Texte intégral
Messieurs les ministres,
Messieurs les présidents,
Mesdames et messieurs,
chers amis.
C'est, pour moi, un grand plaisir de m'exprimer devant les responsables économiques, chinois et français, à l'occasion de cette visite officielle en Chine. La renaissance chinoise, dont Shanghai est un symbole éclatant, suscite un intérêt immense en Europe. Il nous appartient, maintenant, de bâtir entre l'Union européenne et la Chine un partenariat économique à la fois dynamique et équilibré. C'est sur ce thème que je serais heureux de pouvoir échanger avec vous aujourd'hui. Je m'adresserai, d'abord, à messieurs les chefs d'entreprise chinois, que j'ai eu le plaisir de rencontrer tout à l'heure, et pour leur dire que je suis très heureux de cette rencontre. Je les remercie d'être présents à ce rendez-vous et je me félicite de leur action économique en faveur du développement des échanges entre la France et la Chine. Vous m'avez parlé de votre intérêt pour mon pays, pour notre pays, de vos projets d'investissements, soit que vous avez déjà mis en oeuvre, soit que vous envisagez dans les prochains mois. La France accueille de nombreux investisseurs étrangers qui apportent une contribution irremplaçable à notre économie. Nous avons fait de l'attractivité de la France une priorité de mon gouvernement. Avec l'agence que préside madame Clara GAYMARD, nous avions mis en place un dispositif d'accueil pour faire en sorte que les localisations d'emplois soient supérieures aux délocalisations d'emplois. De nombreux groupes internationaux, américains ou asiatiques, sont implantés en France par leurs usines de fabrication ou par leurs centres de recherche et de développement. D'autres ont choisi une implantation en France en raison de nos infrastructures de transport et nombreux sont ceux qui ont choisi d'implanter leurs centres logistiques en Europe en raison même de ces infrastructures de communication. Vos entreprises rivalisent désormais avec les leaders mondiaux dans de nombreux secteurs.
Je vous demande, messieurs les chefs d'entreprise, de grandes entreprises chinoises, de regarder la France, de bien regarder la réalité de la France. Vous verrez que c'est une porte d'entrée de choix, de qualité pour aborder l'Europe, la grande et forte Europe avec ses 450 millions de consommateurs. La France est un pays qui se réforme, qui se modernise, qui innove, qui entreprend. La France, c'est un pays dont le système de formation est hautement performant, hautement développé et qui sait s'ouvrir sur l'extérieur puisque la France accueille, chaque année, 180 000 étudiants dans ses universités et dans ses grandes écoles. Notre pays forme 13 000 étudiants chinois par an sur les 100 000 qui viennent en Europe et qui constituent une force grandissante au sein des universités et des écoles d'ingénieur. En résumé, quand je vous demande de regarder la France, c'est pour dépasser cette vision d'un pays qui serait seulement romantique, comme il paraît qu'on le qualifie quelquefois en Chine. C'est aussi un pays où l'on peut faire de bonnes affaires, développer des initiatives, The new France where the smart money goes ", comme le dit la promesse de l'Agence française pour les investissements internationaux dans un français quelque peu contestable. A vous tous, entrepreneurs chinois, je voudrais vous dire que les entreprises françaises, que les pouvoirs publics français sont prêts à travailler avec vous, à vous aider dans l'ensemble des procédures nécessaires au développement économique et à partager, avec vous, des visions d'avenir. Nous sommes conscients que, aujourd'hui, nous devons avoir des échanges équilibrés mais nous savons aussi que c'est ensemble que nous pouvons inventer les stratégies, les technologies du monde de demain.
