Texte intégral
BFM le 23/02/2004
Journaliste de BFM : Le financement des syndicats remis en question, nous vous en parlons ce matin sur BFM. François Fillon souhaite davantage de transparence. Il recevra la semaine prochaine les trésoriers de chaque confédération pour faire le point et trouver un consensus d'ici l'automne. Plusieurs pistes se dessinent. Alors commentaires en direct ce matin avec Jean-Luc Cazettes.
Alors on dit que c'est souvent le système D qui prime pour boucler le budget des organisations entre aides de l'Etat, de certaines entreprises, voire de la mairie de Paris ou encore de mise à disposition de fonctionnaires en nombre, l'opacité souvent reine, c'est votre avis ? A quel niveau y a-t-il un manque de transparence?
Jean-Luc Cazettes : Je pense qu'il y a globalement besoin de transparence. Il y a deux choses dans l'action syndicale. Il y a l'action syndicale purement revendicative qui est menée dans l'entreprise ou dans la branche professionnelle, celle-là doit pouvoir être financée exclusivement par les cotisations de nos adhérents. Et puis nous jouons également un rôle dans l'ensemble de la société civile en tant que représentant de cette société civile organisée : les pouvoirs publics nous demandent de participer à des foultitudes d'organismes que ce soit les conseils économiques, les organismes de conseils d'administration de HLM etc et là, nous remplissons un rôle à ce moment-là national qui a besoin manifestement d'un financement qui dépasse les strictes cotisations de nos adhérents.
Journaliste : Alors justement vous parlez des cotisations du nombre d'adhérents, un nombre d'adhérents en baisse, de façon générale. Je ne parle pas uniquement de la CGC. Est-ce que ça pousse ainsi les syndicats à rechercher d'autres subventions, d'autres moyens de financement ?
JLC : Pas forcément. Parce qu'encore une fois, si le nombre d'adhérents est en baisse encore que je ne le constate pas dans mon organisation, mais la capacité de négociation de combattant d'entreprise est à peu près de même niveau. Et si ça baisse, ça baisse également de ce côté-là, donc les ressources s'ajustent, ce qui est plus compliqué c'est que les pouvoirs publics nous demandent-on le voit bien avec le débat sur la Sécurité sociale, on le voit bien avec le débat sur le logement, nous demandent de plus en plus parce que nous représentons quand même une part importante et organisée de la société civile, plusieurs centaines de milliers de personnes sur l'ensemble des organisations syndicales, de participer à un certain nombre de choses, pour participer à tout ça, il faut manifestement que l'on ait les moyens de se payer des experts et de pouvoir aller à des réunions.
Journaliste : Alors comment vous, vous en sortez ? Comment est financée la CGC ?
JLC : La CGC est financée essentiellement par les cotisations de ses adhérents et par les subventions versées par les pouvoirs publics pour la formation de ses militants, pour la formation des juges prud'homaux et même les subventions des collectivités territoriales deviennent de plus en plus difficile, puisque tout récemment l'UMP et l'UDF au Conseil Régional d'Ile de France ont voté avec le Front National pour supprimer les subventions des organisations syndicales.
Journaliste : Ca fait un budget total de combien pour la CGC ?
JLC : De l'ordre de 80 millions de francs. Je n'ai pas encore traduit en euros, vous m'en excuserez.
Journaliste : 80 millions de francs c'est ça vous dites ?
JLC : A peu près.
Journaliste : D'accord, donc c'est à peu près dans les 120 millions
JLC : 12 millions d'euros.
Journaliste : 12 millions d'euros absolument. Un système de financement public à l'image de celui des partis politiques semble hors de question. Alors reste l'idée d'une contribution plus importante des entreprises, des branches. Pour l'instant la CGT, la CFTC sont assez favorables et vous Jean-Luc CAZETTES, à la CGC ?
