, nous avons fait voter dans la loi de modernisation sociale des dispositions essentielles qui concernent les services de santé au travail, en particulier, la mise en place de la pluridisciplinarité mais aussi le principe d'indépendance des médecins du travail et des intervenants en santé du travail. De l'autre, les organisations professionnelles et syndicales, signataires de l'accord du 13 septembre, ont progressé dans la mise en oeuvre de cet accord et commencé à dessiner ce que sera à l'avenir l'intervention des partenaires sociaux dans le champ de la prévention des risques professionnels.
Dans ce contexte, je souhaite ce matin insister sur les deux grands objectifs que nous devons nous fixer cette année :
- améliorer l'efficacité du système de prévention
- et mieux prendre en compte les nouveaux risques tant au niveau de leur prévention que de leur réparation.
I- Améliorer l'efficacité du système de prévention des risques professionnels
J'évoquerai successivement le renforcement du rôle des Comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la réforme de la médecine du travail et l'introduction de la pluridisciplinarité dans les services de santé au travail.
Après la catastrophe de Toulouse et vingt ans après la loi de Décembre 1982 créant les CHSCT, il est nécessaire de réfléchir aux évolutions nécessaires de cette institution.
L'explosion de l'usine Grand Paroisse de Toulouse est d'abord un accident du travail. Au-delà d'une mobilisation immédiate des services déconcentrés, à laquelle j'ai veillé personnellement, pour que des contrôles de sites à hauts risques permettent d'éviter le renouvellement d'une telle catastrophe, j'ai souhaité tirer tous les enseignements de cet événement dramatique.
C'est pourquoi, j'ai engagé un travail de réflexion en concertation étroite avec vous. Ce travail très approfondi et partant des faits, je tiens à le rappeler, a été mené dans le cadre d'un groupe ad hoc animé par Monsieur Michel ROUX, président honoraire de la section sociale du Conseil d'Etat, que je tiens à remercier tout particulièrement.
De nombreuses propositions concrètes en ont résulté. Plusieurs d'entre elles ont directement alimenté le volet social du projet de loi de maîtrise des risques industriels qui a été présenté hier en Conseil des Ministres par le Ministre de l'Aménagement du territoire et de l'environnement. Ces propositions s'ordonnent autour des deux idées force qui ont émergé des travaux du groupe, le renforcement nécessaire du rôle des représentants du personnel dans les entreprises à risques, et la maîtrise nécessaire des risques potentiels que représente l'intervention sur ces sites d'entreprises extérieures. Il comprend aussi des avancées importantes sur la formation des salariés et des représentants du personnel en matière de sécurité, sur l'obligation pour les entreprises à risques de disposer de services de secours mobilisables en permanence et enfin sur la nécessaire vigilance en ce qui concerne le statut des personnels recruté sur des postes à risques.
Ce projet, qu'il était indispensable d'élaborer rapidement afin de répondre aux demandes fortes qui se sont exprimées au travers du débat national qui s'est déroulé à la fin de l'année dernière, est bien en phase avec les conclusions de la commission de l'Assemblée Nationale qui a remis son rapport il y a quelques jours.
Je veux vous indiquer qu'à mon sens, ce premier travail n'épuise pas la réflexion plus globale que nous devons avoir ensemble sur les missions et les moyens des CHSCT dans l'ensemble des entreprises. Les CHSCT, parce qu'ils sont regroupent l'ensemble des acteurs de la prévention au sein et hors de l'entreprise, constituent un maillon essentiel de notre système de prévention des risques professionnels. Nous aurons donc à examiner comment nous pouvons encore améliorer son efficacité.
Tout autant que les CHSCT, la médecine du travail requiert notre attention.
Je m'étais engagée l'année dernière à prendre les mesures rendues nécessaires par la situation extrêmement préoccupante des effectifs de médecins du travail, répondant en cela à l'interpellation des signataires de l'accord du 13 septembre.
La loi de modernisation sociale contient les deux mesures indispensables de régularisation des médecins qui exercent les fonctions de médecins du travail sans posséder les diplômes requis et de possibilité de reconversion des médecins de ville qui souhaiteraient s'orienter vers la médecine du travail.
J'ai en même temps demandé que la régionalisation de l'internat européen soit mise en place dès que possible. Nous sommes en train d'examiner cela avec mon collègue de l'Education Nationale.
