Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir aujourd'hui pour installer avec Christian Jacob, ministre délégué à la famille, le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles.
La création de ce Conseil, par la loi du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et des pupilles de l'État, était, vous le savez, très attendue. Elle était aussi nécessaire.
Très attendue parce que chaque année environ 500 femmes accouchent en demandant le secret de leur identité. C'est trop, beaucoup trop parce que ce type d'accouchement fait suite à une grossesse non souhaitée et vécue, le plus souvent, dans une très grande détresse.
Très attendue parce que plusieurs centaines de milliers de personnes, adoptées et pupilles de l'État, sont concernées par la quête de leurs origines personnelles. Ces personnes, lorsqu'elles sont en quête de leur histoire et de leurs origines, vivent de façon très douloureuse le secret qu'on leur oppose ou, si vous me permettez cette expression, le vide éventuel de leur dossier.
Nécessaire aussi car le Conseil devrait, comme il en a la mission, faciliter l'accès aux origines des personnes qui en expriment le désir.
Nécessaire également pour les femmes qui ont recours à l'accouchement secret. Elles doivent pouvoir bénéficier sur l'ensemble du territoire français non seulement des meilleures conditions sanitaires, mais aussi d'un accompagnement et d'un accueil de qualité, qui ne sauraient être exclusifs d'une information claire sur les choix qui leur sont offerts, notamment celui de pouvoir lever ultérieurement ce secret.
La mise en place du Conseil et du réseau de ses correspondants départementaux répond à cet objectif. Je suis certain que vous saurez tisser avec ces derniers les liens nécessaires à l'accomplissement de ces missions.
Ainsi que de chemin parcouru pour en arriver à ce 12 septembre ! Plus de 10 ans de réflexions et de travaux jalonnés notamment par :
le rapport du Conseil d'État intitulé Statut et protection de l'enfant
le rapport que j'ai eu l'honneur de remettre au Premier Ministre, en février 1995, " Enfant d'ici, Enfant d'ailleurs ", consacré à l'adoption,
le rapport du groupe de travail présidé par Monsieur Pascal en 1996, celui de Madame Dekeuwer-Défossez ou encore celui rédigé par le Service du droit des femmes en 1999.
Entre temps, la loi du 5 juillet 1996 relative à l'adoption avait déjà introduit des dispositions permettant un meilleur équilibre entre les droits des parents au secret de leur vie privée et les aspirations des enfants à la connaissance de leurs origines. Elle prévoyait, en particulier, la réversibilité du secret ainsi que le recueil auprès d'elle d'éléments non identifiants. La mise en place du Conseil et de ses correspondants permettra d'harmoniser ce recueil de renseignements, que les départements pratiquent aujourd'hui selon des modalités différentes.
Les travaux que je viens de citer et l'action des associations ont sensibilisé les pouvoirs publics à la nécessité de trouver un équilibre entre des droits apparemment inconciliables. Et nous devons rendre hommage à l'action des associations, dont certaines sont ici présentes, qui ont oeuvré en ce sens, mues par cette volonté de conciliation.
J'ajoute que le respect des engagements internationaux invitait, également, à créer ce Conseil. Aussi, permettez-moi de me réjouir que la loi ait, comme je le souhaitais, ouvert la possibilité, pour le Conseil, de répondre aux demandes des personnes nées à l'étranger et ayant fait l'objet d'une adoption internationale.
La loi du 22 janvier 2002 est le fruit de ces travaux, de ces réflexions et de ces engagements, en définitive de ce long processus de maturation. Et c'est pourquoi elle a pu faire l'objet d'un vote consensuel unanime. Unanimité qui suffit à prouver le caractère nécessaire, essentiel, de la création du Conseil national pour l'accès aux origines.
Car ce Conseil est au coeur de la réforme de l'accouchement secret. Celui-ci est maintenu mais son dispositif est aménagé.
Maintenu car l'accouchement secret permet de prendre en compte la détresse de la mère. C'est ce que vous avez montré, Monsieur le Professeur Henrion, dans le rapport que vous avait confié en 2000 l'Académie nationale de médecine. La mère est mise à l'abri de pressions, de menaces et sa liberté de décision est préservée pour peu qu'elle soit correctement informée.
Il permet aussi de sauvegarder l'enfant en évitant des accouchements clandestins, des abandons dans des conditions précaires, voire des infanticides.
