Texte intégral
Interview de M. Marc-Philippe Daubresse sur France Info le 8 décembre 2004 :
Olivier de Lagarde.- Le plan de cohésion sociale qui a été adopté hier à l'Assemblée nationale prévoit, notamment - on peut même dire que c'est la mesure phare - la construction de 500 000 logement HLM d'ici 2009. Est-ce possible cela, quand on sait que cette année, qui a plutôt été une bonne année, on en a construit que 45 000 ?
Marc-Philippe Daubresse.- " C'est vous qui le dites. Attendez que les chiffres de l'année 2004 soient sortis ; nous les aurons début 2005. Je ne pense pas que c'est le chiffre que vous indiquez qui va être au rendez-vous. Nous sommes en train de réussir notre pari ; nous avons plus de 50 % de logement en plus qui seront construits cette année par rapport au creux de vague qui a été constaté sous le gouvernement Jospin, parce que l'on en avait construit 40 000 là où il en fallait 80 000. Il faut rattraper le retard. Mais ce n'est pas la mesure phare, puisque nous sommes dans une grave crise de l'immobilier - vous le voyez bien : partout en France, les prix flambent. Il faut s'attaquer à l'offre ; on n'a pas assez d'offres de logement. Nous le faisons dans le locatif social, nous le faisons avec les mêmes moyens dans le locatif privé en remettant des logements vacants sur le marché et nous le faisons aussi en lançant, en "boostant", comme on dit, l'accession sociale à la propriété ".
- On va y revenir. Mais revenons sur les HLM : comment allez-vous financer ces constructions ?
" A moins que l'Assemblée nationale soit une assemblée virtuelle, hier, nous avons eu un vote des députés qui adopte une loi de programmation financière qui garantit ligne par ligne, année après année et budget par budget le financement sur les cinq ans et le président de l'Union sociale pour l'habitat, monsieur Delebarre, qui, à ma connaissance n'est pas UMP, dit lui-même que les moyens financiers sont au rendez-vous ".
- Autre mesure qui s'adresse, elle, plus particulièrement aux foyers modestes qui pourraient acheter un logement, c'est relancer le prêt à taux zéro.
" Le prêt à taux zéro, les Français le connaissent. Un sondage vient de sortir, les trois quarts des Français savent ce que cela veut dire : cela veut dire un prêt sans apport personnel dans une situation de crise du logement où on donne un coup de main. Il sera plus social, puisque l'on va augmenter l'aide de l'Etat de 12 % pour l'ensemble des foyers concernés - ce sont les premiers accédants, les primo accédants, donc les jeunes couples. Et puis ceux qui sont dans le parc locatif qui sont concernés. Il y en a 100 000 qui sont aidés par l'Etat, aujourd'hui ; notre objectif, c'est de passer à 240 000 en étant plus social, comme je viens de le dire mais aussi plus familial - les ménages à 2 ou 3 enfants seront plus aidés - et en étant ouvert sur l'ancien, ce qui est une révolution. Nous allons donner des aides dans le logement ancien, puisque la crise, vous le savez bien, elle est au centre des agglomérations, au centre de Paris et dans les grandes villes ".
- Justement, parlons-en : on a parlé du HLM, des foyers modestes, mais aujourd'hui, même les classes moyennes voire supérieures, n'arrivent plus à se loger dans le centre des grandes villes. Pouvez-vous, vous, agir sur le marché ?
" Le prêt à taux zéro concerne les personnes qui gagnent jusqu'à 4,4 Smic en province et un peu plus à Paris. Donc, cela concerne bien et les personnes modestes et les classes moyennes. Je relance aussi dans la construction des logements sociaux, je mets beaucoup d'argent évidemment sur les classes modestes qui sont en pleine crise, mais nous le mettons aussi sur les classes moyennes, puisque les prêts locatifs sociaux que nous avons doublés cette année s'adresse à des personnes qui gagnent entre 1 et 3 Smic ".
