Déclaration de M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur la mise en place du plan de restructuration arboricole, le renforcement de la performance des exploitations fruitières et le rôle de l'interprofession et de l'organisation économique, Saumur le 8 février 2002.

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Circonstance : Congrès de la fédération nationale des producteurs de fruits à Saumur (Maine-et-Loire) le 8 février 2002

Texte intégral

Monsieur le Président,
C'est pour moi un grand plaisir de conclure les travaux de votre congrès 2002 au nom de Jean GLAVANY, Ministre de l'Agriculture et de la Pêche, qui m'a demandé de le représenter aujourd'hui. Il regrette de ne pas pouvoir être présent aujourd'hui après NIMES et IRIGNY et m'a demandé de vous adresser un message chaleureux.
Je suis heureux que vous ayez salué dans votre intervention, Monsieur le Président, les résultats obtenus au cours de ces 3 dernières années dans le cadre d'une concertation étroite entre le ministre de l'agriculture et les partenaires professionnels. L'objectif commun était de valoriser les atouts de vos productions, d'apporter des réponses aux difficultés rencontrées et d'optimiser les concours publics nationaux et européens afin de pouvoir avancer sur des projets. Des avancées ont été obtenues et il convient maintenant de les inscrire dans la durée.
Je vais suivre l'ordre des 4 thèmes que vous avez vous-même évoqués.
I - Je commencerai par le plan de restructuration arboricole décidé en octobre 2000 par Jean GLAVANY et doté de 91 millions d'euros sur 4 ans, soit 23 millions d'euros par an.
I-1 L'an dernier, pour sa première année d'application, ce plan a concerné 1.400 exploitations et a permis de restructurer 4.500 ha : il n'est donc pas pour rien dans le déroulement de la campagne que nous connaissons.
Pour cette année, les circulaires des aides à la modernisation et à la cessation d'activité ont été adaptées à la lumière de l'expérience acquise et des remarques et propositions de chacun.
Si l'an dernier, le ministre a dû faire des choix compte tenu du nombre des dossiers reçus, cette situation ne se renouvelle pas cette année puisque toutes les demandes parvenues à l'ONIFLHOR pourront être satisfaites. Naturellement, conformément aux engagement pris, les dossiers qui n'ont pu être satisfaits l'an dernier seront acceptés cette année. Le processus d'adaptation du verger français va donc se poursuivre et s'accélérer.
La plus grande cohérence doit être assurée entre le volet "modernisation" du plan et les actions "rénovation du verger", qu'elles soient financées par l'ONIFLHOR ou par les programmes opérationnels. Les comités économiques ont en ce domaine un rôle majeur pour favoriser une telle approche.
En effet, les concours publics à votre filière ne peuvent plus être appréciés en fonction des seules lignes budgétaires de l'office alors même que des sources de financement nouvelles, nationales ou européennes (CTE, OCM, DOCUP), sont apparues et vont monter en puissance : vous devez vous saisir de ces outils qui sont des instruments d'avenir. Et ce d'autant plus que vos produits sont consommés directement, permettant de valoriser ainsi leur origine et leur lien au terroir.
Le véritable défi auquel votre fédération me paraît confrontée consiste à faciliter la mise en cohérence de l'ensemble de ces outils de financement pour le mettre à disposition des producteurs dans le cadre de projets collectifs afin de leur conserver au maximum la valeur ajoutée.
Le recours aux contrats territoriaux d'exploitation est essentiel pour accompagner cette démarche. Vous relevez des difficultés. Les services du ministère de l'agriculture sont naturellement toujours à votre disposition pour chercher à y apporter des solutions.
I-2 L'autre axe majeur du plan arboricole est le développement des industries de transformation des fruits afin de mieux valoriser les produits de seconde qualité. Un projet a pu être financé dès cette année, il tourne, montrant ainsi que le dispositif proposé aux opérateurs est bel et bien en place : à eux de saisir toutes les nouvelles opportunités ainsi offertes ! D'autres projets sont en cours d'élaboration dans différentes régions. L'Etat sera naturellement à vos côtés pour les mener à leur terme pour autant qu'ils répondent à deux objectifs : un partenariat fort avec l'amont et la garantie d'une viabilité économique sur le long terme.
