Déclaration à la presse de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, sur l'évolution des travaux de la conférence intergouvernementale (CIG) et les positions françaises sur la réforme des institutions, la réduction de la commission, les coopérations renforcées, la sécurité européenne et la sécurité intérieure, Rome le 25 mars 1997.

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Circonstance : 40ème anniversaire du Traité de Rome à Rome le 25 mars 1997

Texte intégral

Cette réunion a permis d'écouter le point de vue de plusieurs délégations sur l'état de la négociation, à la lumière notamment du document que la présidence a distribué récemment, qui se présente comme une nouvelle rédaction du projet de traité, de sorte que chacun a été amené à répéter ce qui lui paraissait essentiel. Cela a été utile et intéressant, une sorte de revue d'effectifs qui permet de faire le point sur les positions des uns et des autres. Il est vrai qu'à ce stade du calendrier, c'est utile parce que cela permet d'apprécier ce que sont les grands sujets, les grands enjeux de cette conférence. On ne peut pas dire non plus que cela fasse avancer la négociation de façon substantielle. Ceci dit, je m'en réjouis et je voudrais dire plusieurs choses.

D'abord, je trouve que la présidence néerlandaise donne beaucoup d'elle-même. Elle fait preuve d'une grande détermination et marque ainsi une très claire volonté politique d'aboutir à la fin de la négociation à Amsterdam, comme prévu. Je dois dire que c'est bien, parce qu'il était grand temps que nous entrions enfin dans la négociation et j'ai le sentiment que depuis le mois de décembre, c'est à dire depuis le Sommet de Dublin II et le début de la présidence néerlandaise, nous sommes entrés dans la phase utile de la négociation, après avoir, il est vrai, tourner en rond assez joyeusement pendant assez longtemps.
Je ne peux que me féliciter de la dynamique que la présidence néerlandaise a donnée à la négociation. Est-ce que cela veut dire que nous avançons ? Je crois que oui. Nous avançons sur un certain nombre de points mais nous sommes encore loin du compte et il me semble que la route encore à accomplir est plus longue que celle qui a été accomplie. Je ne parle pas en termes de calendrier : je ne vous annonce pas trois ans de négociations. Je veux dire que le chemin à parcourir, entre des positions idéales et la fin de la négociation, est encore devant nous. Nous avons beaucoup de pain sur la planche.

Les positions françaises, vous les connaissez, j'ai donc scrupule à les rappeler devant vous. Je veux le faire en quelques mots, d'ailleurs en résumant ainsi ce que j'ai moi-même dit aujourd'hui.

D'abord, c'est évidemment sur la réforme des institutions de l'Union européenne que porte la principale question selon nous. Et de ce point de vue, nous avons trois préoccupations :

- faire en sorte que le système des votes au sein du Conseil soit modifié, pour que la pondération des voix, c'est-à-dire le nombre des voix qu'il faut pour avoir la majorité soit plus proche de la représentation réelle du peuple. On s'en est écarté progressivement et notamment à l'occasion du dernier élargissement. Comme nous travaillons dans la perspective des élargissements futurs, il faut créer une situation nouvelle, qui reconstitue la situation initiale. Vous voyez à peu près ce qu'il en est ; on comprend quelle est la portée du débat. A l'origine, à six, il fallait aux alentours de 68 % de la population au minimum pour atteindre la majorité qualifiée des voix, alors qu'aujourd'hui, nous sommes à un système où il suffit de 58 % pour avoir la majorité. C'est un affaiblissement progressif de la portée de la majorité qualifiée. C'est cela qu'il faut changer.

Et ce n'est pas une question, comme je l'entends très souvent, "petits pays/grands pays", c'est prendre les choses pour ce qu'elles sont, les pays pour ce qu'ils représentent, leurs poids, pour assurer la légitimité des décisions prises, et au fond, pour assurer que les décisions soient prises sur une base vraiment démocratique.

La repondération est une question importante et je suis frappé de constater qu'il y a une vraie prise de conscience de la part de l'ensemble des membres du Conseil des ministres sur la réalité de cette question.

Ensuite, sur les options, sur ce que l'on est prêt à faire, bien sûr apparaissent des clivages, mais je crois qu'il y a une prise de conscience que ce problème, qui a été posé par la France, est un vrai problème et qu'il doit être résolu.

