Texte intégral
Un État immobile ne peut pas être un État fort. Pourquoi ? Parce qu'un État immobile finit par souffrir d'impotence, d'impuissance : ses dépenses de fonctionnement s'accroissent, tandis que ses dépenses d'investissement reculent. Le déficit se creuse et ce qui devrait être consacré aux missions essentielles de l'État s'évanouit dans le remboursement de la dette. En 1990, les dépenses salariales et les intérêts de la dette représentaient près de 50 % du budget de l'État. Aujourd'hui, ces deux postes s'élèvent à 57 %. Pour lui rendre sa force et sa plasticité, nous avons donc décidé de mettre l'État en mouvement.
Comment ? En lui faisant faire un exercice salutaire, continu, qui va modifier ses habitudes : veiller de manière permanente au rapport qualité-prix des services. Autrement dit : faire en sorte que l'État ait constamment le souci du meilleur coût dans l'exercice de ses missions. Cela implique de ne plus raisonner en termes de moyens, mais d'objectifs et de résultats. De veiller constamment à la performance des organisations et des processus, de mesurer l'efficacité des services et la satisfaction des usagers.
Autant de petites révolutions ! A cette fin, une sorte de " mouvement perpétuel " est nécessaire. Nous voulons convaincre les administrations de passer de " l'esprit Mikado " : " Le premier qui bouge a perdu ", à " l'esprit bicyclette " : " Pour ne pas tomber, il ne faut pas s'arrêter de pédaler. " C'est tout le sens des stratégies ministérielles de réforme (SMR) que nous soumettons aujourd'hui à l'examen d'un comité d'experts indépendants, présidé par Francis Mer. Ce procédé de réforme part d'un principe simple : chaque ministre s'engage sur un programme de réorganisation de son administration, qui en améliore l'efficacité, de manière chiffrée et datée. La bonne méthode ne consiste pas à faire une coupe claire de temps en temps, pour dégager un peu d'argent, mais à repenser vraiment l'organisation de l'État, pour que le gain soit structurel, et non occasionnel.
Ce premier programme de réformes tous azimuts, qui comprend 225 mesures, dégagera, à l'horizon 2007, 1,5 milliards d'euros au minimum et près de 10.000 emplois - ce qui représente un gain de productivité de 1,4 % sur trois ans. Répétée chaque année, cette démarche est progressive, et va monter en puissance.
Notre objectif final est clair : 1,5 % de productivité en plus tous les ans, comme dans toutes les entreprises de services. Cette référence à l'entreprise ne doit pas heurter : il n'y a en effet aucune raison pour que l'efficacité propre à la gestion d'entreprise ne soit pas mise au service du bien public et des objectifs de l'État.
L'État coûte cher parce qu'il a multiplié les structures qui font double emploi ; parce qu'il a institutionnalisé des dépenses inutiles ; parce qu'il n'a pas été construit pour s'inquiéter du gaspillage ; parce que son organisation est telle qu'il se charge de nombreuses tâches qui ne sont pas de son ressort (au détriment de ses missions essentielles) ; parce qu'il ne prend pas la peine de motiver ses équipes, de récompenser les plus méritants, de repérer les bonnes pratiques, d'évaluer et de sélectionner les procédures les plus efficaces, enfin parce qu'il s'est trop longtemps isolé du mouvement de modernisation technologique qui a bouleversé la société. De ce diagnostic découlent une multitude de réformes, fourmillantes et nécessaires.
D'abord, des réformes de structures qui procèdent par fusions ou suppressions : en 2005, nous commencerons la réduction du nombre d'administrations centrales. Elles seront réduites de moitié au ministère de l'Équipement, le ministère des Finances en fusionnera trois et celui de l'Agriculture réorganisera ses offices agricoles. Par ailleurs, certaines missions techniques seront confiées au secteur privé, lorsqu'il est capable de les accomplir plus efficacement que l'État.
Ce n'est là qu'un début ; le " feu roulant " des SMR contraindra tous les ministères à faire cet examen vérité. La force de cette démarche réside dans l'obligation annuelle de faire des réformes jugées sur leurs résultats.
Ensuite, nous sommes amenés à effectuer des réformes de processus. Quelques exemples : la mise en place de l'immatriculation à vie des véhicules libérera 600 emplois d'ici à 2007 ; l'informatisation du " Journal officiel " permettra de dégager 200 emplois. Autre exemple : jusqu'à présent, les prestations familiales des fonctionnaires n'étaient pas gérées par les CAF, mais par l'État ; en corrigeant cette anomalie, 600 emplois seront libérés. Corriger une aberration organisationnelle, c'est chaque fois servir l'usager contribuable.