- Vous avez sans doute écouté J.-L. Borloo sur France 3 et France Info, hier. C'est curieux : on avait quand même l'impression qu'il a tenu un discours un peu "matignonesque", vous ne trouvez pas ?
" Il a répondu sur cette question. Vous savez, quand vous réparez les causes de la fracture sociale, vous êtes obligé de toucher à tout - c'est ce que je fais dans la politique de la ville -, à la réussite éducative, à l'argent des communes en grande difficulté... Nous faisons une réforme considérable pour aider les communes en grande difficulté. Vous touchez également à l'emploi, évidemment, qui est de notre compétence, et donc, J.-L. Borloo essaie de mettre le paquet là où il y a un risque d'implosion sociale. Pour autant, quand quelqu'un fait bien son travail quelque part, la première des choses à faire, c'est de le laisser faire son travail ".
- Vous trouvez que ce serait un bon Premier ministre ?
" Je trouve que J.-L. Borloo a une vision du pays et qu'il consacre toute son énergie à la cohésion sociale. Nous sommes en train de réussir le pari, laissez-nous souffler un petit peu ".
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 10 décembre 2004)
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Interview de M. Marc-Philippe Daubresse, sur France 2 le 20 décembre 2004 :
Gérard Leclerc .- Le logement est l'une des premières préoccupations des Français. On estime qu'il y a environ 3 millions de Français mal logés et, parmi eux, il y en a quelques dizaines de milliers qui n'ont pas de logement du tout, les sans-abri. Est-ce que tous les dispositifs d'urgence sont prêts ? Et surtout, est-ce que vous réfléchissez à une solution plus définitive : leur trouver un logement ?
Marc-Philippe Daubresse .- " Oui, il y a urgence. On sait qu'un "Plan hiver" tout à fait important, avec ma collègue N. Olin, est prêt. Et nous avons pris tous les dispositifs nécessaires. En plus, nous avons exigé qu'il n'y ait plus de coupures d'électricité pendant cette période d'hiver. Donc tous les dispositifs sont pris. Pour autant, il faut aller au fond du problème. Et le fond du problème, c'est d'augmenter la capacité de l'hébergement d'urgence - ce que nous faisons dans le plan Borloo. Et en plus, nous allons signer demain une très importante convention avec le président des HLM de France, M. Delebarre, à la fois pour construire nos 500 000 logements sociaux dont on a besoin, mais aussi pour que les personnes qui sont dans les dispositifs d'urgence puissent aller dans le logement social, ce qui va libérer autant de places pour les sans-abri ".
- Justement, le logement social, on en construisait en gros, jusqu'à ces tous derniers temps, environ 40 000 à 50 000 par an, et il en faudrait 100 000. Est-ce que l'on va pouvoir atteindre cet objectif rapidement ?
" La crise date des années 1998-1999, où l'on construisait 40 000 logements sociaux quand il en fallait 80 000... "
- Cela ne s'est pas beaucoup amélioré depuis, on est toujours autour de 50 000...
" On allait dans le mur à l'époque. Moi, j'ai klaxonné à l'époque. Mais aujourd'hui, il faut faire le rattrapage. Demain, nous signons donc cette convention : 500 000 logements sociaux. La crise du logement social est une crise de l'offre. Jamais l'immobilier n'a été aussi florissant en France depuis vingt ans, et pourtant, jamais la crise du logement n'a été aussi forte dans le logement social. Cela se joue à quitte ou double : on double le nombre de logements sociaux que l'on va construire, on double dans le parc privé également le nombre de logements vacants que l'on va remettre sur le marché et on double l'accession à la propriété ".
- Tout cela, ce sont des objectifs et des bonnes intentions, mais avez-vous les moyens de votre politique ? On a vu que le budget du logement, en 2004, avait baissé par rapport à 2003.
