Texte intégral
Au Conseil européen des 16 et 17 octobre, les chefs d'Etat et de gouvernement ont voulu donner une impulsion nouvelle à la croissance européenne. Ils ont notamment invité la Commission européenne et la Banque européenne d'investissement à dynamiser la recherche et à favoriser la réalisation de grands projets de transport transeuropéens, dans la ligne des initiatives prises par la présidence italienne relayées par la déclaration du Conseil des ministres franco-allemands de septembre dernier.
Cette nouvelle orientation reflète aussi le souci croissant d'une meilleure interconnexion des réseaux européens, qu'il s'agisse des réseaux électriques ou de transport. Or unir les réseaux, en reliant les marchés entre eux, réveille paradoxalement certaines craintes : crainte qu'un grand marché unique ne perturbe la marche de certains services publics, maintenant voués à se déployer sur tout le territoire européen ; crainte que les changements à l'oeuvre diminuent le poids d'entreprises conçues pour être des champions nationaux, et qui doivent désormais se hisser au rang d'entreprises européennes, voire internationales ; ou peur dans certains Etats, d'une dépendance excessive de l'approvisionnement vis-à-vis de leurs voisins, que la récente panne électrique a ravivée en Italie.
Ces craintes sont infondées, car si les services publics économiques en réseau tels que les télécommunications, la poste, la fourniture de gaz, d'électricité, et d'eau, ou encore les transports, sont en voie de structuration sur une échelle européenne, leurs particularités ne sont pas omises. En dehors même des impératifs de sécurité d'approvisionnement et de désenclavement du territoire, ces services appartiennent en effet au modèle social européen que nous avons choisi. Qui pourrait accepter que les trains ne fonctionnent que dans les zones où leur circulation est directement rentable ? Qui prendrait le risque de fragiliser nos industries et nos services en ne leur garantissant pas les moyens de communication et d'alimentation énergétique à la base de leur activité ? En offrant aux services publics économiques (appelés "services d'intérêt économique général" - SIEG - dans le jargon communautaire) un cadre élargi à l'échelle du continent, l'Europe les prépare à une transformation salutaire pour renforcer leur compétitivité, tout en veillant aux obligations de service public qui en font la spécificité.
L'Europe des services publics économiques est en train de naître. Elle s'appuie sur quatre leviers: l'aiguillon de l'ouverture à la concurrence; la garantie du respect des principes d'intérêt général, tels que la qualité, la continuité, la sécurité d'approvisionnement et la solidarité ; la levée des obstacles physiques aux échanges entre pays, ce qui suppose de supprimer les goulets d'étranglement aux frontières ; enfin, la mise en place progressive d'un espace européen de régulation dont le rapport que m'a remis récemment Christian Stoffaes dessine les contours. L'année 2003 a permis, en ce sens, de franchir une double étape.
Tout d'abord, au sein de la Convention, la France a obtenu de faire consacrer les SIEG par la future Constitution européenne, ce qui se traduit par la possibilité d'en fixer les principes et les conditions par une loi européenne.
Le second fait marquant est le lancement par la Commission européenne d'un débat sur l'avenir des services publics en Europe. Initié à travers la publication en mai dernier d'un "Livre vert" ce débat a donné lieu à des propositions nombreuses de la part des syndicats et des entreprises en réponse au questionnaire de la Commission. Le gouvernement y a répondu récemment en mettant en avant trois objectifs essentiels : consolider ces services en les dotant d'un statut juridique transversal; sécuriser leurs financements en rapport avec le coût de leurs obligations de service public ; promouvoir à l'échelle de l'Europe un système coordonné a cohérent d'évaluation de leur qualité.
