Texte intégral
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Cette 52e finale nationale de labour revêt un intérêt particulier. En effet, nous y rassemblons non seulement l'esprit festif et convivial des Jeunes agriculteurs, non seulement leur sens de l'organisation d'un événement grandiose, mais encore une explication pratique d'un thème qui nous est cher, la bioénergie. " Babette fête l'énergie verte " est le symbole de nouvelles aspirations des agriculteurs à s'inviter au débat sur 1 énergie.
Cette finale nationale de labour, qui s'achève ce soir, a connu un immense succès, avec plus de 80 000 visiteurs sur trois jours. L'organisation d'un événement de cette ampleur par une équipe locale démontre que les Jeunes agriculteurs savent promouvoir leur métier en s'ouvrant sur le grand public, en alliant convivialité et professionnalisme, et en assurant qui plus est, la promotion des biocarburants et autres débouchés énergétiques ou non alimentaires de l'agriculture.
Car être jeune dans l'agriculture aujourd'hui c'est, Monsieur le Ministre, savoir réfléchir à ses nouveaux engagements. Le premier d'entre eux est, et restera, de savoir nourrir une population sans cesse plus nombreuse, et cela en utilisant une terre qui ne s'étend pas, souvent bien au contraire ! Mais il y a aussi ces nouveaux défis à relever. Nourrisseurs de la planète, nous le sommes et le serons. Fournisseurs de carburants notamment, nous le devenons ! Je remercie très chaleureusement les Jeunes agriculteurs du Pas-de-Calais d'avoir su nous montrer, au travers d'animations riches et variées liées à la finale de labour, tout un éventail de possibilités offertes par la modernisation et la technicité d'une agriculture nouvelle, soucieuse de mener à bien ses missions, tout prenant en compte la demande environnementale de la société. Je remercie, et j'applaudis particulièrement, Gérald Cazin, président des Jeunes agriculteurs du Pas-de-Calais, et Dominique Tabary, président du comité d'organisation de la manifestation qui nous accueille aujourd'hui.. Merci à vous messieurs, et transmettez à vos équipes, à tous les jeunes qui vous ont soutenu et qui nous ont permis de savourer ce week-end, toutes nos félicitations.
Sans ces jeunes, la finale nationale de labour n'aurait pas pu avoir tout son retentissement. Sans ses partenaires non plus. Merci aussi à tous les partenaires qui ont soutenu cet événement Terre Attitude.
Je veux remercier tout particulièrement les 4 associations spécialisées de la FNSEA que sont l'AGPB, l'AGPM, la CBG, la FOP pour avoir construit ce beau village de l'énergie verte, pour leur implication politique sur cet événement Terre Attitude et pour leur travail au quotidien sur ce sujet de demain qui est le développement des biocarburants. Vous pouvez compter sur les Jeunes agriculteurs pour vous accompagner et vous soutenir pour porter ces projets d'avenir.
Je veux également remercier Total, qui nous accompagne depuis plus de vingt ans, et encore aujourd'hui, alors que nous affichons clairement une opinion qui n'est pas exactement la sienne en matière d'énergie. La preuve que le dialogue existe, que les protagonistes, d'un côté
comme de l'autre, sont ouverts. Merci à vous messieurs, mais je ne désespère pas de vous convaincre que, si nous avons toujours besoin des énergies fossiles, qui ne l'oublions pas ne sont pas inépuisables, il serait tout de même judicieux et stratégique, pour un pays comme la France, de savoir intégrer toujours davantage d'énergies renouvelables dans s'es carburants.
Je veux aussi remercier un autre partenaire, Deutz-Fahr. En dotant un concours que nous avons organisé d'un tracteur neuf, investissement lourd pour un JA, dont nous allons d'ailleurs remettre les clés juste après ces discours. Deutz-Fahr montre qu'il ne s'intéresse pas qu'à des clients, mais également à des femmes et des hommes et à leur environnement. Nous vous en remercions chaleureusement.
Mais avant de parler de l'agriculture de demain, attardons-nous déjà sur celle d'aujourd'hui. Et là, Monsieur le Ministre, je me tourne vers vous.
