Texte intégral
Comment voyez-vous le paysage à droite aujourd'hui ?
C'est un paysage plus équilibré. Autrefois, il y avait un parti dominant et des satellites. Cela nous a coûté cher en stagnation et en conflits. Si un parti est dominant, c'est lui qui dicte sa loi, les idées nouvelles ne peuvent pas apparaître et les autres mouvements ont un grand sentiment de frustation. Aujourd'hui, le jeu est plus ouvert et l'attente d'idées nouvelles est grande.
Et le RPR de Michèle Alliot-Marie ?
Je connais bien Michèle Alliot-Marie. Nous sommes élus du même département, les Pyrénées-Atlantiques. Nous avons des relations proches et confiantes, éprouvées à l'usage du temps. Je sais qu'elle aura un double souci : reconstruire sa maison et permettre une nouvelle coopération au sein de l'opposition.
Selon vous, quelle est la priorité entre union et affirmation de l'identité de chacun ?
Que chacun se sente bien dans sa peau, et nous n'aurons aucun mal à travailler ensemble. Nous avons un immense besoin de parler à la France le langage d'une volonté nouvelle et d'une vision dont elle a oublié même le souvenir. Alors que chacun fasse connaître ses idées, et celles qui sonneront juste s'imposeront.
Mais les élections municipales ont lieu dans moins de quinze mois.
C'est un grand enjeu. De quoi avons-nous besoin pour les gagner ? D'abord d'équipes nouvelles. C'est l'usure du personnel politique qui est souvent la plus grande menace. Nous devons faire toute la place à une génération nouvelle et ne pas hésiter à la jeter dans le grand bain. Pour ma part, j'y suis décidé.
Aux dernières élections partielles, le candidat RPF de Charles Pasqua a refusé de prendre parti entre droite et gauche !
C'est une faute contre le bon sens. Le RPF ne peut pas se mettre ainsi à part de l'opposition républicaine. Son unité n'y résisterait pas. Et cette marginalisation lui enlèverait toute perspective. Je suis certain qu'il devra modifier son attitude.
Votre nouvelle partenaire, la présidente du RPR, a exprimé son hostilité au projet de loi sur la parité hommes-femmes. Quelle sera la position de l'UDF ?
Nous aurions préféré que la place des femmes en politique soit garantie naturellement et sans qu'il y ait besoin d'une loi ! Les grandes formations auraient pu, si elles l'avaient voulu, se mettre d'accord sur ce point. L'autodiscipline aurait été plus digne et plus exemplaire. Mais, puisque les choses n'avancent pas, nous soutiendrons l'idée de parité, qui au moins nous assurera un profond renouvellement.
Vous reconnaissez-vous une part de responsabilité dans le machisme ambiant ?
Non. Ces derniers mois, je me réjouis du succès de Nicole Fontaine à la présidence du Parlement européen, d'Anne-Marie Comparini à celle de la région Rhône-Alpes, et , cette semaine, d'Anne-Marie Idrac à la présidence du Mouvement européen. Cela, c'est de la parité dans les actes et pas seulement dans les mots. Et pour moi, c'est un mouvement naturel. Les femmes en politique ne sont pas dans les rivalités perpétuelles. Elles ne mettent pas toute leur énergie dans les rapports de forces. Grâce à elles, lorsqu'elles ont des responsabilités, le climat politique est transformé. Leur présence permettra une jouvence de la vie démocratique.
Le procès des anciens dirigeants du CDS, avec l'affaire d'un compte en Suisse, ne va pas aider les Français à retrouver confiance dans leur classe politique.
