Texte intégral
Q - Les Français vont être invités à se prononcer sur la Constitution européenne. Est-ce la dernière occasion pour la France de rester indépendante ?
Jean-Marie Le Pen : Le référendum sur la Constitution européenne doit se tenir l'année prochaine, pour autant que Jacques Chirac respecte son engagement. Ce qui n'est jamais certain.
Si elle est adoptée, cela signifiera la fin de la Constitution française, la fin de la France comme état indépendant, et la disparition de la République française.
En terme de politique, la Constitution française devient le règlement intérieur d'une collectivité locale et, sur le plan juridique, la Constitution européenne met en place un système normatif dont la valeur est supérieure à toutes les normes françaises, réglementaires, législatives et même constitutionnelles.
Ce qui veut dire que les décisions de Bruxelles s'imposent à tous les niveaux, à toutes les administrations, à toutes les juridictions, à toutes les personnes morales et physiques, et dans tous les domaines.
Q - Que dites-vous aux Français pour les inciter à voter non ?
J.-M. L. P. : Je leur rappelle qu'aucun bien n'est plus précieux que l'indépendance, manifestation collective de la liberté collective des peuples.
Est-ce que les Français sont prêts à accepter à renoncer à ce bien pour la conquête duquel tant d'hommes et de femmes, tant de peuples se battent aujourd'hui ? Cet abandon me paraît, quant à moi, criminel.
Q - Vous n'êtes pas le seul à prôner le non à ce référendum, et à vous opposer à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Même Fabius semble être sur la même longueur d'onde que vous...
J.-M. L. P. : Mais moi je suis le premier. Je vous rappelle qu'en 1987, je suis intervenu, lors d'une réunion du Parlement européen à Catane, pour dire ce que je pensais de la candidature de la Turquie et du Maroc à l'entrée dans le Marché commun.
J'ai dit que ces nations respectables, et avec lesquelles nous devions établir ou conserver des relations les plus amicales possibles, ne pouvaient entrer dans une organisation européenne pour une raison essentielle, c'est qu'elles n'étaient pas européennes. Si on crée un club de football, on n'y admet pas des gens qui jouent au basket ou qui pratiquent la course à pied ! Une Union européenne exige qu'on soit européen pour en faire partie.
Quant à Fabius, il me semble, mais je ne suis pas un spécialiste des arcanes du Parti socialiste, qu'il ait changé d'opinion.
Fervent partisan du traité de Maastricht, que personnellement j'ai combattu, il se prononcerait aujourd'hui pour le non à la Constitution européenne.
Il s'agit là d'un positionnement de politique intérieure. Pressentant la victoire du non, Laurent Fabius joue sa carte présidentielle à quitte ou double.
Q - Que pensez-vous du contrat de confiance pour 2005 avec les Français, proposé par Raffarin ?
J.-M. L. P. : Je dois vous dire que les prestations de Raffarin à la télévision relèvent de "Autant en emporte le vent" ! Une fois de plus, le Premier ministre a tenté de rassurer les Français, mais les choses ne dépendent plus de lui. Elles dépendent de Chirac et de Sarkozy. Dans le rôle du "bouche-trou", Raffarin remplit courageusement son rôle.
Q - Le débat sur les délocalisations prend de l'ampleur. La classe politique semble découvrir ce phénomène.
J.-M. L. P. : Ce qui est surprenant c'est l'étonnement des responsables politiques. Les délocalisations sont le résultat de la suppression des frontières. On ne peut pas survivre dans un marché concurrentiel, si l'on n'est pas dans les mêmes conditions que ses concurrents.
Il est évident que notre législation sociale, que le poids écrasant de notre bureaucratie, que l'excès des dépenses publiques, et conséquemment l'excès des prélèvements obligatoires qui sont parmi les plus lourds du monde, ont pour conséquence que nous ne pouvons résister, sans frontières, à la concurrence étrangère.
Soit les entreprises déposent leur bilan et ferment, soit elles partent à la recherche de conditions économiques plus favorables en particulier sur le coût de la main-d'oeuvre, sans parler de la fiscalité.