Tout d'abord, comme vous le savez, l'agriculture s'exerce en plein air. Elle est donc tributaire des climats, et de ses excès. Cet été, nous avons connu la sécheresse. Et, plus récemment, cette nouvelle catastrophe qui est venue s'ajouter aux précédentes, dans les départements du Gard, de l'Hérault et de l'Aude. Sécheresse, inondations... Autant d'événements qui nous rappellent l'urgence à mettre en place un véritable dispositif d'assurance récolte, obligatoire, étendu à toutes les productions, y compris le fourrage. Si le fonds des calamités agricoles peut répondre à des situations extrêmes en indemnisant les agriculteurs les plus sinistrés, celui-ci est largement remis en cause dans son fonctionnement : estimations des pertes controversées (en Aveyron), taux d'indemnisation trop bas (il faut passer de 28 à 50 %), prise en compte insuffisante des pluri sinistrés, délais de paiement longs... Autant de griefs qui impliquent que l'assurance récolte soit généralisée à l'ensemble du territoire pour éviter les inéquités de traitement entre les agriculteurs qui dépendraient de l'un ou l'autre système. Je sais, Monsieur le Ministre, que vous êtes sensible à cette orientation. Nous souhaitons tous maintenir et encourager la dynamique engagée sur l'assurance récolte.
Pour les fruits et légumes, un coefficient multiplicateur a été mis en place. Pardon, il a été décidé, voté, mais justement, le problème, c'est qu'il n'a pas été mis en place ! Mais n'est-ce pas le rôle de l'État que de veiller à la bonne application de ses décisions ? Peut-être ce coefficient multiplicateur ne résoudra pas tous les problèmes, mais comment s'en assurer si on n'essaye même pas ? Monsieur le Ministre, nous avons perdu une saison. Le moins que l'on puisse attendre de vous, c'est que nous ne perdions pas la suivante ! Cette fois, vous avez tout le temps de mettre en place des outils de régulation de la filière !
Pour le lait, qui était encore la filière la plus régulée il n'y a pas si longtemps, les repères manquent désormais. La vision, à moyen et long termes, est devenue pour le moins embrumée. Et là encore, Monsieur le Ministre, qui, sinon l'État, peut donner de la lisibilité à une profession, aujourd'hui bafouée par le non-respect d'accords signés ? Qui peut, à part vous, obliger tous les acteurs à respecter la règle du jeu ? La nomination de Jean-Daniel Besnard comme médiateur a permis le retour de tous les acteurs de l'interprofession autour de la table des négociations, pour trouver une issue à cette crise. Mais l'accord trouvé cette semaine ne nous satisfait pas puisqu'il recommande la fin d'un prix unique du lait. Nous ne pourrons pas en rester là pour l'avenir.
Pour les céréales, la récolte ne sera pas suffisante. Ça arrive me direz-vous. Mais cela arrive au moment où les prix sont au plus bas. Et là, nous ne pouvons pas l'accepter, car ces prix bas sont dus à des décisions bruxelloises que nous, Jeunes agriculteurs, avons contestées... Vous avez bien voulu nous écouter. Mais il faut aller plus loin et nous aider à réaliser une bonne campagne. Au moins, Monsieur le Ministre, n'oubliez pas de soutenir notre dernier garde-fou, lors des prochaines négociations à l'OMC en décembre: je veux parler de la préférence communautaire, comme l'a rappelé le Premier Ministre au Space. Il n'est plus question de perdre quoi que ce soit à Hong Kong. Et sur ce point, ce qui est valable pour les céréales l'est pour toutes les productions.
Concernant la viticulture, nous suivons avec intérêt l'assainissement du marché. La distillation, accordée pour 1,5 million d'hectolitres de vins AOC, n'est pas encore arrivée à terme. Je vous rappelle, Monsieur le Ministre, que nous vous avons également demandé celle de 3 millions d'hectolitres de vins de table et de pays. Enfin, pour la redynamisation de l'export, nous attendons vos conclusions suite au rapport Lauga. Pour ce qui est de la resegmentation de l'offre française, je vous accorde que la profession a un rôle à jouer.
Vous connaissez aussi tous les soucis connus par les aviculteurs. Ils sont concurrencés de manière déloyale par des importations insuffisamment taxées, sans traçabilité et ne prenant pas en compte le bien-être animal. Une situation qui réclame, pour le moins, Monsieur le Ministre, une vigilance accrue, d'autant que, au niveau européen, un projet de directive, justement sur le bien-être animal, traîne comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête de nos éleveurs.
