Discours de M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme, sur les grands axes de sa politique touristique : l'action internationale, la revalorisation des métiers du tourisme, l'amélioration de l'outil statistique, la coordination interministérielle, Deauville, le 19 septembre 2002.

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Circonstance : Salon Top Resa à Deauville le 19 septembre 2002

Texte intégral

Mesdames et messieurs,
Depuis mon entrée au gouvernement, comme je m'y étais engagé, j'ai déjà rencontré beaucoup d'entre vous.
Ces entretiens m'ont permis de vous connaître, de vous écouter et de mesurer vos préoccupations et vos attentes.
Je suis très heureux d'être avec vous aujourd'hui, à l'inauguration de votre salon professionnel. C'est pour moi l'occasion de poursuivre le dialogue engagé.
La France, première destination mondiale !!!
- 76,5 millions de touristes
- 1ère industrie française
- 17,2 milliards d'euro en chiffre d'affaires pour 2001
- 7 % du PIB
- 3 millions de salariés dont 1 million d'emplois directs
C'est considérable !!! On ne le répète jamais assez !
Ces très bons résultats, dont nous pouvons être collectivement fiers, sont plus qu'encourageants pour l'avenir.
Mais nous devons rester très vigilants.
Aujourd'hui, le tourisme connaît de profondes mutations.
Sous l'effet de la mondialisation, de la construction européenne et des stratégies économiques, les regroupements dans ce secteur se multiplient.
Les agences de voyages, les systèmes de réservation, les transports, l'industrie hôtelière sont à l'heure des partenariats et des fusions.
La demande des consommateurs elle-même évolue !! Elle se caractérise désormais par une exigence croissante de qualité.
Les comportements changent. Les touristes préfèrent les déplacements de courte durée, et plus fréquents.
La France, terrain privilégié de ces mutations au coeur de l'Europe, attire les convoitises des plus grands groupes.
Les nouvelles technologies engagent le tourisme dans une ère nouvelle, celle de l'information interactive, de la promotion et de la distribution en ligne. La maîtrise de cet outil est incontournable !
Dans ce nouveau contexte, les concurrences entre continents se sont accrues. De nouvelles destinations ont émergé telles la Chine, Saint-Domingue, Cuba, le Brésil ou l'Australie.
Plus près de nous, c'est l'Europe de l'Est ou encore la Croatie. Notre voisin, l'Espagne, a pris lui aussi la juste mesure de toutes ces évolutions. Il s'est donné, ces dernières années, les moyens d'une nouvelle stratégie touristique. Elle s'appuie sur la valorisation d'un riche patrimoine culturel et paysager et sur d'importants moyens de promotion et de communication.
L'Italie, elle aussi, revoit les modes d'organisation de son économie touristique pour se positionner comme un des grands leaders du bassin méditerranéen.
D'autres pays et destinations, que vous connaissez bien, affichent d'ambitieux programmes touristiques.
L'euro a aussi modifié le comportement touristique. En facilitant les échanges tant au niveau européen que mondial, il offre également une opportunité nouvelle de comparaisons entre produits et destinations.
Enfin, l'analyse détaillée des déplacements et des fréquentations touristiques en Europe et dans le monde, met en évidence la montée des exigences en matière de sécurité.
Elle se traduit le plus souvent par une grande réactivité aux événements politiques, ou sociaux : on délaisse certains transports, on évite certaines destinations, on annule ou on reporte des voyages à la dernière minute...
A ce titre, les nouvelles exigences et les nouveaux critères de décision du consommateur sont à considérer avec le plus grand sérieux.
Tout ce que je viens d'évoquer est révélateur de l'extrême fragilité du secteur touristique.
D'ailleurs, la profession a souffert après les événements du 11 septembre. J'en ai conscience.
Je salue ici, la solidarité professionnelle et publique qui a pleinement joué son rôle.
Cette situation ne peut nous laisser indifférents.
Que faut-il donc faire ?
Nous devons, bien entendu, chacun dans l'exercice de ses compétences respectives, travailler dès maintenant et sans relâche dans la même direction, pour le même objectif : un mieux tourisme.

Mesdames et Messieurs,
Je voudrais pour ma part vous dire comment je prévois mon action à très court terme :
- au niveau du Secrétariat d'Etat
- avec mes collègues du gouvernement
- avec vous, les acteurs du terrain
Au niveau du Secrétariat d'Etat, je souhaite d'abord insister sur l'action internationale.
Car c'est elle, bien sûr, qui véhicule l'image de la France à l'étranger. Et c'est une compétence que l'Etat doit non seulement garder, mais aussi amplifier avec Maison de la France, pour que cette image soit claire et lisible dans le monde.
