Texte intégral
QUESTION : Qu'est-ce que la culture de la performance ?
Éric WOERTH (Réponse) : La culture de la performance est un ensemble de pratiques qui, lorsque vécues habituellement par tous les membres d'une organisation, conduisent au succès de cette entité. Pour nous, l'enjeu autour de la culture de la performance est d'évoluer d'une culture très tournée vers l'application de procédures avec tous les excès que nous lui connaissons (inertie, application aveugle, élimination progressive de l'esprit d'initiative) à une culture de l'engagement (on croit à ce que l'on fait et on se met soi-même en situation de progrès) et du résultat.
Lorsqu'on analyse la culture de la performance, il faut distinguer deux éléments de nature différente. D'abord, ce que nous appellerions les " pratiques incontournables " et ensuite les leviers de motivation.
Les pratiques incontournables relèvent de la gestion de la performance des individus et du dialogue de performance les concernant : la fixation d'objectifs clairs, quantifiés, adaptés aux leviers réels d'action des personnes ; l'évaluation systématique de la performance par rapport à ces objectifs ; la mise en uvre significative des implications de l'évaluation, qu'elles soient positives ou négatives.
Les leviers de motivation sont au nombre de trois et doivent être mis en uvre pour significativement faire la différence entre les bonnes et les mauvaises performances. Là aussi, l'un d'entre eux doit être sélectionné pour être particulièrement soigné, les autres devant ne pas présenter de lacunes majeures.
Ces trois leviers sont : la rémunération, le développement personnel (les opportunités de carrière) et les valeurs.
Dans le contexte de l'administration, le troisième levier est probablement le plus immédiatement opérationnel même si nous travaillons sur les deux premiers et j'y reviendrai. Pour avancer sur le troisième levier, il s'agirait de définir un corpus de valeurs fortes qui fondent la qualité du service public. Aujourd'hui, les valeurs de service public sont souvent utilisées comme paravent à l'immobilisme ou au conservatisme, c'est aussi parfois l'image qu'elles ont dans l'opinion. Nous devons sortir de cela pour en faire un corpus de valeurs "conquérant", dynamique, renforçant l'Etat dans son efficacité pour le renforcer dans sa légitimité.
QUESTION : La fonction publique s'achemine vers cette nouvelle culture de la performance qui tend vers le "zéro délai, zéro défaut". Concrètement, où en sommes-nous ?
Éric WOERTH (Réponse) : La grande nouveauté, c'est que la culture de la performance dans l'administration n'est plus un sujet tabou. Le temps ou l'administration considérait qu'elle n'avait que des missions d'intérêt général et non des objectifs d'action publique n'est plus. Depuis quelques années, j'observe un changement de fond de la part des administrations qui s'accélère de nos jours, même si comme l'on dit dans l'Ouest de la France "on est pas encore rendu", même si cette attitude n'est pas encore une culture, c'est-à-dire un état d'esprit permanent pris en compte dans le quotidien des tâches.
Un bon exemple de ce changement, je le mesure avec le débat sur la rémunération au mérite dans la fonction publique. Il y a encore un an, on n'aurait pas osé en parler en public. Aujourd'hui, nous sommes passés aux actes. En 2004, une première vague de 50 directeurs d'administration centrale sur un total de 180 sera concernée par l'introduction d'une part de rémunération variable sur des objectifs fixés par les ministres. Dans la police on a introduit des enveloppes de primes pour des équipes ou des services qui ont obtenu des résultats remarquables, on en parle aussi dans la magistrature, on en parle aussi pour les recteurs d'académie.
Ce changement est positif, nous avons la volonté non pas simplement de l'accompagner mais de le rendre irréversible et de le généraliser.
Depuis quelques années l'administration a pris conscience qu'elle ne pouvait plus vivre et travailler à côté de ce que vit la grande majorité des Français. La compétition mondiale impose aux entreprises et aux salariés du secteur privé de pratiquer une culture de la performance.