Pour ne pas avoir seulement à répondre à l'urgence, Monsieur le Ministre, vous avez jugé bon, et nous vous appuyons dans cette démarche, de promulguer une loi d'orientation agricole. Je tiens d'abord à vous remercier de nous avoir consulté, au même titre, bien sûr, que beaucoup d'autres. Chez les Jeunes agriculteurs, nous pensons que cette loi doit permettre d'effacer l'absence de lisibilité qui nuit à toutes nos filières. Elle doit imposer les organisations qui font défaut. Une véritable orientation de politique agricole s'impose en effet pour conforter notre place de leader agricole.
Qui dit " orientation ", Monsieur le Ministre, dit obligatoirement " avenir ". Et l'avenir, dans l'agriculture, c'est l'installation. Et là, je vous avoue que je ne vous comprends plus. On peut, bien sûr, ne pas être d'accord sur tel ou tel point... Mais comment peut-on, comme vous, souhaiter une " orientation " et, dans le même temps, " oublier " toute politique à l'installation ? Vous semblez vous y intéresser dans les textes de la loi d'orientation, mais omettez en même temps d'abonder les enveloppes normales, habituelles, permettant de développer une politique d'installation en agriculture.
Nous, Jeunes agriculteurs, avons tout un réseau qui, dans chaque canton, dans chaque lycée agricole, prône la passion de notre métier. Ce réseau a, lui aussi, du talent. Mais comment voulez-vous que nous arrivions à des résultats corrects si les enveloppes budgétaires destinées à inciter à la retraite ou à la préretraite, ou tout simplement à promouvoir l'installation, ne sont pas abondées comme il se doit ? Nous voulons croire que le renouvellement des générations en agriculture reste votre réelle priorité.
Les mesures d'accompagnement de l'installation et de la transmission (FICIA) viennent d'être honorées financièrement la semaine dernière.
Mais, concernant les enveloppes du stage 6 mois et du stage préparatoire à l'installation de 2005, allez-vous dire à ces candidats que leur installation est repoussée, voire compromise, pour raison de gel des crédits ? Ce gel représente jusqu'à 50 % des enveloppes départementales. Vous pouvez constater que nous ne sommes ni sur du détail, ni sur du superflu:
Concernant l'ATE et les préretraites, ces deux lignes méritent d'être mieux abondées, et différemment. Fortement réduites dans le budget 2005, elles sont aujourd'hui entièrement consommées dans certaines régions. Ne serait-il pas temps de faire état des vrais besoins des régions, quitte à mutualiser les fonds au niveau national pour 2005 ?
Pour 2006, je vous demande de faire taire les rumeurs sur une possible suppression de l'une ou l'autre ligne dont nous venons de parler et mettons nous autour d'une table pour discuter de notre projet commun de renouvellement des générations.
Je vous rappelle par ailleurs l'importance des prêts bonifiés pour les jeunes installés. Ce dispositif est un outil fondamental à l'installation, qui assure et conforte la pérennité des projets d'installations. Nous voulons le conserver mais pour cela, il doit rester attractif. Les taux des prêts " classiques " pratiqués sur les marchés par les banques concurrencent .fortement ceux des prêts bonifiés. Vous devez y remédier, Monsieur le Ministre, pour renforcer la crédibilité des aides à l'installation. Nous attendons de votre part, une révision à la baisse de 1,5 point des taux des prêts bonifiés. Cela constitue une de nos priorités et irait dans le sens de la baisse des charges que nous réclamons.
Un autre sujet nous tient à coeur, Monsieur le Ministre, la défiscalisation de la Dotation Jeunes Agriculteurs : la DJA n'est plus soumise aujourd'hui à cotisations sociales. Par souci de cohérence et de simplification administrative, nous vous demandons de nouveau à ce qu'elle ne soit plus incluse dans l'assiette fiscale.
Un autre souci majeur aujourd'hui concerne les charges qui pèsent sur nos exploitations. Il est vrai, Monsieur le Ministre, que nombreuses sont les professions qui sont étranglées par ces hausses qui n'en finissent plus. Sachez, Monsieur le Ministre, que la colère gronde dans les campagnes, et y compris chez les Jeunes. Les situations que j'ai décrites pour chaque filière sont autant de motifs d'indignation. Nous vous demandons des faits. Des actes !
