Texte intégral
(Déclaration à l'arrivée à Antananarivo, le 3 juillet 2002) :
Je viens rencontrer les principales Autorités malgaches. Un point de presse est prévu ce soir, j'aurai donc l'occasion de détailler. Mais, bien évidemment, le message de la France, aujourd'hui, est un message de paix, de réconciliation, d'amitié et de solidarité vis-à-vis du peuple, que nous tenons à exprimer très fortement.
C'est le sens de cette visite qui intervient, comme vous le souligniez, très peu de temps après ma prise de fonction, et vous savez que Madagascar a été au coeur de mes préoccupations tout au long des dernières semaines. En témoigne la visite que j'ai eu l'occasion de faire à Libreville et à Dakar pour soutenir les efforts en vue de la réconciliation malgache.
Nous aurons l'occasion de nous retrouver tout à l'heure et d'en reparler plus longuement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 juillet 2002)
(Déclaration sur la signature de conventions de financement à Antananarivo, le 3 juillet 2002) :
Monsieur le Ministre,
Messieurs les Directeurs,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs,
Si je suis aujourd'hui ici, à Madagascar, c'est pour exprimer personnellement au peuple malgache, à tous les responsables de la réconciliation nationale et de la reconstruction du pays, l'amitié, la fidélité, et la solidarité de la France à l'égard de Madagascar. Le défi est immense, vous le connaissez : la paralysie de l'économie, l'effondrement du tourisme, l'aggravation du chômage, les inquiétudes sanitaires et sociales, les violences et les affrontements.
La France et les Français ressentent, personnellement, et profondément les épreuves et les souffrances endurées par le peuple malgache. L'émotion dans notre pays est grande. Nous voulons croire qu'une issue favorable est maintenant possible à la crise.
Dès le début, la France a marqué la solidarité qui était la sienne à l'égard de la population malgache : 13 tonnes de médicaments ont été distribuées sur l'ensemble du territoire et, ce, depuis les hôpitaux régionaux jusqu'aux centres hospitaliers secondaires. Partout des actions significatives ont été mises en uvre par des organisations humanitaires en direction des plus démunis. Ainsi 100.000 euros ont été octroyés à un collectif de 22 organisations non gouvernementales pour financer des opérations en faveur des enfants des rues. A notre demande, l'Agence française de développement a dégagé 1 million d'euros d'aide alimentaire en faveur des populations sinistrées.
Aujourd'hui, le souci de la France, comme l'a exprimé le président de la République française dans son message personnel à la Nation malgache le jour de la fête nationale, c'est que chacun retrouve la voie de l'apaisement, que la concorde revienne dans la Grande Ile, que la reconstruction, si nécessaire et tant attendue, s'engage enfin.
C'est dans ce contexte de sortie de crise que la France entend bien se situer, et c'est dans ce contexte qu'intervient la signature de ces quatre conventions. Il convient maintenant de dépasser le soutien humanitaire, qui ne peut suffire à satisfaire les besoins actuels, pour mettre en uvre une coopération renforcée.
Nous voulons avancer dans la voie d'un partenariat véritable et responsable à la hauteur des moyens qui ont fait jusqu'à présent de Madagascar un des tout premiers bénéficiaires de l'aide publique au développement.
La première de ces conventions est d'un montant de 7 milliards de FMG et concerne le Fonds social de développement. Elle permettra de financer les actions conduites par les organisations non gouvernementales et les collectivités locales en faveur des populations les plus vulnérables.
La deuxième convention permettra à hauteur de 15 milliards de FMG de renforcer le développement des structures sanitaires du pays par un appui au "plan directeur santé 2002-2004".
La troisième convention confortera la recherche agronomique et environnementale si importante dans un pays où 80 % de la population est rurale et ce pour un montant de 4 milliards de FMG.
La dernière convention vise enfin à appuyer le développement maîtrisé du Grand Tananarive pour 5 milliards de FMG.
La signature de ces 4 conventions permettra, nous l'espérons, une reprise réelle et immédiate de l'activité dans le pays et nous contribuerons ainsi par nos activités de coopération à cette reprise. Celle-ci pourra utilement s'appuyer, à partir du bilan des deux dernières années, sur la définition en commun des orientations nécessaires.
A cet effet, je vous proposerai d'organiser, Monsieur le Ministre, dès la rentrée prochaine, un comité de suivi. Mais il faudra aller plus loin encore.
Au-delà de ces conventions, je souhaite que puisse être rapidement mis en uvre un certain nombre de projets complémentaires :
- relance de la coopération non gouvernementale. 14 projets sont actuellement approuvés pour un montant global de 3,2 millions d'euros,
- relance de la coopération décentralisée. 5 projets sont approuvés pour un montant de 200.000 euros,
- et déblocage des projets en cours à l'Agence française de développement pour 11,9 millions d'euros notamment.
Tout ceci pourra, le moment venu, être complété par l'octroi d'une aide budgétaire et par la mise en uvre de l'initiative appelée PPTE (pays pauvres très endettés) dont Madagascar pourrait être appelé à bénéficier à partir de 2003.
La France enfin pourrait mettre en place une initiative du Club des Amis de Madagascar, consacrée à la reconstruction sous l'égide de la Banque mondiale.
Tout ceci, chers amis de Madagascar, pour vous redire à nouveau combien nous espérons que la reconstruction et le développement de votre grand pays puissent enfin être mis en uvre dans un climat apaisé, débarrassé des tensions et des incertitudes, au bénéfice d'un peuple tout entier tourné vers son avenir.
C'est vers la construction de cet avenir que toute l'énergie doit se mobiliser pour répondre aux profondes aspirations du peuple malgache, à la paix et au développement.
Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juillet 2002)
(Conférence de presse à Antananarivo, le 3 juillet 2002) :
Désolé que la salle soit si petite. Je présente mes excuses à l'avance à ceux qui sont un peu dans une position inconfortable.
Vous me permettrez tout d'abord de remercier les autorités malgaches pour l'accueil qu'ils m'ont réservé, accueil du premier membre d'un gouvernement étranger depuis plusieurs mois à Madagascar, et je suis évidemment très heureux qu'il s'agisse d'un ministre français. Il faut vous dire que ce n'est sans doute pas tout à fait un hasard.