On peut le dénoncer, on ne peut pas faire comme si cette compétition n'existait pas. L'administration qui produit des services essentiels à la vie du pays, ne peut pas continuer à uvrer sur un tempo différent du reste de la société. Les impératifs de sécurité, sécurité des biens, des personnes, sanitaire... que les Français adressent à l'État imposent à l'administration non plus une obligation de moyens mais une obligation de résultats.
On le perçoit depuis plusieurs années avec la mise en cause de fonctionnaires devant la justice civile ou pénale. Les fautes individuelles doivent être sanctionnées, mais on ne peut sanctionner les hommes ou les femmes d'un défaut d'ensemble de l'organisation et du fonctionnement de leurs administrations. L'administration s'aperçoit qu'elle n'est pas organisée pour obéir à l'impératif "zéro délai, zéro défaut".
Il y a donc un consensus pour que nous travaillions sérieusement à l'amélioration de la culture de la performance et les choses bougent. Voyons par exemple l'opportunité formidable que représente la LOLF.
QUESTION : Que nous apporte la LOLF (loi organique relative aux lois de finances) ?
Éric WOERTH (Réponse) : Avec la mise en uvre de la LOLF, l'État passe d'une culture de moyens, où l'importance d'un ministère se mesure à l'aune de sa capacité à obtenir chaque année de nouveaux crédits budgétaires, à une culture de résultats, où chaque ministère doit afficher ses objectifs en toute transparence et rendre compte de l'atteinte de ces objectif au moyen d'indicateurs de résultat.
A l'heure actuelle, le budget de l'État se décline en sections ministérielles. Au sein de chaque section ministérielle, les crédits budgétaires sont ordonnés en titres et chapitres budgétaires, selon leur nature : crédits de rémunération, crédits de fonctionnement, crédits d'intervention ou crédits d'investissement.
Avec la LOLF, le budget de l'Etat se présentera par politique publique, c'est-à-dire en fonction non plus de la nature des crédits mais de leur destination, selon trois niveaux d'organisation budgétaire : à chaque politique publique, correspond une mission ; les missions sont composées de programmes ; les programmes sont déclinés en actions.
Les missions peuvent avoir un caractère interministériel. Par exemple, la mission "sécurité sanitaire" regroupera les programmes "veille et sécurité sanitaire" du ministère de la santé et "sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation" du ministère de l'agriculture. De même, la mission "recherche et enseignement supérieur" regroupera des programmes relevant de six ministères.
La mission est l'unité de vote du Parlement. Elle est le cadre d'exercice du droit d'amendement des parlementaires : à l'intérieur d'une mission, les parlementaires pourront réallouer les crédits entre les programmes.
Les programmes succèdent aux chapitres budgétaires. Ils constituent le cadre de la mise en uvre des politiques publiques et relèvent chacun d'un seul ministère.
Un responsable sera désigné pour chaque programme. Celui-ci sera libre de l'utilisation des crédits au sein du programme (sans toutefois accroître les dépenses de personnel). En contrepartie de cette liberté, le responsable du programme devra s'engager sur des objectifs mesurés par des indicateurs de performance, ce qui permettra de généraliser la culture de résultats dans l'Etat.
L'un des chantiers que le Gouvernement conduit actuellement, c'est précisément celui-là : définir des objectifs de performance, assortis d'indicateurs. Et cela, dans un triple but : informer le citoyen, l'usager et le contribuable sur les objectifs poursuivis par l'administration ; orienter le pilotage des services en vue d'atteindre ces objectifs ; pouvoir rendre compte des résultats atteints.
Nous devons donc veiller à ce que les intérêts respectifs du citoyen, de l'usager et du contribuable soient simultanément pris en compte dans les objectifs poursuivis par les politiques publiques : objectifs intéressant le citoyen, dits objectifs d'efficacité socio-économique ; objectifs intéressant l'usager, dits objectifs de qualité de service ; objectifs intéressant les contribuables, dits objectifs d'efficacité de la gestion.