Q - Que pensez-vous de Sarkozy ?
J.-M. L. P. : Sarkozy c'est "la petite bête qui monte, qui monte, qui monte". Mais on sait très bien qu'elle ne montera pas jusqu'au ciel. Je crois que, pour lui couper la route, il a un certain nombre d'adversaires dont lui-même, mais aussi la fragilité structurelle de l'UMP. Sans oublier son solide ennemi en la personne du président de la République qui, dans ce domaine-là, est "un vieux crocodile".
Q - Que vous inspire la présence de ministres chiraquiens à la fête de L'Humanité ?
J.-M. L. P. : Il y a toujours eu, à l'exception de la période du RPF, où De Gaulle qualifiait les communistes de séparatistes, une complicité entre les gouvernements dits "de droite" et le Parti communiste.
Il a toujours été réservé aux communistes un certain nombre de circonscriptions, voire de départements, où personne n'allait les taquiner.
Le Parti communiste a pu en toute impunité se faire financer par l'Union soviétique, et par les ristournes diverses sur les marchés captifs. Les récentes révélations sur le comité d'entreprise de l'EDF en disent long sur ces pratiques.
Les crimes communistes n'ont jamais beaucoup gêné les hommes politiques "de droite", ni les capitalistes français qui financent par l'intermédiaire de la publicité le quotidien communiste, et sa fête annuelle. Si "L'Humanité" ne devait vivre que grâce à ses lecteurs, il y a bien longtemps qu'elle aurait disparu.
Q - Le débat sur les OGM prend de l'ampleur. Quelle est votre position sur ce sujet ?
J.-M. L. P. : Je ne suis pas un technicien de l'agriculture ou de l'agroalimentaire. Mais je pense que le développement des OGM dans le cadre de la mondialisation de l'économie ne peut que s'étendre. Certains arguent du fait que grâce aux OGM la consommation de pesticides et de fongicides diminue. Mais personne à ce jour ne peut clairement dire que les OGM ne sont pas un danger pour la santé. Donc la plus grande prudence est de rigueur !
Le risque est immense de voir disparaître la variété des espèces agroalimentaires avec le risque de la mise en place d'un monopole au bénéfice de grandes multinationales comme Mosento.
Mais une fois de plus on est encore dans le cas de figure d'une France qui a cessé d'exister comme état nation, et qui n'a plus de frontières, donc de protection, et de ce fait est soumise aux aléas de la mondialisation.
Q - Que pensez-vous de la proposition de Chirac d'instaurer un impôt mondial destiné à lutter contre la pauvreté ?
J.-M. L. P. : Elle est farfelue ! Évidemment elle participe du concert démagogique et altermondialiste dont le président de la République est friand. M. Tobbyn lui-même, qui avait imaginé comme hypothèse d'école cette taxation internationale, y a renoncé. Bientôt il n'y aura plus que Chirac comme défenseur de cet impôt.
Au demeurant, on voit mal comment il pourrait être perçu. En revanche on voit bien comment il pourrait être dépensé.
Q - En Irak, la situation se dégrade chaque jour. Comment les États-Unis vont-ils s'en sortir ?
J.-M. L. P. : Je sais bien que ce n'est pas très poli, ni très élégant de se citer soi-même, mais si vous voulez bien vous reporter à ce que j'ai dit et écrit, il y a déjà de nombreux mois, sur le sujet, vous verrez que j'avais prévu cette situation. Non point parce que j'ai une boule de cristal, mais parce que un certain nombre de causes entraîne des effets inéluctables. J'ai prévu et prédit que les Américains qui ont ouvert la boîte de Pandore allaient se trouver aux prises avec une guerre populaire, devant un rejet massif qui leur interdirait de réaliser le projet, au demeurant impossible, d'une démocratie en Irak. Si un jour, il y a une démocratie en Irak, elle sera anti-américaine à 99 %.
Au Vietnam, les Américains, qui sont des gens réalistes, sont partis quand ils ont vu qu'ils ne pouvaient pas y rester.