Il faut ajouter à ces modernisations attendues depuis longtemps la réforme des achats publics. Il faut savoir en effet que l'État, gros client sur le marché des biens et services, est un acheteur complètement irrationnel : il achète quasiment tout trop cher. L'État est comme une immense cantine qui se fournirait chez un détaillant ! On est assez loin du " bon père de famille " ! Nous avons décidé de faire cesser ce scandale.
Un programme de rationalisation systématique des achats sera lancé dans la plupart des ministères. Qu'il s'agisse des achats de matériels, de fournitures bureautiques, des dépenses logistiques et des dépenses immobilières, nous avons estimé à environ 500 millions d'euros les économies potentielles sur trois ans.
Il convient également de mentionner la mise en place progressive de l'" administration électronique ", grande réforme transversale des administrations. Tout comme les entreprises, qui l'ont fait depuis longtemps, l'État doit en effet profiter des formidables gains de productivité produits par la dématérialisation de la paperasse.
Mais une réforme ne se fait pas en " pilotage automatique " : elle repose en dernière instance sur des hommes, qui engagent leur responsabilité. A cette fin, nous chargeons les secrétaires généraux des ministères de veiller personnellement à la mise en uvre effective des réformes : ils sont les garants de la continuité du processus et de son accomplissement dans le temps. C'est dire si la rémunération au mérite des hauts fonctionnaires s'accorde avec les objectifs des SMR.
Assurément, ce travail est de longue haleine, car il y a autant de réformes que d'administrations. L'erreur jusqu'à présent fut justement de croire qu'il n'y avait qu'une seule réforme de l'État, et que l'on réglerait tout en une fois, par la découverte d'une sorte de " martingale ". En réalité, la déperdition d'argent public s'est glissée partout, trouvant chaque fois des causes différentes. Il faut donc procéder systématiquement, avec patience, et faire valoir les principes de bonne gestion.
C'est ainsi, par l'adoption d'une logique interne d'optimisation des coûts et des organisations, par une attention permanente à l'efficience de l'euro dépensé, par la réflexion sur l'efficacité des services, que l'État, de manière réelle, chiffrable, factuelle, et sans grand discours programmatique, doit retrouver la capacité d'investir et de préparer l'avenir.
(Source http://www.u-m-p.org, le 15 septembre 2004)
Comment ? En lui faisant faire un exercice salutaire, continu, qui va modifier ses habitudes : veiller de manière permanente au rapport qualité-prix des services. Autrement dit : faire en sorte que l'État ait constamment le souci du meilleur coût dans l'exercice de ses missions. Cela implique de ne plus raisonner en termes de moyens, mais d'objectifs et de résultats. De veiller constamment à la performance des organisations et des processus, de mesurer l'efficacité des services et la satisfaction des usagers.
Autant de petites révolutions ! A cette fin, une sorte de " mouvement perpétuel " est nécessaire. Nous voulons convaincre les administrations de passer de " l'esprit Mikado " : " Le premier qui bouge a perdu ", à " l'esprit bicyclette " : " Pour ne pas tomber, il ne faut pas s'arrêter de pédaler. " C'est tout le sens des stratégies ministérielles de réforme (SMR) que nous soumettons aujourd'hui à l'examen d'un comité d'experts indépendants, présidé par Francis Mer. Ce procédé de réforme part d'un principe simple : chaque ministre s'engage sur un programme de réorganisation de son administration, qui en améliore l'efficacité, de manière chiffrée et datée. La bonne méthode ne consiste pas à faire une coupe claire de temps en temps, pour dégager un peu d'argent, mais à repenser vraiment l'organisation de l'État, pour que le gain soit structurel, et non occasionnel.
Ce premier programme de réformes tous azimuts, qui comprend 225 mesures, dégagera, à l'horizon 2007, 1,5 milliards d'euros au minimum et près de 10.000 emplois - ce qui représente un gain de productivité de 1,4 % sur trois ans. Répétée chaque année, cette démarche est progressive, et va monter en puissance.
Notre objectif final est clair : 1,5 % de productivité en plus tous les ans, comme dans toutes les entreprises de services. Cette référence à l'entreprise ne doit pas heurter : il n'y a en effet aucune raison pour que l'efficacité propre à la gestion d'entreprise ne soit pas mise au service du bien public et des objectifs de l'État.
