Texte intégral
Monsieur le président,
Mesdames et messieurs les ministres,
Mesdames, messieurs,
Tout d'abord, permettez-moi de remercier le Portugal d'avoir pris l'initiative de cette importante réunion, dans le cadre de sa présidence du Conseil de l'Union européenne.
Je voudrais aussi souligner la chaleur de l'accueil qui nous a été réservé et exprimer, le plus simplement possible, mon plaisir à être ici aujourd'hui dans l'une des destinations phares de l'Europe.
Permettez-moi également, de rappeler les liens, déjà anciens mais toujours forts, d'amitié et de fraternité qui unissent nos deux pays. Et qui faciliteront, j'en suis convaincue, le passage de témoin, pour la présidence de l'Union européenne, entre nos deux pays.
Chacun connaît, dans cette assemblée, la place du tourisme en Europe et sa contribution à la croissance et à l'emploi.
En effet, avec 5,5 % du PIB communautaire, 6% des emplois et 30% du commerce extérieur des services, il représente aujourd'hui, une activité économique et sociale de première importance dans l'ensemble de l'Union européenne.
Cette importance devrait encore se conforter. Les projections de l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) prévoient, dans les 20 ans à venir, un doublement des flux touristiques internationaux au bénéfice de l'Europe. Notre continent - déjà première destination touristique choisie au monde - accueillera ainsi plus de 700 millions de touristes contre 386 millions actuellement.
Avec un taux de croissance prévisionnel supérieur à 3% par an, on prévoit également la création de 2 à 3 millions d'emplois supplémentaires qui viendront s'ajouter aux 9 millions d'emplois directs déjà recensés.
Le Conseil et le Parlement européens n'ont d'ailleurs pas manqué de souligner le rôle dynamique du tourisme en matière de création d'emploi. La résolution adoptée à la suite des conclusions du Groupe de haut niveau sur le tourisme et l'emploi a, sur ce sujet, souligné la nécessité de bâtir des politiques touristiques coordonnées au niveau communautaires.
Il nous appartient aujourd'hui, dans le prolongement de nos différentes rencontres, de poursuivre notre action pour que cette importance bénéficie d'une reconnaissance politique au niveau européen.
Au-delà du seul secteur du tourisme, le contexte économique européen tout entier est, lui aussi, en pleine évolution. Le marché unique se met en place. Bientôt l'Euro sera, au quotidien et de manière plus concrète qu'aujourd'hui, notre règle monétaire commune.
Sa mise en place aura des effets évidents sur le secteur du tourisme. Je m'attarderai sur quelques-uns d'entre eux :
Tout d'abord la transparence.
L'Euro doit éclaircir les conditions de la concurrence entre les pays de l'Union européenne. Pour les entreprises touristiques, il permettra d'unifier les règles d'accès aux financements dans une même monnaie et d'assurer une plus grande transparence des conditions d'accès au crédit ou à l'épargne.
L'Euro permettra ensuite d'offrir aux consommateurs une meilleure lisibilité des prix.
Pour le touriste, un des premiers avantages à utiliser l'Euro, se révélera dans la disparition de toute conversion en monnaie locale. Cela facilitera les comparaisons de prix, tant au moment du choix du séjour, dans tel ou tel pays de destination, que pendant ses vacances.
Enfin l'échange.
Conjugué à la libre circulation des personnes, des marchandises et des capitaux, l'Euro favorisera de manière certaine le développement des échanges au sein de l'Union européenne. Cela augmentera aussi l'attractivité de la destination Europe auprès des touristes internationaux.
Pourtant, si pour les voyagistes, la monnaie unique facilitera d'un côté la diminution des risques liés au change, de l'autre, en favorisant les grandes centrales d'achat, l'Euro risque de durcir les rapports entre fournisseurs et prestataires.
Aussi, devrons nous être attentif à chercher, les moyens d'anticiper au maximum la diversité des risques qui accompagne ces activités.
Le gouvernement français est bien conscient de ces enjeux nouveaux engendrés par l'harmonisation monétaire pour les économies européennes et pour le développement du tourisme qui sera indéniablement un des tout premiers secteurs concernés par la mise en uvre de la monnaie unique.