- La deuxième question, très importante, porte sur la Commission. S'agissant de la Commission, la France maintient sa position : il faut une réduction du nombre des commissaires. Nous avons identifié dix fonctions, nous pensons donc qu'une Commission de dix membres est le bon format et qu'il serait souhaitable de s'y tenir. En tout cas, pour l'instant, c'est la position de la France.

Alors on voit bien l'argument qu'on soulève, c'est l'argument que je trouve le plus mauvais et qui consiste à dire "mais nous voulons chacun notre commissaire". C'est la négation même de la conception de base de la Commission. Je m'étonne même que la Commission ne soit pas enthousiaste à cette idée : c'est paradoxal, parce que nous sommes les meilleurs avocats possibles de la Commission. Nous voulons renforcer le statut de la Commission, en fait, lui rendre sa nature originelle.

De la même façon que lorsque nous demandons le renforcement des pouvoirs du président, ou lorsque nous demandons qu'elle soit responsable non seulement devant le Parlement, mais aussi devant le Conseil, nous travaillons dans l'intérêt général de l'Europe, parce que nous avons toujours considéré dans l'Histoire européenne que la Commission avait joué un rôle déterminant, très souvent essentiel.

- Nous plaidons pour la possibilité de coopérations renforcées. Je répète une fois de plus devant vous que, sur ce sujet, nous avons fait des propositions très précises avec l'Allemagne. C'est une proposition. Nous sommes d'accord pour proposer que demain, les coopérations renforcées puissent, de préférence, se faire à l'intérieur de l'Union plutôt qu'à l'extérieur, c'est-à-dire dans le cadre du dispositif général de l'Union, avec, je dirais, l'imprimatur de la Commission, avec discussion avec nos partenaires, avec une vérification en commun que telle ou telle coopération renforcée constitue bien un progrès pour tous, et avec une attitude ouverte à l'égard de tous ceux qui veulent se joindre "aux coopérants", à ceux qui prendraient l'initiative d'une coopération renforcée. Telle est notre proposition, en réalité très positive et favorable à tous, y compris à ceux qui voudraient se trouver, le cas échéant, dans la situation de ne pas participer à ces coopérations renforcées. Mais si cela devait être "Gulliver" enchaîné, par mille liens qui empêchent de faire des progrès, et bien, nous en avons déjà fait à quelques uns. On peut continuer sur le modèle Schengen et faire à quelques-uns quelque chose d'autre quand cela nous semblera nécessaire. Cela n'empêchera pas que nous soyons ouverts et accueillants envers tous ceux qui voudraient nous rejoindre.

Bref, nous proposons la coopération renforcée comme un plus, comme un geste amical, comme un geste d'accueil, comme un geste positif et si c'est pour que l'on nous renvoie le compliment en nous disant : "il faut l'unanimité" - j'ai même des doutes sur la majorité qualifiée, je ne vous le cache pas - et que l'on enserre cela dans je ne sais plus combien, M. Poss a défini onze conditions-, alors autant rentrer chez soi !

Donc, ce sont des questions évidemment centrales, il y en a beaucoup d'autres. Nous avons parlé de toutes les questions touchant à la politique étrangère et de sécurité commune. Vous savez qu'il y a des propositions françaises concernant la politique étrangère.

Nous souhaitons que le Haut Représentant soit désigné par les chefs de gouvernement. Ce n'est pas un commissaire. Le Haut Représentant doit être nommé par les chefs d'Etat et de gouvernement, dans le champ de leurs responsabilités intergouvernementales. Ils décideraient, à un moment donné, à l'unanimité, cela va de soi, de traiter tel sujet pour telle durée, parce qu'il est important pour l'intérêt général. Nous sommes d'accord, parce que cela pourrait préoccuper certaines délégations partenaires, pour que les modalités pratiques de mise en oeuvre soient confiées au Conseil des ministres et puissent être éventuellement délibérées à la majorité qualifiée. Il y a des solutions possibles, parce que nous arrivons à la table de négociation avec un esprit constructif et naturellement, le souci des conciliations nécessaires.

- Enfin, sur les questions d'identité européenne de sécurité et de défense, nous avons fait des propositions. Nous trouvons le texte de la présidence très en retrait, loin de ce que nous souhaitons. Vous savez aussi qu'il y a, s'agissant de l'UEO, des propositions élaborées avec l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Belgique et le Luxembourg, qui sont des propositions constructives. Je me rends bien compte qu'elles se heurtent actuellement à des difficultés, mais ce n'est pas de notre côté que l'on voudra mettre des freins à tout ce qui va du côté du renforcement de la politique européenne de défense. Tant s'en faut.