Nous devons également veiller à ce que ces objectifs soient compréhensibles : simples, pour que chacun de nos concitoyens puisse se les approprier, précis et, si possible, pas trop nombreux, pour éviter la dispersion des efforts.
Afin que ces objectifs puissent être atteints, chaque ministère pourra les scinder dans sa gestion interne en objectifs opérationnels annuels voire infra annuels. Lorsque plusieurs services interviennent dans le cadre d'une politique publique, au service d'un même objectif de performance national, les objectifs opérationnels assignés à chacun de ces services pourront être modulés autour d'une norme nationale à atteindre, afin de tenir compte du contexte propre à chaque service. Ces objectifs opérationnels seront associés aux BOP (Budgets opérationnels de programme) des services et suivis par les dispositifs de contrôle de gestion des ministères. Ainsi, la déclinaison des objectifs de performance en objectifs opérationnels fournira au responsable de programme un outil de pilotage de ses services.
Enfin, les ministres devront rendre compte chaque année au Parlement, via les rapports annuels de performance (RAP), de l'atteinte des objectifs.
C'est pourquoi, à chaque objectif doit pouvoir être associé un ou plusieurs indicateurs chiffrés pertinents et fiables qui permettent d'apprécier objectivement les résultats de l'action publique, et des cibles qui définissent la valeur que doit atteindre l'indicateur à l'issue d'une période à déterminer, de un à cinq ans.
En informant le citoyen, l'usager et le contribuable sur les objectifs de l'action publique, en orientant le pilotage des services en vue d'atteindre ces objectifs et en permettant au ministre de rendre compte des résultats atteints, la mesure de la performance est un outil essentiel pour parvenir aux buts principaux de notre nouvelle constitution financière qui sont d'améliorer la transparence des finances publiques et d'accroître l'efficacité de la dépense publique.
QUESTION : Ne convient-il pas d'aller encore plus loin ?
Éric WOERTH (Réponse) : La LOLF introduit les conditions d'une culture de résultats dans l'administration en contrepartie d'une plus grande liberté laissée aux gestionnaires. Elle ne suffit pas, il faut pouvoir décliner de haut en bas et de bas en haut de l'administration une culture centrée sur le résultat : la satisfaction des besoins des citoyens au meilleur coût.
Pour y parvenir, il faut décloisonner l'administration, faire sauter les verrous (simplifier) qui sous couvert de respect de procédures régulières paralysent l'action, redonner le pouvoir au plus près de l'endroit ou se prennent les initiatives (décentraliser / déconcentrer), c'est-à-dire sur le terrain. C'est ce à quoi s'emploie le ministre en charge de la réforme de l'État.
Et puis, au-delà de ces actions majeures pour établir un contexte favorable à la culture de performance, il faut engager des actions sur chaque levier évoqué plus haut. Par exemple, en ce qui concerne les "incontournables", nous souhaitons engager un chantier de généralisation des entretiens annuels d'évaluation du plus haut niveau (en parallèle de la mise en place de la rémunération au mérite pour les directions d'administration centrale).
Pour ce qui concerne, le levier de contrôle " opérationnel ", nous allons généraliser les chartes Marianne d'ici la fin de l'année, ce qui permettra de donner et de mettre en uvre des standards de qualité de l'accueil du public par les administrations. Pour ce qui concerne les leviers de motivation, nous travaillons comme je l'ai évoqué, sur la rémunération au mérite, nous souhaitons accélérer l'amélioration de la gestion des compétences en fluidifiant le "marché interne" de l'emploi et de la compétence (création de cadres d'emploi).
Le chantier est vaste, mais le cap est clair et notre détermination affirmée.