" Mais vous l'avez regardé en 2005. Le budget du logement en 2004, du temps de G. de Robien, a baissé parce que les taux d'intérêt avaient baissé, ce qui fait un équivalent de subventions du logement d'à peu près 7 %. Cette année, le budget du logement augmente de 8,3 %. En fait, nous avons les moyens financiers. Cela fait trois mois que j'entends "les moyens, les moyens, les moyens !" : ils viennent d'être votés dans la loi de programmation de cohésion sociale ".
- Vous avez donc les moyens pour construire effectivement les 100 000 logements sociaux par an dans les prochaines années ?
" Nous avons les moyens financiers, J.-L. Borloo les a obtenus. Mais pour autant, nous avons un gros problème, qui s'appelle le foncier, c'est-à-dire les terrains disponibles. Et je suis donc en train de préparer une loi qui va s'appeler "habitat pour tous", qui passera avant l'été de l'année prochaine, pour que l'on puisse mobiliser nos moyens sur le foncier ".
- Il y a un autre problème : ce sont tout simplement les villes qui ne le font pas, c'est-à-dire qui ne construisent pas les logements sociaux qu'elles devraient construire. N'est-il pas possible d'envisager des moyens coercitifs pour les obliger à le faire ?
" Dans la loi "habitat pour tous", nous ouvrons ce débat difficile. Nous maintiendrons les 20 % de logements sociaux exigés dans toutes les villes de plus 3.500 habitants... "
- Qui ne sont souvent pas respectés...
" La loi est respectée, c'est-à-dire que certaines villes paient une amende. "
- Mais elles préfèrent payer plutôt que de le faire...
" En gros, vous avez des maires, très minoritaires, qui se moquent du monde. Il faut des moyens coercitifs, vous avez raison, plus coercitifs qu'aujourd'hui. Et puis vous avez des maires bâtisseurs qui voudraient bien, mais que l'on n'aide pas assez : il faut donc des moyens incitatifs, qui seront dans la loi "habitat pour tous". "
- Autre sujet, il y a également l'accession à la propriété, cette fois-ci pas seulement pour le logement social. Vous avez élargi le prêt à taux zéro. Mais n'est-ce pas là aussi un peu un chèque en blanc sur l'avenir, c'est-à-dire que cela va coûter de l'argent dans les années à venir ? Est-ce que l'Etat pourra payer ?
" Le prêt à taux zéro était une subvention budgétaire qui était répartie sur deux ans. On fait un crédit d'impôts sur cinq ans, donc cela ne change pas grand-chose pour le carburant qui alimente ce prêt. La grande réforme, c'est que ce prêt est ouvert à l'ancien. La crise est dans le logement ancien dans les centres-villes et dans la région parisienne. Et l'autre grande réforme, c'est qu'il est plus social - plus 12 % - et plus familial - on tient compte de la taille des ménages. Nous allons passer, dans nos objectifs, de moins de 100.000 personnes qui vont, pour la première fois accéder à la propriété aidée, à 240 000 personnes. Sur les 300 000 qui se présentent sur le marché chaque année, nous allons donc pouvoir aider 80 % des primo accédants de France : c'est une réforme considérable ".
- A propos du droit au logement, les associations réclament que ce droit au logement soit opposable, c'est-à-dire que ceux qui n'ont pas de logement puissent se retourner contre le préfet, contre l'Etat, contre la ville... Cela vous paraît-il une bonne idée ?