Si je suis aujourd'hui à Madagascar, c'est pour témoigner, personnellement, de l'amitié, de la fidélité et de la solidarité de la France à l'égard de Madagascar, et de la volonté d'appuyer les efforts des autorités malgaches dans leurs tâches de réconciliation et de reconstruction.
La France, tout au long de ces mois difficiles, vous le savez, n'a pas cessé de se tenir aux côtés de Madagascar comme l'a rappelé, il y a quelques jours, le président de la République française, Jacques Chirac, à l'occasion de la Fête nationale.
Nous avons pu manifester notre appui au peuple malgache, c'est pour cela que nous avons maintenu en place nos assistants techniques, conservé ouverts nos écoles et nos lycées, et poursuivi autant que possible nos différents projets de coopération à Madagascar.
C'est pour cela que nous avons mis en place une aide humanitaire importante. Nous avons distribué 13 tonnes de médicaments sur l'ensemble du territoire et 1 million d'euros d'aide alimentaire en faveur des populations sinistrées des zones urbaines.
Aujourd'hui, le moment est venu de procéder à la reconstruction, et ce, dans un climat de réconciliation et de pacification.
C'est pour cette raison que je suis là, pour signer quatre conventions de coopération qui traduisent le début de la reprise de notre coopération, pour appuyer ainsi la sortie de la crise au-delà de la seule aide humanitaire qui ne peut pas évidemment suffire dans la période actuelle.
Je souhaiterais d'abord, si vous le permettez, expliquer la démarche de la France. Elle s'articule autour de plusieurs points.
Tout d'abord un principe politique qui a été, tout au long de ces mois, de privilégier le dialogue et la démocratie.
Deuxième élément, la recherche d'une solution pacifique : pas d'exaction, pas de violence, pas de recours aux mercenaires, c'est la position constante de la France.
Souci aussi d'une démarche collective, c'est tout le sens de l'appui français au respect de la facilitation africaine et à la recherche de la mobilisation de la communauté internationale.
Dernier principe enfin, une exigence d'action : c'est le soutien actif à la réconciliation et à la reconstruction.
Nous savons tous qu'il n'y a pas de reconstruction possible sans esprit de paix, pas de reconstruction durable sans unité nationale et respect de l'intégrité du territoire, pas de reconstruction solide sans l'aide de la communauté internationale.
C'est pour cela que nous soutenons la solution politique souhaitée par la grande communauté de l'Afrique et de l'Océan indien autour des principes fondamentaux que j'ai rappelés tout à l'heure : le dialogue et la démocratie, c'est à dire l'arrêt immédiat des violences et des exactions, la préservation de l'unité et de l'intégrité du territoire, la mise en place d'un gouvernement de réconciliation, l'organisation d'une consultation électorale avec l'aide de la communauté internationale.
A l'heure enfin où les chefs d'Etat et de gouvernement qui viennent de se réunir à l'occasion du sommet du G8 à Kananaskis et ceci, avec plusieurs chefs d'Etat africains ont exprimé solennellement leur attachement au développement de l'Afrique, il paraît essentiel que Madagascar confirme la place qui lui revient dans son environnement régional et son souci de travailler avec l'ensemble de la communauté internationale et des bailleurs de fonds.
Si je suis là, aujourd'hui, c'est parce que je souhaite saluer et encourager la volonté qui s'exprime partout ici, conformément aux principes définis à Addis-Abeba dans la droite ligne de l'appel de Libreville et du processus de Dakar.
Vous me permettrez de rendre un hommage particulier aux efforts déployés par le président Wade ainsi qu'au président Bongo qui a permis, à Libreville, de donner une nouvelle accélération à ce processus.
Avant la réunion de l'OUA, qui s'ouvre à la fin de la semaine à Durban, et à laquelle se rendra le ministre français délégué à la Coopération et à la Francophonie, M. Wiltzer, il était essentiel de marquer concrètement nos efforts.
Aujourd'hui, je suis heureux de constater les avancées concrètes qui viennent d'être faites, qu'il s'agisse de la constitution d'un gouvernement de réconciliation ou de la confirmation de l'organisation d'élections anticipées qui se tiendront avec l'appui et le soutien de la communauté internationale.
Il faut que le processus de réconciliation et de consolidation de la démocratie qui se met en route aujourd'hui se développe désormais pour le plus grand bénéfice de tous les Malgaches, sur l'ensemble du territoire jusqu'à Diego Suarez et Tamatave.
Car il revient à chacun désormais de préparer l'avenir. Il faut que très rapidement l'économie malgache soit relancée, que les besoins quotidiens des malgaches soient satisfaits. La France est prête à apporter toute son aide et à mobiliser tous ses efforts auprès de la communauté internationale à cet effet.
En complément de l'appui apporté par les conventions qui ont été signées ce matin, j'ai proposé aux autorités malgaches un plan plus complet de reconstruction avec un appui exceptionnel de la France, ainsi que la tenue rapide d'une réunion regroupant tous les amis de Madagascar pour que tous les bailleurs de fonds puissent apporter leur aide à la reconstruction dont Madagascar a tant besoin pour conforter le processus de réconciliation qui s'engage aujourd'hui.
J'ajoute que le blocage des fonds publics auprès de la Banque de France sera levé et que l'approvisionnement en billets sera de nouveau assuré.
Le choix de la France aujourd'hui est clair, c'est le choix de la stabilité, c'est le choix de la réconciliation, c'est le choix de l'avenir de Madagascar.
Dans cette optique, je veux vous dire que les Malgaches ont tous et toutes leur place bien sûr, que le temps de la paix est venu, que le temps de la réconciliation est venu.
Nous en sommes convaincus et je veux saluer tous ceux qui oeuvrent partout dans cette Grande Ile à cette formidable tâche.
Je veux saluer enfin celui à qui il revient aujourd'hui de porter la haute charge de présider aux destinées de la réconciliation nationale et de la reconstruction, le président Ravalomanana. Un nouveau chapitre s'ouvre désormais pour Madagascar, je suis heureux d'être parmi vous pour assurer, vous assurer, de la volonté de la France d'être à vos côtés en toute amitié, en totale fidélité, avec une parfaite solidarité pour accompagner le peuple malgache sur ces chemins. Je vous remercie.