Qu'il soit bien clair entre nous que ces deux mesures à caractère exceptionnel, ainsi la reconversion est limitée à cinq ans, s'imposent à nous du seul fait de la grave pénurie actuelle de médecins du travail dans les services. Elles n'ont pas vocation à se substituer aux mécanismes de recrutement normaux des spécialistes que sont les médecins du travail. En second lieu, j'ai expressément demandé que la formation qui sera dispensée à ces médecins soit de qualité et qu'elle soit sanctionnée par des épreuves qui permettent d'apprécier les capacités des médecins concernés à exercer ces fonctions particulièrement exigeantes. J'ai souhaité que la consultation sur les projets de décret soit étendue aux représentants des internes de médecine du travail et à leurs enseignants. Cette concertation est en cours et devrait déboucher rapidement, nous permettant ainsi de mettre en place ces dispositifs pour la rentrée universitaire.
Le vote de la loi de modernisation sociale permet également de donner de bonnes bases à la réforme de la médecine du travail qui est désormais sur les rails.
L'indépendance des médecins du travail a été inscrite dans la loi, en même temps que celle des intervenants en santé au travail dans le cadre de la pluridisciplinarité. Des mesures précises sont venues compléter le dispositif actuel qui garantit cette indépendance.
Nous avons devant nous un grand chantier réglementaire dont vous avez pu commencer à voir les premiers éléments. Il nous faut faire évoluer l'organisation, le fonctionnement des services de santé au travail et renforcer le contrôle social de ces services. Il nous faut également réfléchir au temps médical. L'accord du 13 septembre prévoit le passage à une périodicité de 24 mois de la visite médicale hors surveillance renforcée. Un accord de réduction du temps de travail vient d'être signé dans les services inter-entreprises. Et j'ai la préoccupation que le tiers-temps des médecins du travail soit plus effectif que ce qu'il n'est souvent aujourd'hui. Enfin, la mise en oeuvre de la pluridisciplinarité aura des conséquences sur les conditions dans lesquelles s'exerce la mission des médecins du travail. Nous devons avoir ce débat ensemble afin de trouver les bons équilibres. C'est pourquoi, je souhaite que le premier train de mesures réglementaires porte sur le fonctionnement des services et que nous prenions le temps de la réflexion sur cette notion de temps médical.
J'avais souhaité l'année dernière qu'un débat soit organisé au sein du Conseil supérieur sur la notion d'aptitude médicale.
Plusieurs réunions se sont tenues. Elles ont fait apparaître des positions diverses sur ce qu'il convient de faire. Entre la suppression de cette notion ou son maintien, la gamme des propositions est très étendue.
Surtout, ces premiers échanges ont montré qu'à travers cette notion, ce sont les missions elles-mêmes des médecins du travail qui sont en débat. Dans ces conditions, il me paraît indispensable que cette discussion se poursuive en prenant en compte l'ensemble des contributions existantes, parmi lesquelles l'excellent travail réalisé par un groupe de médecins inspecteurs régionaux, et qu'elle accompagne la préparation des décrets, afin d'éclairer les choix que nous allons faire.
C'est dans ce cadre qu e le litige autour de l'avis de non contre-indication à l'exposition aux produits cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction trouvera, je le souhaite, à se résoudre, indépendamment du contentieux pendant sur ce sujet.
L'obligation de mettre en place des services de santé au travail pluridisciplinaires est maintenant inscrite dans le code du travail
Il s'agit d'une évolution indispensable pour aborder la multiplicité et la complexité des facteurs de risque pour la santé en milieu de travail.
L'Etat a ainsi défini un objectif : dans toutes les entreprises doit se développer une approche de la prévention à la fois technique, médicale et organisationnelle. Il a également tracé, en s'appuyant sur vos réflexions, un cadre concernant le recours aux compétences non médicales.
Il s'agit maintenant de faire vivre cette évolution et de bâtir progressivement ces nouveaux services de santé au travail qui intégreront ces compétences nouvelles, qu'elles proviennent directement des structures existantes de prévention ou indirectement par le biais des procédures d'habilitation que l'on mettra en place.
L'amélioration de notre système de prévention des risques professionnels passe aussi par des méthodes nouvelles d'intervention
J'en évoquerai brièvement trois ce matin.