C'est un procès très dur. Voilà des hommes honnêtes, que personne ne soupçonne d'avantages personnels, et qui sont en réalité les victimes d'un système d'un autre temps, dont tout le monde était complice. A l'époque il n'y avait aucun moyen de financer légalement l'action politique ! Tout venait des entreprises, l'Etat ne donnait pas un franc. C'était une illégalité que la désinvolture générale rendait obligatoire. On leur reproche d'avoir reçu, sans le savoir, deux versements, il y a près de dix ans. Y a-t-il proportionnalité entre l'erreur commise, la punition, et l'opprobre que ces hommes honorables subissent depuis des années ? Je ne crois pas. J'espère que le jugement leur rendra justice. Mais qui leur rendra les années perdues ?
Vous, l'européen, comment jugez-vous le sommet d'Helsinki ?
Il y a une bonne nouvelle : la décision de créer une Force d'action rapide européenne. C'est un grand pas en avant. Mais il y a pour moi de graves motifs d'inquiétude. Accepter la candidature de la Turquie, c'est changer la nature de l'Europe. L'Europe, pour moi, c'est une famille de nations, unies par l'histoire, la géographie et la civilisation. La Turquie, voisine et amie, n'est cependant pas européenne. Ce genre de décisions, prises sans que les peuples y soient le moins du monde associés, nous conduit à une Europe sans unité et dans laquelle les citoyens ne se reconnaissent pas.
Chirac et Jospin sont d'accord sur ce point !
Ce n'est pas parce que le Président et le Premier ministre sont d'accord sur ce point qu'ils ne se trompent pas ! Ils sont aussi d'accord pour éviter une grande réforme des institutions européennes. Sur ce point aussi, je crois qu'ils se trompent et qu'il aurait fallu voir plus grand : l'Europe va vers le blocage et la crise. Comment la réconcilier avec les citoyens ? Comment faire marcher une Europe à 30 ? Il lui faut une Constitution pour devenir un ensemble démocratique ; il lui faut une figure de proue pour parler en son nom, faire avancer les choses et fédérer les différences immenses ; il faut que les pays qui veulent aller de l'avant puissent le faire. A 30, c'est l'Europe toute entière qu'il faut régénérer. On n'en prend pas le chemin. Et la France ne montre pas la voie comme elle le devrait.
(source http://www.udf.org, le 13 décembre 1999)
C'est un paysage plus équilibré. Autrefois, il y avait un parti dominant et des satellites. Cela nous a coûté cher en stagnation et en conflits. Si un parti est dominant, c'est lui qui dicte sa loi, les idées nouvelles ne peuvent pas apparaître et les autres mouvements ont un grand sentiment de frustation. Aujourd'hui, le jeu est plus ouvert et l'attente d'idées nouvelles est grande.
Et le RPR de Michèle Alliot-Marie ?
Je connais bien Michèle Alliot-Marie. Nous sommes élus du même département, les Pyrénées-Atlantiques. Nous avons des relations proches et confiantes, éprouvées à l'usage du temps. Je sais qu'elle aura un double souci : reconstruire sa maison et permettre une nouvelle coopération au sein de l'opposition.
Selon vous, quelle est la priorité entre union et affirmation de l'identité de chacun ?
Que chacun se sente bien dans sa peau, et nous n'aurons aucun mal à travailler ensemble. Nous avons un immense besoin de parler à la France le langage d'une volonté nouvelle et d'une vision dont elle a oublié même le souvenir. Alors que chacun fasse connaître ses idées, et celles qui sonneront juste s'imposeront.
Mais les élections municipales ont lieu dans moins de quinze mois.
C'est un grand enjeu. De quoi avons-nous besoin pour les gagner ? D'abord d'équipes nouvelles. C'est l'usure du personnel politique qui est souvent la plus grande menace. Nous devons faire toute la place à une génération nouvelle et ne pas hésiter à la jeter dans le grand bain. Pour ma part, j'y suis décidé.
Aux dernières élections partielles, le candidat RPF de Charles Pasqua a refusé de prendre parti entre droite et gauche !
C'est une faute contre le bon sens. Le RPF ne peut pas se mettre ainsi à part de l'opposition républicaine. Son unité n'y résisterait pas. Et cette marginalisation lui enlèverait toute perspective. Je suis certain qu'il devra modifier son attitude.
