Déclaration de M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales, sur le plan d'action gouvernemental en faveur du développement de l'industrie agro-alimentaire, Avignon le 3 février 2005.

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Circonstance : 4ème réunion en région, dans le cadre des travaux du Partenariat National pour l'industrie agroalimentaire à Avignon le 3 février.2005

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier d'être venus nombreux à cette réunion. Si j'ai tenu à venir ici, à Avignon, c'est parce que je sais, pour avoir été moi-même à la tête d'une PME, que les journées d'un chef d'entreprise sont bien remplies. Et que les réalités s'apprécient sur le terrain. En tant qu'élu rural, je suis particulièrement attaché à ce dialogue direct.
Aujourd'hui, dans cette salle, toutes les filières sont représentées, tous les domaines d'activité de l'agroalimentaire sont rassemblés et leurs partenaires naturels, banques, investisseurs, administrations, ont également répondu à l'appel. Je les en remercie.
Comme vous le savez, je travaille depuis juin dernier à l'élaboration d'un plan d'action, concret : le Partenariat National pour le développement de l'industrie agroalimentaire. Ces travaux s'inscrivent dans la démarche d'ensemble initiée par le Gouvernement en faveur du dynamisme de nos territoires, en faveur du monde agricole et rural.
L'avenir de notre agriculture et du monde rural doit être considéré de manière globale : nous avons à raisonner " de la fourche à la fourchette ", " du champ à l'assiette "... Parallèlement aux actions menées pour conforter l'amont de l'agriculture française, aux outils du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, à la future loi d'orientation agricole - qui devra être applicable en 2006 - le Partenariat National nous permet d'agir sur l'aval de l'agriculture. Nous lui ouvrons ainsi des perspectives plus larges, plus ambitieuses, et nous traçons plus clairement cette " nouvelle frontière " qu'il nous faut atteindre.
Au travers du Partenariat, il s'agit donc pour le gouvernement de conforter les industries agroalimentaires, qui jouent un rôle de première importance dans le paysage rural français, et plus généralement, dans l'économie de notre pays.
L'enjeu est de taille. Les industries agroalimentaires sont la première industrie nationale en termes de chiffre d'affaires et le 2e employeur français, avec plus de 420 000 salariés. Au fil des années, elles ont augmenté avec régularité leurs effectifs, quelle que soit la conjoncture (+7,7 % de 1998 à 2002). Elles permettent à la France d'être le deuxième exportateur mondial de produits agricoles et agroalimentaires et fournissent un solde positif de 8,6 milliards d'euros (en 2003).
Les industries agroalimentaires jouent, en outre, un rôle essentiel dans le dynamisme du monde rural : les quelque 10 000 entreprises du secteur, dont 80 % sont des PME ou des TPE, maillent nos territoires et assurent 70 % des débouchés de l'agriculture française.
En Provence Alpes Côte d'Azur, l'agroalimentaire emploie plus de 30 000 salariés, avec environ 800 entreprises de plus de 10 salariés. En assurant près d'un emploi sur cinq, ce secteur est le deuxième employeur de la région, après la métallurgie.
A cet égard, vous le savez, le gouvernement met en place des pôles de compétitivité en France, avec pour objectif de faire émerger des pôles d'excellence reconnus internationalement. Je vous rappelle que le dépôt des appels d'offre doit s'effectuer avant le 28 février auprès des Préfets de Région. Les dossiers jugés porteurs seront étudiés lors d'un CIADT qui se tiendra avant l'été. Je sais que se monte à Avignon, autour d'Agroparc, un projet de " pôle européen innovation fruits et légumes ", qui répond à notre thématique d'aujourd'hui (développer la consommation de fruits et légumes, bons pour la santé, en innovant pour mieux répondre aux attentes). J'encourage bien évidemment toutes les candidatures, à travers la France, à de futurs pôles de compétitivité, dans le domaine agroalimentaire.
1/ Nous devons aider les entreprises agroalimentaires à relever des défis importants
Notre industrie agroalimentaire est confrontée aujourd'hui à des défis qu'elle doit relever pour conforter sa réussite, face à une concurrence internationale toujours plus vive.