Propos recueillis par Catherine Barnasson
(Source http://www.emploipublic.com, le 6 septembre 2004)
Éric WOERTH (Réponse) : La culture de la performance est un ensemble de pratiques qui, lorsque vécues habituellement par tous les membres d'une organisation, conduisent au succès de cette entité. Pour nous, l'enjeu autour de la culture de la performance est d'évoluer d'une culture très tournée vers l'application de procédures avec tous les excès que nous lui connaissons (inertie, application aveugle, élimination progressive de l'esprit d'initiative) à une culture de l'engagement (on croit à ce que l'on fait et on se met soi-même en situation de progrès) et du résultat.
Lorsqu'on analyse la culture de la performance, il faut distinguer deux éléments de nature différente. D'abord, ce que nous appellerions les " pratiques incontournables " et ensuite les leviers de motivation.
Les pratiques incontournables relèvent de la gestion de la performance des individus et du dialogue de performance les concernant : la fixation d'objectifs clairs, quantifiés, adaptés aux leviers réels d'action des personnes ; l'évaluation systématique de la performance par rapport à ces objectifs ; la mise en uvre significative des implications de l'évaluation, qu'elles soient positives ou négatives.
Les leviers de motivation sont au nombre de trois et doivent être mis en uvre pour significativement faire la différence entre les bonnes et les mauvaises performances. Là aussi, l'un d'entre eux doit être sélectionné pour être particulièrement soigné, les autres devant ne pas présenter de lacunes majeures.
Ces trois leviers sont : la rémunération, le développement personnel (les opportunités de carrière) et les valeurs.
Dans le contexte de l'administration, le troisième levier est probablement le plus immédiatement opérationnel même si nous travaillons sur les deux premiers et j'y reviendrai. Pour avancer sur le troisième levier, il s'agirait de définir un corpus de valeurs fortes qui fondent la qualité du service public. Aujourd'hui, les valeurs de service public sont souvent utilisées comme paravent à l'immobilisme ou au conservatisme, c'est aussi parfois l'image qu'elles ont dans l'opinion. Nous devons sortir de cela pour en faire un corpus de valeurs "conquérant", dynamique, renforçant l'Etat dans son efficacité pour le renforcer dans sa légitimité.
QUESTION : La fonction publique s'achemine vers cette nouvelle culture de la performance qui tend vers le "zéro délai, zéro défaut". Concrètement, où en sommes-nous ?
Éric WOERTH (Réponse) : La grande nouveauté, c'est que la culture de la performance dans l'administration n'est plus un sujet tabou. Le temps ou l'administration considérait qu'elle n'avait que des missions d'intérêt général et non des objectifs d'action publique n'est plus. Depuis quelques années, j'observe un changement de fond de la part des administrations qui s'accélère de nos jours, même si comme l'on dit dans l'Ouest de la France "on est pas encore rendu", même si cette attitude n'est pas encore une culture, c'est-à-dire un état d'esprit permanent pris en compte dans le quotidien des tâches.
Un bon exemple de ce changement, je le mesure avec le débat sur la rémunération au mérite dans la fonction publique. Il y a encore un an, on n'aurait pas osé en parler en public. Aujourd'hui, nous sommes passés aux actes. En 2004, une première vague de 50 directeurs d'administration centrale sur un total de 180 sera concernée par l'introduction d'une part de rémunération variable sur des objectifs fixés par les ministres. Dans la police on a introduit des enveloppes de primes pour des équipes ou des services qui ont obtenu des résultats remarquables, on en parle aussi dans la magistrature, on en parle aussi pour les recteurs d'académie.
Ce changement est positif, nous avons la volonté non pas simplement de l'accompagner mais de le rendre irréversible et de le généraliser.
Depuis quelques années l'administration a pris conscience qu'elle ne pouvait plus vivre et travailler à côté de ce que vit la grande majorité des Français. La compétition mondiale impose aux entreprises et aux salariés du secteur privé de pratiquer une culture de la performance.