L'État coûte cher parce qu'il a multiplié les structures qui font double emploi ; parce qu'il a institutionnalisé des dépenses inutiles ; parce qu'il n'a pas été construit pour s'inquiéter du gaspillage ; parce que son organisation est telle qu'il se charge de nombreuses tâches qui ne sont pas de son ressort (au détriment de ses missions essentielles) ; parce qu'il ne prend pas la peine de motiver ses équipes, de récompenser les plus méritants, de repérer les bonnes pratiques, d'évaluer et de sélectionner les procédures les plus efficaces, enfin parce qu'il s'est trop longtemps isolé du mouvement de modernisation technologique qui a bouleversé la société. De ce diagnostic découlent une multitude de réformes, fourmillantes et nécessaires.
D'abord, des réformes de structures qui procèdent par fusions ou suppressions : en 2005, nous commencerons la réduction du nombre d'administrations centrales. Elles seront réduites de moitié au ministère de l'Équipement, le ministère des Finances en fusionnera trois et celui de l'Agriculture réorganisera ses offices agricoles. Par ailleurs, certaines missions techniques seront confiées au secteur privé, lorsqu'il est capable de les accomplir plus efficacement que l'État.
Ce n'est là qu'un début ; le " feu roulant " des SMR contraindra tous les ministères à faire cet examen vérité. La force de cette démarche réside dans l'obligation annuelle de faire des réformes jugées sur leurs résultats.
Ensuite, nous sommes amenés à effectuer des réformes de processus. Quelques exemples : la mise en place de l'immatriculation à vie des véhicules libérera 600 emplois d'ici à 2007 ; l'informatisation du " Journal officiel " permettra de dégager 200 emplois. Autre exemple : jusqu'à présent, les prestations familiales des fonctionnaires n'étaient pas gérées par les CAF, mais par l'État ; en corrigeant cette anomalie, 600 emplois seront libérés. Corriger une aberration organisationnelle, c'est chaque fois servir l'usager contribuable.
Il faut ajouter à ces modernisations attendues depuis longtemps la réforme des achats publics. Il faut savoir en effet que l'État, gros client sur le marché des biens et services, est un acheteur complètement irrationnel : il achète quasiment tout trop cher. L'État est comme une immense cantine qui se fournirait chez un détaillant ! On est assez loin du " bon père de famille " ! Nous avons décidé de faire cesser ce scandale.
Un programme de rationalisation systématique des achats sera lancé dans la plupart des ministères. Qu'il s'agisse des achats de matériels, de fournitures bureautiques, des dépenses logistiques et des dépenses immobilières, nous avons estimé à environ 500 millions d'euros les économies potentielles sur trois ans.
Il convient également de mentionner la mise en place progressive de l'" administration électronique ", grande réforme transversale des administrations. Tout comme les entreprises, qui l'ont fait depuis longtemps, l'État doit en effet profiter des formidables gains de productivité produits par la dématérialisation de la paperasse.
Mais une réforme ne se fait pas en " pilotage automatique " : elle repose en dernière instance sur des hommes, qui engagent leur responsabilité. A cette fin, nous chargeons les secrétaires généraux des ministères de veiller personnellement à la mise en uvre effective des réformes : ils sont les garants de la continuité du processus et de son accomplissement dans le temps. C'est dire si la rémunération au mérite des hauts fonctionnaires s'accorde avec les objectifs des SMR.
Assurément, ce travail est de longue haleine, car il y a autant de réformes que d'administrations. L'erreur jusqu'à présent fut justement de croire qu'il n'y avait qu'une seule réforme de l'État, et que l'on réglerait tout en une fois, par la découverte d'une sorte de " martingale ". En réalité, la déperdition d'argent public s'est glissée partout, trouvant chaque fois des causes différentes. Il faut donc procéder systématiquement, avec patience, et faire valoir les principes de bonne gestion.
C'est ainsi, par l'adoption d'une logique interne d'optimisation des coûts et des organisations, par une attention permanente à l'efficience de l'euro dépensé, par la réflexion sur l'efficacité des services, que l'État, de manière réelle, chiffrable, factuelle, et sans grand discours programmatique, doit retrouver la capacité d'investir et de préparer l'avenir.
(Source http://www.u-m-p.org, le 15 septembre 2004)