Texte intégral
Mes chers amis, très souvent dans le courant de l'été les observateurs, comme l'on dit, c'est-à-dire les journalistes qui rentraient de vacances me disaient : mais pourquoi avez-vous fait un Conseil national à l'université d'été ?
Ils y voyaient une stratégie profonde.
On ne sait pas à quelles fins, mais il devait sûrement y avoir des fins dissimulées mais la réponse était beaucoup plus simple : nous avons fait un Conseil national au moment de l'université d'été parce que les cadres du mouvement se plaignaient régulièrement que l'université d'été fût réservée aux jeunes et qu'ils n'aient pas leur place dans cette expression de rentrée.
J'ai dit " qu'à cela ne tienne " ! Nous allons mettre en place un Conseil national qui sera la rentrée de toute l'UDF et de tous ses militants.
Je veux remercier les nombreux parlementaires présents et je les salue :
Pierre Albertini, député-maire de Rouen, Gille Artigues, député de la Loire, Philippe Nogrix, sénateur d'Ille-et-Vilaine, Anne-Marie Comparini, députée du Rhône, Jean-Luc Jean-Luc Préel, député de Vendée, Jean-Christophe Lagarde, député-maire de Drancy, Rudy Salles, député des Alpes-Maritimes, le nouveau président des Jeunes, Arnaud de Belenet, André Santini, député-maire d'Issy-les-Moulineaux, Denis Badré, sénateur des Hauts-de-Seine, Nathalie Griesbecknouvelle député européenne, Bernard Lehideux, nouveau député européen. Vont nous rejoindre d'un instant à l'autre les trois présidents de groupe, à savoir Hervé Morin, Président du groupe UDF à l'Assemblée Nationale, Michel Mercier, Président du groupe UDF au Sénat, etMarielle de Sarnez, Présidente de la délégation UDF au Parlement européen.
Beaucoup d'autres sont présents, Yvan Lachaud, député du Gard, Jean Dionis du Séjour, député du Lot-et-Garonne, Philippe Folliot, député du Tarn, Anne Laperrouze, nouvelle députée européenne, Daniel Soulage, sénateur du Lot-et-Garonne, Jean-Marie Cavada - a passé deux jours avec nous, mais a dû repartir- nouveau député européen.
Je salue également tous les autres conseillers régionaux, conseillers généraux, maires, membres de notre Conseil national.
Je voudrais vous dire quelques mots de la rentrée à l'ouverture du débat, avant de vous proposer un ordre du jour et je demanderai à Pierre Albertini de lancer le débat puisqu'il est en charge de notre projet d'analyse de la société française.
Je voudrais vous donner quelques impressions de rentrée avant de conclure ces journées, demain matin.
La première d'entre elles, c'est naturellement d'avoir le sentiment de la gravité des événements que traverse le monde.
Bien entendu, ces événements se sont focalisés ces derniers jours sur les deux prises d'otages, dont celle de deux journalistes français qui, nous l'espérons, connaîtra, dans les heures qui viennent, un dénouement heureux. Mais lorsque ce dénouement heureux sera intervenu, nous n'oublierons pas pour autant les autres otages, notamment ceux qui ont été assassinés dans ce drame de l'Irak et ceux dont on parle le moins, qu'ils soient issus de pays européens ou d'autres pays du monde. Par exemple, les travailleurs venus simplement pour essayer de gagner leur vie dans des entreprises implantées en Irak et qui n'ont pas trouvé, comme nous aurions dû le faire, le support de l'opinion internationale.
Je considère comme un trait de bonne santé de notre pays qu'il ait su manifester son unité de manière éclatante dans cet événement malheureux, toute force politique confondue, toute communauté confondue, toute conviction spirituelle ou philosophique confondue, que la France ait eue cette force de montrer son unité. Nous espérons que cela aura servi à un dénouement heureux de ce drame. Mais naturellement, à une échelle encore bien plus importante et bien plus tragique le drame de la prise d'otages en Ossétie du Nord, sur le territoire malheureux de cette Russie aujourd'hui déchirée avec la prise d'otages de plus de 1000 personnes dont 700 enfants et les morts qui ont été entraînés par le dénouement tragique de cette affaire.
Nous avons, ce matin, respecté une minute de silence, nous n'allons pas recommencer. Je voudrais simplement que nous ayons une pensée pour ceux dont la vie est aujourd'hui si tragiquement atteinte.
Enfants que nous n'oublierons jamais, enfants fauchés avant que leur vie n'ait pu trouver son cours, familles à jamais déchirées.
Naturellement, nous voyons, dans ces drames, un des visages les plus tragiques du nouveau siècle, une espèce de guerre larvée qui prend en otage des vies humaines et qui, hélas, ne les relâche pas.
Cela veut dire aussi que nous avons le devoir, nous France et nous Europe - car je ne distingue pas la France de l'Europe dans cette affaire - de présenter une autre image de l'avenir et du vivre ensemble.
Que le témoignage d'unité que nous avons manifesté serve aussi de projet pour toutes ces sociétés déchirées.
C'est naturellement notre première pensée.
Et pour nous, la politique vient loin derrière.
Elle a sa dignité, et nous la défendons, mais nous savons faire la distinction entre l'essentiel et le contingent.
Nous n'avons pas voulu déplacer cette université d'été malgré la dimension tragique que nous percevions de tout cela parce qu'il est un devoir, pour les forces politiques, d'être en première ligne lorsque se passe un drame, parce que nos compatriotes ne demandent pas qu'on leur parle de l'accessoire mais de l'essentiel.
Il y a, chez les citoyens, le besoin que leurs politiques traitent de l'essentiel et ne déclinent pas les rendez-vous lorsque ces rendez-vous ont lieu.
Et donc nous allons tous jouer notre rôle en cette rentrée et dans les années qui viennent.
Je voudrais vous dire un mot de l'état de la France, comme je le ressens.
J'ai eu, je ne sais pas si l'on peut dire la satisfaction, mais en tout cas, le sentiment de justesse, tout au long de cet été, de voir un grand nombre de responsables politiques de tous bords reprendre un diagnostic que nous avons porté depuis longtemps sur la démocratie française.
Il y a longtemps que nous, à l'UDF, nous disons que la démocratie en France va mal. Elle va mal parce que les pouvoirs ont du mal à gouverner, à imposer les réformes ou les décisions que, pourtant, l'urgence leur exigeait. Il y a comme une réticence de la société française, et elle va mal parce que les citoyens ne s'y sentent pas entendus comme ils devraient l'être.
Il y a longtemps que nous disons : la France est, à notre connaissance, le seul pays d'Europe et peut-être du monde, où toute élection, quelle que soit son échéance, depuis 30 ans, a entraîné le renvoi des gouvernants en place.
Il y a plus d'un quart de siècle qu'à chaque élection, le balancier est reparti de l'autre côté et cela donne notamment à notre pays une instabilité très grande.
Nous disons depuis longtemps : regardez bien, cette situation a des causes et ces causes sont dans le malaise ou le mal-être des Institutions françaises.
Notre démocratie va mal parce que ces règles sont mauvaises.
Premièrement, le peuple français n'est pas représenté comme il devrait l'être dans le Parlement qui est censé être sa voix.
Regardez, c'est la même chose à chaque alternance, à chaque coup de balancier. L'UMP qui occupe actuellement 65 % des sièges à l'Assemblée Nationale a fait 19 % au premier tour de l'élection présidentielle et 16 % aux dernières élections européennes.