Ses très nombreuses petites et moyennes entreprises constituent un vivier remarquable de talents et d'initiatives, qui font la force du secteur. Mais la dispersion et la taille des industries agroalimentaires expliquent aussi certaines faiblesses.
Ainsi, beaucoup d'entreprises souffrent d'un déficit de fonds propres et certaines peinent à dégager des marges suffisantes. Ces moyens restreints montrent en partie l'effort insuffisant d'investissement du secteur dans la recherche : le taux de valeur ajoutée consacré par l'industrie agroalimentaire à la recherche-développement est de 1,3 %, contre une moyenne de 6,5 % dans les autres secteurs manufacturiers.
On constate, en parallèle, un certain manque d'intérêt pour ce secteur, malgré son potentiel indéniable, ses réussites et de vraies promesses de débouchés. Les investisseurs sont vraisemblablement rebutés par de supposés risques sanitaires et des réglementations perçues comme sévères, malgré la stabilité souvent remarquable des débouchés. Les jeunes aussi se détournent des métiers de l'agroalimentaire, en dépit des nombreux emplois qu'ils assurent.
Ce bref panorama est le fruit d'échanges constants avec les chefs d'entreprises depuis plusieurs mois. J'ai, sur cette base, dégagé six axes de travail pour mon plan d'action en faveur de l'agroalimentaire, qui doivent répondre de manière concrète, pragmatique, opérationnelle, à vos attentes.
Six groupes de travail ont ainsi été constitués en juin, qui avaient pour mission de :
favoriser le développement économique des entreprises et leur financement ; affirmer la dynamique des entreprises à l'international ; encourager la recherche, le développement et l'innovation ; adapter et simplifier les normes et réglementations ; mieux répondre aux attentes de la société ; développer l'emploi, en valorisant les métiers de l'agroalimentaire.
L'ambition de ce plan d'action est forte et s'inscrit pleinement dans la priorité pour l'emploi du gouvernement : nous voulons donner les moyens au secteur agroalimentaire français d'atteindre 500 000 salariés d'ici dix ans, contre 420 000 aujourd'hui. C'est ambitieux, mais certainement pas impossible. J'en suis persuadé quand je constate la capacité de mobilisation des industriels de l'agroalimentaire, leur volonté d'avancer ensemble : votre présence aujourd'hui en constitue une nouvelle illustration.
2. Pour atteindre cet objectif, j'ai voulu une méthode d'action partenariale
Je vous le dis : rien ne peut se faire, rien ne doit se faire sans vous.
C'est pourquoi j'ai mis en place une méthode fondée sur la concertation, afin qu'au delà de l'impulsion donnée par le gouvernement, la profession se mobilise fortement. Les travaux sont conduits, depuis plusieurs mois, au niveau national, en étroite association avec les entreprises et les filières professionnelles. Certains d'entre vous ont participé aux réunions des groupes de travail, nous vous avons largement sollicités et votre contribution a été, sachez-le, aussi utile qu'appréciée.
Sur cette base, j'ai annoncé, au Salon International de l'Alimentation en octobre dernier, six premières mesures concrètes pour les entreprises.
Une première réunion à Lyon, le 13 décembre, a marqué le début d'une deuxième phase, sur le terrain, pour aller plus loin, ensemble, dans la réflexion. J'ai engagé en effet une série de grandes rencontres en région, avec les entreprises, afin de tester auprès d'elles, auprès de vous, toutes les propositions, y compris celles annoncées. Chaque déplacement est l'occasion d'aborder plus précisément une thématique ; aujourd'hui, il s'agit des attentes sociétales. Je souhaite que vous vous exprimiez très librement et que vous me fassiez part de vos suggestions.
Une nouvelle étape interviendra au cours du premier trimestre, où je présenterai d'autres propositions concrètes, nourries de ces rencontres en région. Enfin, un dernier rendez-vous marquera la finalisation du Partenariat National, en juin 2005, avec un ensemble de mesures concrètes, ciblées et efficaces, directement à votre service.
