Texte intégral
Q- Vous êtes à nouveau en campagne pour le non.
R- Oui.
Q- D'abord, avant de parler de cette campagne pour le non, il y a un petit accident dans cette campagne, c'est ce fameux rapport du Sénat américain qui vous reproche, dans le cadre de l'Opération "Pétrole contre nourriture", d'avoir bénéficié d'un certain nombre de libéralités du régime de S. Hussein. Première question : les sénateurs américains vous ont-ils entendu, vous ont-ils consulté avant la publication de ce rapport ?
R- Non, absolument pas. Je n'ai été consulté, ni approché par personne. Cela fait partie des questions que l'ont peut se poser. C'est d'ailleurs ce que dit le Quai d'Orsay lui-même dans une dépêche, puisqu'il dit que l'on cite des noms sans que personne n'ait eu le moyen d'expliquer ou de se défendre.
Q- Alors, les documents qui sont avancés par les sénateurs, notamment des lettres signées du directeur de l'organisme de commercialisation du pétrole, à votre avis, sont-ils des faux ?
R- C'est très difficile de répondre à cette question. Très honnêtement, je ne crois pas que ce soient des faux. Je ne mets pas en doute les compétences des services de renseignement américains. Et je ne crois pas qu'ils se soient livrés à une manipulation. Par contre, on peut s'interroger sur l'origine de ces documents. Qui les a faits ? Dans quelles conditions les a-t-on trouvés ? Etc. Mais tout cela n'est pas nouveau. Cela avait fait l'objet d'une publication dans un journal irakien qui est un journal qui avait été créé au lendemain de la victoire américaine, et de même que cela avait été repris au mois d'octobre dernier. J'avais démenti en ce qui me concerne. Je crois qu'il faut se rendre compte d'une chose, c'est qu'il y a aux Etats-Unis une véritable psychose, et cette psychose consiste à dire que, si la France a pris une position hostile à l'intervention américaine, c'est en fonction de ses intérêts économiques ou des relations privilégiées qu'elle pouvait avoir avec S. Hussein. Dans cette affaire, ce qui m'est reproché n'est que la partie apparente de l'iceberg. Parce qu'il y a une course qui est engagée entre trois commissions du Congrès américain, trois commissions d'enquête, plus la Commission Volcker qui a été créée par le secrétaire général des Nations Unies, plus le FBI. Or, la presse américaine elle-même, hier, considérait qu'il n'y avait aucune preuve de tout ce qui était avancé, et c'est vrai.
Q- Alors s'il y a manipulation du côté irakien, comme vous le disiez à l'instant, comment expliquez-vous que ce soit votre nom qui soit mis en avant ? Cherche-t-on à viser J. Chirac à travers vous ?
R- Cela me paraît évident. Peut-être aussi que, ceux qui pensent à travers moi atteindre J. Chirac, ignorent que la nature de nos relations a changé, au moins sur le plan politique, et que s'ils s'imaginent que j'aurais pu influencer la politique de la France, ils se trompent. De toute façon, j'ai déjà dit et je souhaite que les enquêtes aillent jusqu'à leur terme. Ce ne doit pas être très difficile de retracer les flux financiers, de voir qui a donné les ordres, qui a reçu l'argent, tout cela les services américains sont capables de le retracer, et j'attends qu'ils...j'espère qu'ils vont le faire. Quant à moi, j'avais demandé, il y a déjà un mois, au Sénat français, de créer une commission d'enquête. Ce n'est pas moi. Moi, je suis capable de me défendre, ce n'est pas de cela dont il s'agit. C'est la campagne qui est engagée et qui vise un certain nombre de grosses entreprises françaises et d'intérêts français. Et j'ai demandé hier, officiellement au président du Sénat, la création d'une commission d'enquête, et j'ai aussi demandé qu'il y ait entre le Sénat américain et le Sénat français une coopération pour que l'on essaie de clarifier tout cela et y voir un peu plus net.
Q- Vous aviez dit que vous alliez porter plainte contre des organes de presse...
R- C'est fait.
Q- Y a-t-il un moyen de porter plainte contre les sénateurs
américains ?
R- Contre les sénateurs américains, non. Mais contre ceux qui sont à l'origine de la fourniture de ces documents, probablement. Et c'est ce que je fais étudier aux Etats-Unis. Parce qu'en réalité, c'est le terme de "Commission d'enquête du Sénat américain" est impropre.Pourquoi ?
Parce qu'en réalité, ils se servent de documents qui leur ont été fournis par des enquêteurs de la Commission Volcker, qui ont démissionné de cette Commission, et qui ont enfreint les engagements qu'ils avaient pris.
Q- Donc, c'est [contre] eux que vous vous retournez ?