Je partage par ailleurs votre conviction de la nécessité d'une meilleure structuration de l'offre au travers les regroupements d'entreprises et d'organisations de producteurs. Il reste toutefois à s'accorder sur les modalités les plus efficaces et les plus conformes à la législation communautaire d'un tel accompagnement. Pour cela, un outil existe qui a fait ses preuves dans le passé : le Fonds de structuration des fruits et légumes (FSFL). Pourquoi ne pas le renforcer afin qu'il puisse répondre à la production comme à la transformation. Dès que nous aurons obtenu des garanties de la Commission européenne sur la conformité au droit communautaire de cet instrument, un groupe de travail devra proposer les modalités les plus appropriées du nouveau dispositif. Nous examinerons également avec Bruxelles les avancées qui pourraient être obtenues au titre de l'OCM, en matière d'incitation au regroupement des organisations de producteurs : je sais que la Présidence espagnole est très intéressée par cette question.
I-3 En 2001, vous avez fait de la connaissance de la production pour une meilleure maîtrise quantitative et qualitative l'un de vos axes majeurs de travail. Vous le savez, il s'agit pour Jean GLAVANY d'un enjeu essentiel et d'une orientation constante dans le débat européen.
C'est ainsi que notre délégation a beaucoup insisté sur ce point lors de la discussion du récent rapport de la Commission sur l'évolution de l'OCM "fruits et légumes". Elle le fera à nouveau à l'occasion de la réunion d'un groupe du Conseil sur l'OCM que la Présidence espagnole organise à Valence à la mi-avril. Dans son courrier du 17 décembre 2001 au commissaire FISCHLER, le Ministre a souligné l'importance de ce sujet. Je me réjouis que dans sa réponse le Commissaire ait très bien accueilli les propositions de Jean GLAVANY, ce qui augure bien de nouvelles avancées.
Au plan national, le sujet s'éclaircit. Sur le plan juridique, le recours à une extension des règles apparaît comme la voie le plus adaptée. Elle pourrait être mise en uvre au niveau des comités de bassin, ou à celui de l'interprofession, cette dernière option paraissant plus opérationnelle.
Sur le plan technique, une étude a été engagée à la demande du Ministre : les orientations qui viennent d'être dégagées par le cabinet concerné plaident pour une utilisation rationnelle des dispositifs déjà existants (n° PACAGE, par exemple). Je crois utile que, sur la base du rapport CYNDINIS, nous poursuivions l'analyse pour en extraire les méthodes les plus appropriées pour le développement du système. Un groupe de travail associant l'administration centrale et territoriale, l'ONIFLHOR et les professionnels devrait être constitué à cet effet.
II - Vous évoquez ensuite différents chantiers indispensables pour renforcer la performance de vos exploitations.
II-1 Vous avez besoin de variétés adaptées aux besoins des consommateurs et à vos contraintes de production. Cela passe par une attention particulière apportée à la saveur des fruits, c'est essentiel, mais aussi à la salubrité des arbres que vous plantez et à leur résistance aux maladies. Des efforts importants doivent être faits dans ce domaine pour améliorer la situation sanitaire du verger français et éviter une situation à l'origine d'une dérive budgétaire préoccupante.
Il faut revoir notre orientation. Je vous propose qu'en liaison avec la direction générale de l'alimentation, nous puissions travailler avec votre fédération et les pépiniéristes naturellement pour éviter l'apparition de nouveaux foyers par une amélioration des garanties offertes par le matériel de multiplication. Au-delà, la prévention et une incitation majorée pour une intervention précoce doivent être privilégiés.