" Un droit au logement opposable, cela se construit. Il ne faut pas faire des pétitions de principe. Le droit à l'emploi est bien dans la Constitution, mais on voit bien les difficultés de donner un emploi pour chacun, même si le plan Borloo va amener beaucoup de choses là dessus. Pour un droit au logement opposable, il faut d'abord définir une offre de logement supplémentaire - c'est bien mon plan, qui vise à doubler dans tous les domaines l'offre de logement aussi bien dans l'accession que dans le locatif public et privé. Une fois que vous aurez cette offre, il faut que vous ayez une autorité contre qui vous retournez : on voit bien que c'est plutôt les agglomérations qui peuvent être cette autorité. Et puis il faut que vous ayez des mécanismes de médiation, que je vais mettre - ce sera une première marche de ce droit - dans la loi "habitat pour tous". "
- Dans vos attributions, vous avez également la politique de la ville. On se souvient que M. Borloo avait annoncé de grandes mesures pour détruire toutes les barres, les tours dans les quartiers en difficulté. Où en est-on ?
" Ce plan Marshall des banlieues est quelque chose de gigantesque. On va passer - la loi de cohésion sociale nous le permet désormais - de 30 milliards d'euros prévus sur cinq ans à 40 milliards d'euros prévus sur huit ans, de démolition/reconstruction pour métamorphoser les quartiers des villes... "
- Mais concrètement, combien de logements cela représente-t-il ?
" Cela représente 250.000 démolitions à peu près ou un peu moins, cela dépendra des secteurs de France et on laissera les maires nous dire ce qu'il faut faire là-dessus. Et l'équivalent de reconstruction ou de réhabilitation de logements. Nous allons donc toucher beaucoup de quartiers. A la fin de cette année, nous sommes à 100 quartiers qui auront été agrées par l'Agence de la rénovation urbaine. Cela représente 7 milliards d'euros. On disait du Plan Borloo qu'il n'y aurait pas les moyens. Eh bien, si, ils y sont ! La preuve : à la fin de cette année, nous avons engagé 7 milliards d'euros pour ce plan ".
- Vous savez qu'il y a quand même une critique : on dit que démolir et reconstruire c'est bien, mais la politique de la ville, c'est beaucoup plus large que cela : c'est également, dans les quartiers en difficulté, la politique scolaire, la santé, l'emploi, le développement économique...
" J'ai été rapporteur du budget de la Ville du temps de la gauche. Et j'ai constaté que l'on faisait de l'arrosage, c'est-à-dire que l'on donnait un cachet d'aspirine dans des quartiers où il fallait faire une thérapie de choc... "
- Mais aujourd'hui, les associations se plaignent et disent qu'elles n'ont plus les moyens...
" Avec le Plan de cohésion sociale que nous avons mis en place, nous agissons sur tous les outils structurants : sur l'éducation, sur l'emploi - puisque l'on a 80 000 emplois dans les zones franches urbaines... Pour aider les villes en difficulté, on vient de faire une réforme qui ont les charges sociales les plus lourdes, qui vont avoir jusqu'à 300 % d'augmentation de leurs dotations. On a une politique qui est aujourd'hui structurée et qui nous permet de faire une vraie politique de la ville. Par exemple, les équipes de réussite éducative : en 2005, ce seront 62 millions d'euros qui vont se faire autour de l'école, pour traiter les problèmes dès la petite enfance, et en 2006 et 2007, 400 millions d'euros. Ce ne sont pas des petites sommes, c'est un vrai plan structurel ".
- Etes-vous avec J. Chirac, pour une adhésion de la Turquie au terme de négociations ? Ou avec le président de l'UMP, N. Sarkozy, pour un partenariat privilégié ?
" Je suis centriste, donc j'ai toujours été très européen. Il ne faut pas que l'Europe dérape sur la flaque d'huile de la Turquie. En fait, on ne parle pas assez de la Constitution. Dans la Constitution européenne, où il faut voter "oui", vous aurez les moyens de traiter ce genre de problèmes. Et comme l'a dit le président de la République, ce sont les Français qui auront le dernier mot sur cette question. "
- Vous êtes vice-président de la Communauté urbaine de Lille. La mairie vous intéresse-t-elle ?
" La Communauté urbaine de Lille est prenable. J'attends que P. Mauroy s'en aille - parce que c'est un grand monsieur - mais quand il sera parti, je serai candidat à cette présidence ".