Six mesures ont déjà été présentées, lors du Sial. Un outil pour l'emploi, afin d'attirer les jeunes vers les métiers de l'agroalimentaire :
Les entreprises du secteur ont du mal à recruter et à conserver leurs salariés, en raison, notamment, d'un déficit d'image et d'une certaine méconnaissance des jeunes. C'est pourquoi une campagne de communication va être lancée, en partenariat avec les professionnels, pour une durée de trois ans et pour un montant envisagé de 3 millions d'euros.
Un outil financier, pour favoriser le développement économique et l'innovation des entreprises :
Nous mettons en place, en partenariat avec le nouvel ensemble BDPME/SOFARIS/ANVAR, deux prêts participatifs dédiés aux PME et aux TPE de l'agroalimentaire. Un montant de 1 million d'euros a été engagé, pour une opération de garantie de ces prêts qui permettra de mettre 10 millions d'euros de financements à disposition des PME.
Les " prêts participatifs de développement ", sont en test en région Rhône Alpes, où j'ai tenu la première réunion. Si les entreprises sont satisfaites de cet outil, il sera généralisé aux autres régions.
L'intérêt de ces outils réside dans le fait qu'il s'agit de prêts sans garantie ni caution du chef d'entreprise. Ils s'apparentent donc à du haut de bilan, sans avoir l'inconvénient d'obliger le chef d'entreprise à ouvrir son capital. Ils sont octroyés sur sept ans et à différé de remboursement de deux ans.
Un outil pratique, pour accompagner les industries agroalimentaires à l'export :
Un " kit pour l'export et la promotion agroalimentaires " a été annoncé, en liaison avec le ministre délégué au Commerce Extérieur. Il s'agit de mettre en place un accompagnement personnalisé et individualisé pour les entreprises primo- exportatrices ou déjà exportatrices mais voulant investir de nouveaux marchés, à tous les stades de leur projet export. Cet accompagnement sera réalisé par un organisme unique que nous aurons choisi dans chaque région. Ce sera l'interlocuteur de l'entreprise ; il sera chargé de suivre, pas à pas, le projet de l'entreprise et de coordonner les prestations du kit assurées par les organismes composant le dispositif national d'appui à l'exportation.
J'ai présenté trois autres mesures :
Un diagnostic de l'impact de l'accumulation des normes sur la compétitivité des entreprises ; la création d'un Baromètre de l'alimentation, véritable outil d'expertise pour anticiper les nouvelles attentes des consommateurs ; j'y reviendrai ; la réactivation du Conseil supérieur des exportations agroalimentaires, instance de concertation nécessaire pour les entreprises. J'entends proposer une deuxième série de mesures à la fin du premier trimestre :
- Il s'agira d'abord de renforcer les capacités d'innovation et de recherche/ développement des entreprises. Le travail est déjà bien avancé avec l'ANVAR et avec le ministère de la Recherche.
- Il s'agira également de clarifier et simplifier les normes et réglementations qui pèsent sur les entreprises : j'entends avancer sur ce sujet, dont je connais l'importance. L'étude que j'ai demandée sur les référentiels privés imposés par la grande distribution est lancée, j'en attends des avancées concrètes.
- Il nous faut aussi travailler sur l'emploi, sous plusieurs angles, parmi lesquels on peut citer la nécessité :
d'adapter l'offre de formation initiale et professionnelle de favoriser les passerelles entre les filières pour fluidifier l'emploi de réfléchir aux conditions de travail et de permettre une meilleure anticipation des difficultés pour faciliter la reconversion des salariés.
4. je voudrais détailler les pistes que nous étudions pour permettre aux entreprises de mieux répondre aux attentes sociétales :
Les aliments ne sont pas des biens de consommation courants, et les mécanismes d'ajustement de l'offre et de la demande fonctionnent différemment. Les modes de consommation ont un lien particulier avec la famille, la tradition, les terroirs et peuvent avoir un impact sur la santé.