Je crois que la prédiction faite par un des membres américains de la commission Blix, à savoir que ses compatriotes partiraient un jour d'Irak, la queue entre les jambes, me paraît devoir se réaliser à plus ou moins longue échéance.
La situation tragique de ce peuple qui est la première victime du désordre et des opérations militaires et parmi lui, les plus faibles : les vieillards, les femmes et les enfants, nous la connaissons bien, puisque l'association SOS Enfants d'Irak créée par Mme Jany Le Pen se bat depuis plus de douze ans pour ces innocentes victimes.
Aujourd'hui on parle beaucoup d'otages, mais je rappelle que lors de la première guerre d'Irak en 1991, j'ai été le seul homme politique français à ramener plus de soixante otages, et ce malgré les manuvres du gouvernement français de l'époque.
Q - Au sujet des otages, que pensez-vous des démarches de représentants de la communauté musulmane française en faveur des deux journalistes français enlevés en Irak ?
J.-M. L. P. : Le chantage aux otages est moralement ignoble et il place les autorités responsables dans une situation très difficile.
Il me paraît que mettre le doigt dans l'engrenage, c'est encourager les terroristes à aller plus loin dans leur pression psychologique et médiatique.
L'utilisation par le gouvernement français des organisations confessionnelles musulmanes est une erreur et une faute lourde.
Je ne crois pas que ces associations soient représentatives de ce qu'on appelle, entre guillemets, les musulmans. La confessionnalisation de cette catégorie de la population par un gouvernement qui se prétend laïque est profondément anormale.
Q - Vous avez réagi avec vigueur sur le massacre des enfants d'Ossétie par un commando islamiste ?
J.-M. L. P. : J'ai été profondément choqué par l'attitude partiale d'une majorité de la presse française qui, devant l'ignominie du procédé des terroristes, a fait reposer la responsabilité du bain de sang sur le président Poutine et les forces de l'ordre.
à mes yeux, les seuls coupables du massacre sont les assassins, les criminels qui ont déclenché cette opération.
Je crois que le président Poutine a eu une attitude ferme qui doit le faire souffrir sûrement, mais qui est la seule qui ait des chances de sauvegarder son pays de l'embrasement général.
M. Bassaiev a revendiqué la responsabilité de cette ignoble action. Lui et ceux qui lui obéissent doivent être traités comme des gens qui se sont mis au ban de l'humanité. C'est-à-dire qu'ils n'ont droit à aucune indulgence, à aucune protection d'une loi qu'ils bafouent.
Q - Si vous étiez américain, voteriez-vous pour Buch ou pour Kerry ?
J.-M. L. P. : Je voterais Le Pen naturellement ! J'ai détesté une grande partie des options politiques de M. Bush, en particulier en ce qui concerne sa politique au Moyen-Orient.
Néanmoins, je dois reconnaître que M. Kerry ne m'a pas convaincu de pouvoir être un Président des États-Unis bien solide. À mon avis, il est probable que Bush fera un second mandat.
Plût au ciel que ses erreurs l'aient éclairé et le conduisent à une vision plus réaliste et plus utile pour la communauté mondiale que ne l'ont été ses options précédentes.
Q - Qu'en est-il des remous au sein du Front National ?
J.-M. L. P. : Toutes les périodes post-électorales sont toujours des périodes de remous. Des gens qui viennent d'être élus considèrent qu'ils ont une liberté d'action totale, et pas trop de devoirs ni de gratitude.
Ceux qui ne l'ont pas été, en revanche, considèrent qu'ils ont été victimes d'une abominable injustice et en veulent au responsable de leur sort.
C'est un peu l'épisode de ce que nous vivons actuellement. Ça me paraît être un remous qui a moins d'importance que ne l'espèrent ses promoteurs.
Je considère qu'il est nécessaire qu'il y ait une discipline, que l'on peut pardonner des erreurs. C'est plus difficile quand il s'agit de récidive, et, dans ce cas, il est nécessaire de marquer la différence entre les militants ou responsables qui ne la respectent pas et ceux qui la respectent et qui souhaitent qu'on l'applique !