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 décembre 2004)
Olivier de Lagarde.- Le plan de cohésion sociale qui a été adopté hier à l'Assemblée nationale prévoit, notamment - on peut même dire que c'est la mesure phare - la construction de 500 000 logement HLM d'ici 2009. Est-ce possible cela, quand on sait que cette année, qui a plutôt été une bonne année, on en a construit que 45 000 ?
Marc-Philippe Daubresse.- " C'est vous qui le dites. Attendez que les chiffres de l'année 2004 soient sortis ; nous les aurons début 2005. Je ne pense pas que c'est le chiffre que vous indiquez qui va être au rendez-vous. Nous sommes en train de réussir notre pari ; nous avons plus de 50 % de logement en plus qui seront construits cette année par rapport au creux de vague qui a été constaté sous le gouvernement Jospin, parce que l'on en avait construit 40 000 là où il en fallait 80 000. Il faut rattraper le retard. Mais ce n'est pas la mesure phare, puisque nous sommes dans une grave crise de l'immobilier - vous le voyez bien : partout en France, les prix flambent. Il faut s'attaquer à l'offre ; on n'a pas assez d'offres de logement. Nous le faisons dans le locatif social, nous le faisons avec les mêmes moyens dans le locatif privé en remettant des logements vacants sur le marché et nous le faisons aussi en lançant, en "boostant", comme on dit, l'accession sociale à la propriété ".
- On va y revenir. Mais revenons sur les HLM : comment allez-vous financer ces constructions ?
" A moins que l'Assemblée nationale soit une assemblée virtuelle, hier, nous avons eu un vote des députés qui adopte une loi de programmation financière qui garantit ligne par ligne, année après année et budget par budget le financement sur les cinq ans et le président de l'Union sociale pour l'habitat, monsieur Delebarre, qui, à ma connaissance n'est pas UMP, dit lui-même que les moyens financiers sont au rendez-vous ".
- Autre mesure qui s'adresse, elle, plus particulièrement aux foyers modestes qui pourraient acheter un logement, c'est relancer le prêt à taux zéro.
" Le prêt à taux zéro, les Français le connaissent. Un sondage vient de sortir, les trois quarts des Français savent ce que cela veut dire : cela veut dire un prêt sans apport personnel dans une situation de crise du logement où on donne un coup de main. Il sera plus social, puisque l'on va augmenter l'aide de l'Etat de 12 % pour l'ensemble des foyers concernés - ce sont les premiers accédants, les primo accédants, donc les jeunes couples. Et puis ceux qui sont dans le parc locatif qui sont concernés. Il y en a 100 000 qui sont aidés par l'Etat, aujourd'hui ; notre objectif, c'est de passer à 240 000 en étant plus social, comme je viens de le dire mais aussi plus familial - les ménages à 2 ou 3 enfants seront plus aidés - et en étant ouvert sur l'ancien, ce qui est une révolution. Nous allons donner des aides dans le logement ancien, puisque la crise, vous le savez bien, elle est au centre des agglomérations, au centre de Paris et dans les grandes villes ".
- Justement, parlons-en : on a parlé du HLM, des foyers modestes, mais aujourd'hui, même les classes moyennes voire supérieures, n'arrivent plus à se loger dans le centre des grandes villes. Pouvez-vous, vous, agir sur le marché ?
" Le prêt à taux zéro concerne les personnes qui gagnent jusqu'à 4,4 Smic en province et un peu plus à Paris. Donc, cela concerne bien et les personnes modestes et les classes moyennes. Je relance aussi dans la construction des logements sociaux, je mets beaucoup d'argent évidemment sur les classes modestes qui sont en pleine crise, mais nous le mettons aussi sur les classes moyennes, puisque les prêts locatifs sociaux que nous avons doublés cette année s'adresse à des personnes qui gagnent entre 1 et 3 Smic ".
