Lettre de M. Marc Blondel, secrétaire général de Force Ouvrière, adressée à M. J-P Raffarin, Premier Ministre, sur les conséquences sociales des dispositions du projet de loi de réforme des retraites, Paris le 19 juin 2003.

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Texte intégral

Monsieur le Premier ministre,
Vous venez d'adresser une lettre à tous les Français pour évoquer VOTRE VERITÉ sur l'avenir de NOS RETRAITES.
Si le sujet est d'une gravité certaine, l'augmentation des sacrifices que vous demandez aux salariés ne conduira pas au bonheur espéré.
M. le Premier ministre, vous travestissez la vérité. La dégradation des pensions déjà programmée par les réformes Balladur de 1993 va accroître le nombre de retraités pauvres, augmentant ainsi leur niveau de dépendance économique.
Annoncer que l'avenir des retraites n'est pas financé à ce jour, est une manière d'affoler les Français et de culpabiliser les travailleurs pour leur faire avaler votre projet de réforme.
Si le gouvernement avait conduit une véritable négociation, comme Force Ouvrière l'a toujours revendiquée, nous n'en serions pas à cette situation de blocage, dont vous portez l'entière responsabilité.
C'est une réforme sage, dites-vous ! Très certainement: il faudra travailler et cotiser plus longtemps tout en acceptant des retraites en constante diminution et dont la programmation est déjà engagée depuis 1994. 41 ans en 2008 puis 42 ans en 2020 avec une baisse estimée de l'ordre de 20 %.
Les salariés ne sont pas dupes, malgré une campagne de "propagande" sans précédent (20 millions d'euros), la réforme des retraites est toujours jugée défavorablement par la majorité des " bénéficiaires ". Le scepticisme l'emporte dans les récents sondages.
Parce qu'ils sont confrontés chaque jour aux plans sociaux, aux restructurations, aux délocalisations, aux licenciements, à la désindustrialisation, aux départs précoces, à l'augmentation de la précarité, les salariés ne se reconnaissent pas dans vos propos Monsieur le Premier ministre, ni dans les solutions proposées. Ce ne sont pas les quelques mesurettes inscrites dans le projet de loi, et qui ne concernent qu'une minorité, qui feront de cette contre-réforme un élément positif de solidarité.
Pour Force Ouvrière, nous continuerons à revendiquer une réforme sur une autre base: celle d'une meilleure répartition des richesses produites qui doit permettre d'assurer le financement durable de nos régimes solidaires en maintenant les liens intergénérationnels.
C'est à cette condition que nous pourrons garantir aux salariés une retraite décente pour leur avenir, leur assurant l'indépendance financière.
C'est notre conception, non pas du bonheur, mais de la justice.
Croyez, Monsieur le Premier ministre, en l'assurance de notre considération distinguée et à notre attachement à la cause des salariés.

(Source : http://www.force-ouvriere.org, le 23 juin 2003)