Il s'agit d'abord de l'évaluation des risques .
L'obligation de procéder à une évaluation des risques et à l'actualiser régulièrement aura des conséquences très importantes à terme sur les politiques de prévention des entreprises. Le cadre juridique a été fixé, mais chacun sait ici que l'existence de règles n'a jamais suffit à assurer leur respect. Encore faut-il qu'elles soient comprises, acceptées, que les acteurs chargés de leur mise en oeuvre se les soient appropriées. C'est la phase qui est devant nous, jusqu'au mois de novembre où l'obligation deviendra effective.
Profitons de cette période de quelques mois pour faire connaître cette nouvelle approche, pour créer une vraie dynamique au sein des entreprises afin que l'application de la nouvelle règle permette un réel progrès dans la prévention des risques.
C'est pourquoi je souhaite que la circulaire préparée par mes services sur ce sujet puisse encore s'enrichir de vos réflexions jusqu'en avril. Il est en effet important qu'à cette date le cadre soit fixé pour permettre à chacun, services déconcentrés du Ministère, directions d'entreprises, représentants du personnel, et à l'ensemble des acteurs de la prévention d'être près à temps.
Nous utiliserons également ce délai pour réfléchir à un dispositif d'appui-conseil en direction des petites et moyennes entreprises, associant les représentants du personnel, afin de les aider à mettre en oeuvre dans de bonnes conditions cette importante réforme.
Le deuxième sujet de méthode concerne la mise en place des observatoires régionaux prévus par l'accord du 13 septembre.
Je veux d'abord redire devant vous que le Gouvernement se félicite de la volonté que les signataires de l'accord ont exprimé de renforcer leur intervention,et en même temps accroître leurs responsabilités ,dans le champ de la prévention des risques professionnels. Je sais que cette volonté est également partagée par les organisations syndicales qui n'ont pas paraphé cet accord.
Ce renforcement du rôle des partenaires sociaux va se concrétiser en partie dans la mise en place des observatoires régionaux. Nous aurons donc à trouver les modes de collaboration les mieux adaptés entre ces observatoires et les services de l'Etat. Je souhaite que, comme cela était prévu dans l'accord, cette discussion puisse se dérouler dans les prochaines semaines.
Mais il va de soi que le choix de la stricte parité fait par les signataires, pour la composition des conseils d'administration, et la proposition d'association des directeurs régionaux du travail aux commissions consultatives, n'épuisent pas la question de la coordination nécessaire de l'Etat et des interlocuteurs sociaux sur les orientations politiques en matière de santé et de sécurité au travail. Parallèlement à l'installation des observatoires, je demande aux directeurs régionaux de travailler à la mise en place de structures pour permettre une réelle coordination de la politique de prévention des risques professionnels prenant en compte les missions d'ordre public sous l'impulsion de l'Etat et les priorités retenues en ce qui les concerne, par les représentants des employeurs et des salariés.
Enfin, l'amélioration du système de prévention des risques professionnels passe aussi par des évolutions dans la composition, le fonctionnement et les missions de votre Conseil supérieur. Je souhaite que votre Président puisse me faire des propositions d'évolution d'ici la fin du mois d'avril, après avoir recensé vos propositions .
II- Il faut mieux prendre en compte les nouveaux risques et améliorer notre système de réparation.
Je limiterai mon propos à quelques réflexions sur l'approche que nous devons avoir pour traiter ces nouveaux risques, sur la portée des mesures relatives au harcèlement moral qui ont été votées dans la cadre de la loi de modernisation sociale et enfin sur la nécessaire réforme de notre système de réparation.
Notre approche des nouveaux risques et notamment des risques chimiques
Nous serons conduits dans les mois et les années qui viennent à prendre beaucoup de décisions sur des valeurs limites d'exposition à des produits dangereux qui seront contraignantes.
Je voudrais vous faire part de l'approche qui sera celle du gouvernement qui tire les enseignements du drame que vivent quotidiennement de nombreux salarié victimes de l'amiante . Nous avons, bien sûr, le souci d'une protection maximale de la santé et de la sécurité des travailleurs, mais nous sommes en même temps attachés à la cohérence des décisions que l'on va prendre.