R- Cela, je verrai. J'ai choisi un avocat aux Etats-Unis, c'est à lui maintenant d'examiner les choses et me dire ce qu'il convient de faire. Quant à moi, je vais répondre point par point à ce rapport - la partie qui me concerne ; je vais répondre point par point, à la Commission du Sénat américain.
Q- Dernière question : comment expliquez-vous, très franchement, que ce soit toujours vers vous que l'on se retourne pour un certain nombre d'affaires ?
R- C'est une bonne question.
Q- Je vais formuler ma question, très franchement. Est-ce que vous avez, dans votre carrière, tutoyé parfois la ligne jaune, non pas pour financer votre fortune personnelle, mais pour financer vos campagnes et vos idées disons... ?
R- Non, hélas ! hélas ! non. Cela, je crois que personne, enfin en tous les cas ceux qui ont eu à examiner les choses n'ont aucun doute là-dessus, non. Je n'ai jamais utilisé de moyens illégaux ou à la marge pour "financer [mes] campagnes" comme vous dites. Ma situation est claire.
Q- Mais pourquoi est-ce si sulfureux autour de vous ?
R- Voilà, cela c'est une bonne question.
Q- Votre réponse ?
R- Probablement, parce qu'i l y a des règlements de comptes, que j'ai gêné un certain nombre de gens, et que j'en gêne encore, voilà.
Q- Et qui cherche à vous nuire ?
R- Ah ?...
Q- En France ?
R- En France, oui, certainement.
Q- Du côté de vos amis de la majorité ?
R- Je ne sais pas. On finira bien par le savoir.
Q- Un mot sur la campagne. Vous êtes en campagne pour le non. J'ai été voir sur votre site, j'ai lu : "Donnez votre non - non - pour la France, et l'indépendance de l'Europe" et il y a une croix de Lorraine. Pensez-vous que le général de Gaulle, dont vous semblez vous réclamer à travers cette Crois de Lorraine, aurait récusé ce texte ?
R- Je ne semble pas me réclamer du général de Gaulle. Je suis un disciple du général de Gaulle. Je l'ai été dans la guerre et je le suis resté dans la paix. Certains doivent leur carrière au gaullisme, ils ont depuis renié ses idées. C'est leur...
Q- Qui ?
R- Je ne suis pas là pour accuser qui que ce soit ! Mais je constate. Je suis resté fidèle à ses idées. Je ne sais pas ce que le général de Gaulle ferait aujourd'hui. Ce dont je suis sûr, c'est ce qu'il ne ferait pas. Le général de Gaulle était contre l'intégration européenne, il était pour l'Europe des nations et des patries, et il était contre la supranationalité. Voilà. Donc, je suis convaincu d'être dans la même ligne de pensée lorsque je prends les positions qui sont les miennes. Je ne suis pas contre l'Europe, pas plus que le général de Gaulle ne l'était, je suis contre ce système et je suis contre une nouvelle avancée vers ce que je considère comme la marche vers le fédéralisme. C'est d'ailleurs la seule explication de cette Constitution. Dans le cas contraire, il n'y en a pas. Si ce n'est pas pour aller vers le fédéralisme, elle ne sert à rien, voilà.
Q- Une dernière question à l'ancien ministre de l'Intérieur : que pensez-vous du plan qu'a présenté D. de Villepin, l'actuel ministre de l'Intérieur, pour lutter contre l'immigration clandestine ?
R- C'est toujours intéressant de présenter des plans. Mais si la Constitution est adoptée, la France sera dépourvue de moyens propres, elle devra se retourner...
Q- Je croyais que l'Europe lui donnerait davantage de moyens ?
R- Non, pas du tout. Par exemple, les accords de Schengen n'existeront plus dès lors que la Constitution européenne sera adoptée. Ce qui veut dire, qu'à l'heure actuelle, si la France considère que ses intérêts vitaux sont en jeux, elle peut, du jour au lendemain, bloquer ses frontières. Elle ne le pourra plus dès lors que la Constitution sera votée. Elle devra demander à la Commission européenne, puis au Parlement européen son accord pour le faire.
Q- Pour 2007, N. Sarkozy est votre candidat ?
R- Je n'ai pas de candidat pour 2007. Je verrai bien. Ce qui me choque un peu, je le dis, Dieu sait que je connais bien Nicolas, je l'aime bien, mais il y a un argument que je ne peux pas accepter, en ce qui me concerne, c'est de dire : il faut dire oui à l'Europe pour pouvoir changer les choses en France. Cela, c'est un aveu de renoncement. On dit : comme on ne peut pas transformer les choses en France, l'Europe nous y contraindra. Non. Ce qui manque aux dirigeants français et aux hommes politiques français c'est la volonté. Dès lors qu'ils ont la volonté, ils peuvent faire des choses.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 mai 2005)
R- Oui.