Mais nous devons aussi mieux utiliser notre réseau diplomatique. C'est pourquoi, fin août, à l'occasion du 10ème anniversaire de la conférence des ambassadeurs, j'ai eu le plaisir de présider un déjeuner de travail, en présence d'une quarantaine de diplomates.
Aux côtés de Dominique de Villepin, j'ai mesuré l'engagement de nos compatriotes à faire vivre la France à l'étranger et le soutien qu'ils apportent à la promotion de notre pays. J'ai constaté que nos ambassadeurs sont désormais davantage encore acquis à l'idée que le tourisme français est une composante de la politique extérieure et qu'il constitue un enjeu économique majeur.
Dans cet esprit, j'ai sollicité leur soutien dans l'action de valorisation de l'image de la France, de ses régions et de ses produits.
C'est dans ce même esprit, que j'ai insisté auprès d'eux sur la dimension essentielle que représente, à mes yeux, la coopération internationale et l'exportation de nos savoir-faire touristiques.
J'entends, à ce niveau, redynamiser les accords de coopération qui nous lient à de nombreux pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique du Sud, notamment ceux des destinations touristiques de demain.
Mais si nous travaillons à un rayonnement croissant de la France à l'étranger, nous devons aussi accompagner les entreprises françaises dans la conception et la réalisation de leurs produits.
Et dans cette optique, il faut se donner les moyens de rendre les métiers du tourisme plus attractifs et d'adapter la formation professionnelle en valorisant les filières.
Je suis très attentif au phénomène de "pénurie" qui touche des emplois qualifiés comme celui, par exemple de cuisinier.
De même, les conditions de vie et de travail des saisonniers m'interpellent fortement.
La désaffection des jeunes pour les métiers de l'hôtellerie restauration n'est pas nouvelle. Mais elle s'amplifie. L'ANPE a dénombré en 2001 près de 54.000 offres d'emplois non pourvues.
Certes, la mise en place des contrats jeunes est une première réponse.
Mais nous devons aller plus loin.
La diversité des produits touristiques induit de nouvelles activités qui doivent être valorisées pour intéresser les jeunes. Une concertation permanente avec les professionnels, notre département ministériel, et l'Education Nationale doit conduire à l'élaboration de nouvelles formations sanctionnées par des diplômes reconnus par les pouvoirs publics.
C'est ainsi d'ailleurs, que les premiers diplômés des nouveaux BTS correspondants aux particularités des agences de voyages, des offices de tourisme et des syndicats d'initiative doivent arriver sur le marché du travail dès l'été prochain.
Cette question des nouveaux enseignements est essentielle. Je demanderai au gouvernement de nommer dans les prochains jours un parlementaire en mission afin de faire un état des lieux et des propositions.
Et j'en viens maintenant tout naturellement à vous parler de l'appareil statistique.
J'ai constaté depuis mon arrivée qu'il était parfois difficile de disposer de chiffres complets et fiables sur certains aspects de l'activité touristique.
C'est pourquoi, je désignerai sans tarder une mission de réflexion sur l'outil statistique disponible afin de le rendre plus complet, plus rigoureux, plus réactif et plus opérationnel.
L'évaluation précise du poids économique du tourisme doit permettre en effet une meilleure reconnaissance et une plus grande valorisation du premier secteur économique français.
En second lieu, avec mes collègues du gouvernement, et compte tenu du caractère transversal du tourisme, je serai amené à intervenir auprès d'eux sur les sujets qui vous touchent très directement.
Le premier d'entre eux est la sécurité.
Vous connaissez l'implication du gouvernement sur ce dossier, qui a placé au sommet de ses priorités la lutte contre toutes les formes de violences et de délinquances à l'encontre des personnes et des biens. Je n'ai pas manqué de signaler à Nicolas Sarkozy les inquiétudes de la profession, notamment dans certaines régions.
Lorsque se posera un problème en matière d'alimentation, par exemple, je ne manquerai de faire appel à Hervé Gaymard, ou Renaud Dutreil pour l'hygiène.
De même un problème de transport m'amènera tout naturellement à travailler avec Dominique Bussereau pour trouver avec lui une solution dans les meilleurs délais.
Depuis mon entrée au gouvernement, j'agis bien sûr, en étroite collaboration, avec Gilles de Robien. Nos équipes respectives travaillent de concert tous les jours.
Il n'y a pas, en fait, de ministère avec lequel je ne serai appelé à travailler, et pour l'illustrer, je vous dirai qu'en ce moment même, j'étudie avec Hamlaoui Mékachéra, Secrétaire d'Etat aux Anciens Combattants, le dossier du tourisme de mémoire !
Vous l'avez compris, je m'attache à faire prendre en compte la place du tourisme dans tous les textes de lois qui seront soumis à l'approbation du parlement.