- Reste enfin le troisième pilier, la question de la sécurité intérieure. De ce point de vue, j'ai insisté ce matin sur un point qui paraissait faire confusion dans l'esprit de certains de nos collègues, à savoir que Schengen, c'est Schengen, le Traité de l'Union, c'est le Traité de l'Union.

Il ne s'agit pas de renoncer à Schengen. En d'autres termes, un certain nombre de pays ont souscrit des engagements dans le cadre du Traité de Schengen. Nous sommes tout à fait décidés à continuer dans cette voie. Et d'ailleurs, j'ai proposé que nous pourrions, si cela devait rassurer, souscrire une déclaration commune des pays signataires de Schengen, pour marquer notre intention commune de continuer d'appliquer les engagements de Schengen. Il ne s'agit pas non plus d'introduire Schengen dans le Traité. Nous voulons autre chose. Nous voulons un système par lequel les progrès à accomplir en matière de liberté de circulation soient conditionnés.

Nous sommes en faveur de l'amélioration de la liberté de circulation. Mais nous voulons, parce que nous savons que c'est un problème urgent, crucial et auquel nos populations sont sensibles, nous voulons qu'il y ait des progrès dans la sécurité intérieure, dans le domaine de la drogue, de la lutte contre le crime organisé, etc ...

Et donc nous voulons conditionner l'un à l'autre, progresser ensemble et pourquoi pas à la majorité qualifiée, parce que cela permettrait sans doute de surmonter bien des difficultés, bien des réticences, étant entendu qu'au moment de constater que des progrès ont été accomplis et que par conséquent, on peut entrer dans une nouvelle phase, il faudrait alors que chacun ait le droit de faire valoir son point de vue. Autrement dit, il faudrait, pour cela, certainement l'unanimité.

Vous voyez que je ne vous apprends rien. Je ne fais que répéter inlassablement ce que sont les priorités françaises.

Je dois dire que, sur un certain nombre de points, sur le deuxième et troisième pilier, le document de la présidence constitue un réel progrès par rapport au texte que nous avions eu à la fin de l'année et dont j'avais dit combien il me décevait.

Je dois dire aussi que sur la coopération renforcée, il y a un progrès sensible : on a un texte, qui fera l'objet de beaucoup de négociations. Je trouve encore une fois qu'il y a beaucoup trop de contraintes, de conditions, comme s'il fallait freiner le mouvement de ceux qui veulent aller plus loin et plus vite, ce que nous ne sommes pas prêts à accepter. Nous sommes des Européens, nous n'allons pas accepter que ceux qui sont les moins européens de l'Union européenne empêchent les plus européens d'avancer. Jamais !

Et nous considérons que le texte de la présidence néerlandaise fait accomplir un pas important dans cette direction. Il note des questions institutionnelles et j'ai insisté auprès de Hans Van Mierlo sur la nécessité que nous ayons un texte sur les institutions. Cela commence à devenir urgent. Je ne suis pas très heureux quand on me dit que ce sont des questions qu'on tranchera à la fin de la discussion, à la fin de la négociation, au dernier moment. Je ne vais pas accepter qu'on me coince entre deux portes à la sortie pour me dire, voilà, c'est cela ou rien, parce que ce sera rien. Donc j'ai insisté sur ce point en disant à la présidence que si elle veut nous réunir le 6 avril, pourquoi pas, nous sommes toujours disponibles pour nous retrouver. Ce serait sans doute utile, surtout si c'est pour parler des institutions ; mais qu'on ait un texte de la présidence. Sans doute il sera loin du compte, mais que l'on en ait un, et à partir de là on pourra commencer à travailler. Vous savez ce que c'est qu'une négociation. On propose des amendements, on se concerte pour faire progresser les choses. Bref un texte a cet avantage d'ouvrir vraiment le débat et la discussion.

La présidence a laissé entendre qu'il en serait bien ainsi, ce dont je me réjouis.

Voilà. Nous sommes heureux d'être à Rome. On aimerait que la présidence soit toujours italienne, espagnole ou grecque. Ainsi on serait toujours au soleil. Rome a un charme qu'aucune ville européenne n'a, me semble-t-il, à ce point.

