Déclaration de M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie, sur le bilan de l'ouverture du marché français du gaz à l'ensemble des consommateurs professionnels et des collectivités, la modification du statut des entreprises EDF et GDF, Paris le 21 octobre 2004.

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Circonstance : 9ème Sommet international du gaz à Paris le 21 octobre 2004

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Mesdames, messieurs,
Je suis très heureux de m'adresser à vous à l'occasion de ce 9ème Sommet des Dirigeants de l'industrie du gaz qui est devenu un rendez vous incontournable de la communauté gazière internationale. Permettez-moi d'adresser la bienvenue en France à l'ensemble des participants à ce séminaire.
2004 restera dans l'histoire de l'énergie française comme une année tout à fait majeure. Le Parlement français a en effet adopté le 9 août dernier une loi très importante, modifiant, d'une part, le statut, datant de 1946, des entreprises EDF et Gaz de France, et d'autre part, permettant de transposer les deux directives européennes de juin 2003 sur la libéralisation des secteurs du gaz naturel et de l'électricité.
Ainsi, depuis le 1er juillet dernier, le marché gazier français est ouvert à l'ensemble de la clientèle professionnelle, soit plus de 500 000 consommateurs.
Cette ouverture du marché du gaz constitue une formidable opportunité pour notre pays, c'est-à-dire pour les clients, mais aussi pour nos entreprises d'énergie EDF, Gaz de France, mais aussi Total et Suez.
Je souhaiterais à cet égard souligner que le Gouvernement est profondément attaché à la libéralisation des marchés de l'énergie car la concurrence est synonyme d'innovation et de recherche de productivité. Je me réjouis aussi d'avoir dans un délai très court et sur un sujet aussi sensible, pu faire adopter la loi du 9 août 2004. Ceci fait ainsi de la France un bon élève de l'Union européenne, ce qui est suffisamment rare pour être noté.
Notre majorité avait certes réussi à combler une partie du retard de la France avec l'adoption de la loi du 3 janvier 2003. Le Gouvernement s'était alors attaché à une modernisation profonde du cadre juridique gazier pour permettre à l'ensemble des opérateurs d'exercer leurs activités avec un partage clair des responsabilités et sous la vigilance étroite de la Commission de régulation de l'énergie qui a fait depuis 2 ans un formidable travail.
Je me félicite à cet égard de la publication le 23 septembre dernier des premiers tarifs régulés d'utilisation des réseaux publics de transport selon le modèle "entrée -sortie", en conformité avec les principes agréés au Forum européen de Madrid, et des premiers tarifs régulés d'utilisation des installations de gaz naturel liquéfié, ce qui devrait permettre un accès facilité aux deux terminaux français de gaz naturel liquéfié.
De même, je me félicite que Gaz de France et Gaz du Sud Ouest, sous l'impulsion de la CRE, s'apprêtent à mettre en uvre dans les tous prochains jours des programmes de cession de gaz afin de faciliter l'ouverture du marché dans le sud de la France, zone géographique la plus éloignée des sources d'approvisionnement et où la concurrence est la moins vive.
C'est désormais une deuxième étape majeure qui vient d'être franchie avec succès le 1er juillet dernier, avec l'ouverture du marché de l'ensemble des consommateurs professionnels et des collectivités, soit 70 % en volume. Une troisième étape étant prévue dès 2007 avec une ouverture complète des marchés.
De surcroît, cette ouverture n'est pas seulement théorique mais bien réelle. Côté demande, le taux de clients ayant exercé leur éligibilité est en effet supérieur à 25 %. Côté offre, plus de 25 sociétés françaises et étrangères ont sollicité une demande d'autorisation de fourniture de gaz naturel, auxquelles il faut ajouter les 22 distributeurs historiques locaux. L'ensemble de ces signaux atteste donc bien de la bonne vitalité du marché et de son attrait.
Une vitalité qui va se trouver encore renforcée par la filialisation prévue par la loi du 9 août des activités de transports de Gaz de France et du Groupe Total. Ce qui permettra de plus de dénouer les liens capitalistiques existant entre ces deux groupes à travers CFM et GSO et donc de faire évoluer rapidement système tarifaire français de transport en réduisant le nombre de zones tarifaires.
Une vitalité qui va également se trouver renforcée par la mise en uvre d'un accès des tiers aux stockages souterrains négocié, dans des conditions transparentes et non discriminatoires.
Face à cette ouverture du marché, il convenait par ailleurs de moderniser nos entreprises nationales. La loi du 9 août 2004 a ainsi transformé Gaz de France et Electricité de France d'établissement public en société anonyme, les mettant ainsi à armes égales vis-à-vis de leurs concurrents. Cette transformation a également permis d'abroger le principe de spécialité qui jusqu'ici interdisait à Gaz de France de produire ou de vendre de l'électricité et à Electricité de France d'être fournisseur de gaz naturel. Il s'agit là d'une première étape dans la modernisation de ces entreprises et il convient maintenant de mener à bien la réflexion sur l'opportunité d'une augmentation de capital d'EDF et de Gaz de France afin que ces entreprises aient les moyens financiers de leur développement.
