Déclaration de M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille, sur la protection de l'enfance, le rôle de l'Aide sociale à l'enfance et l'action éducative à domicile, Paris le 26 novembre 2002.

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Circonstance : Installation du groupe de travail sur la protection de l'enfance, à Paris le 26 novembre 2002

Texte intégral

Mesdames, messieurs,
La protection de l'enfance :
. touche chaque année plusieurs dizaines de milliers d'enfants,
. marque la vie de plusieurs centaines de milliers de personnes dans notre pays : enfants et adolescents, parents et proches, professionnels et nombre de bénévoles d'associations.
Les chiffres sont éloquents !
En 2001 :
. près de 136 000 enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance ;
. 127 000 actions éducatives à domicile.
Le plus souvent, pour des raisons objectives,
. la justice décide de séparer les enfants des parents,
. éventuellement et malencontreusement, disperse les fratries.
. Ceci dit, des écrits de psychiatres dont les vôtres Docteur Maurice BERGER, indiquent qu'il est des cas où la séparation des enfants de leurs parents est une condition impérative du bon développement des enfants.
. Parfois même, on estime que cet éloignement se fait trop tard.
. C'est peut-être un des thèmes que vous aborderez dans vos travaux.
Je pense qu'il nous faut concilier deux impératifs :
. les séparations indispensables ne doivent pas arriver de façon trop tardive ;
. la prévention vis-à-vis des dégradations des situations familiales doit être recherchée.
Il s'agit cependant d'un moment déchirant de la vie qui reste une plaie béante dans le cur de ceux qui ont dû l'affronter.
Pour toutes ces raisons, nous sommes tous face à un problème de société réel et douloureux.
En tant qu'élu je sais ce qu'est la réalité de ce problème mais en tant que ministre, j'en mesure l'ampleur :
. il est complexe,
. et mal connu.
Ainsi, les lois des 7 et 22 janvier 1983 sur la décentralisation ont conféré aux départements des compétences partagées avec le ministère de la justice en matière d'aide sociale à l'enfance (ASE).
Les dispositions régissant le service d'ASE ont été codifiées par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale.
Je le rappelle, la mission d'intérêt général et d'ordre public de l'ASE est d'apporter à chaque enfant en difficulté ou en danger la prestation la mieux adaptée à sa situation.
Elle exige donc une attention particulière de la part des pouvoirs publics pour que le retour de ces enfants soit rendu possible au sein de leurs familles redevenues aptes à les recevoir.
En 2000, 4,3 Md ont été dépensés par les Conseils généraux dans le cadre de l'ASE :
. soit environ 72 par habitant
. mais de profondes disparités allant de 20 à 176 en fonction du département.
. Ces dépenses sont en augmentation de 8 % depuis 1996.
Des disparités financières mais aussi des disparités en termes d'organisation comme en témoignent de nombreux rapports de contrôle, en particulier, de l'Inspection générale des affaires sociales.
Les raisons qui conduisent à ces drames de l'ASE sont nombreuses et souvent connues (affectives, sociales ou économiques).
Elles nécessitent désormais une approche alliant nombre de compétences de la part de l'ensemble des professionnels de la protection de l'enfance.
Pourtant, le travail en réseau, dans une perspective pluridisciplinaire, est insuffisamment développé.
L'incompréhension mutuelle des différentes parties prenantes, parents, enfants, juges, travailleurs sociaux, équipes médico-sociales demeure encore perceptible.
L'action conjuguée de l'État et des collectivités territoriales a beaucoup évolué au cours de ces dix dernières années, en particulier, vers plus d'efficacité mais beaucoup reste à faire.
Au total, une mobilisation est certes sensible mais sa traduction opérationnelle doit être renforcée, accélérée au regard de la sensibilité du problème posé.
De nombreux rapports ont ouvert des pistes qui sont restées cependant inexplorées.
Le chemin à parcourir reste donc long pour que les actions des multiples intervenants répondent pleinement aux attentes :
. de parents souvent stigmatisés,
. d'enfants fragilisés par un passé difficile.
Pour toutes ces raisons, j'ai décidé de mettre en place un groupe de travail sur la protection de l'enfance.
J'en ai confié la présidence à Pierre NAVES que vous connaissez tous.
Le gouvernement veut donner :
. à tous les parents les moyens de pouvoir face aux devoirs qu'appelle la parentalité,
. et à tous les enfants le droit de devenir des adultes, des citoyens, capables de prendre en main leur avenir et aptes à assumer leurs responsabilités.
C'est à ce prix que l'histoire ne se répétera pas !
Je vous remercie donc tous d'avoir bien voulu accepter de participer à ce groupe de travail. Je le sais vous êtes tous de fins connaisseurs du sujet.
J'attends des propositions concrètes pour la fin du mois de mars :
. afin que le dispositif soit plus opérationnel et efficace,
. et à la mesure de l'attente des professionnels et des enjeux humains en lice.
Je vous remercie.


(source http://www.social.gouv.fr, le 29 novembre 2002)