Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, sur la prise en compte du handicap, la fiscalité dans les DOM et sur la réforme de l'octroi de mer, Fort-de-France le 25 juin 2004.

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Circonstance : Université des Maires de la Martinique et de la Guadeloupe, à Fort-de-France le 25 juin 2004

Texte intégral

Monsieur le ministre,
Monsieur le député,
Monsieur le président de l'association des maires,
Mesdames et messieurs les maires,
Mesdames et messieurs les élus,

Je voudrais vous dire tout le plaisir que j'éprouve à participer à l'ouverture de cette université des maires de la Martinique et de la Guadeloupe. Ces rencontres sont des moments importants pour échanger des expériences et des bonnes pratiques sur des sujets d'intérêt commun. Ces deux journées de travail, aujourd'hui en Martinique et lundi en Guadeloupe, témoignent du dynamisme des deux associations des maires et je suis heureuse de constater que ces journées vont être consacrées à deux thèmes essentiels qui sont au cur de la vie citoyenne et de la cohésion sociale : l'égalité des chances et le développement durable.
L'égalité des chances et la place des personnes handicapées dans nos communes est donc à l'ordre du jour de cette première journée en Martinique. Je salue le choix de ce thème difficile, en raison des retards énormes que nous devons rattraper outre-mer. Comme vous le savez, la politique du handicap constitue un chantier prioritaire du Président de la République. J'ai donc souhaité que mon ministère participe activement à l'amélioration de la vie sociale des personnes handicapées à travers les 97 mesures du Gouvernement qui ont été présentées au début de cette année. L'accessibilité des personnes handicapées à la vie de la Cité est en effet un axe central de ce plan qui comporte de nombreuses déclinaisons : l'habitat, les services administratifs de l'Etat accueillant du public, les transports, les nouvelles technologies ou encore la formation, autant de points d'application pratiques sur lesquels nous devons faire porter nos efforts. Je me réjouis que certains de ces thèmes soient étudiés au cours de cette journée.
L'outre-mer souffre de déficits importants dans la prise en compte du handicap et il est de notre responsabilité à tous, de faire en sorte que cette dimension soit bien intégrée dans nos décisions quotidiennes.
Dans la mesure de ses moyens, le ministère de l'outre-mer intègre les problématiques du handicap et apporte des réponses pragmatiques. C'est ainsi que le site internet du ministère de l'outre-mer a été, il y a quelques mois, le premier site internet du Gouvernement à recevoir le label " Braille.net " et donc être désormais accessible aux personnes malvoyantes. En Martinique, j'ai souhaité accompagner certaines démarches et soutenir des projets concrets. C'est ainsi que mon ministère a récemment financé des actions de formation à l'apprentissage du braille pour une vingtaine d'adultes déficients visuels. Je vous indique aussi que je suis prête à participer au financement du projet porté par l'association pour la préparation et la promotion des artistes handicapés de la Martinique (APPAHM) pour donner à des déficients visuels les instruments de l'autonomie (apprentissage du braille, maîtrise de l'informatique notamment) et organiser au profit de personnes valides une formation en matière d'encadrement des personnes déficientes visuelles. J'espère que ce projet aboutira car il propose aussi une immersion d'un mois en entreprise pour des stagiaires non voyants, ce qui est essentiel pour leur insertion professionnelle.
Devant l'insuffisance des structures d'accueil spécialisées qui est encore plus forte outre-mer qu'en métropole, nous devons nous mobiliser pour éviter que de nombreux enfants ou adultes handicapés soient obligés d'aller en métropole voire en Belgique pour trouver un centre d'accueil. Il est indispensable d'effectuer un diagnostic régulier, tant quantitatif que qualitatif, de la situation et des besoins des personnes handicapées, pour travailler ensemble à l'amélioration de cet accueil.
Je sais que vous avez pleinement conscience de cette nécessité. Je souhaiterais remercier à cet égard tout particulièrement les représentants des associations qui oeuvrent au quotidien au profit des personnes handicapées et voudrais les assurer, comme aux maires, de mon soutien.
Mesdames et messieurs les maires, vos communes doivent relever de nombreux défis dont celui de l'évolution démographique est sans conteste le plus important et entraîne concrètement d'importants besoins de financement en matière d'investissements lourds. Ce sont les communes, bien souvent maintenant les groupements intercommunaux, qui doivent réaliser et entretenir les réseaux d'eau potable, les stations de traitement des eaux usées ou de dessalement d'eau de mer sans lesquelles il n'existe pas de véritable politique de l'environnement ni de développement durable. Je sais que de nombreuses communes doivent faire encore d'importants efforts de rattrapage en matière de réseaux, de voirie ou de transport. Les thèmes que vous évoquez dans cette université des maires sont aussi constitutifs de coûts qu'il faut dés à présent prendre en compte.
J'ai déjà eu plusieurs occasions de faire part de ma volonté de renforcer durablement les capacités financières des communes et de leurs groupements. Cette volonté s'est déjà concrétisée dans la loi programme du 21 juillet 2003, puisque je vous rappelle que cette loi a rendu éligible à la défiscalisation certains équipements structurants, comme par exemple les stations d'épuration ou les unités de dessalement, lorsqu'ils font l'objet d'une concession de service public.
Une autre mesure de la loi programme vise à améliorer la fiscalité locale, car vous le savez, dans vos communes, une faible part du potentiel fiscal est mobilisé. Il s'agit ici d'une particularité de l'outre-mer qu'il me paraît urgent de prendre en compte, si l'on veut asseoir durablement les finances communales. C'est pourquoi la loi programme a créé une dotation exceptionnelle de 5 M entre 2004 à 2008 pour vous aider à mettre en place ou à achever les opérations de premier adressage en prenant en charge la moitié des dépenses occasionnées. Après avoir reçu un avis favorable du comité des finances locales, le décret est aujourd'hui signé et sera publié prochainement. Il vous appartient désormais d'utiliser cette possibilité et de faire en sorte que tous nos concitoyens bénéficient de services publics communaux, comme par exemple le ramassage des déchets, et contribuent aux charges collectives.
Le vote de la loi sur l'octroi de mer par le Parlement a aussi été l'occasion de modifier les textes concernant le fonds régional pour le développement et pour l'emploi (FRDE) afin qu'une part significative des crédits soit directement affectée aux communes leur permettant ainsi de faire face à leurs besoins de financement en matière d'investissement.

