Déclaration de Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, sur la journée "En ville, sans ma voiture ?", Paris le 8 septembre 1998.

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Circonstance : Opération "En ville, sans ma voiture ?" dans 35 villes, le 22 septembre 1998

Texte intégral

Dès mon arrivée au ministère, j'ai indiqué que la reconquête de la qualité de l'air dans les villes constituait une de mes priorités. Une succession de pics de pollution rappelait, s'il en était besoin, que la lutte contre la pollution de l'air nécessitait une vigilance de tous les instants, les mesures d'urgence n'étant destinées qu'à accompagner les mesures structurelles.
Un an plus tard, à l'occasion du lancement de la journée "En ville, sans ma voiture ?", voici venu le moment d'évaluer le chemin parcouru et ce qui reste à faire.
La reconquête de la qualité de l'air, et plus généralement celle de notre cadre de vie, n'est pas l'affaire d'un jour ou de je ne sais quelle mesure miracle. C'est une démarche de longue haleine que jalonnent de multiples initiatives comme celles qui ont marqué cette première année passée au ministère. Pour n'en citer que quelques-unes, je mentionnerai l'adoption du programme Auto-oil au niveau européen, la circulation alternée du 1er octobre dernier, l'installation du Conseil national de l'air, l'adoption de trois nouveaux décrets en application de la loi sur l'air, la mise en place d'une fiscalité écologique, ou encore l'accélération de la mise en uvre des Plans de déplacements urbains (PDU).
Ainsi, comme vous le constatez, la journée "En ville, sans ma voiture ?" parachève, en quelque sorte, notre premier exercice dans le domaine de la pollution de l'air et de la mobilité urbaine. Un événement exceptionnel qui veut marquer, le temps d'une journée, cette reconquête lente mais inéluctable de nos villes.
C'est que la circulation alternée, à Paris, le 1er octobre dernier, a été un événement doublement révélateur : révélateur d'une situation environnementale et sanitaire à risque mais aussi révélateur du civisme et des bonnes dispositions des citadins lorsque les pouvoirs publics les invitent à modifier leurs comportements.
La partie n'est certes pas gagnée. À en croire un sondage Louis Harris réalisé à la demande du Comité de promotion du transport public, et auquel le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement a participé, les Français expriment des désirs contradictoires : une majorité d'entre eux - 57 % - utilisent la voiture tous les jours ou presque, mais ils sont aussi majoritaires - 64 % - à juger que le trafic automobile en ville est insupportable.
D'où cette idée de la journée " En ville, sans ma voiture ? " : le moment est venu de concrétiser l'évolution culturelle en cours et d'inciter à de nouveaux comportements. Il nous faut répondre favorablement aux 69 % des personnes interrogées dans le cadre de ce sondage qui pensent que la fermeture, certains jours, des centres villes à la circulation, est souhaitable.
Cette journée particulière aura lieu le 22 septembre prochain dans 35 villes partenaires, des villes de toutes tailles, de toutes tendances politiques et réparties dans toute la France. Pour que cette opération soit lisible par les citadins, nous avons rédigé collectivement un cahier des charges, que vous trouverez dans le dossier de presse. Ce document, qui est signé par les édiles des villes qui participent à l'opération, est une sorte de règle du jeu. Il prévoit, notamment, que dans chaque cité un périmètre sera réservé aux piétons, aux vélos et, surtout, aux transports collectifs.
C'est du reste pourquoi nous avons décidé d'inscrire cet événement dans le cadre de la Semaine du transport public. La journée du 22 septembre doit en effet contribuer à réconcilier les Français avec les transports en commun qu'ils utilisent de moins en moins, alors qu'ils sont 94 % à penser que leur développement est prioritaire pour lutter contre la pollution et autant à s'accorder pour dire que la création de voies réservées aux transports publics est souhaitable. Là encore, cette journée doit nous aider à dépasser le désir paradoxal des citadins qui sont partagés entre le confort de leur voiture et la nécessité de reconquérir un air sain en centre-ville et de mettre fin aux embouteillages.
Quant aux voitures, seules celles fonctionnant à l'électricité, au GPLc ou au GNV pourront pénétrer dans le périmètre, pour peu qu'elles affichent clairement l'énergie utilisée. Comme nous en avons convenus avec leur fédération, les taxis seront admis dans les couloirs que les municipalités réserveront aux transports en commun, à condition cependant qu'ils pratiquent, ce jour-là, le co-voiturage et qu'ils indiquent de façon ostensible leur participation à la manifestation.
Des plans de circulation, un fléchage particulier, un PC animé par des bénévoles et des agents municipaux, ou encore un numéro vert, permettront d'assurer le bon déroulement de cette manifestation pendant laquelle la qualité de l'air comme le niveau sonore seront mesurés à intervalles réguliers.
Le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, qui est à l'origine de cette opération, a apporté sa logistique et ses conseils pour l'organisation de cette journée. Mais il ne saurait se substituer aux élus. Chaque ville associée à l'opération a décliné, à partir du cahier des charges commun, les formes que l'opération prendra localement.
Nous ferons le bilan de cette première édition avec l'ensemble des villes, et les leçons que nous en tirerons nous permettront, j'en suis convaincue, de l'étendre à de nombreuses autres cités afin qu'à l'instar de la fête de la musique, la journée "En ville, sans ma voiture ?" devienne un rendez-vous annuel. La Mission de célébration de l'an 2000 s'est d'ores et déjà montré intéressée pour faire de cette journée, dans deux ans, un des événements phares du changement de millénaire, en proposant à nos voisins de l'étendre à l'ensemble de l'Union européenne.
Si cet événement accompagne la mutation culturelle de " l'homo automobilis ", je voudrais rassurer les constructeurs. Il ne s'agit pas d'instruire le procès de la voiture ou de condamner sans appel le désir de mobilité de nos concitoyens. Il s'agit de repenser les transports en ville dans le sens d'un meilleur partage de la voirie. Les industriels ont d'ailleurs été nombreux à apporter leur concours et ils sont aujourd'hui parmi nous.
La question de la mobilité urbaine interpelle toutes les cités. Les réponses que nous saurons élaborer le 22 septembre pourront, sans nul doute, être généralisées et seront fécondes pour faire avancer nos réflexions.
(source http://www.environnement.gouv.fr, le 21 septembre 2001)