Article de Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, dans "Le Courrier de la Chancellerie" de juillet 1998, sur le projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits dans le cadre de la modernisation de la justice.

Prononcé le 1er juillet 1998

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Média : Le Courrier de la Chancellerie

Texte intégral

L'accès au droit constitue un volet fondamental de la réforme de la Justice, aujourd'hui engagée dans toutes ses dimensions.
Parce qu'il se préoccupe du lien qu'entretient chacun et chacune, au jour le jour, avec le droit et la Justice, parce qu'il est un pari vers davantage d'écoute et de dialogue dans une société marquée par l'effacement des médiations naturelles, une société où la régulation par le droit doit l'emporter sur les rapports de force, le projet de loi relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits touche au coeur même du pacte républicain.
J'ai souhaité que le nouveau dispositif d'accès au droit soit discuté en priorité par l'Assemblée nationale. L'examen et le vote de ce texte en 1ère lecture le 29 juin ont démontré le souci partagé par le gouvernement et la représentation nationale d'apporter une réponse ambitieuse à la demande sociale de droit, dans le prolongement des expériences de terrain, animées au plan local par les chefs de juridictions, les professions judiciaires et les associations, qui tous ont contribué à la définition d'une véritable politique publique d'accès au droit.
Si tout symptôme ne relève pas de l'hôpital, tout litige ne doit pas relever nécessairement du tribunal. La distinction entre l'accès au droit et l'accès à la Justice est en cela essentielle. L'objectif premier n'est pas de désencombrer les tribunaux mais bien d'adapter le service public de la Justice à des évolutions de fond et de favoriser des solutions négociées. Elles répondent souvent mieux à la nature de certains litiges (familiaux ou de voisinage par exemple) et surtout aux besoins des parties qui se retrouvent dans ces alternatives simples, peu coûteuses, rapides, et qui ne ferment pas la possibilité du recours à la Justice. Chacun se félicitera si par surcroît cela conduit les juges à pouvoir consacrer davantage de temps aux litiges plus complexes, et si cela leur permet de trancher entre des parties qui auront déjà renoué quelques fils de dialogue entre eux. Car au final, c'est la qualité des réponses du service public de la Justice, à laquelle chacun aspire, qui en sera améliorée.
Le nouvel élan donné à la politique de l'accès au droit, parce qu'il part des préoccupations des citoyens, s'inscrit parfaitement dans la réforme de la Justice, dont la réalisation progresse aujourd'hui à rythme soutenu. Elle repose sur les différents textes législatifs soumis au Parlement depuis le printemps et qui continueront d'être discutés au cours des prochains mois. Elle doit aussi se traduire par des moyens accrus, dont le budget 1998 n'est qu'une première phase, et concourir à la modernisation du service public de la Justice.
Elisabeth Guigou
Garde des Sceaux
Ministre de la Justice