Et bien, cette accentuation, ce coup de balancier, a fait que la représentation du pays n'est pas juste et les Français considèrent que les débats qui ont lieu ne donnent pas à leurs voix la place qu'elles devraient avoir.
De la même manière, notre Constitution écrit, en son article 20, que le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation.
Et bien, celui qui prétendrait aujourd'hui que c'est le gouvernement qui détermine et conduit la politique de la nation, aurait quelque audace. Ce n'est pas le gouvernement qui détermine et conduit la politique de la nation, c'est le Président de la République - c'est d'ailleurs normal, il est élu au suffrage universel - mais on ne le dit pas aux Français.
Mais le Président de la République se tient à distance du débat alors que, dans les grandes démocraties où on élit le Président de la République, le Président s'exprime tous les jours.
C'est au point, j'en ai souvent fait la réflexion, que l'on voit plus souvent, sur les écrans de la télévision française, le Président des Etats-Unis que le Président de la République française.
Or, puisque le président, étant élu au suffrage universel, détermine et conduit la politique de la nation, une vie politique franche voudrait qu'il assume et qu'il s'exprime comme s'exprime un président américain.
Toutes ces distorsions multipliées - un parlement qui ne représente pas le pays, qui ne fait pas la loi puisqu'on ne l'y autorise même pas, qui ne contrôle pas le gouvernement, qui n'organise pas le débat public, un gouvernement qui ne détermine pas la politique de la nation et un président de la République qui le fait, mais qui ne le dit pas - font une démocratie où les Français ne retrouvent pas leur vérité.
Or, s'il est une conviction que nous défendons, c'est celle-ci. La démocratie, désormais, a besoin d'authenticité pour que les citoyens s'y engagent ; il faut qu'ils s'y retrouvent et pour qu'ils s'y retrouvent, il faut qu'ils aient la vérité en face d'eux.
C'est cette vérité-là que nous avons voulu mettre.
Peu à peu, ce sentiment de distance entre les élus et les citoyens est devenu la réalité la plus banale de la vie politique française.
Pas seulement pour ce gouvernement-ci, ce serait moindre mal, mais pour tous les gouvernements successifs. Cela nous impose, si nous sommes courageux, comme le Général de Gaulle le fit en son temps à la fin de la IVe République dont les institutions ne marchaient pas, de porter le projet d'une rénovation de la démocratie française.
Nous sommes les rénovateurs de la démocratie française et nous l'assumons devant le pays, en considérant que tel est notre devoir.
Je suis très heureux d'avoir vu des hommes politiques d'origines, de pensées ou de convictions différentes, reprendre peu à peu ce message. Jack Lang vient de le faire dans un livre récent.
Après, il y a des modalités : on peut être pour la VIe République ou pour la réforme de la Ve, tout ceci est un habillage ; je dirai d'ailleurs dans un instant ce qu'il m'en semble. Mais, déjà, sentir que les institutions sont en cause dans la crise de confiance, c'est un événement très important, c'est un événement majeur.
Je suis très heureux, aussi surprenant que cela puisse paraître à certains d'entre vous et d'entre nous, d'avoir vu le président de l'Assemblée Nationale Jean-Louis Debré dans une tribune récente la semaine dernière donnée au journal " Libération ", dire qu'il fallait changer la représentation du pays à l'Assemblée nationale en changeant le mode de scrutin.
Si Jean-Louis Debré, Président de l'Assemblée nationale et fils de Michel Debré le père de la Constitution - il a dit un jour avec drôlerie qu'il était le frère de la Constitution parce qu'il a le même père - en arrive à cette constatation, cela veut dire que des marges sont ouvertes pour qu'une vraie réflexion puisse être conduite sur ce point. Nous ne pouvons pas garder des institutions qui ne disent pas la vérité du débat politique au pays.
Voilà pour le premier point.
Il y a un deuxième point : un événement naturellement s'est produit. Il faut que nous y réfléchissions une seconde.
J'ai parlé avec Nicolas Sarkozy au téléphone et en le rencontrant directement très souvent pendant cet été, il m'a téléphoné ce matin encore pour me donner la substance de ce qu'il allait dire cet après-midi devant son université d'été. Qu'un ministre important, numéro 2 du gouvernement, fasse le choix de quitter le gouvernement pour aller assumer la présidence d'une formation politique a une signification précise : désormais les formations politiques vont retrouver leur rôle d'acteurs majeurs dans la démocratie française et c'est naturellement très important pour nous.
Il y a deux autres conséquences bien entendu. La première, c'est que Nicolas Sarkozy se présente à la tête de l'UMP après avoir répété que les deux premières années de ce mouvement en tant que parti unique était un échec et méritait une réorientation. C'est ce que je crois et il le dira encore cet après-midi. Deuxièmement, il a dit que l'UMP ne pouvait pas être un parti unique, qu'elle ne pouvait jouer son rôle que dans un partenariat avec d'autres formations politiques et singulièrement la nôtre.
Ceci est positif.
Le climat de respect mutuel qui existe entre nous est aussi pour moi un élément positif.
Cela ne fait que renforcer notre mission parce que, désormais, il apparaît clairement que chacune des formations politiques principales, l'UMP pour ce qui la concerne, l'UDF pour ce qui la concerne et même dans l'opposition le PS pour ce qui le concerne, ont la mission de présenter au pays un projet pour son avenir et les équipes qui soutiendront ce projet.
Nous ne manquerons pas cette à mission.
Nous aurons des relations respectueuses et même amicales.
Nous nous considérons, avec les grandes formations démocratiques, comme co-responsables de l'avenir de la France.
Nous avons une mission particulière : à chacun de dire son projet. Nous avons une mission en commun : nous devons donner au débat la dignité et la portée qui donneront à la vie démocratique de notre pays l'estime que les citoyens sont en droit d'attendre.
Désormais, dans ces relations confiantes, chacun a le devoir de présenter son projet, chacun a le devoir de préparer ses équipes, chacun a le devoir de s'adresser au pays et les Français, le moment venu, choisiront leur destin.
Tel est l'engagement que non seulement nous prenons aujourd'hui mais que nous avons pris depuis des années en affirmant, dans un combat difficile, que le projet que nous portions n'était pas le même que le projet des autres formations politiques, ni de nos voisins de l'UMP dans la majorité, ni du PS dans l'opposition.
Car la question qui se posait à nous était bien celle-là, lorsqu'on a voulu nous faire disparaître.
La vraie question qui était sous-jacente à cette entreprise, était celle-ci : est-ce que le projet que nous portons est une variante ou une alternative ?
Est-ce que nous étions là pour apporter des nuances ou bien est-ce que nous étions là pour porter un projet original ? Le choix que nous avons fait a une signification.
L'UDF porte une alternative pour l'avenir du pays, c'est une vision originale et notre devoir est de la défendre désormais, au moment où le pays fera ses choix principaux.
Et c'est sous cette forme que se traite la question de la présence au gouvernement - sur laquelle il y a eu quelques articles pendant l'été - question qui mérite d'être traitée simplement.
Je la replace dans son contexte en reposant la question de fond : est-ce que l'UDF n'est qu'une variante de la droite ou est-ce qu'elle porte un projet original pour l'avenir du pays ? Ma réponse est que nous portons un projet original pour l'avenir du pays.