On peut le dénoncer, on ne peut pas faire comme si cette compétition n'existait pas. L'administration qui produit des services essentiels à la vie du pays, ne peut pas continuer à uvrer sur un tempo différent du reste de la société. Les impératifs de sécurité, sécurité des biens, des personnes, sanitaire... que les Français adressent à l'État imposent à l'administration non plus une obligation de moyens mais une obligation de résultats.
On le perçoit depuis plusieurs années avec la mise en cause de fonctionnaires devant la justice civile ou pénale. Les fautes individuelles doivent être sanctionnées, mais on ne peut sanctionner les hommes ou les femmes d'un défaut d'ensemble de l'organisation et du fonctionnement de leurs administrations. L'administration s'aperçoit qu'elle n'est pas organisée pour obéir à l'impératif "zéro délai, zéro défaut".
Il y a donc un consensus pour que nous travaillions sérieusement à l'amélioration de la culture de la performance et les choses bougent. Voyons par exemple l'opportunité formidable que représente la LOLF.
QUESTION : Que nous apporte la LOLF (loi organique relative aux lois de finances) ?
Éric WOERTH (Réponse) : Avec la mise en uvre de la LOLF, l'État passe d'une culture de moyens, où l'importance d'un ministère se mesure à l'aune de sa capacité à obtenir chaque année de nouveaux crédits budgétaires, à une culture de résultats, où chaque ministère doit afficher ses objectifs en toute transparence et rendre compte de l'atteinte de ces objectif au moyen d'indicateurs de résultat.
A l'heure actuelle, le budget de l'État se décline en sections ministérielles. Au sein de chaque section ministérielle, les crédits budgétaires sont ordonnés en titres et chapitres budgétaires, selon leur nature : crédits de rémunération, crédits de fonctionnement, crédits d'intervention ou crédits d'investissement.
Avec la LOLF, le budget de l'Etat se présentera par politique publique, c'est-à-dire en fonction non plus de la nature des crédits mais de leur destination, selon trois niveaux d'organisation budgétaire : à chaque politique publique, correspond une mission ; les missions sont composées de programmes ; les programmes sont déclinés en actions.
Les missions peuvent avoir un caractère interministériel. Par exemple, la mission "sécurité sanitaire" regroupera les programmes "veille et sécurité sanitaire" du ministère de la santé et "sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation" du ministère de l'agriculture. De même, la mission "recherche et enseignement supérieur" regroupera des programmes relevant de six ministères.
La mission est l'unité de vote du Parlement. Elle est le cadre d'exercice du droit d'amendement des parlementaires : à l'intérieur d'une mission, les parlementaires pourront réallouer les crédits entre les programmes.
Les programmes succèdent aux chapitres budgétaires. Ils constituent le cadre de la mise en uvre des politiques publiques et relèvent chacun d'un seul ministère.
Un responsable sera désigné pour chaque programme. Celui-ci sera libre de l'utilisation des crédits au sein du programme (sans toutefois accroître les dépenses de personnel). En contrepartie de cette liberté, le responsable du programme devra s'engager sur des objectifs mesurés par des indicateurs de performance, ce qui permettra de généraliser la culture de résultats dans l'Etat.
L'un des chantiers que le Gouvernement conduit actuellement, c'est précisément celui-là : définir des objectifs de performance, assortis d'indicateurs. Et cela, dans un triple but : informer le citoyen, l'usager et le contribuable sur les objectifs poursuivis par l'administration ; orienter le pilotage des services en vue d'atteindre ces objectifs ; pouvoir rendre compte des résultats atteints.
Nous devons donc veiller à ce que les intérêts respectifs du citoyen, de l'usager et du contribuable soient simultanément pris en compte dans les objectifs poursuivis par les politiques publiques : objectifs intéressant le citoyen, dits objectifs d'efficacité socio-économique ; objectifs intéressant l'usager, dits objectifs de qualité de service ; objectifs intéressant les contribuables, dits objectifs d'efficacité de la gestion.