Comme je vous le rappelais, dès le début, je me suis attaché à rencontrer les acteurs du tourisme français dans toute leur diversité et je continuerai à le faire, car je veux être à leur écoute.
Je veux être un ministre partenaire.
Partenaire de l'assouplissement des 35 heures, partenaire pour l'allégement des charges, partenaire pour la baisse de la TVA, partenaire pour la modification de la loi du 13 juillet 1992.
Concernant tout d'abord, l'assouplissement des 35 heures.
Il faut offrir à la profession, aux employeurs comme aux salariés, la possibilité de s'adapter. On doit pouvoir travailler plus pour gagner plus.
François Fillon vient d'annoncer les mesures gouvernementales dans ce sens. Pour ma part je m'attacherai bien sûr, à faire reconnaître les particularités du tourisme dans ce nouveau dispositif.
De même l'allégement des charges sur les bas salaires aidera à favoriser l'emploi. Ces mesures, dont vont bénéficier la plupart des entreprises de notre secteur, auront des effets positifs à plus d'un titre.
La baisse de la TVA est depuis plusieurs années, une revendication des restaurateurs. Il existe, et c'est vrai, une distorsion de concurrence avec la restauration rapide et celle d'un certain nombre de pays européens.
Cette baisse favorisera la compétitivité de la restauration française vis à vis des destinations concurrentes.
Et cette baisse de la TVA est une volonté politique du Président Jacques Chirac. Nous tiendrons promesse.
A ce titre le Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin s'est rendu à Bruxelles au début de cette semaine. Les résultats de ce déplacement sont très bons.
Quant à moi, je m'associe pleinement aux négociations que conduit, dans ce même sens, Noëlle Lenoir auprès des instances européennes.
Mesdames et messieurs,
Comment ne pas parler, ici, à Top Resa, de la loi du 13 juillet 1992 relative à la vente des voyages à forfait ?
A l'origine l'objectif de la loi était de protéger le consommateur tout en favorisant le développement des différents modes de commercialisation, en particulier le tourisme d'accueil.
Aujourd'hui cette loi n'est plus satisfaisante, et vous êtes nombreux à souhaiter sa refonte.
Les questions de garantie financière et de responsabilité de plein droit nécessitent d'être clarifiées. Et le texte ne tient pas compte des nouvelles technologies liées à l'information et à la réservation des produits.
Pour toutes ces raisons, l'évolution de cette loi, représente pour moi un chantier prioritaire.
Je mènerai une large concertation avec tous les acteurs du tourisme, et j'entends l'engager dans les prochaines semaines en vue d'élaborer un projet de loi pour la fin 2003, au plus tard.
Je m'engage également à faire aboutir rapidement le Code du Tourisme.
Il s'inscrit dans le sens de la simplification voulue par le gouvernement. Il est un élément important de la reconnaissance de notre industrie. Ces textes législatifs permettront, j'en suis convaincu, de mieux préparer notre pays aux évolutions rapides du tourisme.
Face à une offre touristique abondante, dont témoigne ce magnifique salon, et face à une clientèle toujours plus exigeante, nous devons adopter une politique du tourisme volontariste.
Je sais, comme vous, qu'elle ne peut se concevoir sans investissements significatifs, dans une démarche "qualité".
Dans ce sens, l'action de l'Etat s'articule aujourd'hui autour de 2 types de démarches :
- Les classements réglementaires
- Les labels et les certificats
Concernant les classements, il nous revient, ensemble, de veiller à leur adaptation constante aux attentes de la clientèle. C'est à dire, de les enrichir et de les rendre toujours plus performants, afin d'offrir à toutes celles et ceux qui visitent la France, des prestations, un accueil, un service et les garanties d'une qualité irréprochable.
Les classements offrent aussi une meilleure lisibilité de l'offre et facilitent sa commercialisation.
Je suis prêt, avec votre participation active, à ouvrir le chantier de leur modernisation.
En ce qui concerne les labels et les certificats, l'Etat a montré que son soutien vous est acquis.
Nous poursuivrons cette démarche. Je prévois d'entreprendre les actions nécessaires à l'amélioration de la qualité des services dans les aéroports, qui sont bien souvent la première image que se font de la France nos visiteurs.
La qualité est une nécessité absolue que nous devons partager pour assurer le développement durable des activités et des métiers du tourisme.
Je souhaite mettre en place un véritable Plan Qualité France pour le tourisme.
Mes services participeront, sur la base d'analyses de marché et de satisfaction de clientèle, à l'élaboration d'un guide stratégique.
Ce guide mettra en exergue l'ensemble des démarches existantes ou à venir qui contribuent à l'amélioration de la qualité de l'accueil et de service.
Développer un tourisme de qualité, c'est aussi veiller à en assurer la durabilité par une plus grande prise en compte de l'environnement naturel, culturel et social des territoires dans les politiques qui seront mises en oeuvre.
