Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, sur la défense de la filière banane antillaise après la réforme de l'Organisation commune du marché de la banane (OCM banane), les possibilités d'assouplissement de l'aide compensatoire, le rôle primordial des groupements de producteurs et l'amélioration de la qualité, Paris le 5 février 2003.

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Circonstance : Séminaire consacré à la filière banane, à Paris le 5 février 2003

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs les Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
Je suis particulièrement heureuse d'ouvrir aujourd'hui ce séminaire de réflexion que nous organisons, de façon conjointe mon collègue, Hervé GAYMARD, ministre de l'Agriculture, et moi-même.
Comme le savent ceux que j'ai rencontrés récemment sur le terrain aux Antilles, nous avons souhaité associer l'ensemble des acteurs de la filière que vous représentez, à une large réflexion sur le devenir de la production de la banane antillaise. En effet, Hervé GAYMARD et moi-même avons pensé, qu'il était du devoir des pouvoirs publics de renforcer l'écoute et le dialogue et d'apporter un soutien énergique aux professionnels, qui, nous le savons, connaissent des périodes souvent difficiles.
Ce séminaire qui marque un moment fort du renouveau de la concertation entre le monde économique et les administrations locales et nationales, devra répondre à plusieurs objectifs :
il s'agit, en premier lieu, de tirer les leçons de l'année 2002, première année civile consécutive à la réforme de l'OCM banane de 2001 qui, malheureusement, ne restera pas dans les mémoires comme une année faste et favorable à la production bananière antillaise. Nous avons pensé qu'il serait riche d'enseignements de revivre le film du déroulement de cette année, pour tenter de comprendre les mécanismes et les causes qui ont conduit à la situation catastrophique que nous avons connue ;
le deuxième objectif de ce séminaire, et du processus de concertation continu qui s'instaure ainsi, sera de parvenir, au terme d'une réflexion qui se poursuivra tout au long de 2003, à constituer une force de propositions auprès de la Commission européenne, en particulier dans le cadre des grandes échéances de 2004, avec l'élargissement de l'Union européenne, et de 2006, avec le passage annoncé au " tarif only ".
Cette journée s'organisera en deux parties autour de l'OCM banane : une partie " volet interne " concentrée sur les aspects " produit " et le fonctionnement de l'OCM. Puis, l'examen du " volet externe " avec toutes ses conséquences au plan national. Grâce aux interventions et aux présentations préparées par des experts du CIRAD et de l'ODEADOM, ainsi que des administrations, chaque thème sera discuté, afin d'identifier des orientations à développer et à approfondir dans le cadre du processus de concertation continue.
Permettez-moi, en ouvrant cette journée de travail et sans vouloir entrer dans le détail technique de vos débats à venir, d'insister simplement sur quelques thèmes du volet interne de l'OCM banane.
Tout d'abord, l'aide compensatoire. Depuis la création de l'OCM, elle permet aux agriculteurs de trouver une compensation à des prix de vente toujours plus bas, face aux coûts de production, qui eux, ont toujours tendance à être plus hauts. L'analyse de l'année écoulée montre que le mécanisme actuel de versement de cette aide compensatoire, contient en son sein-même, l'origine des difficultés de trésorerie des planteurs. Son versement, sous forme d'avances et de solde, apparaît peu compatible avec les besoins d'entretiens réguliers et permanents des plantations, permettant d'obtenir le niveau de qualité requis par le marché. Je pense important d'étudier les pistes qui s'offrent à nous, pour améliorer et assouplir les modalités de calcul et de versement de cette aide, et l'adapter, en temps réel, aux conditions du marché. Dans le même registre, je sais que vous aurez à cur de parler de l'application de la clause " Madère " et des avantages et inconvénients d'une régionalisation de l'aide compensatoire.
Autre sujet sur lequel il me paraît important d'insister, c'est le rôle primordial des groupements de producteurs. Notre production antillaise de banane se caractérise par ses petites plantations souvent difficiles d'accès, toujours soumises aux aléas climatiques fréquents qu'il s'agisse de la sécheresse ou des cyclones, qui entraînent des coûts de production plus élevés que dans les grandes plantations des plaines d'Amérique du Sud ou Centrale. C'est dans ce contexte, que l'on peut juger de toute l'importance pour ces producteurs de s'organiser au sein de groupements afin d'assurer la mise en marché des produits dans de bonnes conditions, de dispenser un encadrement technique de qualité, et de fournir des intrants à moindre coût. Je sais que depuis que la Commission a imposé une reconnaissance officielle des groupements de producteurs, d'importants progrès ont été réalisés tant au niveau du fonctionnement interne que de la connaissance de la production de chaque planteur, de l'appui technique apporté, du contrôle de la qualité ou de l'implication dans la commercialisation. Ces progrès doivent être poursuivis pour répondre aux exigences réglementaires communautaires et, pour réduire les coûts de production afin d'améliorer le niveau de compétitivité de l'ensemble de la filière antillaise.
Cet effort de compétitivité, m'offre une transition naturelle vers l'amélioration de la qualité. D'une façon générale, nous sommes tous convaincus que la banane antillaise possède des qualités intrinsèques. Mais ces qualités ne pourront être reconnues et identifiées par le consommateur, que si l'on s'engage dans une démarche d'identification et de communication adaptées. Le ministère de l'Agriculture a mis en place aujourd'hui un certain nombre de " signes de qualité " nationaux ou communautaires, tels que les labels " agriculture biologique " ou " production de montagne " ou encore les " appellations d'origine contrôlée ", ou les " indications géographiques protégées ". Je suis persuadée que cela répond à des attentes du consommateur et qu'il convient d'y répondre par une écoute appropriée et une adaptation des modes de production, de promotion et de commercialisation.
Voilà donc les trois thèmes que je voulais rapidement évoquer avec vous, et qui sont, je crois, " symboliques " de ce volet interne de l'organisation commune de marché de la banane. Au-delà de ces questions techniques, je voudrais insister sur la nécessité, pour la filière " banane " d'aborder les échéances qui se présentent, de façon unie et soudée, afin de faire front pour défendre les intérêts de notre production antillaise et par, voie de conséquence, de la production communautaire.
J'espère qu'à la fin de l'année, nous pourrons nous pencher sur le travail accompli que nous initions aujourd'hui, en étant fiers des résultats obtenus qui permettront à la France de mieux défendre sa banane antillaise, grâce aux positions acquises et validées à l'issue de cette large concertation.
Je vous souhaite donc d'excellents travaux durant cette journée, point de départ de notre réflexion. Je sais pourvoir compter sur vous, sur votre détermination et sur votre pugnacité afin que nous puissions, ensemble, faire en sorte que nos enfants continuent à manger ce fruit des tropiques, conscients et fiers de manger une banane produite au sein de l'Union européenne.
Merci pour votre attention.

(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 6 février 2003)