Déclaration de M. Alain Juppé, Premier ministre, en réponse à une question sur le champ d'application et le bilan de la loi Robien, à l'Assemblée nationale le 29 janvier 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 29 janvier 1997

Texte intégral

M. le président. La parole est à M. Joseph Klifa.
M. Joseph Klifa. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail et des affaires sociales et concerne la loi n° 96-502 du 11 juin 1996 sur l'aménagement et la réduction conventionnelle du temps de travail.
Force est de constater que, malgré les critiques initiales émanant du CNPF, voire des rangs de l'opposition, les premiers résultats pratiques sont entièrement positifs. A notre connaissance, 54 conventions avec l'état ont déjà été signées, 105 accords d'entreprise sont déjà conclus et plus de 150 seraient en négociation.
Je vous demande, Monsieur le ministre, premièrement, de bien vouloir confirmer, voire d'actualiser, ces chiffres, déjà eux-mêmes très prometteurs; deuxièmement, de bien vouloir rassurer ceux qui pourraient encore s'interroger - mais il doit y en avoir très peu, compte tenu du communiqué commun avec Gilles de Robien, le président du groupe UDF - sur la pérennité d'un dispositif qui est plébiscité, dans toutes les études, par l'opinion, les Chefs d'entreprise, les partenaires sociaux et les salariés. Il y en a des preuves tous les jours sur le terrain.
Troisièmement, je vous demanderai aussi de bien vouloir préciser à la représentation nationale le champ d'application de la loi.
Enfin, dans quel délai estimez-vous, Monsieur le ministre, être en mesure de soumettre à la représentation nationale un rapport d'étape indiquant, entre autres, le coût économique et le gain social écoulant de cette loi ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du Centre.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Alain Juppé, Premier ministre. Monsieur le député, la loi Robien, qui porte sur la réduction et l'aménagement du temps de travail, est une bonne loi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et de l'Union pour la démocratie française et du Centre.)
Elle est un élément important de la panoplie donc nous nous sommes dotés depuis quatre ans et, notamment, au cours des deux dernières années, sous l'impulsion particulièrement dynamique de Jacques Barrot (Applaudissements sur les mêmes bancs) pour lutter contre le chômage et créer des emplois.
Lorsqu'elle s'applique à des entreprises en difficulté, cette loi permet de limiter les suppressions d'emplois, comme on l'a vu pour Moulinex.
M. Charles Ehrmann. Très bien !
M. le Premier ministre. Lorsqu'elle s'applique à des entreprises en développement, elle permet d'accentuer les créations d'emplois.
M. Maxime Gremetz. Le temps partiel annualisé !
M. le Premier ministre. Au total, une centaine d'accords de ce type ont été conclus. Ils concernent 28 000 salarié et ont permis de sauver ou de créer 5 000 emplois.
On ne change donc pas un système qui marche ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française et du Centre.)
On nous dit parfois qu'il est coûteux, mais nous sommes tous bien d'accord pour considérer qu'il vaut mieux dépenser de l'argent public pour créer des emplois que pour indemniser du chômage. (Applaudissements sur mêmes bancs)
Des clarifications seront bien évidement utiles dans les mois qui viennent, d'abord pour bien définir le périmètre d'application de la loi, qui concerne le secteur concurrentiel et non pas, bien sûr, le secteur administré, lequel bénéficie déjà d'aides publiques : on ne peut pas additionner subventions sur subventions.
Peut-être faudra-t-il également clarifier l'effort demandé à chacune des parties, car chacun doit y mettre du sien.
M. Christian Bataille. Il fallait y penser lors du vote de la loi !
M. le Premier ministre. L'état apporte des aides financières ; il est normal que l'entreprise, c'est-à-dire l'employeur et les salariés, fasse également des efforts pour assurer le succès de cette loi (Exclamations sur les bancs du groupe communiste), qu'il s'agisse de la modernisation du processus de production, de la recherche d'une meilleure productivité ou de l'amélioration du service rendu au client ou à l'usager.
M. Christian Bataille. Pourquoi ne pas y avoir pensé avant ?
M. le président. Monsieur Bataille...
M. le Premier ministre. Tout cela fera l'objet d'un bilan d'étape, que je vous propose de dresser vers le milieu de l'année 1997.
En toute hypothèse, cette loi est vraiment l'exemple de ce qu'il faut faire en matière de réduction du temps de travail, c'est-à-dire une action au cas par cas, du sur-mesure, qui tient compte de la réalité de la situation dans l'entreprise, et non pas une réduction généralisée et obligatoire du temps de travail, dont on a vu les résultats désastreux en d'autres temps. (Vifs applaudissements sur les bans du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe l'Union pour la démocratie française et du Centre.)