La France est, et doit rester, une référence mondiale et un modèle en matière de tourisme.
Nous savons que 80 % des touristes se concentrent sur 20 % du territoire.
Mes actions viseront aussi à équilibrer les flux touristiques sur l'ensemble du pays, en s'inspirant des principes du développement durable : maîtrise des concentrations spatiales et temporelles.
Et il ne peut y avoir de développement durable du tourisme sans renforcement de l'attractivité de nouveaux territoires.
Les touristes accordent de plus en plus d'intérêt au patrimoine local, à la richesse des animations et au mode de vie des populations.
Dans les stratégies de développement local, il est nécessaire de rapprocher les partenaires et aussi d'y associer les habitants. L'exemple des parcs naturels régionaux constituent à ce niveau un atout précieux.
Mais cette politique basée sur la qualité et le développement durable ne peut s'appliquer sans décentralisation.
Ce vaste débat, voulu par le Premier Ministre, sera l'occasion de redéfinir les liens entre collectivités et Etat, entre secteur public et privé pour trouver de nouvelles synergies, mais aussi une plus grande proximité entre professionnels et population.
Nous prendrons naturellement toute notre part dans ce débat.
Car le tourisme peut à bien des égards être précurseur en la matière :
Par souci d'une modernisation, d'une simplification, d'une cohérence, et d'une plus grande efficacité.
Il est prévu que le processus de décentralisation puisse prendre la forme d'une expérimentation limitée dans le temps et à l'échelle de la région.
Il conviendra donc que l'Etat recentre ses objectifs sur la politique de promotion.
Et aussi sur la cohérence du développement des équipements et l'aménagement touristique de l'ensemble de notre territoire.

Mesdames et messieurs,
je ne serai pas complet, si, devant vous, je n'évoquais pas mon attachement profond à notre France de l'Outre-Mer.
La situation touristique y apparaît contrastée.
Ces régions françaises éloignées constituent en effet, un ensemble très hétérogène, du fait de leur diversité géographique et culturelle.
Le tourisme y représente une activité économique essentielle, même si sa place y est variable, bien sûr.
En 2001, ce sont 2 millions de visiteurs qui se sont rendus dans l'outre-mer français, ce qui génère environ 40.000 emplois.
Pour autant, malgré des atouts considérables, le tourisme outre-mer subit depuis quelques années un relatif tassement.
Et les chiffres démontrent qu'il existe de grandes difficultés.
C'est pourquoi, j'ai engagé un travail avec ma collègue Brigitte Girardin, qui devrait aboutir à un plan d'action en faveur du tourisme domien.
J'effectuerai, dans ce cadre, de nombreux déplacements avant la fin de l'année, pour rencontrer les élus et les acteurs touristiques.
Ecouter, comprendre et trouver in situ les solutions les plus adaptées.
Mesdames et messieurs,
en trois mois, j'ai ouvert des chantiers dans un grand nombre de domaines : l'international, la fiscalité, le social, la formation, la réglementation, le tourisme durable, les transports, l'outre-mer.
De par la position même du Secrétariat d'Etat au Tourisme, je suis proche de tous les centres de décision de l'Etat et au carrefour de toutes les compétences administratives.
Et j'agis.
Vous ici réunis, vous êtes les acteurs de l'activité touristique en France.
Vous appartenez à la première industrie française.
Vous êtes donc le moteur de l'économie française.
Je vous propose, ensemble, dans les années à venir, de travailler à gagner des parts de marché et favoriser l'allongement des séjours dans notre pays.
Ces objectifs économiques n'excluent pas pour autant la vision humaniste que nous devons avoir du tourisme.
Les débats du sommet de Johannesburg nous encouragent à promouvoir et à sensibiliser les visiteurs au tourisme éthique.
Ces objectifs économiques n'excluent pas non plus mon engagement à soutenir le tourisme social et associatif. Je poursuivrai donc, par exemple, la politique d'élargissement d'accès aux chèques vacances, surtout en faveur des salariées des Petites et Moyennes Entreprises
De même, vous le savez, nous travaillons depuis quelque temps à l'attribution d'un label "Tourisme et Handicap" pour favoriser l'accueil de tous aux loisirs.
C'est un élément important de l'action prioritaire en faveur des handicapés, voulue par le Président de la République lui-même.
Pour mener à bien l'ensemble de ces objectifs politiques, je suis votre partenaire.
Je veux travailler avec vous dans la confiance sans tabou et sans complexe.
A chacun son métier : vous créez de la richesse et des emplois.
Mon rôle, c'est de vous soutenir.
Je vous remercie de votre attention.


(source http://www.tourisme.equipement.gouv.fr, le 20 septembre 2002)