Pour que notre agriculture soit compétitive et demeure un des fleurons de l'économie française (je vous cite bien volontiers les chiffres rappelés par le Premier Ministre mardi l'industrie agroalimentaire a rapporté l'année dernière 8 milliards d'euros d'excédents et représente près de 15 % de l'emploi en France), nous devons nous attaquer à la baisse des charges en agriculture. Nous sommes prêts pour cela à vous faire des propositions sérieuses et qui méritent toute votre attention.
La réduction des cotisations sociales patronales, la modification de l'assiette de calcul des cotisations sociales visant à ne plus imposer socialement et fiscalement les agriculteurs sur leur capital, sont de " vraies bonne idées ". Quant à la TVA sociale, elle mérite mieux que d'être écartée d'un revers de main par le rapport Le Guen quand d'autres pays comme l'Allemagne s'y intéressent de près. Nous attendons de votre part une étude précise sur l'impact et la faisabilité de ce mécanisme.
Pour ce qui est du fioul, directement dans nos cuves et indirectement avec tous les produits que nous devons acheter, il est l'une des causes majeures de cette insupportable hausse des charges... En 2 ans, il a augmenté de 32 centimes d'euros. En clair, son prix a doublé depuis 2003, tandis que nous n'avons pu obtenir qu'une exonération partielle à hauteur de 4 centimes d'euros sur 8 mois - à la demande des JA d'ailleurs - et de 5 centimes sur 4 mois en 2005. C'est encourageant mais pas suffisant. C'est donc au minimum d'un carburant professionnel totalement détaxé dont nous avons besoin pour 2006 pour redonner un peu de souffle aux exploitations.
Et l'on revient au thème de notre finale de labour. Les biocarburants et toutes les bioénergies en général - car il ne faut négliger aucune ressource bioénergétique - constituent une solution, aussi, pour ces charges. Nous nous félicitons du plan gouvernemental de développement des biocarburants, qui prévoit l'incorporation de 5,75 % de biocarburants dès 2008, 7 % en 2010 et 10 % en 2015. Sachez, Monsieur le Ministre, que les JA ne demandent qu'à relever ce défi, à faire pousser l'énergie verte !
Mais nous attirons votre attention sur la déclinaison de ce plan, pour qu'il conserve toute son ambition. Les modalités d'application doivent être précisées sans retard, notamment la révision annoncée de la fiscalité. La détaxation des biocarburants est devenue indispensable. Ensuite, il convient d'encourager la contractualisation entre usines et producteurs à travers un cadre incitatif Nous avons des idées, consultez-nous
Enfin, ce plan d'avenir ambitieux ne nous empêche pas de réfléchir au présent, et à l'indispensable baisse des charges. Sur ce point, une solution nous convient tout à fait l'autoconsommation de carburant vert, à travers des filières courtes et structurées.
L'actualité ce sont aussi les attaques dont nous avons été victimes pendant l'été. Ainsi donc, les agriculteurs, et notamment les maïsiculteurs, seraient à l'origine de la sécheresse ! Une accusation intolérable, irresponsable, qui ne repose sur aucun argument qui puisse tenir la route et que j'ai déjà contestée et condamnée ! Il nous faut un plan national de gestion de la ressource en eau. Depuis plus de 30 ans, les agriculteurs créent des retenues pour capter l'eau abondante en hiver et l'utiliser en période de rareté en été. Il est indispensable de conforter ces investissements.
D'une manière plus générale, nous pouvons évoquer ici l'environnement. Il ne s'agit pas de votre ministère, Monsieur le Ministre, mais rien ne vous empêche de vous exprimer pour nous aider à arrêter cet effet de mode qu'est l'empilement croissant des contraintes environnementales.