Q - Monsieur le Ministre, j'ai assez bien compris ce que vous avez dit sur la relance de la coopération franco-malgache, mais ce que je n'ai pas compris c'est le mot réconciliation. Qu'est que vous entendez par réconciliation ? Est-ce une table ronde avec les terroristes ? Est-ce l'acceptation des membres du groupe de terreur à Madagascar au sein du gouvernement ?
Ma deuxième question : La France est le dernier pays à avoir reconnu Madagascar. C'est un fait, mais ceci est dû à un processus qu'on n'a jamais pu comprendre à Madagascar. Les journalistes français étaient toujours présents à Madagascar, mais on ne sait pas comment, quand il y a prestation de serment du président de la République devant la Nation, devant nos juridictions, la presse française parle d'auto-proclamation. Quand il y a, je dirais, des mouvements, jamais connus à Madagascar, un élan populaire, qui n'a jamais été contenu et qui s'est affirmé, on parle de quelques dizaines de milliers de manifestations, donc je voudrais savoir si, à travers la presse française présente à Madagascar, le gouvernement français y est pour quelque chose ? Merci Monsieur le Ministre.
R - Je vous remercie de vos questions, d'autant qu'à travers ces questions, je crois que vous avez parfaitement compris la nature des réponses et la nature de la position de la France et puisque vous voulez que je sois plus clair encore, je me ferais un plaisir de l'être davantage.
Réconciliation : vous l'avez dit, il s'agit pour la France d'appuyer un processus et celui des Malgaches eux-mêmes et qui va dans le sens de ce qu'à fait le gouvernement et le président Ravalomanana au cours des dernières semaines et des derniers jours. Il s'agit d'appuyer un processus et celui là même que les Africains ont souhaité encourager. C'est, là, la position de la France, c'est, là, la volonté de la France, ce n'est pas de considérer qu'il s'agit pour elle de s'immiscer dans ce qui est le destin du peuple malgache et de la politique malgache elle-même.
En ce qui concerne les commentaires que vous faites sur la presse française, vous savez qu'elle est libre et indépendante, et je me garderais bien de tous commentaires à cet égard. En ce qui concerne la position de la France, je crois l'avoir exprimée avec clarté. Vous dites que la France a été la dernière, vous savez que la position de la France en matière de reconnaissance est encore très claire. Nous ne reconnaissons pas les gouvernements mais les Etats, et dans ce contexte, la position de la France n'a jamais cessé d'être claire. Non seulement elle a été claire, mais elle a toujours été définie en relation avec l'ensemble de nos partenaires : partenaires européens, partenaires africains, partenaires et amis américains. Les choses se sont toujours faites dans la plus grande transparence avec la volonté de faire avancer la situation dans l'esprit de réconciliation et de reconstruction que nous avons justement évoqué tout à l'heure. Notre souci est d'aider concrètement le peuple malgache, d'aider Madagascar à avancer. Cette visite - vous pourrez constater vous-même qu'il s'agit de la première visite d'un membre d'un gouvernement étranger -, et cette première visite est celle d'un membre du gouvernement français.
Q - Monsieur le Ministre, que représente le président Ravalomanana pour vous ?
R - Je l'ai dit, les principes qui guident la diplomatie française, vis-à-vis de la crise malgache depuis de long mois, ont toujours été constants. C'est l'appui à la facilitation africaine, le souci de faire en sorte que le dialogue et que la démocratie puissent l'emporter et que les grands principes puissent être respectés dès lors que les gestes importants qui viennent d'être faits : gestes en faveur d'une consultation populaire (organisation d'élections législatives anticipées), geste en faveur de l'ouverture à la réconciliation au plan gouvernemental. Il y a là, évidemment, des éléments qui vont dans le sens de tous ceux qui nourrissent amitié et affection pour Madagascar et toutes les conditions sont aujourd'hui réunies pour que nous puissions saluer, en la personne du président Ravalomanana, l'homme qui a en charge de mener cette réconciliation et cette reconstruction.
Q - Monsieur le Ministre, je suis en charge de la communication de la société malgache or à ce titre je suis président d'une Association pour la défense citoyenne "Le Choix du Peuple". Ma question portera sur deux points. Le premier point : depuis quelques jours, une délégation de la société civile française se trouve dans nos murs et je dois vous avouer, Monsieur le Ministre, que le point de vue de beaucoup, dans la société civile malgache représente en quelque sorte une levée de bouclier face à une attitude ambiguë sinon désastreuse de la France par rapport aux événements de ces derniers mois. Est-ce que la mission de cette délégation de sociétés françaises a quelques liens avec votre visite ? Voilà ma première question. Ma deuxième question, l'opinion publique malgache souhaite une révision de l'accord de coopération avec la France. Est-ce que votre mission aussi, a un lien avec cette aspiration ? Merci Monsieur le Ministre
R - Dès la formation de ce gouvernement, la fidélité de la France s'est exprimée de la façon la plus claire face à la situation de Madagascar. Mon premier voyage en Afrique a été effectué au Gabon, au Sénégal avec comme sujet Madagascar. Le premier grand voyage que j'ai effectué, aujourd'hui, à Madagascar, porte le témoignage très concret de cette ambition française vis à vis justement de ce qui est une crise trop longue et que nous voulons voir terminée. Il y a là un engagement de fidélité, d'amitié, une ambition française qui doit être claire pour tous.
Vous évoquez une délégation de la société civile ; la définition même de la société civile c'est qu'elle agit par elle-même et donc sans aucun lien avec l'action gouvernementale. Vous évoquez des perspectives dans le domaine de la coopération. Si vous m'avez bien compris ce matin, lors de la signature des conventions, si vous m'avez bien entendu aujourd'hui, vous voyez dans quel esprit se déroule cette visite avec, pour premier souci, de répondre et d'être les premiers à répondre et j'insiste sur ce thème, les premiers à répondre, les premiers à se situer au côté du peuple malgache. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté, de ce point de vue, et notre souci est justement de faire en sorte que la reconstruction, et nombre d'actions de coopération, puissent être parfaitement en phase avec les besoins de Madagascar aujourd'hui. Nous allons donc accompagner un projet d'efforts dans les domaines de la coopération humanitaire, de la coopération économique et répondre aux problèmes qui se posent dans ces domaines en terme financier en ralliant les bonnes volontés et en mobilisant les bailleurs de fonds de façon à pouvoir répondre aux problèmes urgents qui se posent aujourd'hui à Madagascar.