Aussi, n'est-il pas quelque peu paradoxal de constater que l'accouchement secret est encore décrié par certains au motif qu'il constituerait un obstacle à la connaissance de ses origines et, dit-on, à la construction harmonieuse de la personnalité ? Faut-il rappeler que l'accouchement secret existe, certes sous d'autres formes, en Italie et au Luxembourg ? Et qu'il est en passe d'être reconnu en Autriche, en Allemagne et en Belgique.
Maintenu, l'accouchement secret est aussi aménagé pour organiser la réversibilité du secret et favoriser l'accès de toute personne à la connaissance de son histoire. La mère est informée des conséquences juridiques liées à sa demande de secret. L'importance pour toute personne de connaître ses origines est soulignée.
Le Conseil national, pivot de la réforme, permet de s'assurer de la persistance de la demande de secret dans le temps. Il contribue à assurer un équilibre entre des intérêts qui peuvent se trouver en conflit, comme je l'ai souligné, mais parfois aussi se rejoindre. Comment ne pas penser aux situations où mère de naissance et enfant sont engagés dans des quêtes mutuelles ? Comment ne pas évoquer ces mères de naissance désireuses de lever le secret mais qui se heurtent à des incompréhensions, à des réticences ? Le Conseil national et les départements, par leurs actions conjointes et complémentaires, doivent permettre que soit mis un terme à de telles situations.
Cependant, je me dois de souligner que la levée du secret repose avant tout sur une base consensuelle, sur une volonté commune et concomitante. La mère de naissance ou le père de naissance conservent leur droit de ne pas divulguer leur identité mais cela n'empêchera pas le Conseil de communiquer, le cas échéant, d'autres renseignements non identifiants. Aussi, dans l'exercice de cette délicate mission de médiation et de rapprochement des parties, conviendra-t-il de veiller en premier lieu à l'accompagnement psychologique de chacune de celles-ci.
La levée du secret ou la déclaration d'identité des parents de naissance ne peut pas déclencher une quelconque démarche envers l'enfant qui ne cherche pas, même si lui-même est toujours identifiable.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais encore vous dire que nous avons voulu, Christian Jacob et moi-même, que la composition du Conseil soit marquée du sceau de la pluridisciplinarité. Magistrats, personnalités qualifiées, représentants des conseils généraux, représentants d'associations, représentants de l'État vont désormais oeuvrer ensemble. Cette diversité est une richesse qui favorisera les échanges et la nécessaire expression d'une pluralité de positions.
La qualité et l'expérience des personnes ici présentes contribuent, de plus, à lui conférer une autorité morale certaine.
J'ai souhaité, lors de l'examen de la loi au Parlement, que la présence des associations soit prévue explicitement et qu'il soit recherché un équilibre entre la représentation des différentes parties. Je crois pouvoir dire que cet équilibre est atteint.
Christian JACOB et moi-même avons souhaité, en outre, que le conseil comprenne des personnes qualifiées représentant le monde médical ou paramédical au regard de l'importance des enjeux auxquels vous serez confrontés.
Je suis donc heureux que Monsieur le Professeur Henrion et Monsieur le docteur Lévy-Soussan aient accepté d'être membres de ce conseil. Je remercie particulièrement le Professeur Henrion d'avoir accepté d'en assurer la présidence. Et chacun connaît l'engagement du Dr Lévy-Soussan en faveur des enfants en difficulté.
Je remercie aussi Madame Le Boursicot qui a bien voulu accepter d'assister le Conseil en assurant la charge du secrétariat général. Les travaux que Mme Le Boursicot, magistrat, également membre du Conseil supérieur de l'adoption, a menés en la matière et sur l'accès aux origines, son expérience notamment en tant que rapporteur de la mission sur l'adoption, qui présida à la naissance de la loi du 5 juillet 1996, la désignaient naturellement pour cette fonction. Elle la remplira, j'en suis certain, avec l'efficacité et la compétence qui lui sont reconnues.
Je remercie enfin chacun d'entre vous d'avoir accepté d'être membre de ce conseil. Vous allez contribuer à faire vivre cet organisme novateur et une réforme dont nous espérons tous le succès.