Nous avons beaucoup à faire pour construire les réponses du XXIe siècle aux questions que l'économie du XXIe siècle se pose. Pour les entrepreneurs français, je voudrais dire combien je suis reconnaissant pour leurs initiatives, leur énergie et tous ceux qui, ici, expriment, par l'exportation ou l'implantation, la qualité, le savoir faire et les technologies de la France. Déjà, 4 700 entreprises françaises exportent vers la Chine et 500 entreprises y ont investi. Les économistes nous disent que un milliard d'exportations supplémentaires crée 15 000 emplois nouveaux. Cela signifie que, en 2004, en augmentant de 15 % nos exportations vers la Chine, vous avez contribué à créer en France plus de 10 000 emplois. Les exemples de réussite de nos entrepreneurs sont nombreux. Saviez-vous que les artistes chinois peignent, désormais, avec des couleurs qui viennent, monsieur le ministre, de Marseille, que les canards qui servent à préparer les savoureux canards laqués sont le résultat d'une sélection génétique française. J'ai la conviction que tout est possible dans nos échanges. Cette conviction m'a été confirmée au cours du dîner officiel avec le Premier ministre chinois quand j'ai entendu l'orchestre de l'armée chinoise interpréter des airs de Johnny HALLYDAY. Tout est possible. Nos deux pays sont capables de s'adapter à tous ces défis. De la restauration aux jeux sur téléphones cellulaires, dans les secteurs les plus variés, les grandes entreprises mais aussi les PME françaises réussissent en Chine. Nos entreprises se positionnent aussi avec succès sur le marché des grands événements qui vont marquer la Chine dans les prochaines années. Nous savons que les Jeux olympiques de Pékin et l'exposition universelle de Shanghai vont placer la Chine au cur des regards du monde et nous voulons être au côté de la Chine pour ces événements majeurs pour son émergence mondiale. Si nous voulons gagner la bataille de l'emploi dans notre pays, nous savons que le développement par les exportations sur les marchés de croissance est essentiel. La présence des entreprises françaises sur le marché chinois est donc un enjeu important, pour la Chine et pour la France. Il faut saisir les opportunités d'un pays dont l'économie croît à un rythme de près de 10 % par an et dont les importations ont augmenté de plus de 25 % par an, et ce de manière ininterrompue depuis cinq ans, Mais il faut encore aller plus loin et faire mieux.
C'est dans cet esprit que le président de la République, Jacques CHIRAC, a souhaité, lors de sa visite en octobre dernier, que mille PME supplémentaires abordent le marché chinois en 2005. C'est aussi avec cet objectif que nous souhaitons développer les opérations de portage de PME par les grandes entreprises sur le marché chinois. Notre ambition doit être de bâtir un véritable partenariat économique, stratégique entre la France et la Chine. C'est le sens du dialogue que nous avons établi avec les autorités chinoises. Notre dialogue bilatéral se développe sur un nombre croissant de sujets, qu'il s'agisse de l'industrie, des services, des produits agroalimentaires, qu'il s'agisse de l'environnement, des transports ou de l'énergie. Et, dans beaucoup de ces domaines, nos opérateurs ont des solutions à proposer à la Chine. L'environnement est un domaine, par exemple, où l'excellence française nourrit les réflexions chinoises, notamment ici à Shanghai, où s'invente la grande ville du XXIe siècle. Nous sommes conscients que ces investissements - je pense, par exemple, à l'incinérateur de Pudong et à la rénovation des usines de traitement des eaux - ces investissements permettent de développer le développement durable qui est au cur des stratégies économiques des deux pays. La maîtrise de l'énergie est un défi pour la Chine, comme pour le reste du monde. Avec le nucléaire, la France, dans le contexte des chocs pétroliers des années 70 et 80, a développé des réponses éprouvées à ce problème majeur. Les propositions que nous formulons à la Chine en matière d'énergie électronucléaire, nous nous les sommes appliqués à nous-mêmes sur l'ensemble de la filière avec les meilleures conditions de sécurité que nous trouvons dans le monde. De même, en matière de transport ferroviaire, la France a une expérience de 25 ans dans la grande vitesse et la SNCF gère l'un des réseaux ferroviaires les plus performants et les plus sûrs du monde. L'année de la France en Chine est un moment privilégié pour mettre en valeur nos filières d'excellence. Ce fut le cas de l'aéronautique, du ferroviaire, du nucléaire et de ceux que je viens de citer. Permettez-moi de remercier tous ceux qui ont participé, côté français comme côté chinois, à cette dynamique de l'année de la France en Chine. Merci à Henri PROGLIO, merci à tous les entrepreneurs qui se sont engagés dans cette proximité entre nos deux pays, à la fois proximité politique, proximité culturelle et proximité industrielle. Ces filières d'excellence qui sont apparues ainsi dans nos échanges sont évidemment, pour nous, l'occasion de développer la recherche et d'associer toutes les entreprises qui participent à l'innovation et au développement de l'emploi dans notre pays. La Chine est en train de réaliser un programme de développement de ces infrastructures collectives à un rythme particulièrement rapide, fulgurant. La France est disposée à prendre toute sa place dans ce développement et nous avons bien reçu le message des autorités chinoises qui nous demandent de ne pas nous contenter d'exporter mais aussi de réaliser des transferts de technologies. Quand la Chine se développe, elle s'équipe, elle investit dans des machines, dans des technologies, elle consomme nos produits.