Produire des aliments n'est donc pas non plus anodin : les entreprises agroalimentaires sont les dépositaires de savoir-faire parfois séculiers, de traditions bien ancrées dans nos terroirs tout en étant à la pointe de l'innovation et à l'écoute des consommateurs. Elles maillent nos territoires et contribuent à les faire vivre. Elles occupent un espace rural qu'elles ont à coeur de préserver et qu'il nous faut valoriser. Et elles touchent au vivant.
Ce sont autant d'éléments qui soulignent l'intérêt et la portée des réponses à fournir aux attentes du consommateur comme du citoyen, dans le domaine agroalimentaire.
De récents travaux de recherche, relatifs aux attentes de la société en matière d'alimentation, confirment l'importance qu'accordent désormais les consommateurs à la qualité et à l'origine des produits alimentaires, ainsi qu'à la problématique du développement durable. Au-delà d'effets de mode, les observateurs constatent une tendance de fond : les consommateurs veulent être informés, et ils tiennent à cet égard un discours toujours plus exigeant vis-à-vis des industriels comme de la distribution (étiquetage parfois insatisfaisant des produits, multiplicité des signes de qualité...).
De plus, cette tendance s'inscrit dans un contexte de relative inquiétude du consommateur : crises alimentaires, modes de consommation à risque (obésité).
Les entrepreneurs sont conscients de l'évolution des attentes sociétales et cherchent à s'y adapter, mieux encore à les anticiper, afin de façonner leur stratégie industrielle le plus efficacement possible.
Les pouvoirs publics ont, de leur côté, un rôle à jouer pour veiller à la crédibilité de l'information délivrée aux consommateurs. Ils peuvent aussi aider l'entreprise à mieux cerner ces attentes, souvent mouvantes, et donc à mieux y répondre.
Nous le savons tous, la confiance des consommateurs est fragile. Elle nécessite des années d'investissement, mais peut être remise en question par un seul écart. Nous devons ainsi également réfléchir aux moyens d'assurer une certaine sécurité aux entreprises contre les brusques mouvements du marché : sans doute, en leur permettant de rassurer le consommateur par des mentions adaptées et de différencier leurs produits par des signes reconnus, témoignages de qualité.
Nous travaillons donc à la mise au point de plusieurs mesures. Je tiens cependant à souligner que cet effort requiert la mobilisation et la coopération de toute la chaîne de l'alimentation, de l'agriculteur au consommateur en passant par le producteur et le transformateur. Je sais que la chambre d'agriculture, qui nous reçoit aujourd'hui, est particulièrement concernée et mobilisée.
Compléter et regrouper les instruments d'observation
L'observation des perceptions et des attentes des consommateurs permet d'améliorer la compréhension de la demande et son adéquation avec l'offre.
Des outils existent bien sûr pour étudier l'évolution des achats et des consommations. Cependant, ils ne permettent pas toujours d'analyser correctement ces évolutions et d'en comprendre l'origine et l'impact. Ils sont parfois lacunaires, par exemple en ce qui concerne la perception globale de l'offre alimentaire, de la qualité des aliments, des modes de production etc. Bref, ils doivent être complétés pour mieux correspondre aux besoins concrets des entreprises.
Un baromètre de la perception de l'alimentation par les Français a donc été vivement souhaité par les participants à nos groupes de travail : il s'agira d'analyser les résultats d'un questionnaire, répété à intervalles réguliers. Cet outil pérenne, qui sera mis à disposition de toutes les entreprises afin de mieux positionner leur offre, sera certainement très précieux, notamment pour les PME, qui n'ont pas les ressources pour mener de telles enquêtes.
J'ai indiqué, lors du SIAL, que je souhaitais donner suite à cette proposition et j'ai saisi le Conseil national de l'alimentation (CNA). Le CNA a établi un questionnaire très complet, précis et structuré, qui a été validé par de nombreux acteurs, ceux de l'agroalimentaire, des sociologues etc...
Par ailleurs, s'il existe des outils d'observation, ceux-ci ne sont pas toujours bien coordonnés. Il a donc été préconisé de créer un Observatoire de l'alimentation, qui articulerait tous les outils et donnerait à l'ensemble une plus grande cohérence.