Pour en favoriser la prise en compte par les petites et moyennes entreprises qui n'ont pas toujours la possibilité d'engager seules le passage à l'Euro, j'ai personnellement proposé qu'en lien avec le ministère des Finances de notre pays, une information et une préparation renforcées soient faites à leur intention.
Cette nécessité a d'ailleurs été confirmée lors du Conseil européen de Lisbonne.
Mais l'Euro n'est pas - et ne peut pas être - à lui seul, constitutif d'une politique européenne du tourisme. Il en est un des outils. Et c'est bien à la construction de cette politique coordonnée du tourisme au sein de l'union que nous devons nous attacher.
Le tourisme en Europe est aujourd'hui traversé par de grandes tendances qui, tout en coexistant, peuvent parfois sembler contradictoires.
En effet, l'existence en Europe de grands tours-opérateurs, liée à celle d'une demande touristique de masse à destination des pays les plus ensoleillés du Sud mais aussi d'Asie, a permis à ces grands groupes d'organiser des modèles de production touristique, en particulier dans les domaines de l'hébergement.
Par ailleurs, le système de commercialisation par allottement qui l'accompagne n'a pas été sans conséquences sur les logiques d'aménagement, de développement local et de préservation de l'environnement en raison de l'afflux massif de touristes dans les pays récepteurs.
Ce phénomène de domination de l'offre par le secteur de la grande distribution a d'autres conséquences.
Une des principales à mes yeux, est qu'il banalise et normalise l'offre touristique. Il tend à mettre en cause la diversité géographique, socioculturelle et environnementale qui constituent, comme l'a rappelé le Parlement européen dans sa proposition du 4 février 2000, la richesse et la principale attraction des régions communautaires.
Disons-le, ce type de développement sans régulation porte en lui un risque de saturation et de déséquilibre par une trop forte concentration des flux sur quelques sites réputés et nous devons y être très attentifs.
Parallèlement, le secteur touristique est également marqué par une évolution certaine des attentes et des exigences des touristes eux-mêmes.
Je pense en particulier à :
la liberté de choix dans l'offre des produits proposés qui passe par une information accrue,
l'exigence de qualité,
la volonté grandissante à construire soi-même son propre produit touristique,
l'aspiration à l'authenticité et à la découverte d'autres cultures et d'autres populations,
le souci fort du respect et de la protection de la nature et de l'environnement.
Pour faire face à ces exigences nouvelles, l'offre touristique va devoir s'adapter, se transformer, se moderniser.
En France, nous prenons soin, en liaison avec les professionnels privés et associatifs, avec les responsables et les élus locaux, de diversifier et de qualifier l'offre touristique, dans le sens des aspirations des touristes et de leurs nouveaux modes de consommation.
Je veux profiter de cette réunion pour réaffirmer l'importance de favoriser l'émergence de ces nouvelles formes de tourisme.
Pour y répondre, il convient d'initier une véritable démarche politique qui relève, semble-t-il, directement des pouvoirs publics. Il me paraît essentiel de l'évoquer ici, entre ministres. Elle nous conduit à nous interroger sur ce que nous devons faire, comment et avec quels moyens.
Pour ma part, je considère que les réponses à apporter, propres à chaque État, doivent s'inscrire dans un esprit de concertation, favorisant la coordination des politiques touristiques au niveau régional, national et européen.
Il m'apparaît également nécessaire de conduire cette concertation de la manière la plus démocratique et la plus large possible, en l'ouvrant aux professionnels, aux acteurs du tourisme et aux populations locales directement concernées. Et ce, dans une démarche plus citoyenne de la construction européenne.
Il n'est pas utile, à mon sens, de débattre aujourd'hui d'une intégration du tourisme dans les compétences communautaires. Il s'agit davantage de dessiner les contours d'une coordination européenne des politiques du tourisme dans le cadre d'un aménagement du territoire soucieux de l'environnement, des cultures et des hommes, et surtout favorisant la création de richesses et d'emplois.
Cette nouvelle approche pragmatique pourrait prendre en compte, bien entendu, les grandes évolutions que nous percevons tous.
C'est à dire :
l'émergence d'un tourisme moins concentré, plus diffus,
l'amélioration qualitative de l'offre,
la valorisation des spécificités des territoires,
l'implication et la participation plus effectives des populations locales,
la nécessaire modernisation de l'accès à l'information sur une offre touristique plus diffuse, au travers des technologies nouvelles,
le maintien et la création d'emplois qualifiés.