Propos recueillis par Bernard Fontanges
(Source http://www.frontnational.com, le 7 octobre 2004)
Jean-Marie Le Pen : Le référendum sur la Constitution européenne doit se tenir l'année prochaine, pour autant que Jacques Chirac respecte son engagement. Ce qui n'est jamais certain.
Si elle est adoptée, cela signifiera la fin de la Constitution française, la fin de la France comme état indépendant, et la disparition de la République française.
En terme de politique, la Constitution française devient le règlement intérieur d'une collectivité locale et, sur le plan juridique, la Constitution européenne met en place un système normatif dont la valeur est supérieure à toutes les normes françaises, réglementaires, législatives et même constitutionnelles.
Ce qui veut dire que les décisions de Bruxelles s'imposent à tous les niveaux, à toutes les administrations, à toutes les juridictions, à toutes les personnes morales et physiques, et dans tous les domaines.
Q - Que dites-vous aux Français pour les inciter à voter non ?
J.-M. L. P. : Je leur rappelle qu'aucun bien n'est plus précieux que l'indépendance, manifestation collective de la liberté collective des peuples.
Est-ce que les Français sont prêts à accepter à renoncer à ce bien pour la conquête duquel tant d'hommes et de femmes, tant de peuples se battent aujourd'hui ? Cet abandon me paraît, quant à moi, criminel.
Q - Vous n'êtes pas le seul à prôner le non à ce référendum, et à vous opposer à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Même Fabius semble être sur la même longueur d'onde que vous...
J.-M. L. P. : Mais moi je suis le premier. Je vous rappelle qu'en 1987, je suis intervenu, lors d'une réunion du Parlement européen à Catane, pour dire ce que je pensais de la candidature de la Turquie et du Maroc à l'entrée dans le Marché commun.
J'ai dit que ces nations respectables, et avec lesquelles nous devions établir ou conserver des relations les plus amicales possibles, ne pouvaient entrer dans une organisation européenne pour une raison essentielle, c'est qu'elles n'étaient pas européennes. Si on crée un club de football, on n'y admet pas des gens qui jouent au basket ou qui pratiquent la course à pied ! Une Union européenne exige qu'on soit européen pour en faire partie.
Quant à Fabius, il me semble, mais je ne suis pas un spécialiste des arcanes du Parti socialiste, qu'il ait changé d'opinion.
Fervent partisan du traité de Maastricht, que personnellement j'ai combattu, il se prononcerait aujourd'hui pour le non à la Constitution européenne.
Il s'agit là d'un positionnement de politique intérieure. Pressentant la victoire du non, Laurent Fabius joue sa carte présidentielle à quitte ou double.
Q - Que pensez-vous du contrat de confiance pour 2005 avec les Français, proposé par Raffarin ?
J.-M. L. P. : Je dois vous dire que les prestations de Raffarin à la télévision relèvent de "Autant en emporte le vent" ! Une fois de plus, le Premier ministre a tenté de rassurer les Français, mais les choses ne dépendent plus de lui. Elles dépendent de Chirac et de Sarkozy. Dans le rôle du "bouche-trou", Raffarin remplit courageusement son rôle.
Q - Le débat sur les délocalisations prend de l'ampleur. La classe politique semble découvrir ce phénomène.
J.-M. L. P. : Ce qui est surprenant c'est l'étonnement des responsables politiques. Les délocalisations sont le résultat de la suppression des frontières. On ne peut pas survivre dans un marché concurrentiel, si l'on n'est pas dans les mêmes conditions que ses concurrents.
Il est évident que notre législation sociale, que le poids écrasant de notre bureaucratie, que l'excès des dépenses publiques, et conséquemment l'excès des prélèvements obligatoires qui sont parmi les plus lourds du monde, ont pour conséquence que nous ne pouvons résister, sans frontières, à la concurrence étrangère.
Soit les entreprises déposent leur bilan et ferment, soit elles partent à la recherche de conditions économiques plus favorables en particulier sur le coût de la main-d'oeuvre, sans parler de la fiscalité.
Q - Que pensez-vous de Sarkozy ?