Je vous remercie de votre attention et passe la parole à Christian Jacob.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 17 septembre 2002)
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir aujourd'hui pour installer avec Christian Jacob, ministre délégué à la famille, le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles.
La création de ce Conseil, par la loi du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et des pupilles de l'État, était, vous le savez, très attendue. Elle était aussi nécessaire.
Très attendue parce que chaque année environ 500 femmes accouchent en demandant le secret de leur identité. C'est trop, beaucoup trop parce que ce type d'accouchement fait suite à une grossesse non souhaitée et vécue, le plus souvent, dans une très grande détresse.
Très attendue parce que plusieurs centaines de milliers de personnes, adoptées et pupilles de l'État, sont concernées par la quête de leurs origines personnelles. Ces personnes, lorsqu'elles sont en quête de leur histoire et de leurs origines, vivent de façon très douloureuse le secret qu'on leur oppose ou, si vous me permettez cette expression, le vide éventuel de leur dossier.
Nécessaire aussi car le Conseil devrait, comme il en a la mission, faciliter l'accès aux origines des personnes qui en expriment le désir.
Nécessaire également pour les femmes qui ont recours à l'accouchement secret. Elles doivent pouvoir bénéficier sur l'ensemble du territoire français non seulement des meilleures conditions sanitaires, mais aussi d'un accompagnement et d'un accueil de qualité, qui ne sauraient être exclusifs d'une information claire sur les choix qui leur sont offerts, notamment celui de pouvoir lever ultérieurement ce secret.
La mise en place du Conseil et du réseau de ses correspondants départementaux répond à cet objectif. Je suis certain que vous saurez tisser avec ces derniers les liens nécessaires à l'accomplissement de ces missions.
Ainsi que de chemin parcouru pour en arriver à ce 12 septembre ! Plus de 10 ans de réflexions et de travaux jalonnés notamment par :
le rapport du Conseil d'État intitulé Statut et protection de l'enfant
le rapport que j'ai eu l'honneur de remettre au Premier Ministre, en février 1995, " Enfant d'ici, Enfant d'ailleurs ", consacré à l'adoption,
le rapport du groupe de travail présidé par Monsieur Pascal en 1996, celui de Madame Dekeuwer-Défossez ou encore celui rédigé par le Service du droit des femmes en 1999.
Entre temps, la loi du 5 juillet 1996 relative à l'adoption avait déjà introduit des dispositions permettant un meilleur équilibre entre les droits des parents au secret de leur vie privée et les aspirations des enfants à la connaissance de leurs origines. Elle prévoyait, en particulier, la réversibilité du secret ainsi que le recueil auprès d'elle d'éléments non identifiants. La mise en place du Conseil et de ses correspondants permettra d'harmoniser ce recueil de renseignements, que les départements pratiquent aujourd'hui selon des modalités différentes.
Les travaux que je viens de citer et l'action des associations ont sensibilisé les pouvoirs publics à la nécessité de trouver un équilibre entre des droits apparemment inconciliables. Et nous devons rendre hommage à l'action des associations, dont certaines sont ici présentes, qui ont oeuvré en ce sens, mues par cette volonté de conciliation.
J'ajoute que le respect des engagements internationaux invitait, également, à créer ce Conseil. Aussi, permettez-moi de me réjouir que la loi ait, comme je le souhaitais, ouvert la possibilité, pour le Conseil, de répondre aux demandes des personnes nées à l'étranger et ayant fait l'objet d'une adoption internationale.
La loi du 22 janvier 2002 est le fruit de ces travaux, de ces réflexions et de ces engagements, en définitive de ce long processus de maturation. Et c'est pourquoi elle a pu faire l'objet d'un vote consensuel unanime. Unanimité qui suffit à prouver le caractère nécessaire, essentiel, de la création du Conseil national pour l'accès aux origines.
Car ce Conseil est au coeur de la réforme de l'accouchement secret. Celui-ci est maintenu mais son dispositif est aménagé.
Maintenu car l'accouchement secret permet de prendre en compte la détresse de la mère. C'est ce que vous avez montré, Monsieur le Professeur Henrion, dans le rapport que vous avait confié en 2000 l'Académie nationale de médecine. La mère est mise à l'abri de pressions, de menaces et sa liberté de décision est préservée pour peu qu'elle soit correctement informée.
Il permet aussi de sauvegarder l'enfant en évitant des accouchements clandestins, des abandons dans des conditions précaires, voire des infanticides.