Q - Monsieur le Ministre, est-ce que vous pouvez avancer une date approximative pour la levée des fonds à la Banque de France ? Les Malgaches s'apprêtent à faire une réconciliation sans l'ancien président Ratsiraka. Est-ce que cela va dans le sens du souhait de la France ? Merci Monsieur le Ministre.
R - En ce qui concerne le déblocage des avoirs, c'est maintenant une question de jours ou de semaines. Le processus est engagé, la volonté est affirmée, nous sommes en train d'étudier les modalités concrètes pour faire en sorte que cette opération puisse se réaliser le plus rapidement possible.
Vous évoquez l'aspect de réconciliation, il n'appartient pas à la France de dire les conditions dans lesquelles elles doivent se faire, notre souci c'est que cette réconciliation se fasse et d'y associer l'ensemble de ceux qui sont concernés.
Q - Monsieur le Ministre, Charles de Gaulle a dit : "les fonctionnaires sont faits pour fonctionner". Question : est-ce que c'est M. Rivasseau, le fonctionnaire, ou M. Georges Serre qui font la politique de la France ou bien c'est M. le ministre des Affaires étrangères ou M. le président de la République française ? On sait que ce sont les Français avec leurs impôts qui participent au budget de la coopération. On aimerait que désormais, cette coopération profite au peuple malgache, mais pas seulement à quelques malgaches.
La France parfois se fait dépasser par les autres puissances étrangères dans le domaine économique. Par exemple, sur le plan minier, c'est le Canada qui prend la relève de Pechiney. On aimerait que les gros investisseurs français viennent ici, mais pas les petits. Je vous remercie Monsieur le Ministre.
R - Vous avez évoqué la voix de la France. La voix de la France est une et la volonté de la France est également une. Et quand la France marque son souci d'occuper toute sa place en Afrique, elle le fait par fidélité, elle le fait par ambition, parce qu'elle croit en l'Afrique et elle le fait par amitié. Il y a une solidarité qui nous lie à ce continent, qui nous lie à Madagascar, qui est extrêmement profonde. Je voudrais aujourd'hui vous convaincre d'une chose : la France est venue d'abord par le souci d'être présente quand ses amis sont dans l'épreuve et dans la crise et, si j'ai souhaité venir si rapidement à Madagascar, c'est qu'il y a bien pour la France un devoir, une vocation, auxquels nous voulons répondre.
Pour ce qui est des autres éléments que vous avez évoqués dans votre question, je crois que, d'une manière générale, le souci de la France est de travailler en étroite collaboration avec l'ensemble des acteurs de la vie internationale. Je crois que l'Afrique a aujourd'hui de nombreux besoins. La coopération et le champ de la coopération est immense. La France évidemment doit prendre toute sa place, mais je crois que dans la volonté qui nous anime, dans le souci qui nous anime de répondre au mieux aux problèmes, aux demandes de nos amis africains, il peut y avoir une grande complémentarité entre notre action et celle des autres. Vous évoquez un certain nombre de partenaires occidentaux, européens, sachez que notre diplomatie se tient en étroite relation avec l'ensemble de ces partenaires et que notre souci premier c'est de mieux répondre aux problèmes et aux demandes de ces pays africains et non pas de s'engager dans des conflits qui seraient aujourd'hui stériles et complètement dépassés.
Q - La France n'est-elle pas quelque part en train d'exercer son influence sur l'OUA. Je sais que c'est vous qui financez Dakar 1, Dakar 2, peut être encore d'autres. Une deuxième question que j'ai posé à Mme Roselyne Bachelot, porte-parole de Jacques Chirac avant le 1er tour : les relations de la France avec l'Amiral Didier Ratsiraka. Elle n'a pas voulu répondre à ma question. Je pense que vous répondrez. Merci Monsieur le Ministre.
R - En ce qui concerne la position de la France, les principes de la France, vous comprendrez que nous soyons soucieux d'avoir une politique africaine et une seule, c'est à dire de défendre les principes auxquels nous tenons. Nous le faisons avec ambition, nous le faisons avec pragmatisme, nous le faisons avec le souci de faire avancer les grandes questions et, dans la situation malgache, notre premier souci a été d'essayer de faire en sorte de maintenir l'unité, de maintenir la clarté dans les positions et de venir en appui, et non pas de nous substituer à nos partenaires et nos amis africains. La volonté de la France aujourd'hui est extrêmement claire, c'est de faire en sorte, de tout faire, pour sortir de la crise. Je l'ai dit, dans quelques jours, le ministre délégué à la Coopération sera à Durban et nous sommes convaincus aujourd'hui de la nécessité que la communauté africaine, la communauté des pays de l'Océan indien, puisse travailler ensemble et que Madagascar puisse y trouver toute sa place. C'est donc une réponse qui va dans le sens que vous souhaitez, sens qui consiste à faire l'effort que chacun puisse travailler avec tous pour le plus grand bénéfice de cette communauté.
En ce qui concerne l'autre question que vous avez évoquée, ma mémoire est grande mais pas suffisante pour que je me rappelle la question que vous aviez posée, en son temps, pendant la campagne électorale, à Roselyne Bachelot, mais je crois avoir déjà donné des éléments de réponse à la question posée.
Merci
Il y avait une question sur les mercenaires, qui a été posée ce matin, et j'ai dit que j'y répondrais. Je tiens à y répondre par anticipation, puisque la question n'a pas été reposée
Dès que la France, dès que j'ai appris la présence de mercenaires français à bord d'un appareil en direction de Tananarive, nous avons fait en sorte que cet appareil soit bloqué à Dar es Salam et fait en sorte que cet avion soit rapatrié. Ce qui a été fait. Les informations dont nous disposions ont été rendues publiques. C'est dire à quel point la France est soucieuse de dire clairement les choses et d'agir conformément au droit et aux principes auxquels elle croit. Tout ceci, une fois de plus, dans l'intérêt de Madagascar qui est celui de la paix, qui est celui de la stabilité et du développement dans lequel nous souhaitons vous voir participer dans les meilleures conditions. Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juillet 2002)
Je viens rencontrer les principales Autorités malgaches. Un point de presse est prévu ce soir, j'aurai donc l'occasion de détailler. Mais, bien évidemment, le message de la France, aujourd'hui, est un message de paix, de réconciliation, d'amitié et de solidarité vis-à-vis du peuple, que nous tenons à exprimer très fortement.