La nouvelle modalité de répartition des ressources des FRDE est désormais la suivante : 80 % directement versé aux communes et 20 % à la région. En ce qui concerne le passé et les crédits non utilisés, le nouveau texte de loi prévoit le reversement aux communes des ressources des FRDE non engagées par les régions.
Je vous précise que les sommes qui vous seront versées au titre du FRDE abonderont la section d'investissement de vos budgets sous forme d'une dotation globale. Cette dotation pourra financer toutes les dépenses d'investissement et, prioritairement, des projets facilitant l'installation d'entreprises et la création d'emplois ou contribuant à la réalisation d'infrastructures et équipements publics nécessaires au développement.
Enfin, dernier point important concernant l'octroi de mer, les nouvelles dispositions du projet de loi adoptées vont permettre aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de bénéficier de cette dotation globale d'investissement des communes. La réforme de l'octroi de mer permettra donc d'accompagner l'intercommunalité que je vous invite à développer de manière la plus large possible.
Mesdames et messieurs, vous savez que le ministère de l'outre-mer travaille à une réforme des dotations financières de l'Etat aux collectivités d'outre-mer et notamment des communes. Plusieurs axes de travail sont actuellement étudiés et ont été présentés, il y a deux mois, au comité des finances locales. Le groupe de travail sur la réforme de la DGF a consacré une séance spéciale au début du mois d'avril pour traiter avec vos élus des particularités de l'outre-mer.
Le premier axe est celui des réformes en cours des dotations. Elles ne concernent pas seulement l'outre-mer mais toutes les collectivités territoriales de la République. Dans ce cadre, les communes d'outre-mer devraient bénéficier notamment d'une meilleure prise en compte du critère de la population et de celui de la superficie. L'objectif recherché est celui d'un renforcement de la péréquation par un accroissement des masses financières consacrées à l'outre-mer et par l'introduction des critères spécifiques de répartition adaptés à l'outre-mer. Les communes d'outre-mer obtiendraient ainsi un rattrapage de leur dotation globale de fonctionnement.
Le second axe de travail est celui de la reconnaissance de handicaps structurels permanents des collectivités d'outre-mer. Cela pourrait se traduire par la création d'une quote-part dédiée à l'ultra périphéricité au sein des dotations de l'Etat, concrétisant ainsi un renforcement de la solidarité financière de la métropole avec l'outre-mer. L'objectif ici est d'aider les communes à rattraper le retard d'investissement, sans se limiter au cadre de la réforme de la DGF.
Toutes ces évolutions sont en cours de discussions et il est encore trop tôt, au moment où je vous parle, pour vous donner des indications financières concrètes pour chaque de vos communes. Je puis seulement vous dire que je serai très attentive aux évolutions proposées et que je veillerai à ce que le dispositif proposé permette de répondre durablement à vos difficultés.
Vous voyez donc, mesdames et messieurs les maires, que les efforts de l'Etat pour vos collectivités se traduisent déjà par des décisions concrètes. Sachez que je suis parfaitement consciente de vos difficultés financières.
Je sais aussi que vous n'attendez pas tout de l'Etat et que vous savez faire preuve d'imagination et de courage pour améliorer la gestion de vos communes.
Pour conclure, je voudrais vous dire que je connais la place essentielle des collectivités dans le développement des régions. Assises sur une légitimité historique incontestable, les communes constituent le socle de la démocratie en assurant au plus proche des citoyens les services publics les plus essentiels.
La commune est bien la collectivité ou s'expriment le plus clairement et le plus directement les besoins collectifs quotidiens et les attentes de tous les citoyens. Chacun se tourne vers son maire et attend de sa part disponibilité et efficacité.
Vous qui, en tant que maires, êtes les premiers élus de proximité par excellence, soyez assurés de mon écoute permanente pour qu'ensemble, nous puissions améliorer le bien-être de nos concitoyens d'outre-mer.
Je vous remercie.
(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 28 juin 2004)