Déclaration de Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, sur l'accessiblité numérique pour les personnes handicapées, Paris le 31 janvier 2005.

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Circonstance : Colloque "Politiques et législations en faveur de l'accessibilité numérique en Europe" à Paris le 31 janvier 2005

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je veux vous dire le plaisir et l'honneur d'intervenir en clôture de cette rencontre européenne consacrée à l'accessibilité numérique en Europe.
La Cité des Sciences et de l'Industrie est un lieu magique où la science donne accès à l'ouverture et aux échanges entre les hommes : nul autre n'aurait mieux convenu pour accueillir ainsi une manifestation dédiée à l'innovation, aux sciences et à la technologie au service des hommes, et singulièrement au service des hommes les plus fragiles.
Je veux tout particulièrement remercier son président, Monsieur Jean-François HEBERT, pour l'engagement qui est le sien et celui de son institution en faveur de l'intégration des personnes handicapées dans la société.
Je me réjouis que la coopération qui s'était établie en avril 2003 pour l'organisation d'un premier colloque sur les nouvelles technologies et la question de l'accessibilité prenne aujourd'hui la forme d'un partenariat durable sur ce thème avec l'association BrailleNet et ses partenaires européens.
Je veux saluer l'initiative de Dominique BURGER, président de BrailleNet, et organisateur de cet événement. La question de l'accessibilité numérique est un enjeu particulièrement important pour les personnes handicapées, mais également pour l'Europe et l'ensemble des européens. Aussi était-il important que Claudie HAIGNERE, ministre déléguée aux affaires européennes, par son parrainage, et moi-même par ma présence à vos côtés ce soir, nous y associions.
Internet occupe une place de plus en plus grande dans la vie des Français et de tous les Européens. C'est pourquoi l'accessibilité numérique est un enjeu particulièrement important pour les personnes handicapées. Internet est un prodigieux vecteur d'intégration sociale qui devrait faciliter considérablement l'accès des personnes handicapées tant à des services de la vie quotidienne jusque là encore peu accessibles (banques, commerces...), qu'au monde de l'information et des médias d'où elles sont encore trop souvent exclues. La dématérialisation croissante de nombreuses procédures, dans le domaine des services notamment, exige une attention toute particulière pour éviter la constitution d'un fossé numérique, nouvelle cause de fracture sociale.
C'est pourquoi il était essentiel que le projet de loi relatif à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, que je porte au nom du Gouvernement, et qui sera définitivement adopté par l'Assemblée nationale jeudi prochain, fasse une place explicite à l'accessibilité numérique. L'article 25 précise donc que " les services de communications publiques en ligne des services de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées ".
Cette étape législative vient après une série d'initiatives, qui ont été menées notamment à l'échelle européenne.
Les différentes interventions qui ont eu lieu aujourd'hui ont rappelé que plusieurs pays, comme le Royaume-Uni, l'Allemagne ou l'Italie, ont devancé la France dans l'adoption d'une législation ou d'une réglementation relative à l'accessibilité numérique. L'existence d'une norme forte a déjà été identifiée par les experts comme un élément structurant indispensable à la diffusion de bonnes pratiques.
Outre la réglementation, des actions coordonnées au niveau international ou européen ont favorisé le développement de l'accessibilité numérique. Il s'agit bien sûr du World Wide Web Consortium, le W3C, et de l'initiative WAI riche de recommandations et de projets qu'il a créée en 1997. En Europe, la déclaration de Lisbonne, en avril 2000, et les plans d'action e-Europe 2002 et 2005 ont soutenu ce mouvement. En prenant l'initiative d'une nouvelle consultation publique sur la manière de rendre les produits et services TIC plus accessibles, la Commission européenne vient souligner un peu plus encore l'enjeu de cette question.
Cette étape législative française n'est pas une fin, pas plus ici que dans les autres pays. Elle implique une forte mobilisation et un accompagnement attentif.
Il faut évidemment que l'ensemble des acteurs concernés s'emparent rapidement de ce sujet. Je veux ainsi souligner l'importance de faire connaître les exemples de réussite. Le témoignage de Frédéric DULAC sur le projet conduit par le Grand Châlon, communauté d'agglomération en Saône et Loire, et récemment labellisé pour son respect des recommandations en matière d'accessibilité, est à ce titre essentiel.
Le dispositif d'accompagnement de la loi devra prévoir aussi des plans de formation et des procédures d'appels d'offres, pour changer en profondeur les pratiques habituelles, tant des administrations que des entreprises privées.
Le développement de l'accessibilité numérique est un facteur de fort dynamisme pour nos sociétés européennes, et ce, à deux titres.
En premier lieu, parce qu'il va porter un grand élan d'inclusion. Des sociétés plus unies sont également des sociétés plus fortes.
En France, l'administration électronique se développe grâce au programme Administration électronique 2004-2007, le programme ADELE. S'intéresser dans le même temps à l'accessibilité, c'est permettre aux personnes handicapées d'y participer en devenant les utilisateurs de 200 téléservices publics, 7000 sites internet publics, 90% de formulaires administratifs disponibles en ligne, etc.
Le principe de non-discrimination dans l'emploi, qui est transposé dans le droit français par l'article 9 du projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, impose le développement de l'accessibilité numérique. Soit parce que les procédures de recrutement reposent toujours plus sur Internet, soit parce que celui-ci constitue une solution pour adapter les postes de travail. L'expérience réussie du groupe BNP Paribas, qui a oeuvré en faveur de l'accessibilité de son site de recrutement dès mars 2004, mérite à ce titre d'être mentionnée.
Les nouvelles technologies et Internet en particulier favoriseront enfin plus largement l'accès des personnes handicapées à de nombreux services, comme les services bancaires, grâce au développement de la banque en ligne.
Source de dynamisme, l'accessibilité numérique l'est aussi par le vaste chantier industriel et commercial qu'elle sous-tend.
En terme d'opportunité commerciale, rendre accessible un site web, c'est ouvrir le contenu et les services en ligne d'une entreprise à un marché de 3,2 millions de personnes handicapées, et 12 millions de personnes qui déclarent " au moins une incapacité " en France, plus encore si l'on considère le marché européen.
Sans vouloir poursuivre plus longuement mon propos, je ne peux néanmoins achever sans souligner combien ces investissements majeurs pour l'innovation et la recherche, auxquels les travaux en faveur de l'accessibilité conduisent, sont essentiels pour notre croissance économique.
Pour conclure, je voudrais remercier chacun des intervenants pour leurs contributions. Elles ont permis d'améliorer notre connaissance des bonnes pratiques en faveur de l'accès des personnes handicapées à la société de l'information. Je veux également saluer tous les participants, réunis si nombreux aujourd'hui, qui permettront leur diffusion.
En cette année 2005, placée sous le signe de l'Europe, vos témoignages ont permis de rendre plus tangibles encore l'apport au quotidien de la construction européenne et des échanges qu'elle favorise.

(Source http://www.handicap.gouv.fr, le 9 février 2005)