Je ne voudrais pas conclure cette intervention, Monsieur le Ministre, sans évoquer l'Europe et l'international. D'abord, concernant la Politique agricole commune, avec la mise en place des Droits à paiement unique. Je me permets d'insister sur le gros travail de communication qu'il convient de réaliser auprès des paysans pour que nous puissions bien appréhender les nouvelles règles, entre autres sur les clauses de transfert. Il est indispensable que ces nouvelles règles garantissent à chaque agriculteur un montant de DPU, et donc un niveau de revenu, le plus proche de la réalité de son exploitation en 2006. J'insiste également sur la nécessité de ne pas aller au-delà des réglementations communautaires dans la mise en oeuvre de la conditionnalité. Je pense notamment au " paquet hygiène ". N'allons pas accroître la lourdeur du dispositif quand tant d'autres pays le contestent ! D'une manière générale, nous suivons avec intérêt, Monsieur le Ministre, vos intentions de simplifier toutes les procédures.
Je réitère mes encouragements à vous voir défendre notre modèle agricole à Hong Kong. Ne laissez pas l'agriculture devenir une monnaie d'échange ! L'Organisation mondiale du commerce a toute son utilité si elle régule les marchés entre les continents et les pays. Sachez lui rappeler sa fonction, et sa raison d'exister.
Je n'oublierai pas enfin que nous sommes ici à une finale de labour. Je veux donc féliciter tous nos laboureurs pour leurs sillons si droits. La finale nationale du championnat de labour est la juste conclusion d'un grand nombre de finales départementales et régionales, elles aussi organisées par le réseau des Jeunes agriculteurs. Au total, chaque année, tous ces événements Terre Attitude rassemblent près d'un million de visiteurs, et prouvent, si besoin est, que nos campagnes sont vivantes et dynamiques.
Plus qu'une profession, Monsieur le Ministre, c'est tout un public qui attend votre intervention. Je vous cède la parole.
(Source http://www.cnja.com, le 21 septembre 20005)
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Cette 52e finale nationale de labour revêt un intérêt particulier. En effet, nous y rassemblons non seulement l'esprit festif et convivial des Jeunes agriculteurs, non seulement leur sens de l'organisation d'un événement grandiose, mais encore une explication pratique d'un thème qui nous est cher, la bioénergie. " Babette fête l'énergie verte " est le symbole de nouvelles aspirations des agriculteurs à s'inviter au débat sur 1 énergie.
Cette finale nationale de labour, qui s'achève ce soir, a connu un immense succès, avec plus de 80 000 visiteurs sur trois jours. L'organisation d'un événement de cette ampleur par une équipe locale démontre que les Jeunes agriculteurs savent promouvoir leur métier en s'ouvrant sur le grand public, en alliant convivialité et professionnalisme, et en assurant qui plus est, la promotion des biocarburants et autres débouchés énergétiques ou non alimentaires de l'agriculture.
Car être jeune dans l'agriculture aujourd'hui c'est, Monsieur le Ministre, savoir réfléchir à ses nouveaux engagements. Le premier d'entre eux est, et restera, de savoir nourrir une population sans cesse plus nombreuse, et cela en utilisant une terre qui ne s'étend pas, souvent bien au contraire ! Mais il y a aussi ces nouveaux défis à relever. Nourrisseurs de la planète, nous le sommes et le serons. Fournisseurs de carburants notamment, nous le devenons ! Je remercie très chaleureusement les Jeunes agriculteurs du Pas-de-Calais d'avoir su nous montrer, au travers d'animations riches et variées liées à la finale de labour, tout un éventail de possibilités offertes par la modernisation et la technicité d'une agriculture nouvelle, soucieuse de mener à bien ses missions, tout prenant en compte la demande environnementale de la société. Je remercie, et j'applaudis particulièrement, Gérald Cazin, président des Jeunes agriculteurs du Pas-de-Calais, et Dominique Tabary, président du comité d'organisation de la manifestation qui nous accueille aujourd'hui.. Merci à vous messieurs, et transmettez à vos équipes, à tous les jeunes qui vous ont soutenu et qui nous ont permis de savourer ce week-end, toutes nos félicitations.
Sans ces jeunes, la finale nationale de labour n'aurait pas pu avoir tout son retentissement. Sans ses partenaires non plus. Merci aussi à tous les partenaires qui ont soutenu cet événement Terre Attitude.
Je veux remercier tout particulièrement les 4 associations spécialisées de la FNSEA que sont l'AGPB, l'AGPM, la CBG, la FOP pour avoir construit ce beau village de l'énergie verte, pour leur implication politique sur cet événement Terre Attitude et pour leur travail au quotidien sur ce sujet de demain qui est le développement des biocarburants. Vous pouvez compter sur les Jeunes agriculteurs pour vous accompagner et vous soutenir pour porter ces projets d'avenir.