- Vous avez sans doute écouté J.-L. Borloo sur France 3 et France Info, hier. C'est curieux : on avait quand même l'impression qu'il a tenu un discours un peu "matignonesque", vous ne trouvez pas ?
" Il a répondu sur cette question. Vous savez, quand vous réparez les causes de la fracture sociale, vous êtes obligé de toucher à tout - c'est ce que je fais dans la politique de la ville -, à la réussite éducative, à l'argent des communes en grande difficulté... Nous faisons une réforme considérable pour aider les communes en grande difficulté. Vous touchez également à l'emploi, évidemment, qui est de notre compétence, et donc, J.-L. Borloo essaie de mettre le paquet là où il y a un risque d'implosion sociale. Pour autant, quand quelqu'un fait bien son travail quelque part, la première des choses à faire, c'est de le laisser faire son travail ".
- Vous trouvez que ce serait un bon Premier ministre ?
" Je trouve que J.-L. Borloo a une vision du pays et qu'il consacre toute son énergie à la cohésion sociale. Nous sommes en train de réussir le pari, laissez-nous souffler un petit peu ".
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 10 décembre 2004)
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Interview de M. Marc-Philippe Daubresse, sur France 2 le 20 décembre 2004 :
Gérard Leclerc .- Le logement est l'une des premières préoccupations des Français. On estime qu'il y a environ 3 millions de Français mal logés et, parmi eux, il y en a quelques dizaines de milliers qui n'ont pas de logement du tout, les sans-abri. Est-ce que tous les dispositifs d'urgence sont prêts ? Et surtout, est-ce que vous réfléchissez à une solution plus définitive : leur trouver un logement ?
Marc-Philippe Daubresse .- " Oui, il y a urgence. On sait qu'un "Plan hiver" tout à fait important, avec ma collègue N. Olin, est prêt. Et nous avons pris tous les dispositifs nécessaires. En plus, nous avons exigé qu'il n'y ait plus de coupures d'électricité pendant cette période d'hiver. Donc tous les dispositifs sont pris. Pour autant, il faut aller au fond du problème. Et le fond du problème, c'est d'augmenter la capacité de l'hébergement d'urgence - ce que nous faisons dans le plan Borloo. Et en plus, nous allons signer demain une très importante convention avec le président des HLM de France, M. Delebarre, à la fois pour construire nos 500 000 logements sociaux dont on a besoin, mais aussi pour que les personnes qui sont dans les dispositifs d'urgence puissent aller dans le logement social, ce qui va libérer autant de places pour les sans-abri ".
- Justement, le logement social, on en construisait en gros, jusqu'à ces tous derniers temps, environ 40 000 à 50 000 par an, et il en faudrait 100 000. Est-ce que l'on va pouvoir atteindre cet objectif rapidement ?
" La crise date des années 1998-1999, où l'on construisait 40 000 logements sociaux quand il en fallait 80 000... "
- Cela ne s'est pas beaucoup amélioré depuis, on est toujours autour de 50 000...
" On allait dans le mur à l'époque. Moi, j'ai klaxonné à l'époque. Mais aujourd'hui, il faut faire le rattrapage. Demain, nous signons donc cette convention : 500 000 logements sociaux. La crise du logement social est une crise de l'offre. Jamais l'immobilier n'a été aussi florissant en France depuis vingt ans, et pourtant, jamais la crise du logement n'a été aussi forte dans le logement social. Cela se joue à quitte ou double : on double le nombre de logements sociaux que l'on va construire, on double dans le parc privé également le nombre de logements vacants que l'on va remettre sur le marché et on double l'accession à la propriété ".
- Tout cela, ce sont des objectifs et des bonnes intentions, mais avez-vous les moyens de votre politique ? On a vu que le budget du logement, en 2004, avait baissé par rapport à 2003.
