Déclaration de M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, sur la mise en place de la réforme budgétaire et notamment des nouvelles fonctions manageriales de l'Etat, Paris le 9 mars 2004.

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Circonstance : Colloque "La loi organique relative aux lois de finances à 18 mois des échéances" à Paris, le 9 mars 2004

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Je souhaitais profiter de cette journée pour délivrer quelques messages auxquels je tiens personnellement et particulièrement.
Un bref rappel d'abord : nous avons de la chance ! Car cette Nouvelle constitution financière marquera l'histoire budgétaire et financière de la Vème République - et nous pourrons dire : nous en étions ! Une révolution silencieuse est en marche. Une révolution pacifique, mais copernicienne, de l'organisation budgétaire de notre pays.
Je remercierai Louis Schweitzer qui, ce matin, a bien voulu témoigner de son expérience de la conduite du changement, pratique que nous devrons intégrer. Il siège aux côtés de Daniel Bernard et Daniel Bouton, au sein du "Conseil pour la nouvelle constitution financière de la France". Leur expérience nous apporte beaucoup.
Mes remerciements s'adressent à tous ceux qui ont accepté de participer à ces travaux, directeurs d'administration centrale et chefs de services déconcentrés.
Depuis l'entrée en vigueur de notre loi, beaucoup a été fait. J'en ferai un rapide constat :
- la nouvelle architecture du budget de l'Etat est soumise à l'appréciation du Parlement ;
- les treize normes de comptabilité publique ont été arrêtées ;
- de très nombreuses expérimentations sont menées, dans tous les ministères, et je tiens à en remercier tous les acteurs.
Mais beaucoup reste encore à faire. Je me réjouis donc que vous participiez à cette journée de travail.
Au moment où les responsables de programmes commencent à être connus, elle permet de discuter de ce nouveau métier, y compris dans ses rapports avec les services déconcentrés.
Cette journée est aussi l'occasion pour moi :
de rappeler l'exigence qui est la nôtre de faire vivre cette réforme ;
de faire partager ma conviction que l'Etat a désormais besoin de "managers".
I. Nous devons faire vivre cette réforme et l'inscrire dans le quotidien des administrations.
Quelle fierté pour nous tous de pouvoir progresser dans la gestion des deniers des Français, de parvenir à ce que, pour le même impôt payé, le service rendu soit meilleur.
L'esprit de concorde et de responsabilité politique qui a présidé à l'adoption de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) au Parlement, nous fait obligation de mettre en oeuvre avec un même enthousiasme, un même idéal démocratique cette loi pour la rendre concrète à nos compatriotes.
Une étape majeure a été franchie avec la présentation le 21 janvier dernier de la nouvelle architecture du budget de l'Etat.
J'évoquerai à ce sujet les "missions interministérielles". Ces missions ne sont pas un dessaisissement des ministères, chacun restant responsable de la mise en uvre des programmes.
Les programmes sont le coeur de l'exécution budgétaire et le lieu de l'exercice de la responsabilité.
Je me réjouis de la part active, enthousiaste et experte que prend le Parlement, notamment ses commissions des Finances. Cette coopération du Parlement nous sera précieuse pour parfaire notre copie.
La présentation plus moderne du budget de l'Etat révèle la révolution silencieuse de l'organisation et des pratiques administratives qui ouvre la voie à une réforme profonde de notre Etat.
L'objectif est d'une importance première tant au plan de la démocratie que de l'efficacité de l'action publique.
Il s'agit :
de partir désormais des besoins des Français et non plus des demandes des administrations ;
de passer d'une logique quantitative de moyens à une culture qualitative de projets et de résultats.
Chaque politique doit désormais être justifiée, dès le premier euro, au regard exclusif du bienfait qu'elle apportera aux Français et des résultats qu'il est légitime d'obtenir avec leur argent.