Cette nouvelle approche pourrait aussi s'exprimer dans le cadre des politiques de coordination que nous menons les uns et les autres avec un certain nombre de pays émergeants en matière touristique pour la mener en cohérence avec celle de l'Union Européenne.
J'ai eu l'occasion, dans d'autres instances internationales, de rappeler combien la France était attachée à soutenir le Code mondial d'éthique élaboré au sein de l'Organisation mondiale du tourisme comme un "garde fou", prônant ce tourisme responsable, respectueux des hommes, des cultures et des économies locales auquel je faisais référence il y a quelques instants.
Bien évidemment, cette conception nouvelle du Tourisme repose aussi, et avant tout, sur l'engagement et la qualité des personnes qui en sont les acteurs.
Et au moment même où nous réaffirmons les potentialités de développement de ce secteur, celui-ci a plus que jamais besoin d'hommes et de femmes qualifiés, motivés, inventifs dans tous les champs et tous les métiers qu'il recouvre.
Cela implique un effort significatif et durable en faveur de leur formation, de l'amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
L'exigence de qualité, exprimée par les touristes, ne peut en effet se construire sur un emploi fragilisé, précaire, sans garantie sociale pour les hommes et les femmes qui y répondent. Ainsi, la croissance économique du tourisme est-elle intimement liée au progrès social.
C'est le sens des mesures prises par le gouvernement français, à mon initiative, en faveur des salariés saisonniers du tourisme, en particulier dans les domaines de la santé, du logement, de la formation comme celui de la sécurisation du contrat de travail.
C'est aussi le sens du plan présenté, le 3 mai dernier, dans l'esprit du Sommet de Luxembourg, par ma collègue Martine Aubry, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, et qui prévoit parmi ses 8 priorités : la lutte contre la précarité, la validation des acquis de l'expérience professionnelle et la mise en uvre d'un dispositif permettant d'anticiper les évolutions de la demande de main d'uvre.
Nous sommes, en effet, déjà confrontés, dans divers secteurs du tourisme, à une pénurie de main d'uvre qualifiée. Et cela, alors même que la volonté commune des pays de l'Union est de réduire le taux de chômage en Europe. Ce constat est d'autant plus dommageable dans le tourisme que la plupart des emplois créés ne sont pas susceptibles d'être délocalisés.
Bien entendu, tous ces objectifs ne pourront aboutir si parallèlement, nous ne soutenons pas efficacement les entreprises essentiellement constituées d'un tissu de petites et moyennes entreprises.
A cet égard, les recommandations concrètes du Conseil européen de Lisbonne dans le domaine économique et financier sont particulièrement adaptées au champ d'action du tourisme. C'est le cas par exemple avec l'élaboration de la Charte pour les PME visant à faciliter la création d'emploi avec la réorientation du fonds pour le soutien à la création de micro-entreprises, comme d'ailleurs l'établissement d'une stratégie pour supprimer les obstacles aux services.
Pour ma part, j'ai tenu à ce que la France participe activement aux quatre groupes de travail mis en place par la Commission, selon les conclusions du Conseil du Marché intérieur du 21 juin 1999 sur le tourisme et l'emploi.
Comme je viens de le dire, je suis en effet convaincue que la prise en compte du tourisme au niveau communautaire et le développement de l'emploi dans ce secteur, passent par une nécessaire coopération entre les États membres et la Commission et au-delà, avec le Parlement européen.
Le Conseil a donc initié un large échange entre les États membres dans quatre domaines prioritaires, à savoir : l'information ; la formation ; la qualité et le développement durable du tourisme.
Les premières conclusions de ces groupes de travail feront l'objet d'une présentation dans le courant du mois d'octobre lors de la tenue d'un prochain comité consultatif de la Commission.
Je m'efforcerai, dans le cadre de la présidence française, de poursuivre et d'enrichir cette dynamique communautaire, portée aujourd'hui par nos amis portugais, au sein de ces groupes afin que dès l'automne 2000, nous soyons en mesure de proposer à nos partenaires, des pistes de travail et de coopération sur le thème du développement durable.