" Mais vous l'avez regardé en 2005. Le budget du logement en 2004, du temps de G. de Robien, a baissé parce que les taux d'intérêt avaient baissé, ce qui fait un équivalent de subventions du logement d'à peu près 7 %. Cette année, le budget du logement augmente de 8,3 %. En fait, nous avons les moyens financiers. Cela fait trois mois que j'entends "les moyens, les moyens, les moyens !" : ils viennent d'être votés dans la loi de programmation de cohésion sociale ".
- Vous avez donc les moyens pour construire effectivement les 100 000 logements sociaux par an dans les prochaines années ?
" Nous avons les moyens financiers, J.-L. Borloo les a obtenus. Mais pour autant, nous avons un gros problème, qui s'appelle le foncier, c'est-à-dire les terrains disponibles. Et je suis donc en train de préparer une loi qui va s'appeler "habitat pour tous", qui passera avant l'été de l'année prochaine, pour que l'on puisse mobiliser nos moyens sur le foncier ".
- Il y a un autre problème : ce sont tout simplement les villes qui ne le font pas, c'est-à-dire qui ne construisent pas les logements sociaux qu'elles devraient construire. N'est-il pas possible d'envisager des moyens coercitifs pour les obliger à le faire ?
" Dans la loi "habitat pour tous", nous ouvrons ce débat difficile. Nous maintiendrons les 20 % de logements sociaux exigés dans toutes les villes de plus 3.500 habitants... "
- Qui ne sont souvent pas respectés...
" La loi est respectée, c'est-à-dire que certaines villes paient une amende. "
- Mais elles préfèrent payer plutôt que de le faire...
" En gros, vous avez des maires, très minoritaires, qui se moquent du monde. Il faut des moyens coercitifs, vous avez raison, plus coercitifs qu'aujourd'hui. Et puis vous avez des maires bâtisseurs qui voudraient bien, mais que l'on n'aide pas assez : il faut donc des moyens incitatifs, qui seront dans la loi "habitat pour tous". "
- Autre sujet, il y a également l'accession à la propriété, cette fois-ci pas seulement pour le logement social. Vous avez élargi le prêt à taux zéro. Mais n'est-ce pas là aussi un peu un chèque en blanc sur l'avenir, c'est-à-dire que cela va coûter de l'argent dans les années à venir ? Est-ce que l'Etat pourra payer ?
" Le prêt à taux zéro était une subvention budgétaire qui était répartie sur deux ans. On fait un crédit d'impôts sur cinq ans, donc cela ne change pas grand-chose pour le carburant qui alimente ce prêt. La grande réforme, c'est que ce prêt est ouvert à l'ancien. La crise est dans le logement ancien dans les centres-villes et dans la région parisienne. Et l'autre grande réforme, c'est qu'il est plus social - plus 12 % - et plus familial - on tient compte de la taille des ménages. Nous allons passer, dans nos objectifs, de moins de 100.000 personnes qui vont, pour la première fois accéder à la propriété aidée, à 240 000 personnes. Sur les 300 000 qui se présentent sur le marché chaque année, nous allons donc pouvoir aider 80 % des primo accédants de France : c'est une réforme considérable ".
- A propos du droit au logement, les associations réclament que ce droit au logement soit opposable, c'est-à-dire que ceux qui n'ont pas de logement puissent se retourner contre le préfet, contre l'Etat, contre la ville... Cela vous paraît-il une bonne idée ?
" Un droit au logement opposable, cela se construit. Il ne faut pas faire des pétitions de principe. Le droit à l'emploi est bien dans la Constitution, mais on voit bien les difficultés de donner un emploi pour chacun, même si le plan Borloo va amener beaucoup de choses là dessus. Pour un droit au logement opposable, il faut d'abord définir une offre de logement supplémentaire - c'est bien mon plan, qui vise à doubler dans tous les domaines l'offre de logement aussi bien dans l'accession que dans le locatif public et privé. Une fois que vous aurez cette offre, il faut que vous ayez une autorité contre qui vous retournez : on voit bien que c'est plutôt les agglomérations qui peuvent être cette autorité. Et puis il faut que vous ayez des mécanismes de médiation, que je vais mettre - ce sera une première marche de ce droit - dans la loi "habitat pour tous". "
- Dans vos attributions, vous avez également la politique de la ville. On se souvient que M. Borloo avait annoncé de grandes mesures pour détruire toutes les barres, les tours dans les quartiers en difficulté. Où en est-on ?