JLC : Je suis très réticent sur le financement direct par les entreprises parce que l'on risque très vite d'avoir un lien de subordination qui se créait : "Tu es gentil, je te donne une subvention, tu es méchant, je ne te donne pas de subvention". Moi, je préfère une subvention d'Etat, un subventionnement public, clair, transparent en fonction du nombre de voix par exemple aux élections Prud'homales plutôt que de dire aux entreprises et quand on a abordé ce sujet dans les négociations avec les entreprises, les entreprises nous ont dit à l'époque " oui, oui mais nous on veut des subventions dans l'entreprise, on ne veut même pas que ce soit dans la branche. " Autrement dit c'est bien simple on veut pouvoir subventionner les organisations syndicales qui seront compréhensives et gentilles si on rentre dans ce modèle là, il n'y aura plus d'organisation syndicale demain en France.
(source http://www.cfecgc.org, le 5 avril 2004)
France Inter le 06/03/2004
Journaliste : Jean-Luc Cazettes, vous êtes président de la CFE-CGC, autrement dit l'encadrement français. J'ai entre les mains des cartes à jouer d'une édition CFE-CGC qui présentent en fait dix mesures en faveur de l'emploi. C'est pour vous, j'imagine, une réponse à monsieur Fillon à qui vous proposez des projets un peu différents des siens.
Jean-Luc Cazettes : L'emploi ne se décrète pas. Il ne se décrète surtout pas avec des grandes mesures et surtout pas avec celles qui sont envisagées actuellement et qui vont toutes dans le sens de la précarité, de l'affaiblissement des garanties collectives et en fait du démantèlement du droit du travail, voire même des accords collectifs en matière de chômage. Les propositions que nous faisons sont réalistes parce qu'elles fonctionnent dans un certain nombre de cas. C'est le multisalariat pour justement les travailleurs seniors comme on les appelle maintenant, ce sont les groupements d'employeurs, c'est l'employabilité, donc l'anticipation de la formation pour permettre aux entreprises de mieux s'adapter aux évolutions économiques. C'est un certain nombre de choses qui existent, dont on sait que ça marche et dont on demande l'extension de façon à garantir effectivement un développement de l'emploi qui ne soit pas basé uniquement sur la précarité parce que précarité dit perte de confiance, qui dit perte de confiance dit baisse de la croissance et donc baisse de l'emploi.
Journaliste : Parlons maintenant santé : vos réactions à l'heure où le gouvernement examine une réforme du financement des systèmes de santé. Et vous êtes partie prenante de cet examen. Qu'est-ce que vous formulez comme propositions ?
Jean-Luc Cazettes : Partie prenante, j'ai l'impression qu'on fait de la figuration intelligente mais de la figuration au niveau d'un certain nombre de participants et que les négociations auront lieu en fait essentiellement entre le gouvernement, certaines organisations syndicales et la Mutualité française et qu'on nous présentera ensuite un projet tout ficelé. Pour la CFE-CGC et d'ailleurs pour l'encadrement et les catégories moyennes, nous avons deux exigences, trois même. La première, c'est que la CSG demeure une contribution proportionnelle au salaire et non pas progressive, c'est-à-dire que son taux n'augmente pas en fonction des revenus, qu'on n'en fasse pas un deuxième impôt sur le revenu qui serait confiscatoire pour les catégories que nous représentons. La deuxième exigence, c'est qu'on ne fasse pas des remboursements en matière de soins de santé en fonction des revenus, c'est-à-dire que nous soyons de moins en moins remboursé en fonction de l'évolution de nos revenus parce que dans les deux cas de figure, on paierait plus d'un côté pour avoir moins de l'autre. Moi, j'appelle ça du vol. La troisième exigence, c'est que nous avons un système de garanties collectives qui fonctionne très bien dans les entreprises qui sont des accords obligatoires qui concernent tous les salariés de l'entreprise. Nous tenons à les conserver. Le gouvernement a l'intention de leur supprimer leurs avantages fiscaux et je crains que ça ne fasse tomber ces négociations et ces accords collectifs.
