Texte intégral
Monsieur Le Président du Conseil Général,
Monsieur le Procureur de la République,
Monsieur l'Inspecteur d'académie,
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Président du Conseil général, de m'avoir invitée dans votre département à l'occasion de la journée nationale pour l'enfance maltraitée. Cette journée est particulièrement symbolique : créée par Jacques Barrot en mars 1997, elle voulait marquer une préoccupation particulière à l'égard du dépistage, du signalement et de la prise en charge des mineurs maltraités.
Vous avez dans vos propos d'accueil, retracé le cadre juridique et, je le sais, profondément humaniste de l'action des services départementaux qui sont en charge de la protection de l'enfance. C'est-à-dire des plus faibles, des enfants, des jeunes, des familles.
J'ai bien noté que vos services travaillent en lien étroit avec les services des ministères chargés de la justice, de l'Education Nationale et la Santé. Cela me paraît essentiel et j'y vois l'une des raisons du bon fonctionnement de ce dispositif.
L'échange que nous venons d'avoir montre toute la richesse mais aussi les difficultés d'une collaboration réactive et efficace. Je constate qu'il est très important que cette collaboration, par sa qualité, contribue déjà à réparer les traumatismes subis.
L'action des intervenants de la protection de l'enfance, la mienne à la tête du ministère de la Famille et de l'Enfance depuis cinq mois, s'inscrit dans cette même perspective : faire de l'écoute des familles, du soutien et de la protection des plus vulnérables, une priorité.
L'écoute des parents est primordiale, car comme le rappelle le préambule de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, l'enfant a besoin de protection et c'est d'abord aux parents de la leur assurer.
Car nous le savons, l'exercice de la fonction parentale n'est pas complètement inné. C'est la résultante d'un processus. On ne naît pas parent, on le devient. En cas de difficultés graves, un soutien extérieur est indispensable.
Les difficultés, aujourd'hui, sont nombreuses :
Les évolutions de la famille ont été considérables ces dernières années.
Le respect des droits de l'enfant, des droits et devoirs des parents doit tenir compte des bouleversements qui ont affecté la cellule familiale traditionnelle. Ces changements profonds ont permis des avancées :
- des avancées en faveur des femmes et qui leur ont permis de prendre leur place dans la société ;
- des avancées en faveur des enfants, et qui ont permis faire entendre leur voix mais, pour eux-aussi, les nombreuses séparations, ruptures, divorces peuvent susciter de grandes souffrances.
La crise économique et sociale malmène aussi le lien familial, l'image maternelle ou paternelle et affecte encore trop d'enfants, les privant ainsi d'insouciance.
Des dangers nouveaux sont apparus auxquels sont confrontées les familles face à des individus ou à des réseaux internationaux qui utilisent de surcroît les nouvelles technologies de l'information, souvent au mépris de l'intérêt des enfants. Ainsi en est-il d'Internet qui permet des échanges quasi instantanés, d'un bout à l'autre du monde.
L'e-mail, les forums de discussion tissent de nombreux liens, permettent des rencontres non seulement dans le monde virtuel mais aussi dans le monde réel avec des risques de pédophilie. Or les enfants, les adolescents sont très coutumiers de ces nouveaux modes de communication.
Le Gouvernement est conscient de ces enjeux et il a d'ores et déjà apporté des réponses nationales, européennes.
Le développement des services aux familles et à la parentalité tels les Points Info Famille qui permettent l'accès à l'information des familles, les réseaux d'appui, d'écoute, et de conseil aux parents, structures de proximité où des parents vont trouver à la fois des possibilités d'échange entre familles et de soutien par des professionnels, ou encore les services de médiation, en cas de conflits autour des enfants dans des situations de séparations ou de divorce permettent d'informer, de rassurer des parents inquiets ou désorientés. Près de 15 M sont ainsi affectés aux dépenses en faveur du soutien à la fonction parentale et aux familles.
Nous devons aujourd'hui aller plus loin.
Les premiers lieux de repérage des difficultés sociales d'un enfant ou d'un adolescent sont les services départementaux de protection maternelle et infantile, l'école, et les communes. Les lieux de traitement en dernière instance de ces difficultés sont les centres éducatifs fermés, voire les quartiers pénitentiaires des mineurs - ce qui traduit parfois les échecs des dispositifs en amont. Il peut aussi s'agir de placement en hôpital psychiatrique.
La plupart de ces jeunes auront connu le dispositif varié et complexe de l'aide sociale à l'enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse. Ces services ont été confiés, par les lois de décentralisation, aux départements, aux services judiciaires et à la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.
En France, il est souvent question du dispositif de protection de l'enfance mais en fait il y a côte à côte des dispositifs de protection de l'enfance éclatés, parfois anciens et d'application disparate. Récemment un certain nombre de faits divers ont montré que les procédures de repérage, de signalement de maltraitance et les suites qui leur étaient données, comportaient sans doute des lacunes.