L'intérêt du développement de la Chine est évident pour l'ensemble du monde, et notamment pour l'Union européenne. L'Union européenne et la Chine constituent, en effet, deux pôles majeurs de l'économie mondiale et elles ont, toutes les deux, intérêt à des échanges loyaux et équilibrés. La Chine est appelée à jouer un rôle croissant dans le monde. Elle participera de plus en plus au dialogue économique international. J'ai pu noter le sens des responsabilités des responsables chinois, mesurant les conséquences de la croissance chinoise sur l'ensemble du monde. J'ai pu noter combien ils étaient attentifs à l'impact de ce développement, sur leurs clients comme sur leurs fournisseurs. Nous devons toujours dialoguer entre puissances comme l'Europe et la Chine et je suis convaincu que l'Europe, par son évolution institutionnelle, sa constitution nouvelle, lui permettra de renforcer sa coopération avec la Chine et donner plus d'efficacité, plus de crédibilité à notre dialogue, dialogue de confiance, notamment sur les sujets difficiles. L'émergence de la Chine suscite des inquiétudes de la part des opinions publiques et de quelques milieux économiques. Je pense, notamment, au dossier du textile ou bien à la protection intellectuelle. Je crois qu'il faut parler de ces sujets avec sérénité. Naturellement, nous entendons que l'Union européenne défende avec fermeté les intérêts européens sur ces questions, mais nous demandons aussi que soient respectés, du côté européen comme du côté des autres partenaires, les règlements de l'OMC et que tout se fasse dans le respect des règles mais aussi qu'on puisse tenir compte de l'ouverture du marché chinois, ouverture du marché chinois particulièrement significative pour un grand nombre de nos productions. Au cours de ma visite, mes interlocuteurs chinois m'ont paru extrêmement attentifs et conscients de l'enjeu de ces différents dossiers. J'ai le sentiment profond que la Chine est un acteur responsable de l'économie mondiale. En discutant, hier, avec le ministre de la Culture à Cité interdite, il m'expliquait l'importance des trois harmonies, l'harmonie de l'homme et de la nature, l'harmonie entre les hommes et l'harmonie personnelle. Eh bien, je crois qu'on peut appliquer aux relations franco-chinoises cette exigence de la triple harmonie. Harmonie avec le monde, le monde a besoin de l'entente entre la France et l'Europe et la Chine. Le dialogue européen-Chine est un dialogue très important pour équilibrer le monde. Pour avoir l'harmonie du monde, l'Europe et la Chine peuvent, ensemble, être des acteurs de cette harmonie. Harmonie avec le monde, harmonie entre nous pour pouvoir développer des échanges équilibrés, des échanges profitables créateurs d'emplois dans les deux continents. Et, enfin, harmonie interne. La cohésion sociale et territoriale, importante pour la Chine, la construction de nouvelles institutions, importantes pour l'Europe, chacun ayant à faire face ses propres défis. En assumant nos défis internes, en améliorant notre coopération bilatérale et en développant ensemble notre influence dans le monde, je pense que, entre la Chine et la France, il est possible, aujourd'hui, de faire de cette triple harmonie une force pour nos peuples. Merci à tous.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 mai 2005)