Journaliste : Accordez-moi encore en tant que président de la CFE-CGC une minute pour me parler de la parité homme/femme qui fait parler beaucoup d'ailleurs mais qu'est-ce que vous en dites, vous ?
Jean-Luc Cazettes : Nous avons fait acter trois mesures dans la négociation emploi avec le MEDEF : un, de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale. C'est aussi valable d'ailleurs pour les femmes que pour les hommes, c'est-à-dire la fin des réunions qui démarrent à 19 heures, la fin des travaux qui se prolongent jusqu'au week-end. Nous avons fait acter également une meilleure liaison entre les entreprises et les services publics pour un système de crèches adaptées aux horaires de travail, pour des systèmes d'aides justement pour la garde des enfants et troisièmement, nous avons demandé aussi une responsabilisation des partenaires sociaux pour dresser chaque année un bilan de l'évolution du rattrapage de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Il y a encore beaucoup d'inégalités à combattre en France.
(source http://www.cfecgc.org, le 5 avril 2004)
Le 11/03/2004 BFM
Guillaume Dubois : On reparle du conflit des intermittents ces jours-ci, vous le savez bien sûr, l'été approche, les festivals avec, et les contestataires du coup sont repartis à la charge avec notamment un contre-projet de réforme que le gouvernement a accepté d'étudier. Le jugement de l'UNEDIC a priori est très négatif, jugement sur ce contre-projet, mais sait-on jamais, le gouvernement pourrait être tenté de désamorcer la crise, du coup les signataires de la réforme initiale, celle de l'an dernier, ne sont pas tous contents.
Jean-Luc Cazettes, vous aviez signé à l'époque donc cette réforme de l'UNEDIC du régime spécial de l'intermittence du spectacle, vous craignez un changement de cap du gouvernement ?
Jean-Luc Cazettes : On a signé cette réforme, à l'époque on avait des engagements de monsieur Aillagon, que je lui avais confirmés par un courrier, sur une chasse justement aux faux intermittents, sur la prise en compte des problèmes liés à la maladie, un certain nombre de choses, et puis on a laissé le dossier pourrir pendant des mois sans rien faire. Alors comme vous le rappeliez, on approche de la saison des festivals, et brutalement tout le monde s'aperçoit que c'est un problème urgent, qu'il faut solutionner. Alors monsieur Aillagon se penche sur les contre-projets de la CGT spectacle, les maires dans leurs communes s'inquiètent à nouveau. Alors c'est clair que pour nous on ne va pas s'amuser à la sauvette à donner un coup de main pour remettre de l'ordre dans ce dossier.
GD : Alors ce que vous craignez le plus, c'est éventuellement une nouvelle réforme, ou c'est que dans un premier temps que les engagements de l'époque, sur le fait de remettre un petit peu de l'ordre dans le système, et peut-être notamment aussi tout ce qui est audiovisuel public, recours aux intermittents qui ne devraient pas être des intermittents mais des vrais contrats, n'a peut-être pas été fait non plus ?
JLC : Ce que nous avions demandé au ministre en particulier c'est de mettre de l'ordre, y compris d'abord dans le secteur public, je vous rappelle quand même que les meilleurs employeurs d'intermittents c'est France 2 / France 3, sans compter les grandes sociétés de production Endemol, j'en passe et des meilleures, ce travail n'a pas été fait, donc on n'a pas contribué à résorber le déficit. Et moi je dis aujourd'hui, attendez, attendez, attendez, on ne va pas nous demander encore de mettre la main à la poche. Le contre-projet qui a été présenté, qui a été chiffré par l'UNEDIC, et qui nous amènerait à l'ensemble des salariés du secteur privé, de mettre la main à la poche pour financer un nouveau déficit de ce régime. Alors que l'on fasse une caisse spéciale, que le gouvernement à ce moment là sorte les sous pour sa politique culturelle, que les collectivités territoriales qui jouent très bien de ces affaires là mettent également la main à la poche, parce que quand une mairie, quand une association organise un bal, au noir, évidemment ça empêche l'entreprise de le déclarer, le chef d'orchestre de le déclarer, ça lui fait perdre ses droits aux allocations chômage, tout ça qu'on mette de l'ordre là dedans, que tout le monde paye sa part, et là on voudra bien contribuer nous aussi, mais en revanche, il est hors de question qu'on vienne à la sauvette nous demander, je crois que l'UNEDIC a chiffré à 650 millions d'euros supplémentaires.