C'est le sens de cette visite qui intervient, comme vous le souligniez, très peu de temps après ma prise de fonction, et vous savez que Madagascar a été au coeur de mes préoccupations tout au long des dernières semaines. En témoigne la visite que j'ai eu l'occasion de faire à Libreville et à Dakar pour soutenir les efforts en vue de la réconciliation malgache.
Nous aurons l'occasion de nous retrouver tout à l'heure et d'en reparler plus longuement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 juillet 2002)
(Déclaration sur la signature de conventions de financement à Antananarivo, le 3 juillet 2002) :
Monsieur le Ministre,
Messieurs les Directeurs,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs,
Si je suis aujourd'hui ici, à Madagascar, c'est pour exprimer personnellement au peuple malgache, à tous les responsables de la réconciliation nationale et de la reconstruction du pays, l'amitié, la fidélité, et la solidarité de la France à l'égard de Madagascar. Le défi est immense, vous le connaissez : la paralysie de l'économie, l'effondrement du tourisme, l'aggravation du chômage, les inquiétudes sanitaires et sociales, les violences et les affrontements.
La France et les Français ressentent, personnellement, et profondément les épreuves et les souffrances endurées par le peuple malgache. L'émotion dans notre pays est grande. Nous voulons croire qu'une issue favorable est maintenant possible à la crise.
Dès le début, la France a marqué la solidarité qui était la sienne à l'égard de la population malgache : 13 tonnes de médicaments ont été distribuées sur l'ensemble du territoire et, ce, depuis les hôpitaux régionaux jusqu'aux centres hospitaliers secondaires. Partout des actions significatives ont été mises en uvre par des organisations humanitaires en direction des plus démunis. Ainsi 100.000 euros ont été octroyés à un collectif de 22 organisations non gouvernementales pour financer des opérations en faveur des enfants des rues. A notre demande, l'Agence française de développement a dégagé 1 million d'euros d'aide alimentaire en faveur des populations sinistrées.
Aujourd'hui, le souci de la France, comme l'a exprimé le président de la République française dans son message personnel à la Nation malgache le jour de la fête nationale, c'est que chacun retrouve la voie de l'apaisement, que la concorde revienne dans la Grande Ile, que la reconstruction, si nécessaire et tant attendue, s'engage enfin.
C'est dans ce contexte de sortie de crise que la France entend bien se situer, et c'est dans ce contexte qu'intervient la signature de ces quatre conventions. Il convient maintenant de dépasser le soutien humanitaire, qui ne peut suffire à satisfaire les besoins actuels, pour mettre en uvre une coopération renforcée.
Nous voulons avancer dans la voie d'un partenariat véritable et responsable à la hauteur des moyens qui ont fait jusqu'à présent de Madagascar un des tout premiers bénéficiaires de l'aide publique au développement.
La première de ces conventions est d'un montant de 7 milliards de FMG et concerne le Fonds social de développement. Elle permettra de financer les actions conduites par les organisations non gouvernementales et les collectivités locales en faveur des populations les plus vulnérables.
La deuxième convention permettra à hauteur de 15 milliards de FMG de renforcer le développement des structures sanitaires du pays par un appui au "plan directeur santé 2002-2004".
La troisième convention confortera la recherche agronomique et environnementale si importante dans un pays où 80 % de la population est rurale et ce pour un montant de 4 milliards de FMG.
La dernière convention vise enfin à appuyer le développement maîtrisé du Grand Tananarive pour 5 milliards de FMG.
La signature de ces 4 conventions permettra, nous l'espérons, une reprise réelle et immédiate de l'activité dans le pays et nous contribuerons ainsi par nos activités de coopération à cette reprise. Celle-ci pourra utilement s'appuyer, à partir du bilan des deux dernières années, sur la définition en commun des orientations nécessaires.
A cet effet, je vous proposerai d'organiser, Monsieur le Ministre, dès la rentrée prochaine, un comité de suivi. Mais il faudra aller plus loin encore.
Au-delà de ces conventions, je souhaite que puisse être rapidement mis en uvre un certain nombre de projets complémentaires :
- relance de la coopération non gouvernementale. 14 projets sont actuellement approuvés pour un montant global de 3,2 millions d'euros,
- relance de la coopération décentralisée. 5 projets sont approuvés pour un montant de 200.000 euros,
- et déblocage des projets en cours à l'Agence française de développement pour 11,9 millions d'euros notamment.
Tout ceci pourra, le moment venu, être complété par l'octroi d'une aide budgétaire et par la mise en uvre de l'initiative appelée PPTE (pays pauvres très endettés) dont Madagascar pourrait être appelé à bénéficier à partir de 2003.
La France enfin pourrait mettre en place une initiative du Club des Amis de Madagascar, consacrée à la reconstruction sous l'égide de la Banque mondiale.
Tout ceci, chers amis de Madagascar, pour vous redire à nouveau combien nous espérons que la reconstruction et le développement de votre grand pays puissent enfin être mis en uvre dans un climat apaisé, débarrassé des tensions et des incertitudes, au bénéfice d'un peuple tout entier tourné vers son avenir.
C'est vers la construction de cet avenir que toute l'énergie doit se mobiliser pour répondre aux profondes aspirations du peuple malgache, à la paix et au développement.
Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juillet 2002)
(Conférence de presse à Antananarivo, le 3 juillet 2002) :
Désolé que la salle soit si petite. Je présente mes excuses à l'avance à ceux qui sont un peu dans une position inconfortable.
Vous me permettrez tout d'abord de remercier les autorités malgaches pour l'accueil qu'ils m'ont réservé, accueil du premier membre d'un gouvernement étranger depuis plusieurs mois à Madagascar, et je suis évidemment très heureux qu'il s'agisse d'un ministre français. Il faut vous dire que ce n'est sans doute pas tout à fait un hasard.