Ce projet original sur lequel je vais m'efforcer de vous donner quelques orientations, s'est résumé ces dernières années à une question profonde et toute bête : est-ce qu'en France il faut continuer comme nous faisons depuis des années ou est-ce que qu'il y a à faire des changements politiques profonds ?
Ma réponse, celle de tous nos bureaux politiques et de tous nos conseils nationaux, a été sans exception que la France appelait des changements politiques profonds.
La réponse à cette question lancinante de la participation au gouvernement est donc toute simple : on n'entre pas au gouvernement pour des préférences ou pour l'agrément des uns ou des autres, pour avoir des portefeuilles. On entre au gouvernement si l'on pense que le gouvernement va porter les changements politiques profonds dont la France à besoin.
Cette question appartient naturellement et en premier lieu à l'inspirateur de la politique, celui qui est élu au suffrage universel, au Président de la République. Cette question est une question, comme l'on dit, préjudicielle à mes yeux.
Cela veut dire qu'elle est le préalable.
Si le Président de la République disait un jour au pays : oui, j'ai réfléchi, il faut des changements politiques profonds dans notre démocratie, dans nos Institutions, dans notre vie économique, dans notre vie sociale, dans notre destin européen, alors naturellement, je vous le dis au nom de l'UDF, nous en parlerions avec lui sans aucune réticence.
Mais s'il n'y a pas la volonté de changement profond, alors une telle démarche serait une démarche d'abandon et tout ce que nous avons fait depuis 2 ans perdrait son sens.
Si 12 % des Français ont voté pour nous aux élections régionales et européennes contre tous les pronostics, contre toute analyse, exploit qui a rarement été réalisé dans notre vie politique nationale, si nous avons pu bâtir un vaste mouvement européen, c'est pour une seule raison, c'est parce que nous étions différents.
Cette différence-là est notre patrimoine, elle est notre bien le plus précieux. Il faut l'approfondir et ne pas l'éluder, l'affirmer et non l'abandonner.
Tel est, en tout cas, me semble-t-il, le sens de la mission que vous avez donnée à votre président et à notre présence dans la vie politique nationale.
Après l'introduction de Pierre Albertini, je vous propose que nous abordions quatre thèmes. Il y en a beaucoup d'autres, mais j'en ai choisi quatre pour lesquels nous avons une identité différente, en tout cas, une identité que nous affirmons.
* Premier thème : la démocratie française.
Comment faire en sorte que nos institutions deviennent vraies, que les citoyens quand ils entendent nos débats aient le sentiment, non pas de discussions byzantines loin d'eux, mais que leur voix est entendue ? Comment faire pour que le Parlement retrouve son rôle ?
Comment faire pour que le Président de la République assume les choix que son élection au suffrage universel lui commande d'assumer?
Ce sont des changements institutionnels et notamment, un changement de mode de scrutin pour l'élection des députés à l'Assemblée Nationale sur laquelle on a besoin de deux impératifs que j'énonce. Après, on pourra avoir toutes les discussions nécessaires pour que ces impératifs trouvent leur implication.
Premier impératif : on a besoin d'une majorité pour que l'action puisse être suivie.
Deuxièmement, on a besoin de représenter équitablement les minorités. Il n'y a pas besoin de majorité pléthorique, elles font toujours des bêtises. Il y a besoin de contre-pouvoirs parce que s'il n'y a pas de contre-pouvoirs, le pouvoir se trompe à tous les coups.
On a besoin d'une nouvelle définition de la démocratie française.
* Deuxième thème : nous avons besoin de fixer notre cap en matière économique et de gestion du pays.
Je ne sais pas vous, mais j'ai été navré par le débat sur la "cagnotte". Hervé Morin l'a dit et je partage absolument ce sentiment. Charles-Amédée de Courson l'a dit également à sa manière : voilà un pays qui est le pays le plus déficitaire de toute l'Europe, la lanterne rouge de toute l'Europe en matière de déficit public ; voilà un pays qui a un endettement de 1000 milliards d'euros et, au moment où une petite éclaircie se laissait discerner pour rééquilibrer un peu ce pays si profondément déséquilibré pour peut-être améliorer un peu notre situation budgétaire, voilà que l'on a de plus urgent que de se remettre à dépenser pour creuser encore le trou des déficits publics.
Et bien, cela ne nous paraît pas - nous qui sommes, je crois, sans conteste à classer parmi ceux qui ont une vocation sociale - être une vocation sociale que de faire peser sur nos enfants des déficits qu'ils ne pourront pas assumer.
La dette d'un pays comme le nôtre n'est pas sociale. La dette est une lâcheté et c'est la raison pour laquelle nous l'avons manifesté par nos votes sur la réforme de la sécurité sociale. Faire une réforme pour transférer sur les générations futures les feuilles de sécurité sociale que nous sommes incapables de payer pour nous-mêmes, ce n'est pas du courage ; c'est de la lâcheté à l'égard de nos enfants et de nos petits-enfants qui auront tant de charges à porter.
Alors je sais bien que le parti socialiste n'est pas sur cette ligne. C'est normal, il a creusé les déficits. Je sais bien qu'un certain nombre de gens à l'UMP ou au gouvernement se laissent attirer par la facilité de ces sommes apparemment disponibles. Mais je trouve que nous devons défendre une vision de l'avenir qui dise simplement au pays et au peuple de citoyens qui le forme, que si nous sommes courageux, il faut que nous trouvions l'équilibre, qu'il y a bien sûr une dette légitime. Quand on construit une autoroute, un lycée, un équipement, une faculté, un hôpital, il est normal d'en partager la charge avec les générations qui viennent, mais quand il s'agit des feuilles de sécurité sociale c'est une lâcheté de le faire parce que les générations montantes ont déjà sur le dos les 1000 milliards d'euros de notre dette publique, elles ont sur le dos le peuple des retraités si nombreux qu'elles vont avoir à porter, elles ont sur le dos l'augmentation des dépenses de santé due au vieillissement de la population et nous leur faisons l'affront d'aller leur mettre encore sur le dos les feuilles de sécurité sociale que nous sommes incapables de payer par nous-mêmes.
Ce n'est pas bien et il fallait au moins qu'une formation politique le dise de manière que les jeunes sachent qu'au moins une fois, ils ont été défendus là où se prenaient les décisions pour l'avenir du pays.
Ceux qui sont chargés du projet savent qu'il y a là un chapitre tout à fait essentiel.
Nous avons un impératif de définition de justice sociale, qui sera le troisième thème.
* Je suis de ceux qui pensent qu'en 2002, une chance extraordinaire a été manquée , car le pays était prêt à se rassembler, au-delà des opinions différentes, pour assumer les réformes de son avenir et que la majorité présidentielle, 82,5 % des Français l'y invitaient.
En effet, on était, d'une certaine manière, comme en 1958. Cela aurait permis de montrer quelque chose qui est, à mes yeux, tout à fait essentiel : pour que les réformes réussissent, il faut que les Français aient le sentiment qu'elles sont inspirées par la justice.
Une réforme dont, à tort ou à raison, le pays aurait le sentiment qu'elle avantage les uns au détriment des autres et singulièrement les plus favorisés au détriment des moins favorisés, est une réforme vouée à l'échec dans l'opinion. Or, aujourd'hui, on ne peut pas gouverner sans avoir peu ou prou le soutien de l'opinion.