J.-M. L. P. : Sarkozy c'est "la petite bête qui monte, qui monte, qui monte". Mais on sait très bien qu'elle ne montera pas jusqu'au ciel. Je crois que, pour lui couper la route, il a un certain nombre d'adversaires dont lui-même, mais aussi la fragilité structurelle de l'UMP. Sans oublier son solide ennemi en la personne du président de la République qui, dans ce domaine-là, est "un vieux crocodile".
Q - Que vous inspire la présence de ministres chiraquiens à la fête de L'Humanité ?
J.-M. L. P. : Il y a toujours eu, à l'exception de la période du RPF, où De Gaulle qualifiait les communistes de séparatistes, une complicité entre les gouvernements dits "de droite" et le Parti communiste.
Il a toujours été réservé aux communistes un certain nombre de circonscriptions, voire de départements, où personne n'allait les taquiner.
Le Parti communiste a pu en toute impunité se faire financer par l'Union soviétique, et par les ristournes diverses sur les marchés captifs. Les récentes révélations sur le comité d'entreprise de l'EDF en disent long sur ces pratiques.
Les crimes communistes n'ont jamais beaucoup gêné les hommes politiques "de droite", ni les capitalistes français qui financent par l'intermédiaire de la publicité le quotidien communiste, et sa fête annuelle. Si "L'Humanité" ne devait vivre que grâce à ses lecteurs, il y a bien longtemps qu'elle aurait disparu.
Q - Le débat sur les OGM prend de l'ampleur. Quelle est votre position sur ce sujet ?
J.-M. L. P. : Je ne suis pas un technicien de l'agriculture ou de l'agroalimentaire. Mais je pense que le développement des OGM dans le cadre de la mondialisation de l'économie ne peut que s'étendre. Certains arguent du fait que grâce aux OGM la consommation de pesticides et de fongicides diminue. Mais personne à ce jour ne peut clairement dire que les OGM ne sont pas un danger pour la santé. Donc la plus grande prudence est de rigueur !
Le risque est immense de voir disparaître la variété des espèces agroalimentaires avec le risque de la mise en place d'un monopole au bénéfice de grandes multinationales comme Mosento.
Mais une fois de plus on est encore dans le cas de figure d'une France qui a cessé d'exister comme état nation, et qui n'a plus de frontières, donc de protection, et de ce fait est soumise aux aléas de la mondialisation.
Q - Que pensez-vous de la proposition de Chirac d'instaurer un impôt mondial destiné à lutter contre la pauvreté ?
J.-M. L. P. : Elle est farfelue ! Évidemment elle participe du concert démagogique et altermondialiste dont le président de la République est friand. M. Tobbyn lui-même, qui avait imaginé comme hypothèse d'école cette taxation internationale, y a renoncé. Bientôt il n'y aura plus que Chirac comme défenseur de cet impôt.
Au demeurant, on voit mal comment il pourrait être perçu. En revanche on voit bien comment il pourrait être dépensé.
Q - En Irak, la situation se dégrade chaque jour. Comment les États-Unis vont-ils s'en sortir ?
J.-M. L. P. : Je sais bien que ce n'est pas très poli, ni très élégant de se citer soi-même, mais si vous voulez bien vous reporter à ce que j'ai dit et écrit, il y a déjà de nombreux mois, sur le sujet, vous verrez que j'avais prévu cette situation. Non point parce que j'ai une boule de cristal, mais parce que un certain nombre de causes entraîne des effets inéluctables. J'ai prévu et prédit que les Américains qui ont ouvert la boîte de Pandore allaient se trouver aux prises avec une guerre populaire, devant un rejet massif qui leur interdirait de réaliser le projet, au demeurant impossible, d'une démocratie en Irak. Si un jour, il y a une démocratie en Irak, elle sera anti-américaine à 99 %.
Au Vietnam, les Américains, qui sont des gens réalistes, sont partis quand ils ont vu qu'ils ne pouvaient pas y rester.
Je crois que la prédiction faite par un des membres américains de la commission Blix, à savoir que ses compatriotes partiraient un jour d'Irak, la queue entre les jambes, me paraît devoir se réaliser à plus ou moins longue échéance.