Si je suis aujourd'hui à Madagascar, c'est pour témoigner, personnellement, de l'amitié, de la fidélité et de la solidarité de la France à l'égard de Madagascar, et de la volonté d'appuyer les efforts des autorités malgaches dans leurs tâches de réconciliation et de reconstruction.
La France, tout au long de ces mois difficiles, vous le savez, n'a pas cessé de se tenir aux côtés de Madagascar comme l'a rappelé, il y a quelques jours, le président de la République française, Jacques Chirac, à l'occasion de la Fête nationale.
Nous avons pu manifester notre appui au peuple malgache, c'est pour cela que nous avons maintenu en place nos assistants techniques, conservé ouverts nos écoles et nos lycées, et poursuivi autant que possible nos différents projets de coopération à Madagascar.
C'est pour cela que nous avons mis en place une aide humanitaire importante. Nous avons distribué 13 tonnes de médicaments sur l'ensemble du territoire et 1 million d'euros d'aide alimentaire en faveur des populations sinistrées des zones urbaines.
Aujourd'hui, le moment est venu de procéder à la reconstruction, et ce, dans un climat de réconciliation et de pacification.
C'est pour cette raison que je suis là, pour signer quatre conventions de coopération qui traduisent le début de la reprise de notre coopération, pour appuyer ainsi la sortie de la crise au-delà de la seule aide humanitaire qui ne peut pas évidemment suffire dans la période actuelle.
Je souhaiterais d'abord, si vous le permettez, expliquer la démarche de la France. Elle s'articule autour de plusieurs points.
Tout d'abord un principe politique qui a été, tout au long de ces mois, de privilégier le dialogue et la démocratie.
Deuxième élément, la recherche d'une solution pacifique : pas d'exaction, pas de violence, pas de recours aux mercenaires, c'est la position constante de la France.
Souci aussi d'une démarche collective, c'est tout le sens de l'appui français au respect de la facilitation africaine et à la recherche de la mobilisation de la communauté internationale.
Dernier principe enfin, une exigence d'action : c'est le soutien actif à la réconciliation et à la reconstruction.
Nous savons tous qu'il n'y a pas de reconstruction possible sans esprit de paix, pas de reconstruction durable sans unité nationale et respect de l'intégrité du territoire, pas de reconstruction solide sans l'aide de la communauté internationale.
C'est pour cela que nous soutenons la solution politique souhaitée par la grande communauté de l'Afrique et de l'Océan indien autour des principes fondamentaux que j'ai rappelés tout à l'heure : le dialogue et la démocratie, c'est à dire l'arrêt immédiat des violences et des exactions, la préservation de l'unité et de l'intégrité du territoire, la mise en place d'un gouvernement de réconciliation, l'organisation d'une consultation électorale avec l'aide de la communauté internationale.
A l'heure enfin où les chefs d'Etat et de gouvernement qui viennent de se réunir à l'occasion du sommet du G8 à Kananaskis et ceci, avec plusieurs chefs d'Etat africains ont exprimé solennellement leur attachement au développement de l'Afrique, il paraît essentiel que Madagascar confirme la place qui lui revient dans son environnement régional et son souci de travailler avec l'ensemble de la communauté internationale et des bailleurs de fonds.
Si je suis là, aujourd'hui, c'est parce que je souhaite saluer et encourager la volonté qui s'exprime partout ici, conformément aux principes définis à Addis-Abeba dans la droite ligne de l'appel de Libreville et du processus de Dakar.
Vous me permettrez de rendre un hommage particulier aux efforts déployés par le président Wade ainsi qu'au président Bongo qui a permis, à Libreville, de donner une nouvelle accélération à ce processus.
Avant la réunion de l'OUA, qui s'ouvre à la fin de la semaine à Durban, et à laquelle se rendra le ministre français délégué à la Coopération et à la Francophonie, M. Wiltzer, il était essentiel de marquer concrètement nos efforts.
Aujourd'hui, je suis heureux de constater les avancées concrètes qui viennent d'être faites, qu'il s'agisse de la constitution d'un gouvernement de réconciliation ou de la confirmation de l'organisation d'élections anticipées qui se tiendront avec l'appui et le soutien de la communauté internationale.
Il faut que le processus de réconciliation et de consolidation de la démocratie qui se met en route aujourd'hui se développe désormais pour le plus grand bénéfice de tous les Malgaches, sur l'ensemble du territoire jusqu'à Diego Suarez et Tamatave.
Car il revient à chacun désormais de préparer l'avenir. Il faut que très rapidement l'économie malgache soit relancée, que les besoins quotidiens des malgaches soient satisfaits. La France est prête à apporter toute son aide et à mobiliser tous ses efforts auprès de la communauté internationale à cet effet.
En complément de l'appui apporté par les conventions qui ont été signées ce matin, j'ai proposé aux autorités malgaches un plan plus complet de reconstruction avec un appui exceptionnel de la France, ainsi que la tenue rapide d'une réunion regroupant tous les amis de Madagascar pour que tous les bailleurs de fonds puissent apporter leur aide à la reconstruction dont Madagascar a tant besoin pour conforter le processus de réconciliation qui s'engage aujourd'hui.
J'ajoute que le blocage des fonds publics auprès de la Banque de France sera levé et que l'approvisionnement en billets sera de nouveau assuré.
Le choix de la France aujourd'hui est clair, c'est le choix de la stabilité, c'est le choix de la réconciliation, c'est le choix de l'avenir de Madagascar.
Dans cette optique, je veux vous dire que les Malgaches ont tous et toutes leur place bien sûr, que le temps de la paix est venu, que le temps de la réconciliation est venu.
Nous en sommes convaincus et je veux saluer tous ceux qui oeuvrent partout dans cette Grande Ile à cette formidable tâche.
Je veux saluer enfin celui à qui il revient aujourd'hui de porter la haute charge de présider aux destinées de la réconciliation nationale et de la reconstruction, le président Ravalomanana. Un nouveau chapitre s'ouvre désormais pour Madagascar, je suis heureux d'être parmi vous pour assurer, vous assurer, de la volonté de la France d'être à vos côtés en toute amitié, en totale fidélité, avec une parfaite solidarité pour accompagner le peuple malgache sur ces chemins. Je vous remercie.