Un certain nombre de décisions qui ont été prises - je pense à la rentrée dernière sur l'ASS, le gasoil ou sur la distribution des allégements d'impôt et je vous invite à lire le rapport de la cour des comptes si cela vous intéresse - ont donné au pays le sentiment que ce n'était pas le cas.
Nous, nous voulons réincarner l'objectif de justice sociale et cet objectif de justice est d'autant plus important que nous avons des problèmes notamment avec l'ensemble des questions de délocalisation.
Grand sujet devant nous ! On en a beaucoup parlé hier avec M. Gomes : le développement du Tiers-monde.
On a un impératif d'équilibre. Le Tiers-monde a besoin de développement. Donc il a besoin d'emplois mais nos sociétés ont besoin, pour durer, d'avoir elles aussi un ancrage industriel et d'emploi important.
Cela exige un équilibre : c'est vrai en matière agricole, c'est vrai en matière industrielle. C'est une grande question.
J'en cite un des aspects pour montrer que l'on peut avoir des réflexions différentes.
La baisse des prix des supermarchés s'est traduite pour nombre de producteurs agricoles par le risque de leur exclusion des fournitures d'un certain nombre de ces supermarchés-là.
Nous avons donc une réflexion, que Jean Arthuis porte depuis longtemps, sur l'équilibre nécessaire entre producteurs et distributeurs à l'intérieur d'un système nouveau de commercialisation des produits, et pour montrer, là encore, que nous avons une vue différente des autres, je trouve absolument passionnant les enjeux qui reposent sur la politique agricole.
Jusqu'à maintenant, on a fait des politiques agricoles à coup de subventions et d'une certaine manière cela rassure. Mais les subventions ont deux défauts majeurs.
Premier défaut : elles rendent les producteurs agricoles dépendants de la puissance publique. Au lieu d'être des producteurs, ils attendent le chèque que les Institutions, notamment européennes, leur adressent. Ce n'est pas sain et c'est démoralisant pour le monde agricole, en tout cas, pour des secteurs entiers du monde agricole.
Deuxièmement, ce faisant, on tue l'agriculture du Tiers-monde aussi sûrement qu'on la tuerait à coups de poignard.
Il faut une réflexion sur ces sujets car, si des producteurs occidentaux, européens, qui produisent déjà dix fois plus en rendement sur la même parcelle que les producteurs du Tiers-monde sont, en plus, subventionnés, cela veut dire qu'on arrache les paysans du Tiers-monde de leur terre pour les envoyer former le prolétariat des grandes cités où ils iront vivre dans les bidonvilles avec les drames sociaux et humains que cela représente.
Voilà un sujet dont nous devons nous saisir pour montrer que nous avons une vision du monde différente.
Cela ne veut pas dire qu'on passe de l'un à l'autre brutalement, comme certains le proposent quelquefois. On a besoin de transitions, on a besoin d'une pensée nouvelle sur ces sujets.
Justice sociale, pour que tout le monde ait la certitude que c'est ce qui inspire les réflexions sur le travail et les 35 heures. Nous avons proposé, Hervé Morin s'est exprimé dès les premiers jours sur ce sujet, une stratégie complètement différente sur les 35 heures de celle qui, en définitive, a été choisie. Je suis certain que, avec le recul, on verra que ce que nous proposions en ce domaine était plus juste que ce qui, en définitive, a été choisi.
Délocalisation : un bloc sur lequel nous avons une pensée qui ne ressemble à aucune autre, ni à celle du parti socialiste dont on connaît le caractère, à mes yeux, archaïque, ni à celle qui est trop souvent mise en place par le gouvernement.
* Enfin, quatrième sujet, et je m'arrêterai là parce que c'est un grand sujet, le sujet européen.
Les mois qui viennent vont être dominés par la réflexion sur l'Europe, le référendum sur la Constitution et c'est un sujet pour nous.
Mais avant le référendum sur la Constitution, je veux que nous mettions devant nous un enjeu qui menace le référendum.
Dans les semaines qui viennent, on va décider de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Dans les semaines qui viennent, avant le mois de décembre, par une double démarche, de la Commission et du Conseil, on va décider d'ouvrir les négociations avec la Turquie sur son adhésion à l'Union européenne.
Mes amis, les négociations ouvertes, l'adhésion est décidée.
Je le dis avec netteté parce que vous allez entendre : "Mais c'est pour dans longtemps mais de quoi s'inquiète-t-on ? Ce n'est pas avant 10 ans, etc..."
Une fois les négociations ouvertes, personne ne reviendra en arrière.
Si l'on n'ose pas dire non aujourd'hui, comment voulez-vous que l'on ose dire non quand les négociations seront ouvertes.
Or, l'adhésion de la Turquie, et je le dis sans aucune forme de discrimination - cette attitude a toujours été à 1000 lieux de mon esprit - change la nature du projet européen. Je veux simplement dire cela devant vous.
Qu'est-ce qu'était le projet européen ?
C'était une démarche consciente mais simple qui consistait à dire : pour peser sur l'avenir du monde, l'Etat national, la France, l'Allemagne, l'Italie, n'a plus le poids nécessaire et il faut donc que nous exercions différemment la souveraineté qui est nôtre et donc, transférer la souveraineté à une entité qui exerce le pouvoir que nous ne pouvons plus exercer tout seul.
Mais cette démarche politique signifie qu'il y a une identité et une volonté pour exercer cette souveraineté-là. Que l'Europe, c'est une identité et c'est une volonté. Et si nous décidons que le pays le plus important de l'Europe sera un pays non européen, alors le risque est immense qu'il n'y ait plus d'identité et, en raison de ses liens avec les Etats-Unis, qu'il n'y ait plus de volonté à la tête de la souveraineté européenne.
C'est une ambiance démocratiquement malsaine, dans une espèce de jeu de rôle : l'UMP, le parti gouvernemental dit : nous sommes contre, mais il soutient le gouvernement et le Président de la République qui sont les principaux défenseurs de l'adhésion de la Turquie.
Il est de notre devoir de poser ce problème urgemment parce que, je le dis, si ce problème n'est pas traité, si une réponse à cette question n'est pas apportée, si le projet européen est dénaturé alors, c'est le référendum sur l'Europe qui risque malheureusement d'être mis en cause et de trouver hélas une réponse négative.
Nous qui sommes les défenseurs du projet européen, nous voyons la menace. J'ai le sentiment qu'il est partagé par un grand nombre de responsables conscients et qui ont exercé, dans la destinée du projet européen, des responsabilités majeures.
Vous voyez que, là encore, nous avons une identité différente et ce sont bien ces changements profonds qui sont aujourd'hui, à nos yeux, le besoin du pays. C'est la mission que nous avons décidée de remplir.
C'est la mission que nous avons depuis 2002 assumée dans la société politique française ; pas seulement une mission de résistance à ceux qui voulaient faire disparaître notre famille politique et que le pays n'ait plus le choix qu'entre deux appareils qui forcent d'une certaine manière leur décision. Nous avons assumé cette mission mais il y en a aujourd'hui une autre qui est une mission de projet.
Le pays a des inquiétudes profondes. Il faut être capable d'y répondre.
Nous ne pourrons jouer un rôle positif dans cette affaire que si nous assumons notre identité, notre originalité, notre différence et si nous refusons toute stratégie qui conduirait d'une manière ou d'une autre à un abandon de cette exigence que nous avons portée et que nous voulons continuer à porter.