Nous devons également veiller à ce que ces objectifs soient compréhensibles : simples, pour que chacun de nos concitoyens puisse se les approprier, précis et, si possible, pas trop nombreux, pour éviter la dispersion des efforts.
Afin que ces objectifs puissent être atteints, chaque ministère pourra les scinder dans sa gestion interne en objectifs opérationnels annuels voire infra annuels. Lorsque plusieurs services interviennent dans le cadre d'une politique publique, au service d'un même objectif de performance national, les objectifs opérationnels assignés à chacun de ces services pourront être modulés autour d'une norme nationale à atteindre, afin de tenir compte du contexte propre à chaque service. Ces objectifs opérationnels seront associés aux BOP (Budgets opérationnels de programme) des services et suivis par les dispositifs de contrôle de gestion des ministères. Ainsi, la déclinaison des objectifs de performance en objectifs opérationnels fournira au responsable de programme un outil de pilotage de ses services.
Enfin, les ministres devront rendre compte chaque année au Parlement, via les rapports annuels de performance (RAP), de l'atteinte des objectifs.
C'est pourquoi, à chaque objectif doit pouvoir être associé un ou plusieurs indicateurs chiffrés pertinents et fiables qui permettent d'apprécier objectivement les résultats de l'action publique, et des cibles qui définissent la valeur que doit atteindre l'indicateur à l'issue d'une période à déterminer, de un à cinq ans.
En informant le citoyen, l'usager et le contribuable sur les objectifs de l'action publique, en orientant le pilotage des services en vue d'atteindre ces objectifs et en permettant au ministre de rendre compte des résultats atteints, la mesure de la performance est un outil essentiel pour parvenir aux buts principaux de notre nouvelle constitution financière qui sont d'améliorer la transparence des finances publiques et d'accroître l'efficacité de la dépense publique.
QUESTION : Ne convient-il pas d'aller encore plus loin ?
Éric WOERTH (Réponse) : La LOLF introduit les conditions d'une culture de résultats dans l'administration en contrepartie d'une plus grande liberté laissée aux gestionnaires. Elle ne suffit pas, il faut pouvoir décliner de haut en bas et de bas en haut de l'administration une culture centrée sur le résultat : la satisfaction des besoins des citoyens au meilleur coût.
Pour y parvenir, il faut décloisonner l'administration, faire sauter les verrous (simplifier) qui sous couvert de respect de procédures régulières paralysent l'action, redonner le pouvoir au plus près de l'endroit ou se prennent les initiatives (décentraliser / déconcentrer), c'est-à-dire sur le terrain. C'est ce à quoi s'emploie le ministre en charge de la réforme de l'État.
Et puis, au-delà de ces actions majeures pour établir un contexte favorable à la culture de performance, il faut engager des actions sur chaque levier évoqué plus haut. Par exemple, en ce qui concerne les "incontournables", nous souhaitons engager un chantier de généralisation des entretiens annuels d'évaluation du plus haut niveau (en parallèle de la mise en place de la rémunération au mérite pour les directions d'administration centrale).
Pour ce qui concerne, le levier de contrôle " opérationnel ", nous allons généraliser les chartes Marianne d'ici la fin de l'année, ce qui permettra de donner et de mettre en uvre des standards de qualité de l'accueil du public par les administrations. Pour ce qui concerne les leviers de motivation, nous travaillons comme je l'ai évoqué, sur la rémunération au mérite, nous souhaitons accélérer l'amélioration de la gestion des compétences en fluidifiant le "marché interne" de l'emploi et de la compétence (création de cadres d'emploi).
Le chantier est vaste, mais le cap est clair et notre détermination affirmée.
Propos recueillis par Catherine Barnasson
(Source http://www.emploipublic.com, le 6 septembre 2004)