J'ai le plaisir de vous annoncer que je prendrais l'initiative, dans le cadre de la présidence française, d'une rencontre des ministres européens du tourisme à Lille, dans le Nord de la France, dans la semaine du 20 au 25 novembre et je proposerai pourquoi pas, que lors du Conseil "Marché intérieur" prévu fin novembre en France, un point tourisme soit inscrit à l'ordre du jour.
Je ne saurais conclure mon propos sans rappeler un attachement très fort de la France à un droit fondamental et à une aspiration légitime de nos concitoyens, de tous nos concitoyens : l'accès aux vacances et aux loisirs.
Je serais, à ce propos, particulièrement attentive à ce qu'il puisse être inscrit dans le projet de "Charte européenne des droits fondamentaux" que la France entend faire avancer dans le cadre de sa présidence.
Depuis 1936, le Front populaire et la conquête par les travailleurs des premiers congés payés, notre pays s'est attaché, dans sa politique touristique, à favoriser le départ en vacances des populations à revenus modestes comme des familles les plus démunies.
Cela s'est traduit, à la fois, par une politique d'aide aux équipements d'accueil et d'hébergement, en particulier dans le secteur associatif, et par des dispositifs d'aides au départ.
Depuis ma prise de fonction, j'ai souhaité renforcer cette politique notamment par la création de la Bourse Solidarité Vacances et par l'extension du bénéfice des chèques-vacances aux salariés des petites et moyennes entreprises.
La première, la Bourse Solidarité Vacances, permet à des familles en situation d'exclusion sociale d'accéder aux vacances, par un partenariat avec les professionnels du tourisme et les associations caritatives.
Le chèque-vacances, quant à lui, permet de favoriser le départ de familles modestes par une contribution de l'employeur à cet instrument d'épargne volontaire et de paiement des prestations touristiques et de transport.
J'ai proposé que son utilisation soit étendue, la loi française s'y est adaptée, à l'ensemble du territoire de l'Union européenne.
Je souhaite vivement que cet aspect d'une politique sociale des vacances soit débattu au sein de l'Union avec l'ensemble de mes collègues.
Je souhaite aussi qu'elle puisse se traduire par un engagement significatif de l'Union, dans le cadre des fonds structurels européens
D'ores et déjà, la France met à la disposition de ses partenaires européens son expérience et son savoir-faire pour construire, ensemble, un véritable projet européen d'une politique sociale du tourisme.
Pour conclure, je voudrais rappeler un certain nombre d'éléments.
Vous le savez, et nous le vivons quotidiennement, le 20ème siècle aura été celui des mutations et des bouleversements de nos manières de vivre, de communiquer, de nous déplacer.
Nous abordons le troisième millénaire après une formidable révolution des transports et des nouvelles technologies mais aussi conscients que ces progrès ont creusé les inégalités entre pays du Sud et pays du Nord et mis en danger notre écosystème.
Le secteur du tourisme n'a pas échappé à ces évolutions. Il se trouve aujourd'hui confronté à une crise de croissance qui suscite de nouvelles préoccupations plus citoyennes, plus environnementales, celles de favoriser un développement apte à assurer les besoins du présent tout en préservant l'avenir.
C'est le sens même de l'idée à laquelle je suis, vous le savez, très attachée, celle du développement d'un tourisme durable.
Il est, me semble-t-il, de la responsabilité des gouvernements d'intégrer ces évolutions.
Il est tout autant de la responsabilité des gouvernements d'y apporter des réponses tant en termes politiques, qu'en termes budgétaires et de les porter sur le plan européen.
Cela implique une refonte des critères d'intervention et de soutien des aides communautaires, en intégrant cette notion de développement durable à laquelle nous sommes tous sensibles.
Ce sont là, à mes yeux, les conditions indispensables et préalables pour faire de l'Europe un espace de croissance économique, générateur d'emplois qualifiés et durables, mais aussi de progrès social.
Ainsi, c'est un vaste chantier qui s'ouvre à nous en faveur d'une véritable citoyenneté européenne.
Notre réunion de Vilamoura en constitue une étape importante et je voudrais souligner la qualité de sa préparation par la présidence portugaise.
Je souhaite, à cet égard et à titre personnel, saluer tout particulièrement notre collègue, mon ami, Vitor CABRITA NETO.
J'émets le voeu que notre prochaine rencontre en France, à Lille, dans le Nord-Pas-de-Calais, nous fasse franchir un nouveau pas dans la construction de cet édifice.
(Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 25 mai 2000)
Mesdames et messieurs les ministres,
Mesdames, messieurs,
Tout d'abord, permettez-moi de remercier le Portugal d'avoir pris l'initiative de cette importante réunion, dans le cadre de sa présidence du Conseil de l'Union européenne.
Je voudrais aussi souligner la chaleur de l'accueil qui nous a été réservé et exprimer, le plus simplement possible, mon plaisir à être ici aujourd'hui dans l'une des destinations phares de l'Europe.
Permettez-moi également, de rappeler les liens, déjà anciens mais toujours forts, d'amitié et de fraternité qui unissent nos deux pays. Et qui faciliteront, j'en suis convaincue, le passage de témoin, pour la présidence de l'Union européenne, entre nos deux pays.
Chacun connaît, dans cette assemblée, la place du tourisme en Europe et sa contribution à la croissance et à l'emploi.
En effet, avec 5,5 % du PIB communautaire, 6% des emplois et 30% du commerce extérieur des services, il représente aujourd'hui, une activité économique et sociale de première importance dans l'ensemble de l'Union européenne.
Cette importance devrait encore se conforter. Les projections de l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) prévoient, dans les 20 ans à venir, un doublement des flux touristiques internationaux au bénéfice de l'Europe. Notre continent - déjà première destination touristique choisie au monde - accueillera ainsi plus de 700 millions de touristes contre 386 millions actuellement.
Avec un taux de croissance prévisionnel supérieur à 3% par an, on prévoit également la création de 2 à 3 millions d'emplois supplémentaires qui viendront s'ajouter aux 9 millions d'emplois directs déjà recensés.
Le Conseil et le Parlement européens n'ont d'ailleurs pas manqué de souligner le rôle dynamique du tourisme en matière de création d'emploi. La résolution adoptée à la suite des conclusions du Groupe de haut niveau sur le tourisme et l'emploi a, sur ce sujet, souligné la nécessité de bâtir des politiques touristiques coordonnées au niveau communautaires.
Il nous appartient aujourd'hui, dans le prolongement de nos différentes rencontres, de poursuivre notre action pour que cette importance bénéficie d'une reconnaissance politique au niveau européen.
Au-delà du seul secteur du tourisme, le contexte économique européen tout entier est, lui aussi, en pleine évolution. Le marché unique se met en place. Bientôt l'Euro sera, au quotidien et de manière plus concrète qu'aujourd'hui, notre règle monétaire commune.
Sa mise en place aura des effets évidents sur le secteur du tourisme. Je m'attarderai sur quelques-uns d'entre eux :
Tout d'abord la transparence.
L'Euro doit éclaircir les conditions de la concurrence entre les pays de l'Union européenne. Pour les entreprises touristiques, il permettra d'unifier les règles d'accès aux financements dans une même monnaie et d'assurer une plus grande transparence des conditions d'accès au crédit ou à l'épargne.
L'Euro permettra ensuite d'offrir aux consommateurs une meilleure lisibilité des prix.
Pour le touriste, un des premiers avantages à utiliser l'Euro, se révélera dans la disparition de toute conversion en monnaie locale. Cela facilitera les comparaisons de prix, tant au moment du choix du séjour, dans tel ou tel pays de destination, que pendant ses vacances.
Enfin l'échange.
Conjugué à la libre circulation des personnes, des marchandises et des capitaux, l'Euro favorisera de manière certaine le développement des échanges au sein de l'Union européenne. Cela augmentera aussi l'attractivité de la destination Europe auprès des touristes internationaux.
Pourtant, si pour les voyagistes, la monnaie unique facilitera d'un côté la diminution des risques liés au change, de l'autre, en favorisant les grandes centrales d'achat, l'Euro risque de durcir les rapports entre fournisseurs et prestataires.
Aussi, devrons nous être attentif à chercher, les moyens d'anticiper au maximum la diversité des risques qui accompagne ces activités.
Le gouvernement français est bien conscient de ces enjeux nouveaux engendrés par l'harmonisation monétaire pour les économies européennes et pour le développement du tourisme qui sera indéniablement un des tout premiers secteurs concernés par la mise en uvre de la monnaie unique.
Pour en favoriser la prise en compte par les petites et moyennes entreprises qui n'ont pas toujours la possibilité d'engager seules le passage à l'Euro, j'ai personnellement proposé qu'en lien avec le ministère des Finances de notre pays, une information et une préparation renforcées soient faites à leur intention.