Je veux également remercier Total, qui nous accompagne depuis plus de vingt ans, et encore aujourd'hui, alors que nous affichons clairement une opinion qui n'est pas exactement la sienne en matière d'énergie. La preuve que le dialogue existe, que les protagonistes, d'un côté
comme de l'autre, sont ouverts. Merci à vous messieurs, mais je ne désespère pas de vous convaincre que, si nous avons toujours besoin des énergies fossiles, qui ne l'oublions pas ne sont pas inépuisables, il serait tout de même judicieux et stratégique, pour un pays comme la France, de savoir intégrer toujours davantage d'énergies renouvelables dans s'es carburants.
Je veux aussi remercier un autre partenaire, Deutz-Fahr. En dotant un concours que nous avons organisé d'un tracteur neuf, investissement lourd pour un JA, dont nous allons d'ailleurs remettre les clés juste après ces discours. Deutz-Fahr montre qu'il ne s'intéresse pas qu'à des clients, mais également à des femmes et des hommes et à leur environnement. Nous vous en remercions chaleureusement.
Mais avant de parler de l'agriculture de demain, attardons-nous déjà sur celle d'aujourd'hui. Et là, Monsieur le Ministre, je me tourne vers vous.
Tout d'abord, comme vous le savez, l'agriculture s'exerce en plein air. Elle est donc tributaire des climats, et de ses excès. Cet été, nous avons connu la sécheresse. Et, plus récemment, cette nouvelle catastrophe qui est venue s'ajouter aux précédentes, dans les départements du Gard, de l'Hérault et de l'Aude. Sécheresse, inondations... Autant d'événements qui nous rappellent l'urgence à mettre en place un véritable dispositif d'assurance récolte, obligatoire, étendu à toutes les productions, y compris le fourrage. Si le fonds des calamités agricoles peut répondre à des situations extrêmes en indemnisant les agriculteurs les plus sinistrés, celui-ci est largement remis en cause dans son fonctionnement : estimations des pertes controversées (en Aveyron), taux d'indemnisation trop bas (il faut passer de 28 à 50 %), prise en compte insuffisante des pluri sinistrés, délais de paiement longs... Autant de griefs qui impliquent que l'assurance récolte soit généralisée à l'ensemble du territoire pour éviter les inéquités de traitement entre les agriculteurs qui dépendraient de l'un ou l'autre système. Je sais, Monsieur le Ministre, que vous êtes sensible à cette orientation. Nous souhaitons tous maintenir et encourager la dynamique engagée sur l'assurance récolte.
Pour les fruits et légumes, un coefficient multiplicateur a été mis en place. Pardon, il a été décidé, voté, mais justement, le problème, c'est qu'il n'a pas été mis en place ! Mais n'est-ce pas le rôle de l'État que de veiller à la bonne application de ses décisions ? Peut-être ce coefficient multiplicateur ne résoudra pas tous les problèmes, mais comment s'en assurer si on n'essaye même pas ? Monsieur le Ministre, nous avons perdu une saison. Le moins que l'on puisse attendre de vous, c'est que nous ne perdions pas la suivante ! Cette fois, vous avez tout le temps de mettre en place des outils de régulation de la filière !
Pour le lait, qui était encore la filière la plus régulée il n'y a pas si longtemps, les repères manquent désormais. La vision, à moyen et long termes, est devenue pour le moins embrumée. Et là encore, Monsieur le Ministre, qui, sinon l'État, peut donner de la lisibilité à une profession, aujourd'hui bafouée par le non-respect d'accords signés ? Qui peut, à part vous, obliger tous les acteurs à respecter la règle du jeu ? La nomination de Jean-Daniel Besnard comme médiateur a permis le retour de tous les acteurs de l'interprofession autour de la table des négociations, pour trouver une issue à cette crise. Mais l'accord trouvé cette semaine ne nous satisfait pas puisqu'il recommande la fin d'un prix unique du lait. Nous ne pourrons pas en rester là pour l'avenir.