Le Conseil européen vient donc de permettre une troisième avancée, en exprimant le consensus existant entre les Etats sur l'urgence de régler les difficultés d'interconnexion entre leurs réseaux nationaux, de transport en particulier. S'il en était besoin, l'exemple des services publics économiques démontrerait amplement que l'Europe n'est pas une contrainte qui nous soit extérieure. Elle est au contraire un espace d'initiatives, d'échanges et de fertilisations croisées. Elle est aussi un accélérateur de mutations, un incubateur d'entreprises de taille européenne. Elle s'avère enfin un facilitateur des comparaisons indispensables de la performance technique, économique et sociale des services publics. La France, pour sa part, contribue à l'édification du socle commun des services publics en Europe: en apportant son expérience unique dans ce domaine et en rehaussant l'ambition de la politique européenne.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 octobre 2003)
Cette nouvelle orientation reflète aussi le souci croissant d'une meilleure interconnexion des réseaux européens, qu'il s'agisse des réseaux électriques ou de transport. Or unir les réseaux, en reliant les marchés entre eux, réveille paradoxalement certaines craintes : crainte qu'un grand marché unique ne perturbe la marche de certains services publics, maintenant voués à se déployer sur tout le territoire européen ; crainte que les changements à l'oeuvre diminuent le poids d'entreprises conçues pour être des champions nationaux, et qui doivent désormais se hisser au rang d'entreprises européennes, voire internationales ; ou peur dans certains Etats, d'une dépendance excessive de l'approvisionnement vis-à-vis de leurs voisins, que la récente panne électrique a ravivée en Italie.
Ces craintes sont infondées, car si les services publics économiques en réseau tels que les télécommunications, la poste, la fourniture de gaz, d'électricité, et d'eau, ou encore les transports, sont en voie de structuration sur une échelle européenne, leurs particularités ne sont pas omises. En dehors même des impératifs de sécurité d'approvisionnement et de désenclavement du territoire, ces services appartiennent en effet au modèle social européen que nous avons choisi. Qui pourrait accepter que les trains ne fonctionnent que dans les zones où leur circulation est directement rentable ? Qui prendrait le risque de fragiliser nos industries et nos services en ne leur garantissant pas les moyens de communication et d'alimentation énergétique à la base de leur activité ? En offrant aux services publics économiques (appelés "services d'intérêt économique général" - SIEG - dans le jargon communautaire) un cadre élargi à l'échelle du continent, l'Europe les prépare à une transformation salutaire pour renforcer leur compétitivité, tout en veillant aux obligations de service public qui en font la spécificité.
L'Europe des services publics économiques est en train de naître. Elle s'appuie sur quatre leviers: l'aiguillon de l'ouverture à la concurrence; la garantie du respect des principes d'intérêt général, tels que la qualité, la continuité, la sécurité d'approvisionnement et la solidarité ; la levée des obstacles physiques aux échanges entre pays, ce qui suppose de supprimer les goulets d'étranglement aux frontières ; enfin, la mise en place progressive d'un espace européen de régulation dont le rapport que m'a remis récemment Christian Stoffaes dessine les contours. L'année 2003 a permis, en ce sens, de franchir une double étape.
Tout d'abord, au sein de la Convention, la France a obtenu de faire consacrer les SIEG par la future Constitution européenne, ce qui se traduit par la possibilité d'en fixer les principes et les conditions par une loi européenne.
Le second fait marquant est le lancement par la Commission européenne d'un débat sur l'avenir des services publics en Europe. Initié à travers la publication en mai dernier d'un "Livre vert" ce débat a donné lieu à des propositions nombreuses de la part des syndicats et des entreprises en réponse au questionnaire de la Commission. Le gouvernement y a répondu récemment en mettant en avant trois objectifs essentiels : consolider ces services en les dotant d'un statut juridique transversal; sécuriser leurs financements en rapport avec le coût de leurs obligations de service public ; promouvoir à l'échelle de l'Europe un système coordonné a cohérent d'évaluation de leur qualité.
Le Conseil européen vient donc de permettre une troisième avancée, en exprimant le consensus existant entre les Etats sur l'urgence de régler les difficultés d'interconnexion entre leurs réseaux nationaux, de transport en particulier. S'il en était besoin, l'exemple des services publics économiques démontrerait amplement que l'Europe n'est pas une contrainte qui nous soit extérieure. Elle est au contraire un espace d'initiatives, d'échanges et de fertilisations croisées. Elle est aussi un accélérateur de mutations, un incubateur d'entreprises de taille européenne. Elle s'avère enfin un facilitateur des comparaisons indispensables de la performance technique, économique et sociale des services publics. La France, pour sa part, contribue à l'édification du socle commun des services publics en Europe: en apportant son expérience unique dans ce domaine et en rehaussant l'ambition de la politique européenne.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 octobre 2003)