Cette nécessité a d'ailleurs été confirmée lors du Conseil européen de Lisbonne.
Mais l'Euro n'est pas - et ne peut pas être - à lui seul, constitutif d'une politique européenne du tourisme. Il en est un des outils. Et c'est bien à la construction de cette politique coordonnée du tourisme au sein de l'union que nous devons nous attacher.
Le tourisme en Europe est aujourd'hui traversé par de grandes tendances qui, tout en coexistant, peuvent parfois sembler contradictoires.
En effet, l'existence en Europe de grands tours-opérateurs, liée à celle d'une demande touristique de masse à destination des pays les plus ensoleillés du Sud mais aussi d'Asie, a permis à ces grands groupes d'organiser des modèles de production touristique, en particulier dans les domaines de l'hébergement.
Par ailleurs, le système de commercialisation par allottement qui l'accompagne n'a pas été sans conséquences sur les logiques d'aménagement, de développement local et de préservation de l'environnement en raison de l'afflux massif de touristes dans les pays récepteurs.
Ce phénomène de domination de l'offre par le secteur de la grande distribution a d'autres conséquences.
Une des principales à mes yeux, est qu'il banalise et normalise l'offre touristique. Il tend à mettre en cause la diversité géographique, socioculturelle et environnementale qui constituent, comme l'a rappelé le Parlement européen dans sa proposition du 4 février 2000, la richesse et la principale attraction des régions communautaires.
Disons-le, ce type de développement sans régulation porte en lui un risque de saturation et de déséquilibre par une trop forte concentration des flux sur quelques sites réputés et nous devons y être très attentifs.
Parallèlement, le secteur touristique est également marqué par une évolution certaine des attentes et des exigences des touristes eux-mêmes.
Je pense en particulier à :
la liberté de choix dans l'offre des produits proposés qui passe par une information accrue,
l'exigence de qualité,
la volonté grandissante à construire soi-même son propre produit touristique,
l'aspiration à l'authenticité et à la découverte d'autres cultures et d'autres populations,
le souci fort du respect et de la protection de la nature et de l'environnement.
Pour faire face à ces exigences nouvelles, l'offre touristique va devoir s'adapter, se transformer, se moderniser.
En France, nous prenons soin, en liaison avec les professionnels privés et associatifs, avec les responsables et les élus locaux, de diversifier et de qualifier l'offre touristique, dans le sens des aspirations des touristes et de leurs nouveaux modes de consommation.
Je veux profiter de cette réunion pour réaffirmer l'importance de favoriser l'émergence de ces nouvelles formes de tourisme.
Pour y répondre, il convient d'initier une véritable démarche politique qui relève, semble-t-il, directement des pouvoirs publics. Il me paraît essentiel de l'évoquer ici, entre ministres. Elle nous conduit à nous interroger sur ce que nous devons faire, comment et avec quels moyens.
Pour ma part, je considère que les réponses à apporter, propres à chaque État, doivent s'inscrire dans un esprit de concertation, favorisant la coordination des politiques touristiques au niveau régional, national et européen.
Il m'apparaît également nécessaire de conduire cette concertation de la manière la plus démocratique et la plus large possible, en l'ouvrant aux professionnels, aux acteurs du tourisme et aux populations locales directement concernées. Et ce, dans une démarche plus citoyenne de la construction européenne.
Il n'est pas utile, à mon sens, de débattre aujourd'hui d'une intégration du tourisme dans les compétences communautaires. Il s'agit davantage de dessiner les contours d'une coordination européenne des politiques du tourisme dans le cadre d'un aménagement du territoire soucieux de l'environnement, des cultures et des hommes, et surtout favorisant la création de richesses et d'emplois.
Cette nouvelle approche pragmatique pourrait prendre en compte, bien entendu, les grandes évolutions que nous percevons tous.
C'est à dire :
l'émergence d'un tourisme moins concentré, plus diffus,
l'amélioration qualitative de l'offre,
la valorisation des spécificités des territoires,
l'implication et la participation plus effectives des populations locales,
la nécessaire modernisation de l'accès à l'information sur une offre touristique plus diffuse, au travers des technologies nouvelles,
le maintien et la création d'emplois qualifiés.