GD : Alors effectivement, cette idée d'une caisse complémentaire spéciale qui serait financée par à la fois le milieu professionnel et les utilisateurs, les utilisateurs ce sont les producteurs, les sociétés de production audiovisuelle, les collectivités locales, l'Etat aussi notamment également, elle avait été lancée par votre camarade de la CFDT François Chérèque, vous y adhéreriez ?
JLC : Moi je rappelle simplement que cette idée là, je l'avais lancée il y a à peu près 12 ans..
GD : Donc effectivement vous ne pouvez que la soutenir.
JLC : A l'époque tout le monde avait trouvé que c'était une idée un peu stupide, je suis très content de voir que maintenant, aussi bien François Chérèque, que d'ailleurs monsieur Gautier-Sauvagnac, trouvent que cette idée est une bonne idée, et qu'on peut mettre en place ce régime spécial, je crois que c'est une des bonnes solutions qui peuvent permettre de sortir de ce conflit qui sans ça n'a pas de fin et n'a pas de solution, et qui permet en particulier à chacun de payer sa part dans la politique culturelle de la France.
GD : Ça veut dire que l'accord, la réforme de l'an dernier, quoi qu'il arrive, elle est d'ores et déjà caduque, à jeter à la poubelle ?
JLC : Je pense qu'elle est caduque dans la mesure où elle a été refusée par les uns et par les autres, et dans la mesure où le gouvernement ne fait rien véritablement pour la faire appliquer.
(source http://www.cfecgc.org, le 5 avril 2004)
Journaliste de BFM : Le financement des syndicats remis en question, nous vous en parlons ce matin sur BFM. François Fillon souhaite davantage de transparence. Il recevra la semaine prochaine les trésoriers de chaque confédération pour faire le point et trouver un consensus d'ici l'automne. Plusieurs pistes se dessinent. Alors commentaires en direct ce matin avec Jean-Luc Cazettes.
Alors on dit que c'est souvent le système D qui prime pour boucler le budget des organisations entre aides de l'Etat, de certaines entreprises, voire de la mairie de Paris ou encore de mise à disposition de fonctionnaires en nombre, l'opacité souvent reine, c'est votre avis ? A quel niveau y a-t-il un manque de transparence?
Jean-Luc Cazettes : Je pense qu'il y a globalement besoin de transparence. Il y a deux choses dans l'action syndicale. Il y a l'action syndicale purement revendicative qui est menée dans l'entreprise ou dans la branche professionnelle, celle-là doit pouvoir être financée exclusivement par les cotisations de nos adhérents. Et puis nous jouons également un rôle dans l'ensemble de la société civile en tant que représentant de cette société civile organisée : les pouvoirs publics nous demandent de participer à des foultitudes d'organismes que ce soit les conseils économiques, les organismes de conseils d'administration de HLM etc et là, nous remplissons un rôle à ce moment-là national qui a besoin manifestement d'un financement qui dépasse les strictes cotisations de nos adhérents.
Journaliste : Alors justement vous parlez des cotisations du nombre d'adhérents, un nombre d'adhérents en baisse, de façon générale. Je ne parle pas uniquement de la CGC. Est-ce que ça pousse ainsi les syndicats à rechercher d'autres subventions, d'autres moyens de financement ?