(source http://www.udf.org, le 7 septembre 2004)
Ils y voyaient une stratégie profonde.
On ne sait pas à quelles fins, mais il devait sûrement y avoir des fins dissimulées mais la réponse était beaucoup plus simple : nous avons fait un Conseil national au moment de l'université d'été parce que les cadres du mouvement se plaignaient régulièrement que l'université d'été fût réservée aux jeunes et qu'ils n'aient pas leur place dans cette expression de rentrée.
J'ai dit " qu'à cela ne tienne " ! Nous allons mettre en place un Conseil national qui sera la rentrée de toute l'UDF et de tous ses militants.
Je veux remercier les nombreux parlementaires présents et je les salue :
Pierre Albertini, député-maire de Rouen, Gille Artigues, député de la Loire, Philippe Nogrix, sénateur d'Ille-et-Vilaine, Anne-Marie Comparini, députée du Rhône, Jean-Luc Jean-Luc Préel, député de Vendée, Jean-Christophe Lagarde, député-maire de Drancy, Rudy Salles, député des Alpes-Maritimes, le nouveau président des Jeunes, Arnaud de Belenet, André Santini, député-maire d'Issy-les-Moulineaux, Denis Badré, sénateur des Hauts-de-Seine, Nathalie Griesbecknouvelle député européenne, Bernard Lehideux, nouveau député européen. Vont nous rejoindre d'un instant à l'autre les trois présidents de groupe, à savoir Hervé Morin, Président du groupe UDF à l'Assemblée Nationale, Michel Mercier, Président du groupe UDF au Sénat, etMarielle de Sarnez, Présidente de la délégation UDF au Parlement européen.
Beaucoup d'autres sont présents, Yvan Lachaud, député du Gard, Jean Dionis du Séjour, député du Lot-et-Garonne, Philippe Folliot, député du Tarn, Anne Laperrouze, nouvelle députée européenne, Daniel Soulage, sénateur du Lot-et-Garonne, Jean-Marie Cavada - a passé deux jours avec nous, mais a dû repartir- nouveau député européen.
Je salue également tous les autres conseillers régionaux, conseillers généraux, maires, membres de notre Conseil national.
Je voudrais vous dire quelques mots de la rentrée à l'ouverture du débat, avant de vous proposer un ordre du jour et je demanderai à Pierre Albertini de lancer le débat puisqu'il est en charge de notre projet d'analyse de la société française.
Je voudrais vous donner quelques impressions de rentrée avant de conclure ces journées, demain matin.
La première d'entre elles, c'est naturellement d'avoir le sentiment de la gravité des événements que traverse le monde.
Bien entendu, ces événements se sont focalisés ces derniers jours sur les deux prises d'otages, dont celle de deux journalistes français qui, nous l'espérons, connaîtra, dans les heures qui viennent, un dénouement heureux. Mais lorsque ce dénouement heureux sera intervenu, nous n'oublierons pas pour autant les autres otages, notamment ceux qui ont été assassinés dans ce drame de l'Irak et ceux dont on parle le moins, qu'ils soient issus de pays européens ou d'autres pays du monde. Par exemple, les travailleurs venus simplement pour essayer de gagner leur vie dans des entreprises implantées en Irak et qui n'ont pas trouvé, comme nous aurions dû le faire, le support de l'opinion internationale.
Je considère comme un trait de bonne santé de notre pays qu'il ait su manifester son unité de manière éclatante dans cet événement malheureux, toute force politique confondue, toute communauté confondue, toute conviction spirituelle ou philosophique confondue, que la France ait eue cette force de montrer son unité. Nous espérons que cela aura servi à un dénouement heureux de ce drame. Mais naturellement, à une échelle encore bien plus importante et bien plus tragique le drame de la prise d'otages en Ossétie du Nord, sur le territoire malheureux de cette Russie aujourd'hui déchirée avec la prise d'otages de plus de 1000 personnes dont 700 enfants et les morts qui ont été entraînés par le dénouement tragique de cette affaire.
Nous avons, ce matin, respecté une minute de silence, nous n'allons pas recommencer. Je voudrais simplement que nous ayons une pensée pour ceux dont la vie est aujourd'hui si tragiquement atteinte.
Enfants que nous n'oublierons jamais, enfants fauchés avant que leur vie n'ait pu trouver son cours, familles à jamais déchirées.
Naturellement, nous voyons, dans ces drames, un des visages les plus tragiques du nouveau siècle, une espèce de guerre larvée qui prend en otage des vies humaines et qui, hélas, ne les relâche pas.
Cela veut dire aussi que nous avons le devoir, nous France et nous Europe - car je ne distingue pas la France de l'Europe dans cette affaire - de présenter une autre image de l'avenir et du vivre ensemble.
Que le témoignage d'unité que nous avons manifesté serve aussi de projet pour toutes ces sociétés déchirées.
C'est naturellement notre première pensée.
Et pour nous, la politique vient loin derrière.
Elle a sa dignité, et nous la défendons, mais nous savons faire la distinction entre l'essentiel et le contingent.
Nous n'avons pas voulu déplacer cette université d'été malgré la dimension tragique que nous percevions de tout cela parce qu'il est un devoir, pour les forces politiques, d'être en première ligne lorsque se passe un drame, parce que nos compatriotes ne demandent pas qu'on leur parle de l'accessoire mais de l'essentiel.
Il y a, chez les citoyens, le besoin que leurs politiques traitent de l'essentiel et ne déclinent pas les rendez-vous lorsque ces rendez-vous ont lieu.
Et donc nous allons tous jouer notre rôle en cette rentrée et dans les années qui viennent.
Je voudrais vous dire un mot de l'état de la France, comme je le ressens.
J'ai eu, je ne sais pas si l'on peut dire la satisfaction, mais en tout cas, le sentiment de justesse, tout au long de cet été, de voir un grand nombre de responsables politiques de tous bords reprendre un diagnostic que nous avons porté depuis longtemps sur la démocratie française.
Il y a longtemps que nous, à l'UDF, nous disons que la démocratie en France va mal. Elle va mal parce que les pouvoirs ont du mal à gouverner, à imposer les réformes ou les décisions que, pourtant, l'urgence leur exigeait. Il y a comme une réticence de la société française, et elle va mal parce que les citoyens ne s'y sentent pas entendus comme ils devraient l'être.
Il y a longtemps que nous disons : la France est, à notre connaissance, le seul pays d'Europe et peut-être du monde, où toute élection, quelle que soit son échéance, depuis 30 ans, a entraîné le renvoi des gouvernants en place.
Il y a plus d'un quart de siècle qu'à chaque élection, le balancier est reparti de l'autre côté et cela donne notamment à notre pays une instabilité très grande.
Nous disons depuis longtemps : regardez bien, cette situation a des causes et ces causes sont dans le malaise ou le mal-être des Institutions françaises.
Notre démocratie va mal parce que ces règles sont mauvaises.
Premièrement, le peuple français n'est pas représenté comme il devrait l'être dans le Parlement qui est censé être sa voix.
Regardez, c'est la même chose à chaque alternance, à chaque coup de balancier. L'UMP qui occupe actuellement 65 % des sièges à l'Assemblée Nationale a fait 19 % au premier tour de l'élection présidentielle et 16 % aux dernières élections européennes.
