Déclaration de M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer, sur les axes de la politique d'aménagement du réseau des gares ferroviaires, Paris le 19 mai 2005.

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Circonstance : 45e forum d'Iéna "Quelles gares et aérogares pour demain ?" à Paris, le 19 mai 2005

Texte intégral

Le thème que vous avez choisi pour le 45ème forum : "Quelles gares et aérogares pour demain ?" m'apparaît tout à fait pertinent. Il concerne en effet plusieurs points qui seront au cours de la décennie au cur de la problématique " transports ". Permettez-moi de les rappeler ici : il s'agit du développement durable, de l'accessibilité et de l'intermodalité. Je centrerai les propos qui suivent essentiellement sur la dernière question.
Parmi toutes les questions auxquelles vous avez essayé de répondre, j'en relève deux :
- qu'est-ce qu'un pôle d'échange réussi aujourd'hui ?
- entre la gare d'hier et le pôle d'échanges de demain, quelles révolutions ?
Dans un monde de plus en plus mobile, la gare doit évoluer: si nous voulons un développement durable, elles doivent se transformer en pôle multimodal, en nud d'échanges. A rebours de l'histoire ferroviaire qui fait de la gare et de l'aérogare le bâtiment réservé aux voyageurs, le pôle d'échange doit permettre une optimisation des correspondances entre réseaux ou modes de transports et donc de les rendre d'une utilisation beaucoup plus simple pour les usagers et donc beaucoup plus attractifs. Gares et aérogares doivent être la traduction dans les transports de la société de services.
L'intermodalité se heurte, hélas, à bien des obstacles, notamment le plus important d'entre eux à mon sens : la multiplicité et la diversité des acteurs.
Les compétences Transports et Aménagement sont fragmentées alors que leur association est indispensable dans le montage d'opérations. Bien plus, les pôles d'échanges accueillent certes des voyageurs mais aussi des activités de service de plus en plus larges. D'où des conflits d'usage et des conflits d'échelle.
Parce qu'un complexe comme, par exemple, celui de La Défense, ne peut se vivre comme une juxtaposition de concepts monomodaux, un opérateur d'ensemble est inévitable pour une gestion intermodale.
Des solutions existent, je pense aux syndicats mixtes de la loi Solidarité et Renouvellement Urbains. Sur un périmètre qu'elles définissent d'un commun accord, plusieurs autorités organisatrices de transports peuvent s'associer au sein d'un syndicat mixte afin de coordonner les services de transports qui relèvent de leur compétence, mettre en place un système d'information et de tarification coordonnée. Le syndicat mixte peut donc assurer, en lieu et place de ses membres, la réalisation et la gestion d'équipement et d'infrastructures de transports. Il s'agit là d'une possibilité, mais il faudra très vraisemblablement trouver des formules qui vont bien au delà pour gérer la complexité des gares multimodales du 21ème siècle.
Après la coordination entre acteurs, le deuxième enjeu concerne l'aménagement des gares de demain, qui devra avoir le souci de l'articulation.
Ce qui veut dire soigner les aménagements externes des pôles d'échanges, afficher la préoccupation des liaisons de rabattement pour accéder au pôle, et dans le cas des gares -pas des aérogares naturellement ne pas oublier la marche à pied comme mode privilégié d'accès.
Il ne faut pas oublier que les pôles d'échanges sont très dépendants du contexte local dans lequel ils s'inscrivent. Il conviendra donc de mettre en place des mécanismes permettant de penser ensemble transports et urbanisme. Il y a, en ce domaine, une prise de conscience récente dont témoigne notamment le Plan de Déplacements Urbains d'Île -de-France, dont l'un des axes est d'offrir un meilleur accès aux services urbains en densifiant les secteurs autour des gares, en valorisant leurs abords.
Ce souhait d'une densification urbaine autour des pôles d'échanges me semble être une idée à creuser.
Les aménagements internes, quant à eux, devront allier clarté et simplicité, pour atténuer l'effet labyrinthe de certains pôles d'échanges.
Ce souci devra également se manifester à travers la parfaite accessibilité du site. C'est une grande cause nationale qui vise à rattraper un retard qui n'était pas admissible. La loi du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées nous donne comme objectif à l'horizon d'une dizaine d'années la parfaite intégration dans notre système de déplacement de tous ceux qui souffrent d'un handicap. Les abords des pôles d'échanges et leurs aménagements intérieurs devront donc être traités sans aucune rupture dans les cheminements.
Dans le domaine ferroviaire, la SNCF a lancé un plan d'actions en 2003 en faveur de l'accessibilité lors de la signature de la "Charte nationale d'accessibilité" avec plusieurs ministres et RFF. Ce plan prévoit notamment de créer un réseau de gares accessibles à moins de 50 km du domicile de toutes personnes à mobilité réduite. Ainsi d'ici 10 ans 724 gares contre 250 aujourd'hui seraient accessibles aux Personnes à Mobilité Réduite, soit plus d'une sur deux !
Afin d'aller plus loin, la SNCF a lancé le concept Mobigare qui doit permettre d'aller plus loin que ce premier schéma. Il s'agit de réaliser de nouveaux aménagements et services spécifiques -des guichets surbaissés par exemple- en collaboration avec les associations représentatives des personnes à mobilité réduite.
Quatrième et dernier enjeu, il conviendra également de soigner tout particulièrement les services, clés du succès des pôles d'échanges.
Bien évidemment les services aux voyageurs devront faire l'objet de la plus grande attention, qu'il s'agisse de la billetterie ou des kiosques d'information. Mais un soin tout aussi attentif doit être apporté aux services connexes, telles que les galeries commerciales, car le temps du transport n'est plus aujourd'hui, pour nos concitoyens, un temps mort, mais un temps de vie à part entière. Je salue à cet égard, l'initiative de la RATP qui, dans ses centres d'échanges, met à la disposition de ses clients des bouquets de services équipés notamment en consoles informatiques.
Nos gares hébergent aujourd'hui des centres commerciaux parmi les plus importants à Paris, et nos aéroports sont également des vitrines commerciales sur des créneaux certes différents.
Voilà les quelques propos que je voulais livrer à votre réflexion. Si nos gares, aérogares et pôles d'échanges répondent à ces 4 caractéristiques que sont la coordination des acteurs, la bonne articulation des interfaces, une parfaite accessibilité et enfin une qualité de service particulièrement soignée, la plupart des défis seront relevés. Je tiens à dire, en tant que grand utilisateur de ces lieux, nous pouvons nous réjouir de la grande qualité qui nous est offerte dans ces lieux mêlant déplacements et consommation, loisir et travail.
Pour en faire des réalisations exemplaires, l'innovation et l'imagination doivent s'exprimer sans retenue !
(Source http://www.equipement.gouv.fr, le 23 mai 2005)