Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs, mes chers collègues,
On observe depuis quelques années une certaine rupture entre l'agriculture et le reste de la société, qui se creuse chaque jour un peu plus. Une certaine incompréhension gagne les uns et les autres, source de ressentiment peut-être, génératrice de blocages assurément.
Il nous apparaît particulièrement opportun de s'y arrêter et de réfléchir aux voies et moyens de redonner à l'agriculture, activité ancestrale s'il en est, toute sa place au sein de notre société. Qui, mieux que le Conseil Economique et Social pouvait être saisi d'une telle question ? Je voudrais, ici saluer notre rapporteur Hubert BOUCHET qui a su (tout en séchant les manifestations de mai), dans un délai extrêmement court, donner une représentation très fidèle de l'état des relations entre la société et les agriculteurs, tout en se projetant dans l'avenir. Son rapport, j'en suis sûr, fera date.
Nos concitoyens ont une image floue, passéiste voire nostalgique du monde agricole, une image qui ne correspond pas à la réalité d'une activité pourtant très moderne. Faut-il y voir la conséquence d'un abandon progressif par la majeure partie de la population de ses racines agricoles et rurales ? La société pointe un doigt accusateur à l'endroit de la Politique Agricole Commune alors qu'elle a permis d'assurer l'autosuffisance alimentaire de la France et de l'Europe. Cela n'est pas rien. Souvenez-vous, mes chers collègues, que nous importions encore des céréales au début des années 60.
Le compromis qui vient d'être signé à Luxembourg par les ministres de l'agriculture n'est pas pour rassurer le monde agricole déjà en proie à un fort désarroi du fait des nombreuses crises conjoncturelles. Cet accord marque la fin de la PAC, même si sur le plan budgétaire il n'y a pas d'évolution par rapport à l'accord des chefs d'Etat et de gouvernement de l'automne dernier. En effet, à la disparition des outils de régulation des marchés, vient désormais s'ajouter la suppression progressive des outils d'orientation de la politique agricole avec le découplage des aides. On se dirige inévitablement vers une renationalisation de la politique agricole, ce qui est tout à fait regrettable pour l'avenir de l'agriculture et celui de l'Union Européenne.
Ces bouleversements, qu'ils soient politiques ou sociaux, sont les signes forts d'une évolution en marche. Le monde agricole est aujourd'hui parvenu à un tournant. Comme il l'a toujours fait par le passé, il saura s'adapter et prendre en compte les nouvelles attentes de la population, à condition toutefois, qu'on lui donne les outils nécessaires pour cela. Les termes d'un nouveau contrat doivent être inventés, qui permette de réconcilier l'agriculteur avec ses concitoyens, de redonner à l'agriculture toute sa place au sein de notre monde moderne.
Les attentes de la population sont plurielles. Notre rapporteur les analyse avec beaucoup d'exactitude. Je n'y reviendrai donc pas. Je souhaiterais toutefois mettre l'accent sur deux d'entre elles :
Toutes les études le montrent, nos concitoyens sont particulièrement attachés à une alimentation qui soit diversifiée et réponde à des chartes de qualité rigoureuses garanties par de bonnes pratiques agricoles. Mais, ont-ils bien mesuré que la fourniture de tels produits exige le maintien d'une politique agricole adaptée car les lois du marché seront toujours insuffisantes à réguler un secteur par essence soumis à l'irrationalité. Cela pose notamment le problème de la défense du modèle agricole européen à l'OMC à Cancun et du droit à la souveraineté alimentaire de chaque Etat. La fourniture de produits diversifiés et de qualité ne pourra pas, non plus, exister sans une juste rémunération de l'activité agricole. Cela pose le problème du prix des produits et de la répartition de la valeur ajoutée entre les acteurs de la filière et particulièrement la grande distribution.
Les attentes de la société se tournent également vers le monde rural. Le besoin de nature et l'envie d'espace donnent aujourd'hui toute sa valeur à l'activité ancestrale du paysan qui entretient le territoire, jour après jour, génération après génération, afin que la campagne demeure accessible à tous. Mais, avons-nous bien pris conscience que cette activité, dont tout un chacun profite, est aujourd'hui fragilisée par les bouleversements que connaît le monde agricole. Cela pose le problème du maintien de l'agriculteur au centre du monde rural. Cela pose la question de la politique d'installation des jeunes et de l'attractivité du métier. Cela pose le problème du devenir de la politique des structures et de la politique foncière. Cela pose enfin la question de la rémunération par la collectivité d'une activité que notre rapporteur qualifie de troisième dimension.
Voilà, mes chers collègues, les points sur lesquels je voulais insister à l'occasion de la présentation de ce rapport.
Les agriculteurs, comme ils l'ont toujours fait par le passé, sauront évoluer et s'adapter aux attentes futures de la société. Cette dernière est-elle vraiment prête à supporter le coût de ses nouvelles aspirations ?
Plus encore, l'Etat est-il lui-même prêt à assumer sa responsabilité à l'endroit de l'agriculture ?
Une réponse positive à ces deux questions est très importante pour assurer des perspectives durables aux agriculteurs.
Le Groupe de l'Agriculture a lu avec beaucoup d'attention le projet d'avis qui nous est soumis en raison de sa grande qualité. Vous vous en doutez, il le votera.