Q - Monsieur le Ministre, j'ai assez bien compris ce que vous avez dit sur la relance de la coopération franco-malgache, mais ce que je n'ai pas compris c'est le mot réconciliation. Qu'est que vous entendez par réconciliation ? Est-ce une table ronde avec les terroristes ? Est-ce l'acceptation des membres du groupe de terreur à Madagascar au sein du gouvernement ?
Ma deuxième question : La France est le dernier pays à avoir reconnu Madagascar. C'est un fait, mais ceci est dû à un processus qu'on n'a jamais pu comprendre à Madagascar. Les journalistes français étaient toujours présents à Madagascar, mais on ne sait pas comment, quand il y a prestation de serment du président de la République devant la Nation, devant nos juridictions, la presse française parle d'auto-proclamation. Quand il y a, je dirais, des mouvements, jamais connus à Madagascar, un élan populaire, qui n'a jamais été contenu et qui s'est affirmé, on parle de quelques dizaines de milliers de manifestations, donc je voudrais savoir si, à travers la presse française présente à Madagascar, le gouvernement français y est pour quelque chose ? Merci Monsieur le Ministre.
R - Je vous remercie de vos questions, d'autant qu'à travers ces questions, je crois que vous avez parfaitement compris la nature des réponses et la nature de la position de la France et puisque vous voulez que je sois plus clair encore, je me ferais un plaisir de l'être davantage.
Réconciliation : vous l'avez dit, il s'agit pour la France d'appuyer un processus et celui des Malgaches eux-mêmes et qui va dans le sens de ce qu'à fait le gouvernement et le président Ravalomanana au cours des dernières semaines et des derniers jours. Il s'agit d'appuyer un processus et celui là même que les Africains ont souhaité encourager. C'est, là, la position de la France, c'est, là, la volonté de la France, ce n'est pas de considérer qu'il s'agit pour elle de s'immiscer dans ce qui est le destin du peuple malgache et de la politique malgache elle-même.
En ce qui concerne les commentaires que vous faites sur la presse française, vous savez qu'elle est libre et indépendante, et je me garderais bien de tous commentaires à cet égard. En ce qui concerne la position de la France, je crois l'avoir exprimée avec clarté. Vous dites que la France a été la dernière, vous savez que la position de la France en matière de reconnaissance est encore très claire. Nous ne reconnaissons pas les gouvernements mais les Etats, et dans ce contexte, la position de la France n'a jamais cessé d'être claire. Non seulement elle a été claire, mais elle a toujours été définie en relation avec l'ensemble de nos partenaires : partenaires européens, partenaires africains, partenaires et amis américains. Les choses se sont toujours faites dans la plus grande transparence avec la volonté de faire avancer la situation dans l'esprit de réconciliation et de reconstruction que nous avons justement évoqué tout à l'heure. Notre souci est d'aider concrètement le peuple malgache, d'aider Madagascar à avancer. Cette visite - vous pourrez constater vous-même qu'il s'agit de la première visite d'un membre d'un gouvernement étranger -, et cette première visite est celle d'un membre du gouvernement français.
Q - Monsieur le Ministre, que représente le président Ravalomanana pour vous ?
R - Je l'ai dit, les principes qui guident la diplomatie française, vis-à-vis de la crise malgache depuis de long mois, ont toujours été constants. C'est l'appui à la facilitation africaine, le souci de faire en sorte que le dialogue et que la démocratie puissent l'emporter et que les grands principes puissent être respectés dès lors que les gestes importants qui viennent d'être faits : gestes en faveur d'une consultation populaire (organisation d'élections législatives anticipées), geste en faveur de l'ouverture à la réconciliation au plan gouvernemental. Il y a là, évidemment, des éléments qui vont dans le sens de tous ceux qui nourrissent amitié et affection pour Madagascar et toutes les conditions sont aujourd'hui réunies pour que nous puissions saluer, en la personne du président Ravalomanana, l'homme qui a en charge de mener cette réconciliation et cette reconstruction.
Q - Monsieur le Ministre, je suis en charge de la communication de la société malgache or à ce titre je suis président d'une Association pour la défense citoyenne "Le Choix du Peuple". Ma question portera sur deux points. Le premier point : depuis quelques jours, une délégation de la société civile française se trouve dans nos murs et je dois vous avouer, Monsieur le Ministre, que le point de vue de beaucoup, dans la société civile malgache représente en quelque sorte une levée de bouclier face à une attitude ambiguë sinon désastreuse de la France par rapport aux événements de ces derniers mois. Est-ce que la mission de cette délégation de sociétés françaises a quelques liens avec votre visite ? Voilà ma première question. Ma deuxième question, l'opinion publique malgache souhaite une révision de l'accord de coopération avec la France. Est-ce que votre mission aussi, a un lien avec cette aspiration ? Merci Monsieur le Ministre
R - Dès la formation de ce gouvernement, la fidélité de la France s'est exprimée de la façon la plus claire face à la situation de Madagascar. Mon premier voyage en Afrique a été effectué au Gabon, au Sénégal avec comme sujet Madagascar. Le premier grand voyage que j'ai effectué, aujourd'hui, à Madagascar, porte le témoignage très concret de cette ambition française vis à vis justement de ce qui est une crise trop longue et que nous voulons voir terminée. Il y a là un engagement de fidélité, d'amitié, une ambition française qui doit être claire pour tous.
Vous évoquez une délégation de la société civile ; la définition même de la société civile c'est qu'elle agit par elle-même et donc sans aucun lien avec l'action gouvernementale. Vous évoquez des perspectives dans le domaine de la coopération. Si vous m'avez bien compris ce matin, lors de la signature des conventions, si vous m'avez bien entendu aujourd'hui, vous voyez dans quel esprit se déroule cette visite avec, pour premier souci, de répondre et d'être les premiers à répondre et j'insiste sur ce thème, les premiers à répondre, les premiers à se situer au côté du peuple malgache. Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté, de ce point de vue, et notre souci est justement de faire en sorte que la reconstruction, et nombre d'actions de coopération, puissent être parfaitement en phase avec les besoins de Madagascar aujourd'hui. Nous allons donc accompagner un projet d'efforts dans les domaines de la coopération humanitaire, de la coopération économique et répondre aux problèmes qui se posent dans ces domaines en terme financier en ralliant les bonnes volontés et en mobilisant les bailleurs de fonds de façon à pouvoir répondre aux problèmes urgents qui se posent aujourd'hui à Madagascar.