Grâce à vous, l'esprit de résultat, de performance, l'exigence du résultat et de la performance habitera, obsèdera même nos administrations.
Les indicateurs de performance nous aideront à avoir un regard éclairé sur l'utilisation de l'impôt prélevé sur le fruit du travail des Français.
Le budget de la France redeviendra l'acte démocratique fondamental qu'il n'aurait jamais du cesser d'être.
Avec ces pratiques rénovées, nous pourrons envoyer aux Français un message politique pour les mobiliser autour d'objectifs communs et ainsi renforcer leur confiance dans l'action publique.
Faisons-le en instillant une culture "managériale" au sein de nos administrations. Elle renforcera la fierté des agents de l'Etat de servir un Etat moderne, et, à travers lui, chaque Français.
II. Vous êtes les nouveaux "managers" publics dont notre Etat a besoin
Avec la réforme budgétaire, vous devenez réellement, sous l'autorité de vos ministres, les managers de l'Etat.
C'est un métier totalement nouveau. Il vous révélera des qualités que vous avez en vous-même et que vous n'aviez pas toujours l'occasion de mobiliser.
Les responsables de programme, par exemple, seront aux administrations publiques ce que sont les "managers" des unités opérationnelles dans les grandes entreprises : des pilotes et des coordinateurs.
- Ils seront libres de l'utilisation des crédits, et répondront, en contrepartie, de leurs résultats ;
- ils assumeront des risques ;
- ils redéploieront les emplois et les crédits en fonction des priorités ;
- ils défendront une vraie vision stratégique en mobilisant derrière eux les équipes de fonctionnaires autour d'objectifs nouveaux.
La démarche de performance s'imprégnera tout au long de la ligne hiérarchique et irriguera l'ensemble de nos administrations.
La diffusion de la culture de responsabilité n'est pas un slogan. Elle est le gage d'un service public qui progresse. Cette culture identifie les responsables, offre une grande liberté de gestion et un pilotage par la performance. La "moderfie" est une réforme de management fondée sur un postulat : une administration plus responsable est toujours plus efficace.
Ce changement de culture va apporter souplesse et flexibilité. Il permettra de mieux répondre aux attentes de nos concitoyens.
Cette réforme profitera à chacun. Les Français y trouveront leur compte, le consentement à l'impôt n'en sortira que renforcé et tous ceux qui ont choisi le beau métier de fonctionnaire ne pourront que se sentir valorisés et grandis dans les valeurs de la République. En renouvelant le travail de l'ensemble des agents publics, en les mobilisant autour d'objectifs, en leur donnant les moyens de les atteindre, nous récréerons pour chacun d'entre eux de la fierté de servir.
Je suis venu cet après-midi, solennellement, vous demander de faire partager à tous vos agents cet enthousiasme en les convainquant des bienfaits de notre réforme, en expliquant que cette loi organique, encore technique et lointaine pour beaucoup, renforcera l'intérêt de leurs missions, améliorera leurs conditions de travail et fera grandir la considération que leur portent les Français.
Mesdames et Messieurs,
Tous les exemples étrangers le montrent : aucune réforme d'envergure des administrations publiques ne peut voir le jour sans une profonde réforme budgétaire préalable. Je suis venu ce soir vous exprimer ma confiance dans votre capacité à implanter ces bonnes pratiques, pour moderniser l'Etat avec force et sérénité.
Aucune réforme ne s'est jamais imposée par décret, les administrations ne se sont jamais réformées contre leur gré.
L'esprit qu'il nous faut insuffler est tout autre. En favorisant les évolutions, en encourageant vos administrations à optimiser, d'elle-même, leur fonctionnement, en favorisant l'émergence de "managers" publics, en instituant un Etat stratège, nous ouvrons le chemin le plus sûr et le plus efficace vers cette modernisation de la France attendue de tous.
Cette chance de progrès qui nous est offerte, transformons-la en progrès pour la France et les Français
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 15 mars 2004)