La situation tragique de ce peuple qui est la première victime du désordre et des opérations militaires et parmi lui, les plus faibles : les vieillards, les femmes et les enfants, nous la connaissons bien, puisque l'association SOS Enfants d'Irak créée par Mme Jany Le Pen se bat depuis plus de douze ans pour ces innocentes victimes.
Aujourd'hui on parle beaucoup d'otages, mais je rappelle que lors de la première guerre d'Irak en 1991, j'ai été le seul homme politique français à ramener plus de soixante otages, et ce malgré les manuvres du gouvernement français de l'époque.
Q - Au sujet des otages, que pensez-vous des démarches de représentants de la communauté musulmane française en faveur des deux journalistes français enlevés en Irak ?
J.-M. L. P. : Le chantage aux otages est moralement ignoble et il place les autorités responsables dans une situation très difficile.
Il me paraît que mettre le doigt dans l'engrenage, c'est encourager les terroristes à aller plus loin dans leur pression psychologique et médiatique.
L'utilisation par le gouvernement français des organisations confessionnelles musulmanes est une erreur et une faute lourde.
Je ne crois pas que ces associations soient représentatives de ce qu'on appelle, entre guillemets, les musulmans. La confessionnalisation de cette catégorie de la population par un gouvernement qui se prétend laïque est profondément anormale.
Q - Vous avez réagi avec vigueur sur le massacre des enfants d'Ossétie par un commando islamiste ?
J.-M. L. P. : J'ai été profondément choqué par l'attitude partiale d'une majorité de la presse française qui, devant l'ignominie du procédé des terroristes, a fait reposer la responsabilité du bain de sang sur le président Poutine et les forces de l'ordre.
à mes yeux, les seuls coupables du massacre sont les assassins, les criminels qui ont déclenché cette opération.
Je crois que le président Poutine a eu une attitude ferme qui doit le faire souffrir sûrement, mais qui est la seule qui ait des chances de sauvegarder son pays de l'embrasement général.
M. Bassaiev a revendiqué la responsabilité de cette ignoble action. Lui et ceux qui lui obéissent doivent être traités comme des gens qui se sont mis au ban de l'humanité. C'est-à-dire qu'ils n'ont droit à aucune indulgence, à aucune protection d'une loi qu'ils bafouent.
Q - Si vous étiez américain, voteriez-vous pour Buch ou pour Kerry ?
J.-M. L. P. : Je voterais Le Pen naturellement ! J'ai détesté une grande partie des options politiques de M. Bush, en particulier en ce qui concerne sa politique au Moyen-Orient.
Néanmoins, je dois reconnaître que M. Kerry ne m'a pas convaincu de pouvoir être un Président des États-Unis bien solide. À mon avis, il est probable que Bush fera un second mandat.
Plût au ciel que ses erreurs l'aient éclairé et le conduisent à une vision plus réaliste et plus utile pour la communauté mondiale que ne l'ont été ses options précédentes.
Q - Qu'en est-il des remous au sein du Front National ?
J.-M. L. P. : Toutes les périodes post-électorales sont toujours des périodes de remous. Des gens qui viennent d'être élus considèrent qu'ils ont une liberté d'action totale, et pas trop de devoirs ni de gratitude.
Ceux qui ne l'ont pas été, en revanche, considèrent qu'ils ont été victimes d'une abominable injustice et en veulent au responsable de leur sort.
C'est un peu l'épisode de ce que nous vivons actuellement. Ça me paraît être un remous qui a moins d'importance que ne l'espèrent ses promoteurs.
Je considère qu'il est nécessaire qu'il y ait une discipline, que l'on peut pardonner des erreurs. C'est plus difficile quand il s'agit de récidive, et, dans ce cas, il est nécessaire de marquer la différence entre les militants ou responsables qui ne la respectent pas et ceux qui la respectent et qui souhaitent qu'on l'applique !
Propos recueillis par Bernard Fontanges
(Source http://www.frontnational.com, le 7 octobre 2004)