Et bien, cette accentuation, ce coup de balancier, a fait que la représentation du pays n'est pas juste et les Français considèrent que les débats qui ont lieu ne donnent pas à leurs voix la place qu'elles devraient avoir.
De la même manière, notre Constitution écrit, en son article 20, que le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation.
Et bien, celui qui prétendrait aujourd'hui que c'est le gouvernement qui détermine et conduit la politique de la nation, aurait quelque audace. Ce n'est pas le gouvernement qui détermine et conduit la politique de la nation, c'est le Président de la République - c'est d'ailleurs normal, il est élu au suffrage universel - mais on ne le dit pas aux Français.
Mais le Président de la République se tient à distance du débat alors que, dans les grandes démocraties où on élit le Président de la République, le Président s'exprime tous les jours.
C'est au point, j'en ai souvent fait la réflexion, que l'on voit plus souvent, sur les écrans de la télévision française, le Président des Etats-Unis que le Président de la République française.
Or, puisque le président, étant élu au suffrage universel, détermine et conduit la politique de la nation, une vie politique franche voudrait qu'il assume et qu'il s'exprime comme s'exprime un président américain.
Toutes ces distorsions multipliées - un parlement qui ne représente pas le pays, qui ne fait pas la loi puisqu'on ne l'y autorise même pas, qui ne contrôle pas le gouvernement, qui n'organise pas le débat public, un gouvernement qui ne détermine pas la politique de la nation et un président de la République qui le fait, mais qui ne le dit pas - font une démocratie où les Français ne retrouvent pas leur vérité.
Or, s'il est une conviction que nous défendons, c'est celle-ci. La démocratie, désormais, a besoin d'authenticité pour que les citoyens s'y engagent ; il faut qu'ils s'y retrouvent et pour qu'ils s'y retrouvent, il faut qu'ils aient la vérité en face d'eux.
C'est cette vérité-là que nous avons voulu mettre.
Peu à peu, ce sentiment de distance entre les élus et les citoyens est devenu la réalité la plus banale de la vie politique française.
Pas seulement pour ce gouvernement-ci, ce serait moindre mal, mais pour tous les gouvernements successifs. Cela nous impose, si nous sommes courageux, comme le Général de Gaulle le fit en son temps à la fin de la IVe République dont les institutions ne marchaient pas, de porter le projet d'une rénovation de la démocratie française.
Nous sommes les rénovateurs de la démocratie française et nous l'assumons devant le pays, en considérant que tel est notre devoir.
Je suis très heureux d'avoir vu des hommes politiques d'origines, de pensées ou de convictions différentes, reprendre peu à peu ce message. Jack Lang vient de le faire dans un livre récent.
Après, il y a des modalités : on peut être pour la VIe République ou pour la réforme de la Ve, tout ceci est un habillage ; je dirai d'ailleurs dans un instant ce qu'il m'en semble. Mais, déjà, sentir que les institutions sont en cause dans la crise de confiance, c'est un événement très important, c'est un événement majeur.
Je suis très heureux, aussi surprenant que cela puisse paraître à certains d'entre vous et d'entre nous, d'avoir vu le président de l'Assemblée Nationale Jean-Louis Debré dans une tribune récente la semaine dernière donnée au journal " Libération ", dire qu'il fallait changer la représentation du pays à l'Assemblée nationale en changeant le mode de scrutin.
Si Jean-Louis Debré, Président de l'Assemblée nationale et fils de Michel Debré le père de la Constitution - il a dit un jour avec drôlerie qu'il était le frère de la Constitution parce qu'il a le même père - en arrive à cette constatation, cela veut dire que des marges sont ouvertes pour qu'une vraie réflexion puisse être conduite sur ce point. Nous ne pouvons pas garder des institutions qui ne disent pas la vérité du débat politique au pays.
Voilà pour le premier point.
Il y a un deuxième point : un événement naturellement s'est produit. Il faut que nous y réfléchissions une seconde.
J'ai parlé avec Nicolas Sarkozy au téléphone et en le rencontrant directement très souvent pendant cet été, il m'a téléphoné ce matin encore pour me donner la substance de ce qu'il allait dire cet après-midi devant son université d'été. Qu'un ministre important, numéro 2 du gouvernement, fasse le choix de quitter le gouvernement pour aller assumer la présidence d'une formation politique a une signification précise : désormais les formations politiques vont retrouver leur rôle d'acteurs majeurs dans la démocratie française et c'est naturellement très important pour nous.
Il y a deux autres conséquences bien entendu. La première, c'est que Nicolas Sarkozy se présente à la tête de l'UMP après avoir répété que les deux premières années de ce mouvement en tant que parti unique était un échec et méritait une réorientation. C'est ce que je crois et il le dira encore cet après-midi. Deuxièmement, il a dit que l'UMP ne pouvait pas être un parti unique, qu'elle ne pouvait jouer son rôle que dans un partenariat avec d'autres formations politiques et singulièrement la nôtre.
Ceci est positif.
Le climat de respect mutuel qui existe entre nous est aussi pour moi un élément positif.
Cela ne fait que renforcer notre mission parce que, désormais, il apparaît clairement que chacune des formations politiques principales, l'UMP pour ce qui la concerne, l'UDF pour ce qui la concerne et même dans l'opposition le PS pour ce qui le concerne, ont la mission de présenter au pays un projet pour son avenir et les équipes qui soutiendront ce projet.
Nous ne manquerons pas cette à mission.
Nous aurons des relations respectueuses et même amicales.
Nous nous considérons, avec les grandes formations démocratiques, comme co-responsables de l'avenir de la France.
Nous avons une mission particulière : à chacun de dire son projet. Nous avons une mission en commun : nous devons donner au débat la dignité et la portée qui donneront à la vie démocratique de notre pays l'estime que les citoyens sont en droit d'attendre.
Désormais, dans ces relations confiantes, chacun a le devoir de présenter son projet, chacun a le devoir de préparer ses équipes, chacun a le devoir de s'adresser au pays et les Français, le moment venu, choisiront leur destin.
Tel est l'engagement que non seulement nous prenons aujourd'hui mais que nous avons pris depuis des années en affirmant, dans un combat difficile, que le projet que nous portions n'était pas le même que le projet des autres formations politiques, ni de nos voisins de l'UMP dans la majorité, ni du PS dans l'opposition.
Car la question qui se posait à nous était bien celle-là, lorsqu'on a voulu nous faire disparaître.
La vraie question qui était sous-jacente à cette entreprise, était celle-ci : est-ce que le projet que nous portons est une variante ou une alternative ?
Est-ce que nous étions là pour apporter des nuances ou bien est-ce que nous étions là pour porter un projet original ? Le choix que nous avons fait a une signification.
L'UDF porte une alternative pour l'avenir du pays, c'est une vision originale et notre devoir est de la défendre désormais, au moment où le pays fera ses choix principaux.
Et c'est sous cette forme que se traite la question de la présence au gouvernement - sur laquelle il y a eu quelques articles pendant l'été - question qui mérite d'être traitée simplement.
Je la replace dans son contexte en reposant la question de fond : est-ce que l'UDF n'est qu'une variante de la droite ou est-ce qu'elle porte un projet original pour l'avenir du pays ? Ma réponse est que nous portons un projet original pour l'avenir du pays.