Un tel observatoire, intégrant le baromètre, permettrait d'éclairer les décisions, tant publiques que privées ; des notes d'analyse et de conjoncture pourraient être rédigées périodiquement et des forums entre les parties concernées (chercheurs, industries, consommateurs, etc.) alimentés régulièrement. J'ai donc également demandé au CNA de formuler des propositions d'organisation d'un observatoire d'ici mai 2005.
Répondre aux attentes sociétales émergentes
Alors que la notion d'attentes sociétales émergentes est relativement nouvelle, elle est peut-être déjà en passe d'être galvaudée. Il faut d'abord définir clairement ces attentes : c'est, on l'a vu, l'objet du baromètre et de l'observatoire. Mais il faut une méthode pour déterminer la valeur et la validité des réponses à ces attentes.
Trois approches sont sans doute possibles :
encadrer les réponses par la réglementation ; les inclure dans un processus de certification contrôlé par un organisme tiers ; laisser agir le marché avec, pour limite, la répression de l'information trompeuse ou abusive.
Il me semble que l'approche " libre " doit être retenue. Néanmoins, le groupe de travail a jugé souhaitable, à l'heure où une réforme de la certification des produits s'engage, que l'Etat puisse à tout le moins donner des garanties pour certaines mentions qui n'ont pas d'impact directement perceptible par le consommateur. Nous y travaillerons, si vous l'acceptez.
Clarifier et simplifier les signes de qualité
Outre ce travail, il nous faut également nous interroger sur le dispositif existant des signes de qualité. Nous avons certainement, en effet, des marges de progression, pour en optimiser l'efficacité au niveau du consommateur.
Vous le savez : la réflexion sur l'évolution des signes de qualité est en cours, guidée par trois principes : lisibilité des démarches pour les consommateurs, accessibilité pour les producteurs et simplicité.
Une première étape a été franchie en février 2004, avec l'annonce des mesures en faveur de l'agriculture biologique.
Une vaste consultation est actuellement menée, notamment autour de deux questions importantes : un accès direct à l'IGP (Indication Géographique Protégée) sans obligation de lien avec les signes nationaux (label rouge et CCP - Certification de Conformité Produit) et une meilleure lisibilité de la CCP dans le dispositif des signes de qualité.
Je peux vous dire que les évolutions nécessaires seront inscrites dans le projet de loi d'orientation agricole.
Conforter les voies qui permettent d'assurer la confiance du consommateur
Je voudrais également aborder avec vous un fait bien connu des entreprises produisant sous signes de qualité : le fait qu'une meilleure information sur l'origine ou la provenance semble assurer - voire restaurer - la confiance des consommateurs, comme les expériences telles que " Viande Bovine Française - VBF " ont pu le montrer.
Le groupe de travail a recommandé qu'une règle d'information sur la provenance simple des matières premières agricoles soit édictée. Elle permettrait de répondre aux attentes du consommateur en différenciant :
d'une part, la demande d'utilisation d'une mention d'origine liée à une certaine qualité du produit, justifiant les demandes de reconnaissance en AOC, AOP et IGP ; d'autre part, une simple mention de l'origine, sans liaison avec une référence qualitative prédéterminée, mais en tant qu'information du consommateur. Il faudrait, pour donner corps à cette préconisation, publier le décret prévu par la Loi d'orientation agricole de 1999. Le groupe a également proposé que cette mesure concerne aussi l'ingrédient principal d'un produit composé.
Je sais que cette dernière proposition ne fait pas l'unanimité chez les professionnels. Pourtant, toute initiative permettant de démarquer la production française de la concurrence pourrait être une bonne chose. Nous devons au moins en discuter. Cela nécessitera peut-être une sensibilisation du consommateur, mais le terrain créé par les crises récentes est certainement propice à l'évolution des habitudes.