Q - Monsieur le Ministre, est-ce que vous pouvez avancer une date approximative pour la levée des fonds à la Banque de France ? Les Malgaches s'apprêtent à faire une réconciliation sans l'ancien président Ratsiraka. Est-ce que cela va dans le sens du souhait de la France ? Merci Monsieur le Ministre.
R - En ce qui concerne le déblocage des avoirs, c'est maintenant une question de jours ou de semaines. Le processus est engagé, la volonté est affirmée, nous sommes en train d'étudier les modalités concrètes pour faire en sorte que cette opération puisse se réaliser le plus rapidement possible.
Vous évoquez l'aspect de réconciliation, il n'appartient pas à la France de dire les conditions dans lesquelles elles doivent se faire, notre souci c'est que cette réconciliation se fasse et d'y associer l'ensemble de ceux qui sont concernés.
Q - Monsieur le Ministre, Charles de Gaulle a dit : "les fonctionnaires sont faits pour fonctionner". Question : est-ce que c'est M. Rivasseau, le fonctionnaire, ou M. Georges Serre qui font la politique de la France ou bien c'est M. le ministre des Affaires étrangères ou M. le président de la République française ? On sait que ce sont les Français avec leurs impôts qui participent au budget de la coopération. On aimerait que désormais, cette coopération profite au peuple malgache, mais pas seulement à quelques malgaches.
La France parfois se fait dépasser par les autres puissances étrangères dans le domaine économique. Par exemple, sur le plan minier, c'est le Canada qui prend la relève de Pechiney. On aimerait que les gros investisseurs français viennent ici, mais pas les petits. Je vous remercie Monsieur le Ministre.
R - Vous avez évoqué la voix de la France. La voix de la France est une et la volonté de la France est également une. Et quand la France marque son souci d'occuper toute sa place en Afrique, elle le fait par fidélité, elle le fait par ambition, parce qu'elle croit en l'Afrique et elle le fait par amitié. Il y a une solidarité qui nous lie à ce continent, qui nous lie à Madagascar, qui est extrêmement profonde. Je voudrais aujourd'hui vous convaincre d'une chose : la France est venue d'abord par le souci d'être présente quand ses amis sont dans l'épreuve et dans la crise et, si j'ai souhaité venir si rapidement à Madagascar, c'est qu'il y a bien pour la France un devoir, une vocation, auxquels nous voulons répondre.
Pour ce qui est des autres éléments que vous avez évoqués dans votre question, je crois que, d'une manière générale, le souci de la France est de travailler en étroite collaboration avec l'ensemble des acteurs de la vie internationale. Je crois que l'Afrique a aujourd'hui de nombreux besoins. La coopération et le champ de la coopération est immense. La France évidemment doit prendre toute sa place, mais je crois que dans la volonté qui nous anime, dans le souci qui nous anime de répondre au mieux aux problèmes, aux demandes de nos amis africains, il peut y avoir une grande complémentarité entre notre action et celle des autres. Vous évoquez un certain nombre de partenaires occidentaux, européens, sachez que notre diplomatie se tient en étroite relation avec l'ensemble de ces partenaires et que notre souci premier c'est de mieux répondre aux problèmes et aux demandes de ces pays africains et non pas de s'engager dans des conflits qui seraient aujourd'hui stériles et complètement dépassés.
Q - La France n'est-elle pas quelque part en train d'exercer son influence sur l'OUA. Je sais que c'est vous qui financez Dakar 1, Dakar 2, peut être encore d'autres. Une deuxième question que j'ai posé à Mme Roselyne Bachelot, porte-parole de Jacques Chirac avant le 1er tour : les relations de la France avec l'Amiral Didier Ratsiraka. Elle n'a pas voulu répondre à ma question. Je pense que vous répondrez. Merci Monsieur le Ministre.
R - En ce qui concerne la position de la France, les principes de la France, vous comprendrez que nous soyons soucieux d'avoir une politique africaine et une seule, c'est à dire de défendre les principes auxquels nous tenons. Nous le faisons avec ambition, nous le faisons avec pragmatisme, nous le faisons avec le souci de faire avancer les grandes questions et, dans la situation malgache, notre premier souci a été d'essayer de faire en sorte de maintenir l'unité, de maintenir la clarté dans les positions et de venir en appui, et non pas de nous substituer à nos partenaires et nos amis africains. La volonté de la France aujourd'hui est extrêmement claire, c'est de faire en sorte, de tout faire, pour sortir de la crise. Je l'ai dit, dans quelques jours, le ministre délégué à la Coopération sera à Durban et nous sommes convaincus aujourd'hui de la nécessité que la communauté africaine, la communauté des pays de l'Océan indien, puisse travailler ensemble et que Madagascar puisse y trouver toute sa place. C'est donc une réponse qui va dans le sens que vous souhaitez, sens qui consiste à faire l'effort que chacun puisse travailler avec tous pour le plus grand bénéfice de cette communauté.
En ce qui concerne l'autre question que vous avez évoquée, ma mémoire est grande mais pas suffisante pour que je me rappelle la question que vous aviez posée, en son temps, pendant la campagne électorale, à Roselyne Bachelot, mais je crois avoir déjà donné des éléments de réponse à la question posée.
Merci
Il y avait une question sur les mercenaires, qui a été posée ce matin, et j'ai dit que j'y répondrais. Je tiens à y répondre par anticipation, puisque la question n'a pas été reposée
Dès que la France, dès que j'ai appris la présence de mercenaires français à bord d'un appareil en direction de Tananarive, nous avons fait en sorte que cet appareil soit bloqué à Dar es Salam et fait en sorte que cet avion soit rapatrié. Ce qui a été fait. Les informations dont nous disposions ont été rendues publiques. C'est dire à quel point la France est soucieuse de dire clairement les choses et d'agir conformément au droit et aux principes auxquels elle croit. Tout ceci, une fois de plus, dans l'intérêt de Madagascar qui est celui de la paix, qui est celui de la stabilité et du développement dans lequel nous souhaitons vous voir participer dans les meilleures conditions. Je vous remercie.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juillet 2002)