Vous le voyez, ce Gouvernement a déjà beaucoup fait et il lui reste beaucoup à faire.
J'ai dit en introduction que 2004 était pour la France une année marquante par les évolutions entreprises. Je pense que le même qualitatif peut être sans difficulté employé pour la situation mondiale, compte tenu des récentes évolutions des prix internationaux du pétrole et du gaz naturel. Bien que la force de l'Euro ait partiellement compensé la croissance des prix depuis 2002, ils battent en effet aujourd'hui des records et devraient rester élevés une partie de l'hiver. Ces prix sont pour l'essentiel dus à une croissance très forte de la demande mondiale combinée à une quasi-disparition des surcapacités de productions, mais aussi au maintien de risques géopolitiques localisés dans les pays producteurs. Cette situation pourrait donc se prolonger et il convient de prendre les mesures pour y faire face à court et à long terme.
A court terme, il s'agit de relancer les politiques de la réduction de la demande, renouant ainsi avec l'esprit de " la chasse au gaspi ". C'est bien le sens du projet de loi d'orientation sur l'énergie et des objectifs de limitation de l'intensité énergétique, qui visent une économie produisant de plus en plus de richesse avec de moins en moins d'énergie.
A plus long terme, il s'agit de veiller à garantir la sécurité d'approvisionnement à la fois en termes physiques et en termes de compétitivité des prix d'approvisionnement.
Je me réjouis d'ailleurs que les dernières années aient marqué sur ce thème un ralliement progressif de l'ensemble des pays européens à des préoccupations soulevées depuis des années par la France, sans doute du fait de sa dépendance extrême en matière d'hydrocarbures.
Cette préoccupation est d'ailleurs d'autant plus importante aujourd'hui que la dépendance en gaz de l'Union Européenne va s'accroître inexorablement notamment en raison de la forte croissance de son usage pour la production électrique.
Face à cette situation, l'Etat a donc veillé à disposer des outils nécessaires pour s'assurer que la continuité de fourniture, en particulier due à la clientèle domestique ou assurant des missions d'intérêt général, n'est pas menacée.
Le Gouvernement a ainsi fait le choix de conditionner l'exercice de la fourniture de gaz à la délivrance une autorisation. Les pétitionnaires devant notamment démontrer qu'ils disposent d'un portefeuille d'approvisionnement suffisamment diversifié en fonction de la part de marché qu'ils souhaitent alimenter.
Le Gouvernement a aussi milité au niveau européen, avec succès, pour le maintien d'une part importante des approvisionnements sous la forme de contrats de long terme, moyen privilégié pour garantir une coopération efficace et pérenne entre producteurs et consommateurs et un niveau d'investissements suffisant. Vous savez tous ici que les enjeux financiers des investissements gaziers à consentir dans les prochaines années pour garantir la sécurité d'approvisionnement de l'Europe sont en effet considérables.
S'agissant plus particulièrement des investissements en France, mes services engageront d'ailleurs prochainement un exercice dit de "bilan gazier" afin de rendre public un plan indicatif et pluriannuel décrivant d'une part l'évolution prévisible de la demande et d'autre part les investissements qu'il conviendra de programmer pour compléter les infrastructures du réseau d'approvisionnement en gaz naturel. Ce document sera présenté devant le Parlement.
Par ailleurs, le développement rapide et souhaitable du marché du GNL permettra de diversifier davantage les sources d'approvisionnement, et d'apporter sur le marché des quantités de gaz supplémentaires en cas de pointe de demande. Même si au regard des marchés asiatiques ou américain, le GNL représente encore aujourd'hui une faible part de l'approvisionnement européen, le taux de croissance de la demande justifie là encore d'importants investissements en Europe. Je me félicite donc de la décision prise par Gaz de France de construire un nouveau terminal à Fos, pour une mise en service en 2007. Je me félicite également des partenariats technologiques qu'a su nouer GDF depuis plusieurs années et qui lui ont permis d'être présent dans la construction de nombreux méthaniers à travers sa filiale Gaz Transport Technigaz (GTT).
Enfin, conscient de la difficulté qui pourrait apparaître pour la réalisation de nouvelles grandes infrastructures gazières dans un cadre d'accès aux tiers régulé, j'ai souhaité que la loi du 9 août prévoit des possibilités de dérogations à l'accès des tiers pour les interconnexions internationales, les terminaux méthaniers ou les stockages afin d'encourager les investissements.
Conclusion
A ceux qui pourraient s'inquiéter des conséquences des évolutions actuelles sur leurs activités, je souhaite donc dire que le processus d'ouverture des marchés gaziers et électriques en cours dans les pays de l'Union Européenne, comme dans un grand nombre de pays producteurs est maîtrisé et me parait ouvrir la voie à des partenariats innovants et à des opportunités commerciales nouvelles, sur un marché en croissance toujours rapide.
Nous avons la chance d'être les acteurs d'une transition qui présente de nombreux défis à relever, à nous de faire en sorte que les marchés que nous mettrons en place répondent à toutes les attentes.
Merci de votre attention.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 22 octobre 2004)