Conférence de presse de M. Michel Barnier, ministre des affaires étrangères, sur le bilan de la conférence intergouvernementale de Charm el-Cheikh consacrée à la relance du processus politique en Irak, Charm el-Cheikh le 23 novembre 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Conférence intergouvernementale de Charm el-Cheikh (Egypte) sur l'Irak les 22 et 23 novembre 2004 : conférence de presse de Michel Barnier à l'issue de la réunion le 23

Texte intégral

Mesdames, Messieurs, merci de votre présence nombreuse et de votre attention.
Cette conférence de Charm el-Cheikh est pour nous un moment important, parce que c'est, en réalité, la première fois que tout le monde est présent, s'agissant de cette tragédie irakienne, et en particulier tous les pays riverains de l'Irak qui sont, avec les Irakiens, les premiers concernés par ce qui se passe en Irak et la stabilité ou l'instabilité de ce grand pays. D'abord pour cela, et ne serait-ce que pour cela, cette conférence de Charm el-Cheikh était un moment utile.
Dans quel esprit, avec quels objectifs la France a-t-elle préparé cette conférence de Charm el-Cheikh ? Mon état d'esprit, celui de mon pays depuis le début de cette tragédie, est d'être utile, de chercher avec les autres à trouver des solutions pour en sortir. C'est cela notre état d'esprit, sûrement pas de se singulariser ou de s'opposer, mais d'être utile et de chercher des solutions.
La France a des relations anciennes dans cette région du Proche et du Moyen-Orient. Elle a une certaine connaissance des peuples de cette région. Et c'est en particulier vrai du président Jacques Chirac. Nous pensons qu'il faut toujours tenir compte, quand on cherche des solutions, de ces peuples, de leur histoire, de leurs traditions, de leurs sensibilités. Et donc, il faut rechercher des solutions qui correspondent à ce que sont ces peuples et à leurs aspirations.
Nous nous trouvons en Irak dans une situation de chaos extrêmement grave, avec une spirale de violence, d'opérations militaires, des attentats, des enlèvements. Chacun comprendra qu'en évoquant ces enlèvements, j'ai une pensée pour Christian Chesnot et Georges Malbrunot, vos deux confrères. Je veux vous dire que nous continuerons nos efforts avec ténacité et avec patience afin d'obtenir leur libération.
Voilà la situation de l'Irak. Et ce dont nous sommes convaincus, c'est qu'on ne sortira pas de cette situation et de cette tragédie par les armes ni par des opérations militaires. On en sortira par un processus politique et démocratique. C'est cela qui est en cause et c'est cela dont nous avons parlé tous ensemble pour dire, dans cette déclaration, la même chose, tous les pays de la région - dont vous savez que la plupart d'entre eux ont, comme nous-mêmes, marqué leur désaccord avec cette guerre - et puis les autres partenaires de la communauté internationale et notamment les Nations unies. Ce qu'a confirmé la conférence de Charm el-Cheikh, c'est que seul un processus politique et démocratique permettra de sortir ce pays de l'impasse de l'instabilité et de la tragédie dans lesquelles son peuple est actuellement plongé.
Il y a naturellement des conditions à cela. Ce ne sont pas des conditions que la France pose, ce ne sont pas nos conditions, ce sont les conditions auxquelles, à notre avis - et nous ne sommes pas les seuls -, on pourra réussir ce processus politique et démocratique. La première condition était, et reste, que toutes les forces et les communautés de l'Irak s'approprient ce processus politique, qu'elles s'y engagent, qu'elles y soient intégrées. La deuxième condition, c'est que le peuple irakien ait l'horizon de sa souveraineté, qu'il y ait le moment dans l'avenir, l'horizon auquel les forces étrangères, qui sont présentes actuellement en Irak, se retireront, parce que nous pensons que cet horizon est une des conditions pour que tout le monde en Irak s'engage dans le processus politique.
Voilà les deux points que j'avais indiqués au tout début lorsqu'il a été question, pour la première fois, de cette conférence interrégionale. On ne savait pas, à l'époque, que ce serait une Conférence intergouvernementale, une conférence des gouvernements et seulement des gouvernements. On ne savait pas où elle se situerait, et je veux remercier les autorités égyptiennes de l'avoir accueillie ici, dans de bonnes conditions, et remercier la diplomatie égyptienne du travail qu'elle a fait pour réussir cette réunion.