Q- D'abord, avant de parler de cette campagne pour le non, il y a un petit accident dans cette campagne, c'est ce fameux rapport du Sénat américain qui vous reproche, dans le cadre de l'Opération "Pétrole contre nourriture", d'avoir bénéficié d'un certain nombre de libéralités du régime de S. Hussein. Première question : les sénateurs américains vous ont-ils entendu, vous ont-ils consulté avant la publication de ce rapport ?
R- Non, absolument pas. Je n'ai été consulté, ni approché par personne. Cela fait partie des questions que l'ont peut se poser. C'est d'ailleurs ce que dit le Quai d'Orsay lui-même dans une dépêche, puisqu'il dit que l'on cite des noms sans que personne n'ait eu le moyen d'expliquer ou de se défendre.
Q- Alors, les documents qui sont avancés par les sénateurs, notamment des lettres signées du directeur de l'organisme de commercialisation du pétrole, à votre avis, sont-ils des faux ?
R- C'est très difficile de répondre à cette question. Très honnêtement, je ne crois pas que ce soient des faux. Je ne mets pas en doute les compétences des services de renseignement américains. Et je ne crois pas qu'ils se soient livrés à une manipulation. Par contre, on peut s'interroger sur l'origine de ces documents. Qui les a faits ? Dans quelles conditions les a-t-on trouvés ? Etc. Mais tout cela n'est pas nouveau. Cela avait fait l'objet d'une publication dans un journal irakien qui est un journal qui avait été créé au lendemain de la victoire américaine, et de même que cela avait été repris au mois d'octobre dernier. J'avais démenti en ce qui me concerne. Je crois qu'il faut se rendre compte d'une chose, c'est qu'il y a aux Etats-Unis une véritable psychose, et cette psychose consiste à dire que, si la France a pris une position hostile à l'intervention américaine, c'est en fonction de ses intérêts économiques ou des relations privilégiées qu'elle pouvait avoir avec S. Hussein. Dans cette affaire, ce qui m'est reproché n'est que la partie apparente de l'iceberg. Parce qu'il y a une course qui est engagée entre trois commissions du Congrès américain, trois commissions d'enquête, plus la Commission Volcker qui a été créée par le secrétaire général des Nations Unies, plus le FBI. Or, la presse américaine elle-même, hier, considérait qu'il n'y avait aucune preuve de tout ce qui était avancé, et c'est vrai.
Q- Alors s'il y a manipulation du côté irakien, comme vous le disiez à l'instant, comment expliquez-vous que ce soit votre nom qui soit mis en avant ? Cherche-t-on à viser J. Chirac à travers vous ?
R- Cela me paraît évident. Peut-être aussi que, ceux qui pensent à travers moi atteindre J. Chirac, ignorent que la nature de nos relations a changé, au moins sur le plan politique, et que s'ils s'imaginent que j'aurais pu influencer la politique de la France, ils se trompent. De toute façon, j'ai déjà dit et je souhaite que les enquêtes aillent jusqu'à leur terme. Ce ne doit pas être très difficile de retracer les flux financiers, de voir qui a donné les ordres, qui a reçu l'argent, tout cela les services américains sont capables de le retracer, et j'attends qu'ils...j'espère qu'ils vont le faire. Quant à moi, j'avais demandé, il y a déjà un mois, au Sénat français, de créer une commission d'enquête. Ce n'est pas moi. Moi, je suis capable de me défendre, ce n'est pas de cela dont il s'agit. C'est la campagne qui est engagée et qui vise un certain nombre de grosses entreprises françaises et d'intérêts français. Et j'ai demandé hier, officiellement au président du Sénat, la création d'une commission d'enquête, et j'ai aussi demandé qu'il y ait entre le Sénat américain et le Sénat français une coopération pour que l'on essaie de clarifier tout cela et y voir un peu plus net.
Q- Vous aviez dit que vous alliez porter plainte contre des organes de presse...
R- C'est fait.
Q- Y a-t-il un moyen de porter plainte contre les sénateurs
américains ?
R- Contre les sénateurs américains, non. Mais contre ceux qui sont à l'origine de la fourniture de ces documents, probablement. Et c'est ce que je fais étudier aux Etats-Unis. Parce qu'en réalité, c'est le terme de "Commission d'enquête du Sénat américain" est impropre.Pourquoi ?
Parce qu'en réalité, ils se servent de documents qui leur ont été fournis par des enquêteurs de la Commission Volcker, qui ont démissionné de cette Commission, et qui ont enfreint les engagements qu'ils avaient pris.
Q- Donc, c'est [contre] eux que vous vous retournez ?