Ce projet original sur lequel je vais m'efforcer de vous donner quelques orientations, s'est résumé ces dernières années à une question profonde et toute bête : est-ce qu'en France il faut continuer comme nous faisons depuis des années ou est-ce que qu'il y a à faire des changements politiques profonds ?
Ma réponse, celle de tous nos bureaux politiques et de tous nos conseils nationaux, a été sans exception que la France appelait des changements politiques profonds.
La réponse à cette question lancinante de la participation au gouvernement est donc toute simple : on n'entre pas au gouvernement pour des préférences ou pour l'agrément des uns ou des autres, pour avoir des portefeuilles. On entre au gouvernement si l'on pense que le gouvernement va porter les changements politiques profonds dont la France à besoin.
Cette question appartient naturellement et en premier lieu à l'inspirateur de la politique, celui qui est élu au suffrage universel, au Président de la République. Cette question est une question, comme l'on dit, préjudicielle à mes yeux.
Cela veut dire qu'elle est le préalable.
Si le Président de la République disait un jour au pays : oui, j'ai réfléchi, il faut des changements politiques profonds dans notre démocratie, dans nos Institutions, dans notre vie économique, dans notre vie sociale, dans notre destin européen, alors naturellement, je vous le dis au nom de l'UDF, nous en parlerions avec lui sans aucune réticence.
Mais s'il n'y a pas la volonté de changement profond, alors une telle démarche serait une démarche d'abandon et tout ce que nous avons fait depuis 2 ans perdrait son sens.
Si 12 % des Français ont voté pour nous aux élections régionales et européennes contre tous les pronostics, contre toute analyse, exploit qui a rarement été réalisé dans notre vie politique nationale, si nous avons pu bâtir un vaste mouvement européen, c'est pour une seule raison, c'est parce que nous étions différents.
Cette différence-là est notre patrimoine, elle est notre bien le plus précieux. Il faut l'approfondir et ne pas l'éluder, l'affirmer et non l'abandonner.
Tel est, en tout cas, me semble-t-il, le sens de la mission que vous avez donnée à votre président et à notre présence dans la vie politique nationale.
Après l'introduction de Pierre Albertini, je vous propose que nous abordions quatre thèmes. Il y en a beaucoup d'autres, mais j'en ai choisi quatre pour lesquels nous avons une identité différente, en tout cas, une identité que nous affirmons.
* Premier thème : la démocratie française.
Comment faire en sorte que nos institutions deviennent vraies, que les citoyens quand ils entendent nos débats aient le sentiment, non pas de discussions byzantines loin d'eux, mais que leur voix est entendue ? Comment faire pour que le Parlement retrouve son rôle ?
Comment faire pour que le Président de la République assume les choix que son élection au suffrage universel lui commande d'assumer?
Ce sont des changements institutionnels et notamment, un changement de mode de scrutin pour l'élection des députés à l'Assemblée Nationale sur laquelle on a besoin de deux impératifs que j'énonce. Après, on pourra avoir toutes les discussions nécessaires pour que ces impératifs trouvent leur implication.
Premier impératif : on a besoin d'une majorité pour que l'action puisse être suivie.
Deuxièmement, on a besoin de représenter équitablement les minorités. Il n'y a pas besoin de majorité pléthorique, elles font toujours des bêtises. Il y a besoin de contre-pouvoirs parce que s'il n'y a pas de contre-pouvoirs, le pouvoir se trompe à tous les coups.
On a besoin d'une nouvelle définition de la démocratie française.
* Deuxième thème : nous avons besoin de fixer notre cap en matière économique et de gestion du pays.
Je ne sais pas vous, mais j'ai été navré par le débat sur la "cagnotte". Hervé Morin l'a dit et je partage absolument ce sentiment. Charles-Amédée de Courson l'a dit également à sa manière : voilà un pays qui est le pays le plus déficitaire de toute l'Europe, la lanterne rouge de toute l'Europe en matière de déficit public ; voilà un pays qui a un endettement de 1000 milliards d'euros et, au moment où une petite éclaircie se laissait discerner pour rééquilibrer un peu ce pays si profondément déséquilibré pour peut-être améliorer un peu notre situation budgétaire, voilà que l'on a de plus urgent que de se remettre à dépenser pour creuser encore le trou des déficits publics.
Et bien, cela ne nous paraît pas - nous qui sommes, je crois, sans conteste à classer parmi ceux qui ont une vocation sociale - être une vocation sociale que de faire peser sur nos enfants des déficits qu'ils ne pourront pas assumer.
La dette d'un pays comme le nôtre n'est pas sociale. La dette est une lâcheté et c'est la raison pour laquelle nous l'avons manifesté par nos votes sur la réforme de la sécurité sociale. Faire une réforme pour transférer sur les générations futures les feuilles de sécurité sociale que nous sommes incapables de payer pour nous-mêmes, ce n'est pas du courage ; c'est de la lâcheté à l'égard de nos enfants et de nos petits-enfants qui auront tant de charges à porter.
Alors je sais bien que le parti socialiste n'est pas sur cette ligne. C'est normal, il a creusé les déficits. Je sais bien qu'un certain nombre de gens à l'UMP ou au gouvernement se laissent attirer par la facilité de ces sommes apparemment disponibles. Mais je trouve que nous devons défendre une vision de l'avenir qui dise simplement au pays et au peuple de citoyens qui le forme, que si nous sommes courageux, il faut que nous trouvions l'équilibre, qu'il y a bien sûr une dette légitime. Quand on construit une autoroute, un lycée, un équipement, une faculté, un hôpital, il est normal d'en partager la charge avec les générations qui viennent, mais quand il s'agit des feuilles de sécurité sociale c'est une lâcheté de le faire parce que les générations montantes ont déjà sur le dos les 1000 milliards d'euros de notre dette publique, elles ont sur le dos le peuple des retraités si nombreux qu'elles vont avoir à porter, elles ont sur le dos l'augmentation des dépenses de santé due au vieillissement de la population et nous leur faisons l'affront d'aller leur mettre encore sur le dos les feuilles de sécurité sociale que nous sommes incapables de payer par nous-mêmes.
Ce n'est pas bien et il fallait au moins qu'une formation politique le dise de manière que les jeunes sachent qu'au moins une fois, ils ont été défendus là où se prenaient les décisions pour l'avenir du pays.
Ceux qui sont chargés du projet savent qu'il y a là un chapitre tout à fait essentiel.
Nous avons un impératif de définition de justice sociale, qui sera le troisième thème.
* Je suis de ceux qui pensent qu'en 2002, une chance extraordinaire a été manquée , car le pays était prêt à se rassembler, au-delà des opinions différentes, pour assumer les réformes de son avenir et que la majorité présidentielle, 82,5 % des Français l'y invitaient.
En effet, on était, d'une certaine manière, comme en 1958. Cela aurait permis de montrer quelque chose qui est, à mes yeux, tout à fait essentiel : pour que les réformes réussissent, il faut que les Français aient le sentiment qu'elles sont inspirées par la justice.
Une réforme dont, à tort ou à raison, le pays aurait le sentiment qu'elle avantage les uns au détriment des autres et singulièrement les plus favorisés au détriment des moins favorisés, est une réforme vouée à l'échec dans l'opinion. Or, aujourd'hui, on ne peut pas gouverner sans avoir peu ou prou le soutien de l'opinion.