Deux cas peuvent se présenter :
lorsque les données scientifiques sont incertaines , notre position doit concilier tout à la fois le souci de la cohérence (la sévérité des mesures de protection prises doit se fonder sur les connaissances scientifiques qui permettent de classer la dangerosité des produits), mais aussi celui de l'ouverture à toutes les informations scientifiques nouvelles.
Ceci est notamment le cas des éthers de glycols. Le ministère a mis en place le niveau de protection le plus élevé possible notamment en obligeant à la substitution dès que cela est techniquement possible. Le ministère n'a connaissance à ce stade d'aucune nouvelle donnée validée justifiant de réviser le plan fondé sur l'expertise collective de l'INSERM de 1999. Les mesures réglementaires prises n'ont donc pas lieu d'être modifiées pour l'instant.
En revanche, le ministère promeut une logique de veille. En conséquence, des études complémentaires sont en cours. Par ailleurs, j'ai demandé que soit organisée au début du deuxième trimestre 2002 une réunion d'échanges de connaissances entre les experts scientifiques, les partenaires sociaux et l'administration.
Toute nouvelle donnée scientifique validée par les experts sera prise en compte pour ajuster, si besoin, le plan d'action. La question de l'interdiction -posée par certains- ferait alors partie des possibilités.
Lorsque les données scientifiques sont disponibles et validées, le ministère prend alors en compte les dernières données scientifiques.
Tout autre critère de décision est susceptible de mettre en jeu, nous le savons bien, la responsabilité civile de l'Etat. Je propose de retenir les valeurs les plus protectrices, corrélées au niveau de risque connu.
Dans la mesure où ces décisions ont des répercussions en terme d'emploi - en particulier pour les salariés dont le taux d'exposition aux risques justifiera un changement d'emploi-, des mesures d'accompagnement seront mises en place pour permettre aux salariés concernés d'assurer à temps leur reconversion et aux entreprises de prévoir les mouvements de personnel nécessaire.
Deux cas se présentent aujourd'hui : le plomb (pour lequel il s'agit de s'appuyer sur les recommandations de l'OMS) et les poussières de bois (sur l'étude de l'INSERM de décembre 2001).
Les décisions qui seront précisées dans ces prochains jours sur ces deux cas seront conformes à l'approche que je viens de décrire. Naturellement ces décisions nécessitent une concertation approfondie au sein du Conseil Supérieur de la prévention des risques professionnels mais aussi avec les professions concernées afin d'évaluer précisément et d'anticiper les conséquences de ces décisions
L'interdiction du harcèlement moral au travail traduit une évolution majeure dans la prévention des risques professionnels
La prise en compte du harcèlement moral dans le champ de la santé au travail est le symbole de l'intégration dans le domaine des conditions de travail des aspects psycho-sociaux du travail et met l'accent sur la globalité de la santé qu'elle soit physique ou mentale. À cette occasion, le champ de compétence du CHSCT a été élargi à la santé mentale. C'est un champ très important et très vaste qui s'ouvre devant nous qui concerne l'ensemble des acteurs et des instances de prévention des risques professionnels de l'entreprise, qu'il s'agisse des chefs d'entreprise bien sur, des services de santé au travail, mais aussi des représentants du personnel. Les questions révélées par la dépression, voire le suicide, le stress, les situations de harcèlement sur le lieu de travail ne sont pas du seul domaine des individus. Elles concernent d'abord les conditions de travail au sens large, l'organisation du travail elle-même souvent. Telle doit être notre approche de ces phénomènes. La loi de modernisation sociale donne les outils juridiques qui manquaient pour aborder ces questions dans l'entreprise. Mais les efforts de prévention sont devant nous de même d'ailleurs que la définition d'une juste réparation des dommages subis par les salariés concernés.
J'en viens, pour conclure, à la nécessaire évolution de notre système de réparation.
La réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles (ATMP) a beaucoup mobilisé le ministère de l'emploi et de la solidarité ces derniers mois, et nous y travaillerons encore cette année, avec l'ensemble des acteurs concernés.