La rénovation de ces dispositifs est devenue un enjeu essentiel alors que, depuis les lois de décentralisation, la protection de l'enfance n'a pas véritablement fait l'objet d'un débat public si ce n'est à l'occasion du vote de la loi du 10 juillet 1989 sur l'enfance maltraitée.
Un tel débat est d'autant plus indispensable aujourd'hui que le nombre d'enfants concernés n'a cessé de croître alors même que nous ne disposons aujourd'hui que de chiffres parcellaires : plus de 263 000 enfants bénéficient d'une mesure de protection administrative et judiciaire financée par l'aide sociale à l'enfance dont le poids financier dans les budgets des départements est devenu considérable ( environ 5 milliards d'euros en 2002).
La connaissance réciproque de l'activité de l'ensemble des dispositifs de protection de l'enfance, exprimée en données homogènes, était le premier jalon indispensable d'une nouvelle politique de protection de l'enfance. Tel était un des enjeux de la loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance créant l'observatoire national de l'enfance en danger.
Travailler tous ensemble à une meilleure prévention des situations difficiles, mieux prendre en compte tous les aspects de la maltraitance, réfléchir à des formes d'accueil modulables en fonction des besoins de l'enfant, engager une réflexion sur la complémentarité des dispositifs, la coordination des intervenants. Tels sont mes projets pour les semaines à venir.
Il ne s'agit pas de standardiser les pratiques ni d'entraver les capacités d'initiative et d'autonomie inhérentes à chaque institution mais de les inscrire dans un cadre d'exercice et de références commun, moderne.
Il est indispensable que les critères d'admission aux différents dispositifs, des procédures clairement définies, un contenu lisible des actions soient partagés par tous les partenaires de la protection de l'enfance au plan départemental, et soient communiqués aux parents et aux jeunes.
Trop d'enfants passent d'institutions en institutions sans continuité de prise en charge, sans " histoire " construite avec les parents. Il est primordial aussi d'assurer à ces enfants en grande difficulté familiale une référence adulte sécurisante, installée dans une certaine durée et dans la constance.
N'oublions pas que nous avons été nous-même des enfants, ayant vécu des épreuves familiales, des "ruptures". Puis nous sommes devenus parents à notre tour.
Nous essayons de construire un environnement stable et structurant pour nos enfants.
C'est tout l'enjeu de la réflexion sur la protection de l'enfance que je souhaite mener avec les départements dans les semaines et les mois à venir.
Je vous remercie.
(Source http://www.famille.gouv.fr, le 28 septembre 2004)
Monsieur le Procureur de la République,
Monsieur l'Inspecteur d'académie,
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Président du Conseil général, de m'avoir invitée dans votre département à l'occasion de la journée nationale pour l'enfance maltraitée. Cette journée est particulièrement symbolique : créée par Jacques Barrot en mars 1997, elle voulait marquer une préoccupation particulière à l'égard du dépistage, du signalement et de la prise en charge des mineurs maltraités.
Vous avez dans vos propos d'accueil, retracé le cadre juridique et, je le sais, profondément humaniste de l'action des services départementaux qui sont en charge de la protection de l'enfance. C'est-à-dire des plus faibles, des enfants, des jeunes, des familles.
J'ai bien noté que vos services travaillent en lien étroit avec les services des ministères chargés de la justice, de l'Education Nationale et la Santé. Cela me paraît essentiel et j'y vois l'une des raisons du bon fonctionnement de ce dispositif.
L'échange que nous venons d'avoir montre toute la richesse mais aussi les difficultés d'une collaboration réactive et efficace. Je constate qu'il est très important que cette collaboration, par sa qualité, contribue déjà à réparer les traumatismes subis.
L'action des intervenants de la protection de l'enfance, la mienne à la tête du ministère de la Famille et de l'Enfance depuis cinq mois, s'inscrit dans cette même perspective : faire de l'écoute des familles, du soutien et de la protection des plus vulnérables, une priorité.
L'écoute des parents est primordiale, car comme le rappelle le préambule de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, l'enfant a besoin de protection et c'est d'abord aux parents de la leur assurer.
Car nous le savons, l'exercice de la fonction parentale n'est pas complètement inné. C'est la résultante d'un processus. On ne naît pas parent, on le devient. En cas de difficultés graves, un soutien extérieur est indispensable.
Les difficultés, aujourd'hui, sont nombreuses :
Les évolutions de la famille ont été considérables ces dernières années.
Le respect des droits de l'enfant, des droits et devoirs des parents doit tenir compte des bouleversements qui ont affecté la cellule familiale traditionnelle. Ces changements profonds ont permis des avancées :
- des avancées en faveur des femmes et qui leur ont permis de prendre leur place dans la société ;
- des avancées en faveur des enfants, et qui ont permis faire entendre leur voix mais, pour eux-aussi, les nombreuses séparations, ruptures, divorces peuvent susciter de grandes souffrances.