R- Cela, je verrai. J'ai choisi un avocat aux Etats-Unis, c'est à lui maintenant d'examiner les choses et me dire ce qu'il convient de faire. Quant à moi, je vais répondre point par point à ce rapport - la partie qui me concerne ; je vais répondre point par point, à la Commission du Sénat américain.
Q- Dernière question : comment expliquez-vous, très franchement, que ce soit toujours vers vous que l'on se retourne pour un certain nombre d'affaires ?
R- C'est une bonne question.
Q- Je vais formuler ma question, très franchement. Est-ce que vous avez, dans votre carrière, tutoyé parfois la ligne jaune, non pas pour financer votre fortune personnelle, mais pour financer vos campagnes et vos idées disons... ?
R- Non, hélas ! hélas ! non. Cela, je crois que personne, enfin en tous les cas ceux qui ont eu à examiner les choses n'ont aucun doute là-dessus, non. Je n'ai jamais utilisé de moyens illégaux ou à la marge pour "financer [mes] campagnes" comme vous dites. Ma situation est claire.
Q- Mais pourquoi est-ce si sulfureux autour de vous ?
R- Voilà, cela c'est une bonne question.
Q- Votre réponse ?
R- Probablement, parce qu'i l y a des règlements de comptes, que j'ai gêné un certain nombre de gens, et que j'en gêne encore, voilà.
Q- Et qui cherche à vous nuire ?
R- Ah ?...
Q- En France ?
R- En France, oui, certainement.
Q- Du côté de vos amis de la majorité ?
R- Je ne sais pas. On finira bien par le savoir.
Q- Un mot sur la campagne. Vous êtes en campagne pour le non. J'ai été voir sur votre site, j'ai lu : "Donnez votre non - non - pour la France, et l'indépendance de l'Europe" et il y a une croix de Lorraine. Pensez-vous que le général de Gaulle, dont vous semblez vous réclamer à travers cette Crois de Lorraine, aurait récusé ce texte ?
R- Je ne semble pas me réclamer du général de Gaulle. Je suis un disciple du général de Gaulle. Je l'ai été dans la guerre et je le suis resté dans la paix. Certains doivent leur carrière au gaullisme, ils ont depuis renié ses idées. C'est leur...
Q- Qui ?
R- Je ne suis pas là pour accuser qui que ce soit ! Mais je constate. Je suis resté fidèle à ses idées. Je ne sais pas ce que le général de Gaulle ferait aujourd'hui. Ce dont je suis sûr, c'est ce qu'il ne ferait pas. Le général de Gaulle était contre l'intégration européenne, il était pour l'Europe des nations et des patries, et il était contre la supranationalité. Voilà. Donc, je suis convaincu d'être dans la même ligne de pensée lorsque je prends les positions qui sont les miennes. Je ne suis pas contre l'Europe, pas plus que le général de Gaulle ne l'était, je suis contre ce système et je suis contre une nouvelle avancée vers ce que je considère comme la marche vers le fédéralisme. C'est d'ailleurs la seule explication de cette Constitution. Dans le cas contraire, il n'y en a pas. Si ce n'est pas pour aller vers le fédéralisme, elle ne sert à rien, voilà.
Q- Une dernière question à l'ancien ministre de l'Intérieur : que pensez-vous du plan qu'a présenté D. de Villepin, l'actuel ministre de l'Intérieur, pour lutter contre l'immigration clandestine ?
R- C'est toujours intéressant de présenter des plans. Mais si la Constitution est adoptée, la France sera dépourvue de moyens propres, elle devra se retourner...
Q- Je croyais que l'Europe lui donnerait davantage de moyens ?
R- Non, pas du tout. Par exemple, les accords de Schengen n'existeront plus dès lors que la Constitution européenne sera adoptée. Ce qui veut dire, qu'à l'heure actuelle, si la France considère que ses intérêts vitaux sont en jeux, elle peut, du jour au lendemain, bloquer ses frontières. Elle ne le pourra plus dès lors que la Constitution sera votée. Elle devra demander à la Commission européenne, puis au Parlement européen son accord pour le faire.
Q- Pour 2007, N. Sarkozy est votre candidat ?
R- Je n'ai pas de candidat pour 2007. Je verrai bien. Ce qui me choque un peu, je le dis, Dieu sait que je connais bien Nicolas, je l'aime bien, mais il y a un argument que je ne peux pas accepter, en ce qui me concerne, c'est de dire : il faut dire oui à l'Europe pour pouvoir changer les choses en France. Cela, c'est un aveu de renoncement. On dit : comme on ne peut pas transformer les choses en France, l'Europe nous y contraindra. Non. Ce qui manque aux dirigeants français et aux hommes politiques français c'est la volonté. Dès lors qu'ils ont la volonté, ils peuvent faire des choses.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 mai 2005)