Voilà l'approche de la France depuis le début, depuis la chute du régime de Saddam Hussein. C'est une approche pour être utile, pour être constructif en faveur de la paix et la stabilité. Nous avons eu cette approche, permettez-moi de le rappeler, dans l'élaboration de la résolution 1546, qui a fait l'objet pour la première fois d'un vrai dialogue avec les Etats-Unis, au point que nous avions rédigé cinq versions successives de cette résolution avant de finalement l'approuver à l'unanimité. Et l'une des raisons pour laquelle nous avons approuvé cette résolution est qu'elle a fait l'objet d'un vrai travail, d'un vrai dialogue mais aussi parce qu'elle comportait cet horizon, que j'ai évoqué tout à l'heure, du retrait des troupes étrangères et du retour de l'Irak à la pleine souveraineté et à la pleine maîtrise de son destin.
Nous avons également eu cette approche constructive pour préparer cette Conférence de Charm el-Cheikh. Je pense que cette conférence est une étape dans le processus politique, qui va permettre de le consolider.
Et puis, nous avons eu cette approche constructive très récemment dans le cadre du Club de Paris, que nous présidons, en faisant un effort important, exigeant, d'annulation d'une grande partie de la dette irakienne. C'est un effort finalement logique. Nous avons dit, et je le répète, que la France n'enverra pas, ni aujourd'hui ni demain, de soldats en Irak. J'ai dit, en même temps, que nous serions disponibles, avec les autres pays européens, pour participer à la reconstruction politique et économique de l'Irak, au service et pour le peuple irakien qui a tant souffert et qui souffre tant. Et donc, mettant nos actes en accord avec nos engagements, nous avons décidé, dans un tour de table collectif, de participer de manière ambitieuse et exigeante, avec des étapes et des conditions, à l'annulation progressive de cette dette irakienne.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire. Notre vocation n'est pas d'être spectateurs, comme je l'ai entendu dire une fois. Nous avons voulu, je l'ai dit ce matin devant le ministre irakien et devant l'ensemble des ministres qui participaient à cette réunion : notre vocation est d'être des acteurs de la stabilité et de ce processus politique. Nous sommes venus dans cet état d'esprit et nous avons travaillé dans cet état d'esprit également à la préparation de cette conférence.
J'ajouterai finalement qu'il faudra naturellement vérifier que les bonnes décisions ou les bonnes orientations, qui ont été arrêtées dans cette déclaration finale de Charm el-Cheikh, sont effectivement mises en oeuvre sur le terrain en Irak. Le premier moment de vérité sera l'organisation des élections. Il faut maintenant préparer ces élections. Charm el-Cheikh a proposé un premier cap : ce sont les élections fixées au 30 janvier. Ces élections, si je devais résumer en deux mots ma conviction, sont à la fois, à cette date, difficiles et possibles.
Pour qu'elles soient possibles, malgré ces difficultés, il faut les efforts de tous. Il y a des conditions objectives qui devront être rassemblées pour réussir ce premier moment de vérité. D'abord une condition est qu'il y ait moins de violence, moins d'opérations militaires, davantage de sérénité. Une deuxième condition, c'est que le processus électoral soit impartial et transparent et qu'il puisse réellement concerner tout le territoire irakien. J'ai dit ce matin que nous étions prêts, avec les autres pays européens, à accompagner la bonne organisation de ces élections.
Et puis enfin, je le dis une troisième fois et c'est pour moi la condition de la crédibilité de ces élections, il faut que toutes les forces politiques irakiennes puissent s'y associer. C'est pourquoi l'un des soucis exprimés par la France, par la Russie et par d'autres, concerne cette conférence inter-irakienne qui doit être organisée maintenant en Irak et avant les élections. Elle est précisément prévue, comme nous le souhaitions, dans le communiqué final de Charm el-Cheikh. Il faut qu'elle se déroule de manière sincère, de manière concrète, le plus rapidement possible.
Voilà, je vous ai dit l'essentiel de ce que je pouvais vous dire, je suis prêt à répondre à vos questions.
Q - Il a beaucoup été question, dans cette conférence, de la réunion du Quartet et de la question israélo-palestinienne, est ce que cela vous a semblé utile qu'on en discute ici ?
R - Il n'en a pas été beaucoup question, je serais presque tenté de dire pas assez. Moi-même j'ai évoqué, comme l'a fait le ministre égyptien, comme l'a fait Amr Moussa au nom de la Ligue arabe, le lien entre ces deux conflits, le plus récent dont nous parlons, cette tragédie irakienne et le plus ancien, le conflit israélo-palestinien. Là encore, cette spirale de violences et de sang, qui touche les enfants de Palestine comme les enfants d'Israël, il faut en sortir également par un processus politique.