II-2 Vous avez évoqué les aléas conjoncturels inhérents à vos marchés, Jean GLAVANY vient d'intervenir auprès du commissaire FISCHLER pour lui faire des propositions concrètes concernant la mise en place de dispositifs d'assurance-revenu ou d'assurance-récolte. Je vous l'ai dit, la Commission semble disposer à avancer sur cette question.
Au plan national, nous avons commencé d'avancer sur ce dernier sujet, dans le droit fil du rapport BABUSIAUX. C'est ainsi que le Gouvernement a accepté le 19 novembre 2001 un amendement du député Gilbert MITTERRAND créant un régime incitatif d'épargne de précaution. Il permettra d'aider les exploitants agricoles à se prémunir contre des baisses conjoncturelles de revenus. Cette mesure prendra la forme d'une déduction du bénéfice imposable des sommes épargnées, selon des modalités qui favoriseront les petites exploitations.
Par ailleurs, la procédure d'indemnisation par le fonds des calamités sera simplifiée afin d'être plus rapide et d'atténuer les effets de seuil. Un projet de décret en ce sens est examiné par la Commission nationale des calamités agricoles aujourd'hui.
Enfin, l'adaptation de l'assurance récolte afin de prendre en compte de nouveaux risques, notamment le gel en arboriculture, est en cours. Ainsi, les primes d'assurances pourront être prises en charge partiellement pendant la période de montée en puissance des nouveaux contrats. 7.6 Meuros sont réservés cette année à ces actions sur le budget du Ministère.
Les choses avancent donc sur ces dossiers aussi.
II-3 Les questions concernant l'emploi et les charges sont essentielles pour votre profession. Jean GLAVANY en est conscient. C'est ainsi que des mesures d'allégement de charges importantes ont été prises pour les travailleurs occasionnels de votre filière. Elles représentent un montant de 25 Meuros pris en charge par la solidarité nationale.
Au plan européen, l'équité des conditions de concurrence entre producteurs des Etats membres suppose que l'effort de réduction des coûts de production s'effectue dans le respect le plus strict des règles sociales de chaque Etat membre. Les organisations de producteurs qui n'auraient pas respecté le droit social de leur pays d'établissement doivent pouvoir être exclues des aides communautaires. L'éco-conditionnalité existe pour encourager la prise en compte de l'environnement. Jean GLAVANY a saisi le Commissaire FISCHLER pour lui demander l'introduction de la socio-conditionnalité pour inciter à la mise en uvre d'une véritable Europe sociale dans ce secteur. La réponse du Commissaire laisse espérer des avancées sur ce point essentiel pour la France.
La mise en uvre de la loi sur les 35 heures va entraîner des modifications importantes dans l'organisation du travail sur vos exploitations. Des solutions pragmatiques pourront être proposées dans le droit fil des pistes ouvertes lors du séminaire tenu le 21 décembre 2001 pour répondre aux difficultés susceptibles de se poser dans un esprit de dialogue et de recherche de compromis. Toutefois, pour résoudre le problème de recrutement qui se pose dans vos filières, il faut rechercher ensemble comment rendre le travail plus attractif et mieux valorisé et non l'inverse. Un accord a été signé avec l'ANPE le 16 janvier 2002. Naturellement, les services du ministère sont à votre disposition pour avancer ensemble sur ces questions.
III - Vous évoquez en dernier lieu le rôle de l'interprofession et de l'organisation économique.
III-1 En ce qui concerne l'interprofession, je me réjouis comme vous du chemin parcouru depuis 2000 sous l'égide du président LAFITTE.
Le projet interprofessionnel 2000-2006 élaboré à cette occasion, la constitution de groupes de suivi par produit pour aider au dialogue entre familles, la réflexion initiée pour une segmentation stratégique, la campagne de communication sur les bienfaits des fruits et légumes sont autant de signes d'une démarche constructive.
L'Etat y apportera son appui, pour peu que chacun y mette du sien en s'appropriant le projet interprofessionnel. Enfin, je me réjouis de voir que les réflexions sur le rapprochement entre les interprofessions "frais" et "transformé" avancent.