Et naturellement nous sommes tous heureux de nous retrouver quarante ans après. Je voudrais faire observer que quarante ans après, contrairement à ce que je vois, à ce que j'entends souvent, à ce qui est devenu une sorte de rengaine, il n'y a pas lieu d'être pessimiste. Mais il y a lieu d'observer la réalité européenne, pour bien comprendre que nous sommes dans une phase de grands changements. D'un côté, il y a la monnaie - c'est un événement déjà acquis : les grandes entreprises européennes, les grandes banques, les grandes institutions financières sont déjà en train de préparer l'avènement de la monnaie unique. Pendant que, dans les médias, des hommes politiques parfois, des observateurs, tiennent des propos, jacassent, les spécialistes, eux, savent que cela va se faire. Ils s'y préparent et cela demande en effet une préparation technique formidable.

Et je crois que l'on peut dire que ce sera le parachèvement de la route entreprise en 1958 : faire de l'Union européenne aujourd'hui, le Marché commun à l'époque, un grand espace politique organisé.

Quand on regarde le chemin parcouru depuis 40 ans, c'est un chemin formidable. La CIG va parachever cette oeuvre, et en quelque sorte la clôturer.

Car je crois que le travail a été accompli et désormais qu'un peu moins de centralisation, un peu moins de réglementation économique sera nécessaire. La manie à Bruxelles de concevoir des réglementations en tous sens, ce n'est pas la voie de l'avenir. Nous entrons dans une nouvelle période. Et cette nouvelle période, personne ne veut en prendre conscience. C'est l'élargissement, c'est-à-dire la grande Europe. Cette grande Europe ouvre une nouvelle page de l'Histoire européenne. Et l'esprit d'anticipation consistera désormais à tirer toutes les conséquences de l'élargissement.

Nous Français, non seulement nous acceptons cet élargissement, qui apparaît désormais comme un objectif politique majeur : rassembler autour de la même table, pour la première fois dans l'Histoire de l'Europe, l'ensemble des nations européennes, et pour les mêmes raisons qu'à l'origine, pour que l'Europe ne soit plus jamais divisée et déchirée, et pour la prospérité.

Nous terminons quarante années et nous ouvrons une nouvelle période de l'Europe, une nouvelle période de l'Histoire européenne qui va certainement être riche d'événements, de tensions sans doute, mais aussi de progrès.

Q - Sur les institutions, il n'y a aucun accord. Vous dites qu'il faut faire un texte, avec des crochets. Si l'on n'entre pas dans le vif de la négociation, on va continuer de tourner longtemps autour du pot. R - Le rôle de la présidence, c'est précisément de prendre ses responsabilités, d'entrer dans le sujet, de faire des propositions.

Q - La France est prête à renoncer à un commissaire ?
R - Comprenez-moi bien : si c'est dix, nous sommes prêts à dire : la Commission sera composée de dix membres, et sur une base de rotation. Nous sommes ouverts. Autrement dit, nous faisons preuve de logique avec nous-mêmes. Nous voulons travailler pour l'intérêt général de l'Union parce que nous pensons que la Commission a un rôle important, si on lui rend sa nature et ses qualités originelles. Nous sommes disposés, et dans ce cadre-là, à l'accepter. Mais si c'est pour nous dire que finalement, on réduit les membres de la Commission, à quinze membres, un par pays. Alors là, ne doutez pas que nous n'accepterons jamais ça. Jamais.

Q - (Propos tenus par M. Lamberto Dini sur un report dans l'entrée de l'UEM). R - Une dépêche a prêté à M. Dini les propos que vous évoquez. Une autre dépêche dit qu'il n'a jamais demandé un report de l'Union monétaire. Je ne vais pas réagir aux propos de M. Dini car je n'arrive pas à savoir ce qu'il a dit exactement.

Je vais répondre à la question générale : peut-on modifier ? C'est très simple. D'abord, ce n'est pas le calendrier de l'euro qui nous oblige, par exemple nous Français, à mettre de l'ordre dans nos affaires. C'est le taux de chômage qui nous y oblige. Et tant que nous n'aurons pas mis de l'ordre dans nos affaires, dans nos comptes sociaux et dans nos comptes publics, nous n'aurons pas la reprise économique que nous recherchons.

Il est vrai qu'il y a une échéance fixée par le Traité. Mais je le répète, les exigences de la mise au net des comptes publics français, sont directement liées au taux de chômage de la France. Si la France veut sortir de sa situation de chômage élevé - ce à quoi travaille le gouvernement - c'est en mettant de l'ordre dans ses affaires.