JLC : Pas forcément. Parce qu'encore une fois, si le nombre d'adhérents est en baisse encore que je ne le constate pas dans mon organisation, mais la capacité de négociation de combattant d'entreprise est à peu près de même niveau. Et si ça baisse, ça baisse également de ce côté-là, donc les ressources s'ajustent, ce qui est plus compliqué c'est que les pouvoirs publics nous demandent-on le voit bien avec le débat sur la Sécurité sociale, on le voit bien avec le débat sur le logement, nous demandent de plus en plus parce que nous représentons quand même une part importante et organisée de la société civile, plusieurs centaines de milliers de personnes sur l'ensemble des organisations syndicales, de participer à un certain nombre de choses, pour participer à tout ça, il faut manifestement que l'on ait les moyens de se payer des experts et de pouvoir aller à des réunions.
Journaliste : Alors comment vous, vous en sortez ? Comment est financée la CGC ?
JLC : La CGC est financée essentiellement par les cotisations de ses adhérents et par les subventions versées par les pouvoirs publics pour la formation de ses militants, pour la formation des juges prud'homaux et même les subventions des collectivités territoriales deviennent de plus en plus difficile, puisque tout récemment l'UMP et l'UDF au Conseil Régional d'Ile de France ont voté avec le Front National pour supprimer les subventions des organisations syndicales.
Journaliste : Ca fait un budget total de combien pour la CGC ?
JLC : De l'ordre de 80 millions de francs. Je n'ai pas encore traduit en euros, vous m'en excuserez.
Journaliste : 80 millions de francs c'est ça vous dites ?
JLC : A peu près.
Journaliste : D'accord, donc c'est à peu près dans les 120 millions
JLC : 12 millions d'euros.
Journaliste : 12 millions d'euros absolument. Un système de financement public à l'image de celui des partis politiques semble hors de question. Alors reste l'idée d'une contribution plus importante des entreprises, des branches. Pour l'instant la CGT, la CFTC sont assez favorables et vous Jean-Luc CAZETTES, à la CGC ?
JLC : Je suis très réticent sur le financement direct par les entreprises parce que l'on risque très vite d'avoir un lien de subordination qui se créait : "Tu es gentil, je te donne une subvention, tu es méchant, je ne te donne pas de subvention". Moi, je préfère une subvention d'Etat, un subventionnement public, clair, transparent en fonction du nombre de voix par exemple aux élections Prud'homales plutôt que de dire aux entreprises et quand on a abordé ce sujet dans les négociations avec les entreprises, les entreprises nous ont dit à l'époque " oui, oui mais nous on veut des subventions dans l'entreprise, on ne veut même pas que ce soit dans la branche. " Autrement dit c'est bien simple on veut pouvoir subventionner les organisations syndicales qui seront compréhensives et gentilles si on rentre dans ce modèle là, il n'y aura plus d'organisation syndicale demain en France.
(source http://www.cfecgc.org, le 5 avril 2004)
France Inter le 06/03/2004
Journaliste : Jean-Luc Cazettes, vous êtes président de la CFE-CGC, autrement dit l'encadrement français. J'ai entre les mains des cartes à jouer d'une édition CFE-CGC qui présentent en fait dix mesures en faveur de l'emploi. C'est pour vous, j'imagine, une réponse à monsieur Fillon à qui vous proposez des projets un peu différents des siens.
Jean-Luc Cazettes : L'emploi ne se décrète pas. Il ne se décrète surtout pas avec des grandes mesures et surtout pas avec celles qui sont envisagées actuellement et qui vont toutes dans le sens de la précarité, de l'affaiblissement des garanties collectives et en fait du démantèlement du droit du travail, voire même des accords collectifs en matière de chômage. Les propositions que nous faisons sont réalistes parce qu'elles fonctionnent dans un certain nombre de cas. C'est le multisalariat pour justement les travailleurs seniors comme on les appelle maintenant, ce sont les groupements d'employeurs, c'est l'employabilité, donc l'anticipation de la formation pour permettre aux entreprises de mieux s'adapter aux évolutions économiques. C'est un certain nombre de choses qui existent, dont on sait que ça marche et dont on demande l'extension de façon à garantir effectivement un développement de l'emploi qui ne soit pas basé uniquement sur la précarité parce que précarité dit perte de confiance, qui dit perte de confiance dit baisse de la croissance et donc baisse de l'emploi.