Donc je trouve assez normal qu'on ait évoqué ces deux conflits, parce qu'ils touchent tous les deux la stabilité de cette région du Proche et du Moyen-Orient et je pense qu'ils ont des liens. Il faut, dans le même élan d'unité internationale, dans le cadre des Nations unies, chercher maintenant à écrire de nouvelles pages pour résoudre ce conflit.
Il y a des conditions également qui permettent aujourd'hui, si nous le voulons, d'écrire ces nouvelles pages : une nouvelle Autorité palestinienne qui continuera l'oeuvre de Yasser Arafat, avec d'autres hommes et d'autres femmes ; il y a l'engagement du Premier ministre Ariel Sharon de se retirer d'un premier territoire occupé, Gaza, et, j'ajoute, de réussir le retrait de Gaza ; il y a la détermination américaine, maintenant que le président Bush a été réélu ; il y a la détermination des autres partenaires, la Russie et les Européens, qui sont unanimes sur cette question et prêts à accompagner le processus politique et la relance de la Feuille de route.
Donc, si vous mettez tout cela ensemble, nous avons les conditions, si on en a la volonté, pour relancer la Feuille de route, avancer d'un même mouvement dans le processus politique de sortie de crise en Irak et réengager un processus politique et de paix entre Israéliens et Palestiniens.
Q - Monsieur le Ministre, j'ai une question concernant la conférence : vous souhaitiez qu'un calendrier de retrait des troupes américaines soit adopté. Etes-vous satisfait du texte de la déclaration finale ? S'agissant du Proche-Orient, êtes vous satisfait des déclarations du président Bush sur la création d'un Etat palestinien avant 2009 ?
R - Nous avons beaucoup insisté pour que, dans cette déclaration finale de Charm el-Cheikh, il soit clairement fait référence à ce qui est écrit dans la résolution 1546, à cet horizon du retrait des troupes étrangères et ce moment, dans la résolution 1546, est fixé à la fin du processus politique en décembre 2005. Je dis cela parce que, lorsque j'ai pour la première fois évoqué cette idée du retrait, que l'on évoque ici à Charm el-Cheikh, un certain nombre d'interlocuteurs ont dit qu'il n'en était pas question. Il en a été question et je pense que c'est une des conditions pour rendre crédible le processus politique. Il faut que les Irakiens sachent qu'à un moment, assez proche, ils redeviendront pleinement maîtres de leur destin et souverains dans leur pays. Donc, nous avons obtenu, de ce point de vue, que soit fait référence à cet horizon là, et je pense que c'est utile.
J'ai dit tout à l'heure, en répondant à votre question, qu'il y avait naturellement un lien entre tous les conflits qui déstabilisent cette région, et je confirme l'engagement de mon pays, comme des pays européens, à cet objectif de la Feuille de route : qu'il y ait deux Etats, l'Etat d'Israël vivant en sécurité, - nous ne transigerons jamais sur la sécurité d'Israël - et un Etat palestinien, lui aussi vivant en sécurité, viable et indépendant et je veux bien ajouter que le plus tôt sera le mieux pour la création de cet Etat palestinien. Je crois que l'on ne doit pas attendre 2009 pour créer cet Etat palestinien et pour offrir, aux jeunes Palestiniens en particulier, concrètement un horizon pour leur futur et pour leur avenir.
Quant au Quartet, il s'est réuni de manière informelle, et c'est déjà bien qu'il se soit réuni. Ce qui m'a été dit de cette réunion, puisque je n'y participais pas personnellement, c'est que tous ceux qui étaient autour de la table, Nations unies, Russie, Union européenne, Etats-Unis, ressentent bien la responsabilité, l'exigence qui est la leur en ce moment de relancer le Processus de paix. J'ai eu ce sentiment.
Q - Monsieur le Ministre, la France avait au début, on l'a senti, une certaine réticence à l'idée de cette conférence. Etes-vous satisfaits du communiqué final et de cette conférence qui a débuté sur une forme d'hégémonie américaine, puisque le gouvernement irakien intérimaire a dit qu'il comptait avec les Etats-Unis, vous croyez qu'il y a eu un consensus important ?