Le rapport que le Professeur MASSE m'a remis en juin dernier sur cette question l'a montré avec une grande clarté, qui n'a été contestée par personne : le système de réparation des ATMP hérité des lois fondatrices de 1898 doit aujourd'hui être repensé dans sa totalité. Le principe de la réparation forfaitaire sur lequel il repose depuis plus d'un siècle ne s'est pas adapté aux évolutions récentes du droit de l'indemnisation, et il ne correspond plus aux attentes actuelles de la société. Pour ces raisons, le Professeur MASSE juge que l'intégration par le système d'indemnisation des ATMP des principes de la réparation intégrale est inévitable.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire devant le Parlement lors des débats autour du PLFSS 2002, je partage ce constat. Les suites de l'accident de l'usine AZF à Toulouse en ont dramatiquement souligné la pertinence.
C'est la raison pour laquelle cette loi de financement de la sécurité sociale comprend un grand nombre de mesures d'amélioration du système de réparation des ATMP : abaissement du seuil d'accès au système dérogatoire de reconnaissance des maladies professionnelles; instauration d'un mécanisme d'indexation pour les indemnités en capital versées aux victimes et revalorisation immédiate de leur barème de 10%; assouplissement des conditions d'ouverture de la majoration pour tierce personne; revalorisation de 10 points de la rente d'orphelin et de la rente d'ayant-droit et élargissement de cette dernière aux concubins et aux partenaires d'un PACS. Le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante a été doté, pour sa première année de fonctionnement de 3,65 Mds de F. par le PLF et le PLFSS. Son premier conseil d'administration sera installé très prochainement, permettant le démarrage effectif de son activité.
Autant de mesures qui concourent à améliorer l'indemnisation offerte aux victimes et à le rapprocher des mécanismes du droit commun de la réparation.
Elles témoignent, je crois, de la volonté sans équivoque de ce gouvernement de se saisir de cette question.
Au-delà de ces mesures importantes mais qui demeurent ponctuelles, c'est à une réforme d'ensemble du système qu'il faut s'atteler. Car, si la logique du passage d'une réparation forfaitaire à la réparation intégrale est certainement "inévitable", il est également clair qu'elle requiert un investissement préparatoire très important. C'est, en effet, tout le fonctionnement du dispositif, dans sa réglementation comme dans son organisation et son fonctionnement quotidien, qu'il faut revoir.
C'est précisément pour préparer cette réforme d'ensemble que j'ai demandé en octobre dernier à Michel YAHIEL d'animer un groupe de travail réunissant l'ensemble des administrations concernées, en y associant les partenaires sociaux, gestionnaires de la branche ATMP, et les associations victimes. Le groupe travaille actuellement sur les enjeux juridiques, financiers, institutionnels et médicaux soulevés par le passage à la réparation intégrale. Il doit me rendre ses conclusions à la fin du mois prochain.
Les sujets que soulève une telle réforme sont extrêmement complexes. Il est illusoire de penser que, en lui-même, ce groupe de travail pourra tous les épuiser. Mais ils nous permettront de la préparer, et d'organiser pour les mois à venir le travail et les concertations nécessaires afin de faire de ce projet l'une des grandes réformes de la prochaine législature.
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, je voudrais vous faire part de ma conviction que nous sommes entrés dans une période qui sera marquée par une évolution majeure de notre système de prévention des risques professionnels.
La persistance d'un niveau élevé d'accidents du travail et de maladies professionnelles, même si, bien heureusement, l'augmentation récente n'est pas proportionnelle à l'accroissement du volume d'heures travaillées du fait de l'activité économique soutenue, les catastrophes sanitaires que représentent les conséquences de l'exposition à l'amiante de très nombreux travailleurs ou le terrible accident de Toulouse nous appellent à des efforts accrus pour mieux prévenir les risques professionnels.
Les solutions vers lesquelles nous devons nous diriger pour améliorer notre système de prévention des risques professionnels apparaissent de plus en plus clairement : développer un système de veille performant, mieux définir les missions de chacun dans le cadre nouveau qui résultera de l'évaluation des risques et de la pluridisciplinarité des services de santé au travail, améliorer substantiellement notre système de réparation.
Les évolutions nécessaires seront le résultat de notre travail commun, dans le respect des compétences et des prérogatives de chacun. Pour sa part, ce gouvernement est soucieux d'encourager les initiatives des partenaires sociaux sur ce champ tout en assumant les responsabilités qui sont les siennes dès lors que les questions abordées relèvent de l'ordre public social. Je ne doute pas que nous trouvions ensemble les voies de cet équilibre indispensable.
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.sante.gouv.fr, le 19 février 2002)