Un certain nombre de décisions qui ont été prises - je pense à la rentrée dernière sur l'ASS, le gasoil ou sur la distribution des allégements d'impôt et je vous invite à lire le rapport de la cour des comptes si cela vous intéresse - ont donné au pays le sentiment que ce n'était pas le cas.
Nous, nous voulons réincarner l'objectif de justice sociale et cet objectif de justice est d'autant plus important que nous avons des problèmes notamment avec l'ensemble des questions de délocalisation.
Grand sujet devant nous ! On en a beaucoup parlé hier avec M. Gomes : le développement du Tiers-monde.
On a un impératif d'équilibre. Le Tiers-monde a besoin de développement. Donc il a besoin d'emplois mais nos sociétés ont besoin, pour durer, d'avoir elles aussi un ancrage industriel et d'emploi important.
Cela exige un équilibre : c'est vrai en matière agricole, c'est vrai en matière industrielle. C'est une grande question.
J'en cite un des aspects pour montrer que l'on peut avoir des réflexions différentes.
La baisse des prix des supermarchés s'est traduite pour nombre de producteurs agricoles par le risque de leur exclusion des fournitures d'un certain nombre de ces supermarchés-là.
Nous avons donc une réflexion, que Jean Arthuis porte depuis longtemps, sur l'équilibre nécessaire entre producteurs et distributeurs à l'intérieur d'un système nouveau de commercialisation des produits, et pour montrer, là encore, que nous avons une vue différente des autres, je trouve absolument passionnant les enjeux qui reposent sur la politique agricole.
Jusqu'à maintenant, on a fait des politiques agricoles à coup de subventions et d'une certaine manière cela rassure. Mais les subventions ont deux défauts majeurs.
Premier défaut : elles rendent les producteurs agricoles dépendants de la puissance publique. Au lieu d'être des producteurs, ils attendent le chèque que les Institutions, notamment européennes, leur adressent. Ce n'est pas sain et c'est démoralisant pour le monde agricole, en tout cas, pour des secteurs entiers du monde agricole.
Deuxièmement, ce faisant, on tue l'agriculture du Tiers-monde aussi sûrement qu'on la tuerait à coups de poignard.
Il faut une réflexion sur ces sujets car, si des producteurs occidentaux, européens, qui produisent déjà dix fois plus en rendement sur la même parcelle que les producteurs du Tiers-monde sont, en plus, subventionnés, cela veut dire qu'on arrache les paysans du Tiers-monde de leur terre pour les envoyer former le prolétariat des grandes cités où ils iront vivre dans les bidonvilles avec les drames sociaux et humains que cela représente.
Voilà un sujet dont nous devons nous saisir pour montrer que nous avons une vision du monde différente.
Cela ne veut pas dire qu'on passe de l'un à l'autre brutalement, comme certains le proposent quelquefois. On a besoin de transitions, on a besoin d'une pensée nouvelle sur ces sujets.
Justice sociale, pour que tout le monde ait la certitude que c'est ce qui inspire les réflexions sur le travail et les 35 heures. Nous avons proposé, Hervé Morin s'est exprimé dès les premiers jours sur ce sujet, une stratégie complètement différente sur les 35 heures de celle qui, en définitive, a été choisie. Je suis certain que, avec le recul, on verra que ce que nous proposions en ce domaine était plus juste que ce qui, en définitive, a été choisi.
Délocalisation : un bloc sur lequel nous avons une pensée qui ne ressemble à aucune autre, ni à celle du parti socialiste dont on connaît le caractère, à mes yeux, archaïque, ni à celle qui est trop souvent mise en place par le gouvernement.
* Enfin, quatrième sujet, et je m'arrêterai là parce que c'est un grand sujet, le sujet européen.
Les mois qui viennent vont être dominés par la réflexion sur l'Europe, le référendum sur la Constitution et c'est un sujet pour nous.
Mais avant le référendum sur la Constitution, je veux que nous mettions devant nous un enjeu qui menace le référendum.
Dans les semaines qui viennent, on va décider de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne. Dans les semaines qui viennent, avant le mois de décembre, par une double démarche, de la Commission et du Conseil, on va décider d'ouvrir les négociations avec la Turquie sur son adhésion à l'Union européenne.
Mes amis, les négociations ouvertes, l'adhésion est décidée.
Je le dis avec netteté parce que vous allez entendre : "Mais c'est pour dans longtemps mais de quoi s'inquiète-t-on ? Ce n'est pas avant 10 ans, etc..."
Une fois les négociations ouvertes, personne ne reviendra en arrière.
Si l'on n'ose pas dire non aujourd'hui, comment voulez-vous que l'on ose dire non quand les négociations seront ouvertes.
Or, l'adhésion de la Turquie, et je le dis sans aucune forme de discrimination - cette attitude a toujours été à 1000 lieux de mon esprit - change la nature du projet européen. Je veux simplement dire cela devant vous.
Qu'est-ce qu'était le projet européen ?
C'était une démarche consciente mais simple qui consistait à dire : pour peser sur l'avenir du monde, l'Etat national, la France, l'Allemagne, l'Italie, n'a plus le poids nécessaire et il faut donc que nous exercions différemment la souveraineté qui est nôtre et donc, transférer la souveraineté à une entité qui exerce le pouvoir que nous ne pouvons plus exercer tout seul.
Mais cette démarche politique signifie qu'il y a une identité et une volonté pour exercer cette souveraineté-là. Que l'Europe, c'est une identité et c'est une volonté. Et si nous décidons que le pays le plus important de l'Europe sera un pays non européen, alors le risque est immense qu'il n'y ait plus d'identité et, en raison de ses liens avec les Etats-Unis, qu'il n'y ait plus de volonté à la tête de la souveraineté européenne.
C'est une ambiance démocratiquement malsaine, dans une espèce de jeu de rôle : l'UMP, le parti gouvernemental dit : nous sommes contre, mais il soutient le gouvernement et le Président de la République qui sont les principaux défenseurs de l'adhésion de la Turquie.
Il est de notre devoir de poser ce problème urgemment parce que, je le dis, si ce problème n'est pas traité, si une réponse à cette question n'est pas apportée, si le projet européen est dénaturé alors, c'est le référendum sur l'Europe qui risque malheureusement d'être mis en cause et de trouver hélas une réponse négative.
Nous qui sommes les défenseurs du projet européen, nous voyons la menace. J'ai le sentiment qu'il est partagé par un grand nombre de responsables conscients et qui ont exercé, dans la destinée du projet européen, des responsabilités majeures.
Vous voyez que, là encore, nous avons une identité différente et ce sont bien ces changements profonds qui sont aujourd'hui, à nos yeux, le besoin du pays. C'est la mission que nous avons décidée de remplir.
C'est la mission que nous avons depuis 2002 assumée dans la société politique française ; pas seulement une mission de résistance à ceux qui voulaient faire disparaître notre famille politique et que le pays n'ait plus le choix qu'entre deux appareils qui forcent d'une certaine manière leur décision. Nous avons assumé cette mission mais il y en a aujourd'hui une autre qui est une mission de projet.
Le pays a des inquiétudes profondes. Il faut être capable d'y répondre.
Nous ne pourrons jouer un rôle positif dans cette affaire que si nous assumons notre identité, notre originalité, notre différence et si nous refusons toute stratégie qui conduirait d'une manière ou d'une autre à un abandon de cette exigence que nous avons portée et que nous voulons continuer à porter.
(source http://www.udf.org, le 7 septembre 2004)