Votre nouvelle partenaire, la présidente du RPR, a exprimé son hostilité au projet de loi sur la parité hommes-femmes. Quelle sera la position de l'UDF ?
Nous aurions préféré que la place des femmes en politique soit garantie naturellement et sans qu'il y ait besoin d'une loi ! Les grandes formations auraient pu, si elles l'avaient voulu, se mettre d'accord sur ce point. L'autodiscipline aurait été plus digne et plus exemplaire. Mais, puisque les choses n'avancent pas, nous soutiendrons l'idée de parité, qui au moins nous assurera un profond renouvellement.
Vous reconnaissez-vous une part de responsabilité dans le machisme ambiant ?
Non. Ces derniers mois, je me réjouis du succès de Nicole Fontaine à la présidence du Parlement européen, d'Anne-Marie Comparini à celle de la région Rhône-Alpes, et , cette semaine, d'Anne-Marie Idrac à la présidence du Mouvement européen. Cela, c'est de la parité dans les actes et pas seulement dans les mots. Et pour moi, c'est un mouvement naturel. Les femmes en politique ne sont pas dans les rivalités perpétuelles. Elles ne mettent pas toute leur énergie dans les rapports de forces. Grâce à elles, lorsqu'elles ont des responsabilités, le climat politique est transformé. Leur présence permettra une jouvence de la vie démocratique.
Le procès des anciens dirigeants du CDS, avec l'affaire d'un compte en Suisse, ne va pas aider les Français à retrouver confiance dans leur classe politique.
C'est un procès très dur. Voilà des hommes honnêtes, que personne ne soupçonne d'avantages personnels, et qui sont en réalité les victimes d'un système d'un autre temps, dont tout le monde était complice. A l'époque il n'y avait aucun moyen de financer légalement l'action politique ! Tout venait des entreprises, l'Etat ne donnait pas un franc. C'était une illégalité que la désinvolture générale rendait obligatoire. On leur reproche d'avoir reçu, sans le savoir, deux versements, il y a près de dix ans. Y a-t-il proportionnalité entre l'erreur commise, la punition, et l'opprobre que ces hommes honorables subissent depuis des années ? Je ne crois pas. J'espère que le jugement leur rendra justice. Mais qui leur rendra les années perdues ?
Vous, l'européen, comment jugez-vous le sommet d'Helsinki ?
Il y a une bonne nouvelle : la décision de créer une Force d'action rapide européenne. C'est un grand pas en avant. Mais il y a pour moi de graves motifs d'inquiétude. Accepter la candidature de la Turquie, c'est changer la nature de l'Europe. L'Europe, pour moi, c'est une famille de nations, unies par l'histoire, la géographie et la civilisation. La Turquie, voisine et amie, n'est cependant pas européenne. Ce genre de décisions, prises sans que les peuples y soient le moins du monde associés, nous conduit à une Europe sans unité et dans laquelle les citoyens ne se reconnaissent pas.
Chirac et Jospin sont d'accord sur ce point !
Ce n'est pas parce que le Président et le Premier ministre sont d'accord sur ce point qu'ils ne se trompent pas ! Ils sont aussi d'accord pour éviter une grande réforme des institutions européennes. Sur ce point aussi, je crois qu'ils se trompent et qu'il aurait fallu voir plus grand : l'Europe va vers le blocage et la crise. Comment la réconcilier avec les citoyens ? Comment faire marcher une Europe à 30 ? Il lui faut une Constitution pour devenir un ensemble démocratique ; il lui faut une figure de proue pour parler en son nom, faire avancer les choses et fédérer les différences immenses ; il faut que les pays qui veulent aller de l'avant puissent le faire. A 30, c'est l'Europe toute entière qu'il faut régénérer. On n'en prend pas le chemin. Et la France ne montre pas la voie comme elle le devrait.
(source http://www.udf.org, le 13 décembre 1999)