" Ce plan Marshall des banlieues est quelque chose de gigantesque. On va passer - la loi de cohésion sociale nous le permet désormais - de 30 milliards d'euros prévus sur cinq ans à 40 milliards d'euros prévus sur huit ans, de démolition/reconstruction pour métamorphoser les quartiers des villes... "
- Mais concrètement, combien de logements cela représente-t-il ?
" Cela représente 250.000 démolitions à peu près ou un peu moins, cela dépendra des secteurs de France et on laissera les maires nous dire ce qu'il faut faire là-dessus. Et l'équivalent de reconstruction ou de réhabilitation de logements. Nous allons donc toucher beaucoup de quartiers. A la fin de cette année, nous sommes à 100 quartiers qui auront été agrées par l'Agence de la rénovation urbaine. Cela représente 7 milliards d'euros. On disait du Plan Borloo qu'il n'y aurait pas les moyens. Eh bien, si, ils y sont ! La preuve : à la fin de cette année, nous avons engagé 7 milliards d'euros pour ce plan ".
- Vous savez qu'il y a quand même une critique : on dit que démolir et reconstruire c'est bien, mais la politique de la ville, c'est beaucoup plus large que cela : c'est également, dans les quartiers en difficulté, la politique scolaire, la santé, l'emploi, le développement économique...
" J'ai été rapporteur du budget de la Ville du temps de la gauche. Et j'ai constaté que l'on faisait de l'arrosage, c'est-à-dire que l'on donnait un cachet d'aspirine dans des quartiers où il fallait faire une thérapie de choc... "
- Mais aujourd'hui, les associations se plaignent et disent qu'elles n'ont plus les moyens...
" Avec le Plan de cohésion sociale que nous avons mis en place, nous agissons sur tous les outils structurants : sur l'éducation, sur l'emploi - puisque l'on a 80 000 emplois dans les zones franches urbaines... Pour aider les villes en difficulté, on vient de faire une réforme qui ont les charges sociales les plus lourdes, qui vont avoir jusqu'à 300 % d'augmentation de leurs dotations. On a une politique qui est aujourd'hui structurée et qui nous permet de faire une vraie politique de la ville. Par exemple, les équipes de réussite éducative : en 2005, ce seront 62 millions d'euros qui vont se faire autour de l'école, pour traiter les problèmes dès la petite enfance, et en 2006 et 2007, 400 millions d'euros. Ce ne sont pas des petites sommes, c'est un vrai plan structurel ".
- Etes-vous avec J. Chirac, pour une adhésion de la Turquie au terme de négociations ? Ou avec le président de l'UMP, N. Sarkozy, pour un partenariat privilégié ?
" Je suis centriste, donc j'ai toujours été très européen. Il ne faut pas que l'Europe dérape sur la flaque d'huile de la Turquie. En fait, on ne parle pas assez de la Constitution. Dans la Constitution européenne, où il faut voter "oui", vous aurez les moyens de traiter ce genre de problèmes. Et comme l'a dit le président de la République, ce sont les Français qui auront le dernier mot sur cette question. "
- Vous êtes vice-président de la Communauté urbaine de Lille. La mairie vous intéresse-t-elle ?
" La Communauté urbaine de Lille est prenable. J'attends que P. Mauroy s'en aille - parce que c'est un grand monsieur - mais quand il sera parti, je serai candidat à cette présidence ".
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 décembre 2004)