(Source http://www.fnsea.fr, le 11 juillet 2003)
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs, mes chers collègues,
On observe depuis quelques années une certaine rupture entre l'agriculture et le reste de la société, qui se creuse chaque jour un peu plus. Une certaine incompréhension gagne les uns et les autres, source de ressentiment peut-être, génératrice de blocages assurément.
Il nous apparaît particulièrement opportun de s'y arrêter et de réfléchir aux voies et moyens de redonner à l'agriculture, activité ancestrale s'il en est, toute sa place au sein de notre société. Qui, mieux que le Conseil Economique et Social pouvait être saisi d'une telle question ? Je voudrais, ici saluer notre rapporteur Hubert BOUCHET qui a su (tout en séchant les manifestations de mai), dans un délai extrêmement court, donner une représentation très fidèle de l'état des relations entre la société et les agriculteurs, tout en se projetant dans l'avenir. Son rapport, j'en suis sûr, fera date.
Nos concitoyens ont une image floue, passéiste voire nostalgique du monde agricole, une image qui ne correspond pas à la réalité d'une activité pourtant très moderne. Faut-il y voir la conséquence d'un abandon progressif par la majeure partie de la population de ses racines agricoles et rurales ? La société pointe un doigt accusateur à l'endroit de la Politique Agricole Commune alors qu'elle a permis d'assurer l'autosuffisance alimentaire de la France et de l'Europe. Cela n'est pas rien. Souvenez-vous, mes chers collègues, que nous importions encore des céréales au début des années 60.
Le compromis qui vient d'être signé à Luxembourg par les ministres de l'agriculture n'est pas pour rassurer le monde agricole déjà en proie à un fort désarroi du fait des nombreuses crises conjoncturelles. Cet accord marque la fin de la PAC, même si sur le plan budgétaire il n'y a pas d'évolution par rapport à l'accord des chefs d'Etat et de gouvernement de l'automne dernier. En effet, à la disparition des outils de régulation des marchés, vient désormais s'ajouter la suppression progressive des outils d'orientation de la politique agricole avec le découplage des aides. On se dirige inévitablement vers une renationalisation de la politique agricole, ce qui est tout à fait regrettable pour l'avenir de l'agriculture et celui de l'Union Européenne.
Ces bouleversements, qu'ils soient politiques ou sociaux, sont les signes forts d'une évolution en marche. Le monde agricole est aujourd'hui parvenu à un tournant. Comme il l'a toujours fait par le passé, il saura s'adapter et prendre en compte les nouvelles attentes de la population, à condition toutefois, qu'on lui donne les outils nécessaires pour cela. Les termes d'un nouveau contrat doivent être inventés, qui permette de réconcilier l'agriculteur avec ses concitoyens, de redonner à l'agriculture toute sa place au sein de notre monde moderne.
Les attentes de la population sont plurielles. Notre rapporteur les analyse avec beaucoup d'exactitude. Je n'y reviendrai donc pas. Je souhaiterais toutefois mettre l'accent sur deux d'entre elles :
Toutes les études le montrent, nos concitoyens sont particulièrement attachés à une alimentation qui soit diversifiée et réponde à des chartes de qualité rigoureuses garanties par de bonnes pratiques agricoles. Mais, ont-ils bien mesuré que la fourniture de tels produits exige le maintien d'une politique agricole adaptée car les lois du marché seront toujours insuffisantes à réguler un secteur par essence soumis à l'irrationalité. Cela pose notamment le problème de la défense du modèle agricole européen à l'OMC à Cancun et du droit à la souveraineté alimentaire de chaque Etat. La fourniture de produits diversifiés et de qualité ne pourra pas, non plus, exister sans une juste rémunération de l'activité agricole. Cela pose le problème du prix des produits et de la répartition de la valeur ajoutée entre les acteurs de la filière et particulièrement la grande distribution.
Les attentes de la société se tournent également vers le monde rural. Le besoin de nature et l'envie d'espace donnent aujourd'hui toute sa valeur à l'activité ancestrale du paysan qui entretient le territoire, jour après jour, génération après génération, afin que la campagne demeure accessible à tous. Mais, avons-nous bien pris conscience que cette activité, dont tout un chacun profite, est aujourd'hui fragilisée par les bouleversements que connaît le monde agricole. Cela pose le problème du maintien de l'agriculteur au centre du monde rural. Cela pose la question de la politique d'installation des jeunes et de l'attractivité du métier. Cela pose le problème du devenir de la politique des structures et de la politique foncière. Cela pose enfin la question de la rémunération par la collectivité d'une activité que notre rapporteur qualifie de troisième dimension.
Voilà, mes chers collègues, les points sur lesquels je voulais insister à l'occasion de la présentation de ce rapport.
Les agriculteurs, comme ils l'ont toujours fait par le passé, sauront évoluer et s'adapter aux attentes futures de la société. Cette dernière est-elle vraiment prête à supporter le coût de ses nouvelles aspirations ?
Plus encore, l'Etat est-il lui-même prêt à assumer sa responsabilité à l'endroit de l'agriculture ?
Une réponse positive à ces deux questions est très importante pour assurer des perspectives durables aux agriculteurs.
Le Groupe de l'Agriculture a lu avec beaucoup d'attention le projet d'avis qui nous est soumis en raison de sa grande qualité. Vous vous en doutez, il le votera.
(Source http://www.fnsea.fr, le 11 juillet 2003)