Cette nouvelle approche pourrait aussi s'exprimer dans le cadre des politiques de coordination que nous menons les uns et les autres avec un certain nombre de pays émergeants en matière touristique pour la mener en cohérence avec celle de l'Union Européenne.
J'ai eu l'occasion, dans d'autres instances internationales, de rappeler combien la France était attachée à soutenir le Code mondial d'éthique élaboré au sein de l'Organisation mondiale du tourisme comme un "garde fou", prônant ce tourisme responsable, respectueux des hommes, des cultures et des économies locales auquel je faisais référence il y a quelques instants.
Bien évidemment, cette conception nouvelle du Tourisme repose aussi, et avant tout, sur l'engagement et la qualité des personnes qui en sont les acteurs.
Et au moment même où nous réaffirmons les potentialités de développement de ce secteur, celui-ci a plus que jamais besoin d'hommes et de femmes qualifiés, motivés, inventifs dans tous les champs et tous les métiers qu'il recouvre.
Cela implique un effort significatif et durable en faveur de leur formation, de l'amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
L'exigence de qualité, exprimée par les touristes, ne peut en effet se construire sur un emploi fragilisé, précaire, sans garantie sociale pour les hommes et les femmes qui y répondent. Ainsi, la croissance économique du tourisme est-elle intimement liée au progrès social.
C'est le sens des mesures prises par le gouvernement français, à mon initiative, en faveur des salariés saisonniers du tourisme, en particulier dans les domaines de la santé, du logement, de la formation comme celui de la sécurisation du contrat de travail.
C'est aussi le sens du plan présenté, le 3 mai dernier, dans l'esprit du Sommet de Luxembourg, par ma collègue Martine Aubry, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, et qui prévoit parmi ses 8 priorités : la lutte contre la précarité, la validation des acquis de l'expérience professionnelle et la mise en uvre d'un dispositif permettant d'anticiper les évolutions de la demande de main d'uvre.
Nous sommes, en effet, déjà confrontés, dans divers secteurs du tourisme, à une pénurie de main d'uvre qualifiée. Et cela, alors même que la volonté commune des pays de l'Union est de réduire le taux de chômage en Europe. Ce constat est d'autant plus dommageable dans le tourisme que la plupart des emplois créés ne sont pas susceptibles d'être délocalisés.
Bien entendu, tous ces objectifs ne pourront aboutir si parallèlement, nous ne soutenons pas efficacement les entreprises essentiellement constituées d'un tissu de petites et moyennes entreprises.
A cet égard, les recommandations concrètes du Conseil européen de Lisbonne dans le domaine économique et financier sont particulièrement adaptées au champ d'action du tourisme. C'est le cas par exemple avec l'élaboration de la Charte pour les PME visant à faciliter la création d'emploi avec la réorientation du fonds pour le soutien à la création de micro-entreprises, comme d'ailleurs l'établissement d'une stratégie pour supprimer les obstacles aux services.
Pour ma part, j'ai tenu à ce que la France participe activement aux quatre groupes de travail mis en place par la Commission, selon les conclusions du Conseil du Marché intérieur du 21 juin 1999 sur le tourisme et l'emploi.
Comme je viens de le dire, je suis en effet convaincue que la prise en compte du tourisme au niveau communautaire et le développement de l'emploi dans ce secteur, passent par une nécessaire coopération entre les États membres et la Commission et au-delà, avec le Parlement européen.
Le Conseil a donc initié un large échange entre les États membres dans quatre domaines prioritaires, à savoir : l'information ; la formation ; la qualité et le développement durable du tourisme.
Les premières conclusions de ces groupes de travail feront l'objet d'une présentation dans le courant du mois d'octobre lors de la tenue d'un prochain comité consultatif de la Commission.
Je m'efforcerai, dans le cadre de la présidence française, de poursuivre et d'enrichir cette dynamique communautaire, portée aujourd'hui par nos amis portugais, au sein de ces groupes afin que dès l'automne 2000, nous soyons en mesure de proposer à nos partenaires, des pistes de travail et de coopération sur le thème du développement durable.
J'ai le plaisir de vous annoncer que je prendrais l'initiative, dans le cadre de la présidence française, d'une rencontre des ministres européens du tourisme à Lille, dans le Nord de la France, dans la semaine du 20 au 25 novembre et je proposerai pourquoi pas, que lors du Conseil "Marché intérieur" prévu fin novembre en France, un point tourisme soit inscrit à l'ordre du jour.