R - Je ne vois pas où vous avez trouvé que nous étions réticents à l'idée d'une conférence, puisque nous l'avions proposée. Nous avions nous-même proposé, mon prédécesseur, il y a maintenant plus d'un an, et les Russes, en même temps, qu'il y ait, à l'horizon de 2004, pour accompagner et consolider une démarche politique plutôt qu'une démarche militaire, une réunion interrégionale permettant à tous les pays de la région d'être inclus dans un processus politique. C'est ce que j'ai appelé, à un moment donné, la "double inclusivité". Pardonnez-moi ce mot qui est un peu barbare, l'inclusivité c'est-à-dire que les forces politiques irakiennes qui renoncent à la violence et celles qui y ont déjà renoncé ou qui ne l'ont jamais pratiquée, que ces forces politiques soient incluses dans le processus politique - et c'est l'objet d'un des points du communiqué final - et la deuxième inclusivité, c'est celle des pays de la région qui ont tous quelque chose à dire et à faire pour le succès de ce processus et la stabilité de l'Irak. Donc, nous avions, nous-mêmes, souhaité cette conférence et nous avons participé à sa préparation, non pas en indiquant, je le répète, nos conditions, mais les conditions pour réussir. Et il me semble que les deux messages principaux que nous avions souhaités - une conférence inter-irakienne avec cette inclusivité des forces politiques irakiennes d'une part, et l'horizon du retrait des troupes étrangères d'autre part - se retrouvent clairement dans le communiqué final. C'est pour cette raison que nous l'avons préparé et que l'avons approuvé.
Q - Pensez-vous que la simple mention, dans la déclaration finale de la résolution 1546, répond à votre souhait concernant le départ des forces étrangères ?
La date de décembre 2005 figure dans la résolution des Nations unies. Elle est à la fois très proche et très lointaine, et je pense qu'il fallait qu'une référence à cette date soit faite très clairement dans le communiqué final de Charm el-Cheikh, pour dire que nous voulons atteindre ce moment là où se posera la question du retrait des troupes étrangères. Et je serais tenté de dire de cette date du retrait, ce que j'ai dit de la date des élections de janvier 2005 : c'est difficile et possible. Voilà pourquoi je pense que les élections sont un moment de vérité et qu'il faut faire très attention aux conditions de la réussite des élections. J'ai évoqué moi-même trois conditions pour que ces élections, qui seront difficiles, et que certains jugent impossibles, soient possibles.
Q - Pouvez-vous nous dire pourquoi la France a encouragé la tenue de cette réunion ?
R - La France n'a jamais imaginé d'être spectatrice de ce qui se passe dans cette région du Proche et du Moyen-Orient. Nous avons toujours voulu être acteur de la paix et de la stabilité et donc nous sommes venus à Charm el-Cheikh dans cet état d'esprit, pour participer à une étape de la paix. Je crois que nous avons eu raison d'être ici, avec tous les pays de la région qui, pour la première fois, sont tout ici ensemble, la Turquie, l'Iran, la Syrie, la Jordanie, l'Arabie saoudite, l'Egypte naturellement qui nous accueille, d'autres encore, les pays européens, les Etats-Unis, la Russie, la Chine, le Japon, le Secrétaire général de l'ONU. C'est la première fois que, à coté de l'Irak, nous nous retrouvons là pour dire ensemble : on ne sortira pas de cette tragédie par les armes, on en sortira par la politique, par la démocratie, par un processus politique. Nous avons travaillé à ce processus politique dont le premier moment de vérité est celui des élections, dont j'ai dit qu'elles sont difficiles mais possibles, le 30 janvier prochain
Q - Quels ont été les points les plus difficiles durant les dernières heures de la conférence ?
R - C'est probablement ce qui touche au suivi de cette conférence, c'est-à-dire comment on va s'assurer que l'état d'esprit de Charm el-Cheikh perdurera. Ce qui a été l'objet de quelques discussions, dans les dernières heures, concernait notamment la réunion inter-irakienne qui doit être organisée, par le gouvernement intérimaire, avant les élections du 30 janvier, et dans un dialogue entre la présidence égyptienne et le gouvernement irakien, les résultats de cette conférence inter-irakienne. Visiblement le gouvernement irakien n'avait pas trop l'idée de rendre des comptes ou de faire un suivi de cette conférence. Nous pensons que c'est l'une des conditions pour que tout le monde entre dans le processus politique, que le maximum des forces irakiennes s'intègrent dans ce processus démocratique, que la conférence inter-irakienne soit organisée, sincèrement et rapidement, et qu'elle soit un succès. Je pense que c'est, je le répète, l'une des conditions de la crédibilité des élections, que tout le monde y participe.