Alors, si on voulait changer quelque chose à l'ensemble des règles concernant le passage à la troisième phase de l'Union économique et monétaire - cela concernerait le calendrier, cela pourrait concerner les critères - il faudrait renégocier le Traité. La France ne le proposera jamais. Nous pensons simplement qu'il y a un Traité qu'il faut appliquer. Ce Traité comprend un certain nombre de dispositions, qui fixent un calendrier, des critères. Il faut s'y tenir.

J'ajoute que, si par extraordinaire, vous rouvrez la négociation, il n'y aura plus d'accord du tout, sur rien. Vous le sentez bien. Un certain nombre de pays aujourd'hui, sans doute, ne seraient pas prêts.

C'est pourquoi, c'est l'intérêt général et l'intérêt de la France de respecter tous les engagements auxquels nous avons souscrits. Au lieu de regarder la monnaie unique comme un fardeau, comme une contrainte, comme un poids, je la regarde comme un projet, comme un espoir, comme une force, parce que dans ce monde où il n'y a qu'une seule grande monnaie mondiale, nous allons en créer une seconde, qui sera peut-être la première, à terme, mais qui en tout cas, changera la balance des forces économiques et financières du monde, et naturellement, au profit de l'emploi et de la croissance chez nous, en France, en Italie, dans toute l'Europe.

Q - Si vous deviez choisir entre un bon accord sur la CIG et le respect du
calendrier ?

R - Les espoirs que nous mettons dans la négociation sont, somme toute, modestes. C'est cette modestie qui nous fait penser que nous devrions normalement tenir le calendrier. Et je ne sais pas ce que vous appelez un bon accord et a fortiori un mauvais. Le fait est que le fond l'emporte sur le calendrier.

Q - En Albanie, une mission humanitaire est-elle décidée ou non ?
R - Je voudrais ramener les choses à ce qu'elles sont. L'Union européenne a décidé hier d'engager une action importante, forte, en Albanie. Sur le plan humanitaire, économique, financier et d'assistance politique et administrative. Elle a constaté d'autre part que certains pays étaient disposés à mettre des forces de stabilisation au service de cette politique, si cela s'avérait nécessaire. Sur cette base, il y a des concertations autour de l'Italie, par définition, et quelques autres pays qui sont prêts, dont la France.

Q - Où en est l'envoi d'une mission militaire ?
R - Il faut s'adapter aux circonstances. La situation a déjà évolué en huit jours. Ce qui est nécessaire, à mon avis, ce qui est urgent, c'est le volet civil, l'aide humanitaire, économique et financière, l'aide à la stabilisation politique et administrative, et même l'aide à la reconstitution de l'armée et de la police par des moyens de formation. L'aspect de stabilisation militaro-policière, fait l'objet de discussions. Certains pays ne veulent pas s'en mêler. La France est disposée à soutenir l'Italie.

Q - Que pensez-vous de la réaction négative de M. Rifkind sur le document des
Six sur l'UE et l'UEO ?

R -Nous savons depuis longtemps qu'il y a un débat. Il y a ceux qui souhaitent que l'Europe ne s'occupe pas de défense, disant que c'est l'affaire de l'UEO ; ceux qui souhaitent que l'Union européenne soit seule à s'occuper de défense ; et puis ceux qui cherchent des solutions qui tiennent compte des réalités. Le document que nous avons présenté est un effort de conciliation de ces points de vue. Je ne suis pas surpris des propos qu'a pu tenir M. Rifkind. Nous savons que la Grande Bretagne est assez défavorable à la perspective d'un renforcement des relations entre l'UEO et l'Union européenne.

Q - La question de la réduction du nombre des commissaires pourrait-elle faire échouer la négociation ?

R - Je ne vois rien qui puisse faire échouer la négociation. Il est possible que l'on ait besoin d'un peu plus de temps que prévu, si c'est nécessaire. Vous me voyez revenir à Paris en disant : "C'est formidable, c'est un grand progrès, il y avait deux commissaires pour la France et un pour les autres, et désormais il y en a un pour la France et pour les autres". Ce serait un grand succès en effet !

Q - Etes-vous en faveur d'un Conseil européen extraordinaire au lendemain des
élections britanniques ?

R - Ecoutez, c'est la présidence qui en aura la responsabilité. De toute façon, il y aura un nouveau gouvernement britannique, et il faudra bien que l'on se voie. Mais c'est la responsabilité de la présidence..

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 octobre 2001)