Journaliste : Parlons maintenant santé : vos réactions à l'heure où le gouvernement examine une réforme du financement des systèmes de santé. Et vous êtes partie prenante de cet examen. Qu'est-ce que vous formulez comme propositions ?
Jean-Luc Cazettes : Partie prenante, j'ai l'impression qu'on fait de la figuration intelligente mais de la figuration au niveau d'un certain nombre de participants et que les négociations auront lieu en fait essentiellement entre le gouvernement, certaines organisations syndicales et la Mutualité française et qu'on nous présentera ensuite un projet tout ficelé. Pour la CFE-CGC et d'ailleurs pour l'encadrement et les catégories moyennes, nous avons deux exigences, trois même. La première, c'est que la CSG demeure une contribution proportionnelle au salaire et non pas progressive, c'est-à-dire que son taux n'augmente pas en fonction des revenus, qu'on n'en fasse pas un deuxième impôt sur le revenu qui serait confiscatoire pour les catégories que nous représentons. La deuxième exigence, c'est qu'on ne fasse pas des remboursements en matière de soins de santé en fonction des revenus, c'est-à-dire que nous soyons de moins en moins remboursé en fonction de l'évolution de nos revenus parce que dans les deux cas de figure, on paierait plus d'un côté pour avoir moins de l'autre. Moi, j'appelle ça du vol. La troisième exigence, c'est que nous avons un système de garanties collectives qui fonctionne très bien dans les entreprises qui sont des accords obligatoires qui concernent tous les salariés de l'entreprise. Nous tenons à les conserver. Le gouvernement a l'intention de leur supprimer leurs avantages fiscaux et je crains que ça ne fasse tomber ces négociations et ces accords collectifs.
Journaliste : Accordez-moi encore en tant que président de la CFE-CGC une minute pour me parler de la parité homme/femme qui fait parler beaucoup d'ailleurs mais qu'est-ce que vous en dites, vous ?
Jean-Luc Cazettes : Nous avons fait acter trois mesures dans la négociation emploi avec le MEDEF : un, de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale. C'est aussi valable d'ailleurs pour les femmes que pour les hommes, c'est-à-dire la fin des réunions qui démarrent à 19 heures, la fin des travaux qui se prolongent jusqu'au week-end. Nous avons fait acter également une meilleure liaison entre les entreprises et les services publics pour un système de crèches adaptées aux horaires de travail, pour des systèmes d'aides justement pour la garde des enfants et troisièmement, nous avons demandé aussi une responsabilisation des partenaires sociaux pour dresser chaque année un bilan de l'évolution du rattrapage de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Il y a encore beaucoup d'inégalités à combattre en France.
(source http://www.cfecgc.org, le 5 avril 2004)
Le 11/03/2004 BFM
Guillaume Dubois : On reparle du conflit des intermittents ces jours-ci, vous le savez bien sûr, l'été approche, les festivals avec, et les contestataires du coup sont repartis à la charge avec notamment un contre-projet de réforme que le gouvernement a accepté d'étudier. Le jugement de l'UNEDIC a priori est très négatif, jugement sur ce contre-projet, mais sait-on jamais, le gouvernement pourrait être tenté de désamorcer la crise, du coup les signataires de la réforme initiale, celle de l'an dernier, ne sont pas tous contents.
Jean-Luc Cazettes, vous aviez signé à l'époque donc cette réforme de l'UNEDIC du régime spécial de l'intermittence du spectacle, vous craignez un changement de cap du gouvernement ?