Promouvoir des démarches de développement durable dans les entreprises
Parmi les nouvelles attentes sociétales, il est un domaine à explorer : celui du développement durable. Au delà du concept, des démarches très concrètes, pragmatiques peuvent être mises en place.
Rappelons qu'au niveau national, la loi sur les nouvelles régulations économiques a introduit l'obligation, pour les entreprises cotées en bourse, de réaliser un rapport annuel qui intègre les dimensions sociales et environnementales. L'AFNOR a diffusé un guide des démarches de développement durable pour les entreprises.
De leur côté, des entreprises agroalimentaires françaises ont commencé à publier des rapports sur la mise en oeuvre de leur politique de développement durable, montrant ainsi une volonté de promouvoir ces démarches.
Nous envisageons donc de réaliser un travail sur la norme AFNOR, en lien avec l'étude que j'ai demandée sur les normes et référentiels privés dans le secteur agroalimentaire. Nous étudions également des possibilités d'accompagnement et d'incitation spécifiques pour que les entreprises puissent intégrer en leur sein cette démarche de développement durable et la valoriser au mieux.
Mieux prendre en compte l'impact socio-économique dans l'élaboration de nouvelles réglementations.
Cette problématique du développement durable se traduit aussi dans l'action des pouvoirs publics.
Ainsi, dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable (SNDD), il parait souhaitable d'oeuvrer en faveur d'un système alimentaire durable. Liant les dimensions sociales, économiques (prix des produits, emploi) et environnementales, ce système alimentaire durable est sans doute celui qui répond le mieux aux attentes sociétales du moment.
La mise en place d'un tel système implique que, lors de la définition de toute règle ayant des conséquences sur l'activité des entreprises, l'expertise ne se limite pas à la seule dimension sanitaire ou environnementale, mais s'attache également à en déterminer l'impact socio-économique. Il s'agirait donc d'institutionnaliser l'expertise socio-économique dans le domaine alimentaire. Nous travaillons à traduire cette nécessité dans les faits.
Faciliter et crédibiliser la communication collective
Nous pouvons également travailler à l'amélioration de la connaissance et de la compréhension des consommateurs, notamment concernant les caractéristiques des produits, y compris nutritionnelles. Il est, dans ce cas, important que ce type d'information puisse être assorti de garanties sur sa crédibilité.
Cela pourrait passer, et c'est une proposition du groupe de travail, par un appui à la communication professionnelle collective, après expertise et validation des messages destinés à une diffusion auprès des consommateurs : il reste évidemment à définir les limites et les formes de cet appui. La réflexion sur le rôle des pouvoirs publics en la matière est complexe mais le débat mérite d'être mené.
Enfin, le groupe de travail a réfléchi à la possibilité d'un droit de consultation d'instances scientifiques reconnues, pour les émetteurs de messages professionnels collectifs.
Avancer ensemble sur la problématique nutrition
Enfin, il apparaît clairement que la nutrition constitue le grand défi des années à venir pour l'agroalimentaire.
Devons-nous attendre passivement une éventuelle crise, ayant pour origine les effets sur la santé, supposés ou avérés, de tel ou tel aliment, ou de tel ou tel ingrédient ? Ou au contraire tenter,
d'une part, grâce à une meilleure assise scientifique, de distinguer le vrai du faux et d'adapter les produits, et d'autre part, par la pédagogie et l'information, de renouer avec une éducation aux bons comportements alimentaires ?
A nouveau, il nous faut y réfléchir car il s'agit là d'un réel enjeu en termes de santé publique et pour nos entreprises.
Je vous propose donc de fédérer les efforts publics et privés sur ce thème, par la mise en place d'une fondation nutrition, qui comporterait à la fois un volet recherche et un volet éducation. Naturellement, pour que cette fondation voie le jour, nous devrons lancer un appel à bonnes volontés, particulièrement aux professionnels. Je vous le lance aujourd'hui ; sachez que nous sommes prêts à agir avec vous.
A nouveau, je tiens à vous dire que ce plan d'action se construira avec vous. C'est pourquoi je compte sur vos réactions, vos propositions. Je vous remercie.

(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 11 février 2005)