La crise économique et sociale malmène aussi le lien familial, l'image maternelle ou paternelle et affecte encore trop d'enfants, les privant ainsi d'insouciance.
Des dangers nouveaux sont apparus auxquels sont confrontées les familles face à des individus ou à des réseaux internationaux qui utilisent de surcroît les nouvelles technologies de l'information, souvent au mépris de l'intérêt des enfants. Ainsi en est-il d'Internet qui permet des échanges quasi instantanés, d'un bout à l'autre du monde.
L'e-mail, les forums de discussion tissent de nombreux liens, permettent des rencontres non seulement dans le monde virtuel mais aussi dans le monde réel avec des risques de pédophilie. Or les enfants, les adolescents sont très coutumiers de ces nouveaux modes de communication.
Le Gouvernement est conscient de ces enjeux et il a d'ores et déjà apporté des réponses nationales, européennes.
Le développement des services aux familles et à la parentalité tels les Points Info Famille qui permettent l'accès à l'information des familles, les réseaux d'appui, d'écoute, et de conseil aux parents, structures de proximité où des parents vont trouver à la fois des possibilités d'échange entre familles et de soutien par des professionnels, ou encore les services de médiation, en cas de conflits autour des enfants dans des situations de séparations ou de divorce permettent d'informer, de rassurer des parents inquiets ou désorientés. Près de 15 M sont ainsi affectés aux dépenses en faveur du soutien à la fonction parentale et aux familles.
Nous devons aujourd'hui aller plus loin.
Les premiers lieux de repérage des difficultés sociales d'un enfant ou d'un adolescent sont les services départementaux de protection maternelle et infantile, l'école, et les communes. Les lieux de traitement en dernière instance de ces difficultés sont les centres éducatifs fermés, voire les quartiers pénitentiaires des mineurs - ce qui traduit parfois les échecs des dispositifs en amont. Il peut aussi s'agir de placement en hôpital psychiatrique.
La plupart de ces jeunes auront connu le dispositif varié et complexe de l'aide sociale à l'enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse. Ces services ont été confiés, par les lois de décentralisation, aux départements, aux services judiciaires et à la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.
En France, il est souvent question du dispositif de protection de l'enfance mais en fait il y a côte à côte des dispositifs de protection de l'enfance éclatés, parfois anciens et d'application disparate. Récemment un certain nombre de faits divers ont montré que les procédures de repérage, de signalement de maltraitance et les suites qui leur étaient données, comportaient sans doute des lacunes.
La rénovation de ces dispositifs est devenue un enjeu essentiel alors que, depuis les lois de décentralisation, la protection de l'enfance n'a pas véritablement fait l'objet d'un débat public si ce n'est à l'occasion du vote de la loi du 10 juillet 1989 sur l'enfance maltraitée.
Un tel débat est d'autant plus indispensable aujourd'hui que le nombre d'enfants concernés n'a cessé de croître alors même que nous ne disposons aujourd'hui que de chiffres parcellaires : plus de 263 000 enfants bénéficient d'une mesure de protection administrative et judiciaire financée par l'aide sociale à l'enfance dont le poids financier dans les budgets des départements est devenu considérable ( environ 5 milliards d'euros en 2002).
La connaissance réciproque de l'activité de l'ensemble des dispositifs de protection de l'enfance, exprimée en données homogènes, était le premier jalon indispensable d'une nouvelle politique de protection de l'enfance. Tel était un des enjeux de la loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance créant l'observatoire national de l'enfance en danger.
Travailler tous ensemble à une meilleure prévention des situations difficiles, mieux prendre en compte tous les aspects de la maltraitance, réfléchir à des formes d'accueil modulables en fonction des besoins de l'enfant, engager une réflexion sur la complémentarité des dispositifs, la coordination des intervenants. Tels sont mes projets pour les semaines à venir.
Il ne s'agit pas de standardiser les pratiques ni d'entraver les capacités d'initiative et d'autonomie inhérentes à chaque institution mais de les inscrire dans un cadre d'exercice et de références commun, moderne.
Il est indispensable que les critères d'admission aux différents dispositifs, des procédures clairement définies, un contenu lisible des actions soient partagés par tous les partenaires de la protection de l'enfance au plan départemental, et soient communiqués aux parents et aux jeunes.
Trop d'enfants passent d'institutions en institutions sans continuité de prise en charge, sans " histoire " construite avec les parents. Il est primordial aussi d'assurer à ces enfants en grande difficulté familiale une référence adulte sécurisante, installée dans une certaine durée et dans la constance.
N'oublions pas que nous avons été nous-même des enfants, ayant vécu des épreuves familiales, des "ruptures". Puis nous sommes devenus parents à notre tour.
Nous essayons de construire un environnement stable et structurant pour nos enfants.
C'est tout l'enjeu de la réflexion sur la protection de l'enfance que je souhaite mener avec les départements dans les semaines et les mois à venir.
Je vous remercie.
(Source http://www.famille.gouv.fr, le 28 septembre 2004)