Q - Même les forces qui ont participé aux batailles de Falloujah ?
R - Toutes les forces qui renoncent à la violence.
Q - Je voudrais savoir si la France aura des idées concernant la réconciliation ?
R - Oui, nous souhaitons la réconciliation en Irak à l'intérieur des forces et des communautés irakiennes et, encore une fois, les élections du 30 janvier seront un premier moment de vérité à propos de cette réconciliation. Par tous les moyens, par tous les appels et notamment en tant que pays européen, nous allons préparer, accompagner ce processus électoral, pour qu'il soit le plus sincère, le plus impartial possible, et qu'il concerne bien tout le territoire irakien, toutes les forces et toutes les communautés irakiennes, notamment toutes les forces politiques qui s'engagent dans la politique, y compris celles qui décideront, ou qui ont décidé, d'abandonner la violence pour s'inscrire dans un processus politique.
Q - La France envisage-t-elle de participer à la consolidation de l'Irak par l'envoi de troupes ?
R - Cette question n'est pas posée, elle ne peut être posée, parce que j'ai déjà dit et je veux bien le répéter devant vous, qu'il n'y a pas, qu'il n'y aura pas, ni aujourd'hui, ni demain de soldats français en Irak. Nous avons décidé de participer à la reconstruction politique et économique de l'Irak par un appui économique et financier, comme nous venons de le prouver avec la dette irakienne, par un appui bilatéral en termes de formation, de crédits de coopération, à travers l'Union européenne qui va accompagner le processus électoral. Nous pensons être bien plus utiles à la stabilité et à la reconstruction politique et économique de l'Irak par de telles actions plutôt que par des soldats.
Q - Les conditions qui sont des conditions de bon sens que vous avez exprimées pour la réussite du processus politique en Irak sont dans la déclaration finale, mais celle-ci n'a pas de caractère contraignant, donc évidemment l'échec est toujours possible. Est-ce qu'au fond le monde, y compris le gouvernement transitoire irakien et son protecteur américain ont signé quelque chose disant que ces deux gouvernements auraient une très lourde responsabilité en cas d'échec, puisque ce qui n'est pas contraignant fait appel à leur bonne volonté, et si leur bonne volonté ne va pas jusqu'au bout, au fond un échec éventuel serait très lourd pour eux...
R - Cette déclaration a le caractère que vous avez dit. Elle comporte des orientations, des engagements. Je trouve très important, permettez-moi de le redire une troisième fois, que tous ceux qui sont concernés de près ou de loin, et généralement de près, par la stabilité de l'Irak, étaient présents à Charm el-Cheikh, sans exception, et que tous ont signé le même texte après l'avoir élaboré ensemble. Alors, c'est vrai que nous aurions, les uns ou les autres, souhaité des phrases plus précises, des engagements plus rigoureux. Le plus important, c'est que tout le monde soit finalement d'accord pour ce texte, et pour prendre ces engagements qui sont mutuellement une forme de co-responsabilité. Il y a, en revanche, un texte qui engage et qui est plus contraignant, c'est la résolution 1546 qui a fait l'objet d'une décision du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous nous situons dans ce cadre, bien sûr, il s'agit de bonne volonté comme vous l'avez dit.
Q - Notamment ce que vous expliquiez à notre confrère sur le dialogue inter-irakien qui fait appel à la bonne volonté...
R - Ecoutez, je ne vais pas élaborer davantage, il s'agit pour tous ceux qui ont signé ce texte, en effet, de bonne volonté et je pense que la paix ne peut pas attendre trop longtemps et que cette étape de Charm el Cheikh constitue un moment important pour préparer le moment de vérité que constituent les élections prévues le 30 janvier, dont je répète qu'elles sont possibles et difficiles à la fois. Nous sommes aujourd'hui, nous Français, dans cet état d'esprit, nous n'oublions pas les positions passées, chacun se souvient de ce que nous avons dit très clairement au début de ce conflit, et nous voulons regarder devant nous, parce que nous pensons que cette région doit sortir de cette spirale de violence et de terreur et qu'elle doit s'engager, aussi bien en Irak que du côté israélo-palestinien, sur la voie de la paix et de la stabilité.
Merci beaucoup.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 novembre 2004)