Aussi, n'est-il pas quelque peu paradoxal de constater que l'accouchement secret est encore décrié par certains au motif qu'il constituerait un obstacle à la connaissance de ses origines et, dit-on, à la construction harmonieuse de la personnalité ? Faut-il rappeler que l'accouchement secret existe, certes sous d'autres formes, en Italie et au Luxembourg ? Et qu'il est en passe d'être reconnu en Autriche, en Allemagne et en Belgique.
Maintenu, l'accouchement secret est aussi aménagé pour organiser la réversibilité du secret et favoriser l'accès de toute personne à la connaissance de son histoire. La mère est informée des conséquences juridiques liées à sa demande de secret. L'importance pour toute personne de connaître ses origines est soulignée.
Le Conseil national, pivot de la réforme, permet de s'assurer de la persistance de la demande de secret dans le temps. Il contribue à assurer un équilibre entre des intérêts qui peuvent se trouver en conflit, comme je l'ai souligné, mais parfois aussi se rejoindre. Comment ne pas penser aux situations où mère de naissance et enfant sont engagés dans des quêtes mutuelles ? Comment ne pas évoquer ces mères de naissance désireuses de lever le secret mais qui se heurtent à des incompréhensions, à des réticences ? Le Conseil national et les départements, par leurs actions conjointes et complémentaires, doivent permettre que soit mis un terme à de telles situations.
Cependant, je me dois de souligner que la levée du secret repose avant tout sur une base consensuelle, sur une volonté commune et concomitante. La mère de naissance ou le père de naissance conservent leur droit de ne pas divulguer leur identité mais cela n'empêchera pas le Conseil de communiquer, le cas échéant, d'autres renseignements non identifiants. Aussi, dans l'exercice de cette délicate mission de médiation et de rapprochement des parties, conviendra-t-il de veiller en premier lieu à l'accompagnement psychologique de chacune de celles-ci.
La levée du secret ou la déclaration d'identité des parents de naissance ne peut pas déclencher une quelconque démarche envers l'enfant qui ne cherche pas, même si lui-même est toujours identifiable.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais encore vous dire que nous avons voulu, Christian Jacob et moi-même, que la composition du Conseil soit marquée du sceau de la pluridisciplinarité. Magistrats, personnalités qualifiées, représentants des conseils généraux, représentants d'associations, représentants de l'État vont désormais oeuvrer ensemble. Cette diversité est une richesse qui favorisera les échanges et la nécessaire expression d'une pluralité de positions.
La qualité et l'expérience des personnes ici présentes contribuent, de plus, à lui conférer une autorité morale certaine.
J'ai souhaité, lors de l'examen de la loi au Parlement, que la présence des associations soit prévue explicitement et qu'il soit recherché un équilibre entre la représentation des différentes parties. Je crois pouvoir dire que cet équilibre est atteint.
Christian JACOB et moi-même avons souhaité, en outre, que le conseil comprenne des personnes qualifiées représentant le monde médical ou paramédical au regard de l'importance des enjeux auxquels vous serez confrontés.
Je suis donc heureux que Monsieur le Professeur Henrion et Monsieur le docteur Lévy-Soussan aient accepté d'être membres de ce conseil. Je remercie particulièrement le Professeur Henrion d'avoir accepté d'en assurer la présidence. Et chacun connaît l'engagement du Dr Lévy-Soussan en faveur des enfants en difficulté.
Je remercie aussi Madame Le Boursicot qui a bien voulu accepter d'assister le Conseil en assurant la charge du secrétariat général. Les travaux que Mme Le Boursicot, magistrat, également membre du Conseil supérieur de l'adoption, a menés en la matière et sur l'accès aux origines, son expérience notamment en tant que rapporteur de la mission sur l'adoption, qui présida à la naissance de la loi du 5 juillet 1996, la désignaient naturellement pour cette fonction. Elle la remplira, j'en suis certain, avec l'efficacité et la compétence qui lui sont reconnues.
Je remercie enfin chacun d'entre vous d'avoir accepté d'être membre de ce conseil. Vous allez contribuer à faire vivre cet organisme novateur et une réforme dont nous espérons tous le succès.
Je vous remercie de votre attention et passe la parole à Christian Jacob.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 17 septembre 2002)