Jean-Luc Cazettes : On a signé cette réforme, à l'époque on avait des engagements de monsieur Aillagon, que je lui avais confirmés par un courrier, sur une chasse justement aux faux intermittents, sur la prise en compte des problèmes liés à la maladie, un certain nombre de choses, et puis on a laissé le dossier pourrir pendant des mois sans rien faire. Alors comme vous le rappeliez, on approche de la saison des festivals, et brutalement tout le monde s'aperçoit que c'est un problème urgent, qu'il faut solutionner. Alors monsieur Aillagon se penche sur les contre-projets de la CGT spectacle, les maires dans leurs communes s'inquiètent à nouveau. Alors c'est clair que pour nous on ne va pas s'amuser à la sauvette à donner un coup de main pour remettre de l'ordre dans ce dossier.
GD : Alors ce que vous craignez le plus, c'est éventuellement une nouvelle réforme, ou c'est que dans un premier temps que les engagements de l'époque, sur le fait de remettre un petit peu de l'ordre dans le système, et peut-être notamment aussi tout ce qui est audiovisuel public, recours aux intermittents qui ne devraient pas être des intermittents mais des vrais contrats, n'a peut-être pas été fait non plus ?
JLC : Ce que nous avions demandé au ministre en particulier c'est de mettre de l'ordre, y compris d'abord dans le secteur public, je vous rappelle quand même que les meilleurs employeurs d'intermittents c'est France 2 / France 3, sans compter les grandes sociétés de production Endemol, j'en passe et des meilleures, ce travail n'a pas été fait, donc on n'a pas contribué à résorber le déficit. Et moi je dis aujourd'hui, attendez, attendez, attendez, on ne va pas nous demander encore de mettre la main à la poche. Le contre-projet qui a été présenté, qui a été chiffré par l'UNEDIC, et qui nous amènerait à l'ensemble des salariés du secteur privé, de mettre la main à la poche pour financer un nouveau déficit de ce régime. Alors que l'on fasse une caisse spéciale, que le gouvernement à ce moment là sorte les sous pour sa politique culturelle, que les collectivités territoriales qui jouent très bien de ces affaires là mettent également la main à la poche, parce que quand une mairie, quand une association organise un bal, au noir, évidemment ça empêche l'entreprise de le déclarer, le chef d'orchestre de le déclarer, ça lui fait perdre ses droits aux allocations chômage, tout ça qu'on mette de l'ordre là dedans, que tout le monde paye sa part, et là on voudra bien contribuer nous aussi, mais en revanche, il est hors de question qu'on vienne à la sauvette nous demander, je crois que l'UNEDIC a chiffré à 650 millions d'euros supplémentaires.
GD : Alors effectivement, cette idée d'une caisse complémentaire spéciale qui serait financée par à la fois le milieu professionnel et les utilisateurs, les utilisateurs ce sont les producteurs, les sociétés de production audiovisuelle, les collectivités locales, l'Etat aussi notamment également, elle avait été lancée par votre camarade de la CFDT François Chérèque, vous y adhéreriez ?
JLC : Moi je rappelle simplement que cette idée là, je l'avais lancée il y a à peu près 12 ans..
GD : Donc effectivement vous ne pouvez que la soutenir.
JLC : A l'époque tout le monde avait trouvé que c'était une idée un peu stupide, je suis très content de voir que maintenant, aussi bien François Chérèque, que d'ailleurs monsieur Gautier-Sauvagnac, trouvent que cette idée est une bonne idée, et qu'on peut mettre en place ce régime spécial, je crois que c'est une des bonnes solutions qui peuvent permettre de sortir de ce conflit qui sans ça n'a pas de fin et n'a pas de solution, et qui permet en particulier à chacun de payer sa part dans la politique culturelle de la France.
GD : Ça veut dire que l'accord, la réforme de l'an dernier, quoi qu'il arrive, elle est d'ores et déjà caduque, à jeter à la poubelle ?
JLC : Je pense qu'elle est caduque dans la mesure où elle a été refusée par les uns et par les autres, et dans la mesure où le gouvernement ne fait rien véritablement pour la faire appliquer.
(source http://www.cfecgc.org, le 5 avril 2004)