III-2 S'agissant enfin de l'Organisation économique, le Ministre a voulu depuis son arrivée rue de Varenne encourager l'action collective, tant il est convaincu que le regroupement et l'organisation de notre offre représentent la condition sine qua non du succès de votre filière.
Tel est le sens de la politique visant à réserver les concours publics nationaux aux producteurs adhérents de l'organisation économique, des aménagements apportés à l'automne 2000 pour renforcer les attributions des comités économiques, de la réforme de l'OCM voulue et portée par la France en novembre 2000 et des simplifications qui lui ont été apportées au printemps et à l'été 2001.
Par ailleurs, le Ministre a précisé dans son courrier du 17 décembre 2001 au commissaire FISCHLER dans quel sens continuer à améliorer l'OCM : simplification, aménagement et clarification des critères de reconnaissance des organisations de producteurs afin de les ouvrir au plus grand nombre, socio-conditionnalité des aides communautaires, assouplissement des modalités d'extension des accords interprofessionnels. Il convient en fait que de nouveaux producteurs rejoignent l'organisation économique, non sous la contrainte mais parce qu'ils sont convaincus que c'est utile.
Au plan national, nous travaillons déjà sur les critères de reconnaissance des organisations de producteurs qui tout en respectant scrupuleusement les règles européennes permettent de prendre en compte au maximum la diversité de vos réalités.
III-3 L'organisation économique doit également se mobiliser sur des projets. Son ciment ne peut être uniquement l'utilisation de crédits publics. C'est ainsi que Jean GLAVANY a voulu rationaliser l'utilisation des concours publics ouverts au titre des plans de campagne, les rendre plus efficaces économiquement et plus transparents. Il faut donc les faire évoluer rapidement. Vous savez que, en l'état, ces instruments sont menacés à court terme. Pour autant, des instruments de gestion de crise seront toujours nécessaires en raison des particularités de vos marchés. Je me réjouis donc que vous engagiez une réflexion sur des outils alternatifs, répondant ainsi à la demande que vous avez adressée le ministre le 11 avril 2001.
Vous le voyez, Monsieur le Président, les choses avancent sur tous les fronts que vous avez évoqués.
Les structures de l'organisation économique constituent des lieux de dialogue intéressants. Toutefois, il est toujours possible d'améliorer les choses, en terme de service apporté aux organisations de producteurs, de transparence dans leur organisation et dans leur fonctionnement, de partage équilibré des tâches entre les missions d'animation des uns et le rôle commercial des autres.
A l'heure où tant de mutations marquent votre filière, la définition du rôle des comités de bassin et des sections nationales " produit " constitue certainement l'un des enjeux majeurs des mois à venir. Si vous le souhaitez, une mission de l'inspection générale peut contribuer à rechercher avec vous les moyens d'avancer sur ces questions.
Pour conclure, je dirai Monsieur le Président que beaucoup reste à faire. Il nous faut consolider, renforcer, rationaliser ce qui a été obtenu - plan arboricole, connaissance de la production, réforme de l'OCM et des fonds structurels, CTE, interprofession - et permettre que ces nouveaux instruments permettent de répondre aux attentes des producteurs.
Mais il nous faut aussi progresser au plan national et communautaire sur d'autres chantiers : révision de certains aspects de l'OCM, emploi, organisation économique pour n'en citer que quelqu'uns.
Je forme le vu que ce travail continuent à se poursuivre dans le climat qui a prévalu au cours de ces 3 ans, avec la conviction que votre métier est un beau métier, au cur de la réconciliation entre l'agriculture et la société compte tenu de son rôle en matière d'emploi, d'aménagement du territoire, de qualité et de " naturalité " des produits. Il répond à l'image que se fait Jean GLAVANY d'une agriculture moderne, respectueuse des hommes et des terroirs.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 12 février 2002)