Je ne saurais conclure mon propos sans rappeler un attachement très fort de la France à un droit fondamental et à une aspiration légitime de nos concitoyens, de tous nos concitoyens : l'accès aux vacances et aux loisirs.
Je serais, à ce propos, particulièrement attentive à ce qu'il puisse être inscrit dans le projet de "Charte européenne des droits fondamentaux" que la France entend faire avancer dans le cadre de sa présidence.
Depuis 1936, le Front populaire et la conquête par les travailleurs des premiers congés payés, notre pays s'est attaché, dans sa politique touristique, à favoriser le départ en vacances des populations à revenus modestes comme des familles les plus démunies.
Cela s'est traduit, à la fois, par une politique d'aide aux équipements d'accueil et d'hébergement, en particulier dans le secteur associatif, et par des dispositifs d'aides au départ.
Depuis ma prise de fonction, j'ai souhaité renforcer cette politique notamment par la création de la Bourse Solidarité Vacances et par l'extension du bénéfice des chèques-vacances aux salariés des petites et moyennes entreprises.
La première, la Bourse Solidarité Vacances, permet à des familles en situation d'exclusion sociale d'accéder aux vacances, par un partenariat avec les professionnels du tourisme et les associations caritatives.
Le chèque-vacances, quant à lui, permet de favoriser le départ de familles modestes par une contribution de l'employeur à cet instrument d'épargne volontaire et de paiement des prestations touristiques et de transport.
J'ai proposé que son utilisation soit étendue, la loi française s'y est adaptée, à l'ensemble du territoire de l'Union européenne.
Je souhaite vivement que cet aspect d'une politique sociale des vacances soit débattu au sein de l'Union avec l'ensemble de mes collègues.
Je souhaite aussi qu'elle puisse se traduire par un engagement significatif de l'Union, dans le cadre des fonds structurels européens
D'ores et déjà, la France met à la disposition de ses partenaires européens son expérience et son savoir-faire pour construire, ensemble, un véritable projet européen d'une politique sociale du tourisme.
Pour conclure, je voudrais rappeler un certain nombre d'éléments.
Vous le savez, et nous le vivons quotidiennement, le 20ème siècle aura été celui des mutations et des bouleversements de nos manières de vivre, de communiquer, de nous déplacer.
Nous abordons le troisième millénaire après une formidable révolution des transports et des nouvelles technologies mais aussi conscients que ces progrès ont creusé les inégalités entre pays du Sud et pays du Nord et mis en danger notre écosystème.
Le secteur du tourisme n'a pas échappé à ces évolutions. Il se trouve aujourd'hui confronté à une crise de croissance qui suscite de nouvelles préoccupations plus citoyennes, plus environnementales, celles de favoriser un développement apte à assurer les besoins du présent tout en préservant l'avenir.
C'est le sens même de l'idée à laquelle je suis, vous le savez, très attachée, celle du développement d'un tourisme durable.
Il est, me semble-t-il, de la responsabilité des gouvernements d'intégrer ces évolutions.
Il est tout autant de la responsabilité des gouvernements d'y apporter des réponses tant en termes politiques, qu'en termes budgétaires et de les porter sur le plan européen.
Cela implique une refonte des critères d'intervention et de soutien des aides communautaires, en intégrant cette notion de développement durable à laquelle nous sommes tous sensibles.
Ce sont là, à mes yeux, les conditions indispensables et préalables pour faire de l'Europe un espace de croissance économique, générateur d'emplois qualifiés et durables, mais aussi de progrès social.
Ainsi, c'est un vaste chantier qui s'ouvre à nous en faveur d'une véritable citoyenneté européenne.
Notre réunion de Vilamoura en constitue une étape importante et je voudrais souligner la qualité de sa préparation par la présidence portugaise.
Je souhaite, à cet égard et à titre personnel, saluer tout particulièrement notre collègue, mon ami, Vitor CABRITA NETO.
J'émets le voeu que notre prochaine rencontre en France, à Lille, dans le Nord-Pas-de-Calais, nous fasse franchir un nouveau pas dans la construction de cet édifice.
(Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 25 mai 2000)