Pour les céréales, la récolte ne sera pas suffisante. Ça arrive me direz-vous. Mais cela arrive au moment où les prix sont au plus bas. Et là, nous ne pouvons pas l'accepter, car ces prix bas sont dus à des décisions bruxelloises que nous, Jeunes agriculteurs, avons contestées... Vous avez bien voulu nous écouter. Mais il faut aller plus loin et nous aider à réaliser une bonne campagne. Au moins, Monsieur le Ministre, n'oubliez pas de soutenir notre dernier garde-fou, lors des prochaines négociations à l'OMC en décembre: je veux parler de la préférence communautaire, comme l'a rappelé le Premier Ministre au Space. Il n'est plus question de perdre quoi que ce soit à Hong Kong. Et sur ce point, ce qui est valable pour les céréales l'est pour toutes les productions.
Concernant la viticulture, nous suivons avec intérêt l'assainissement du marché. La distillation, accordée pour 1,5 million d'hectolitres de vins AOC, n'est pas encore arrivée à terme. Je vous rappelle, Monsieur le Ministre, que nous vous avons également demandé celle de 3 millions d'hectolitres de vins de table et de pays. Enfin, pour la redynamisation de l'export, nous attendons vos conclusions suite au rapport Lauga. Pour ce qui est de la resegmentation de l'offre française, je vous accorde que la profession a un rôle à jouer.
Vous connaissez aussi tous les soucis connus par les aviculteurs. Ils sont concurrencés de manière déloyale par des importations insuffisamment taxées, sans traçabilité et ne prenant pas en compte le bien-être animal. Une situation qui réclame, pour le moins, Monsieur le Ministre, une vigilance accrue, d'autant que, au niveau européen, un projet de directive, justement sur le bien-être animal, traîne comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête de nos éleveurs.
Pour ne pas avoir seulement à répondre à l'urgence, Monsieur le Ministre, vous avez jugé bon, et nous vous appuyons dans cette démarche, de promulguer une loi d'orientation agricole. Je tiens d'abord à vous remercier de nous avoir consulté, au même titre, bien sûr, que beaucoup d'autres. Chez les Jeunes agriculteurs, nous pensons que cette loi doit permettre d'effacer l'absence de lisibilité qui nuit à toutes nos filières. Elle doit imposer les organisations qui font défaut. Une véritable orientation de politique agricole s'impose en effet pour conforter notre place de leader agricole.
Qui dit " orientation ", Monsieur le Ministre, dit obligatoirement " avenir ". Et l'avenir, dans l'agriculture, c'est l'installation. Et là, je vous avoue que je ne vous comprends plus. On peut, bien sûr, ne pas être d'accord sur tel ou tel point... Mais comment peut-on, comme vous, souhaiter une " orientation " et, dans le même temps, " oublier " toute politique à l'installation ? Vous semblez vous y intéresser dans les textes de la loi d'orientation, mais omettez en même temps d'abonder les enveloppes normales, habituelles, permettant de développer une politique d'installation en agriculture.
Nous, Jeunes agriculteurs, avons tout un réseau qui, dans chaque canton, dans chaque lycée agricole, prône la passion de notre métier. Ce réseau a, lui aussi, du talent. Mais comment voulez-vous que nous arrivions à des résultats corrects si les enveloppes budgétaires destinées à inciter à la retraite ou à la préretraite, ou tout simplement à promouvoir l'installation, ne sont pas abondées comme il se doit ? Nous voulons croire que le renouvellement des générations en agriculture reste votre réelle priorité.
Les mesures d'accompagnement de l'installation et de la transmission (FICIA) viennent d'être honorées financièrement la semaine dernière.
Mais, concernant les enveloppes du stage 6 mois et du stage préparatoire à l'installation de 2005, allez-vous dire à ces candidats que leur installation est repoussée, voire compromise, pour raison de gel des crédits ? Ce gel représente jusqu'à 50 % des enveloppes départementales. Vous pouvez constater que nous ne sommes ni sur du détail, ni sur du superflu:
Concernant l'ATE et les préretraites, ces deux lignes méritent d'être mieux abondées, et différemment. Fortement réduites dans le budget 2005, elles sont aujourd'hui entièrement consommées dans certaines régions. Ne serait-il pas temps de faire état des vrais besoins des régions, quitte à mutualiser les fonds au niveau national pour 2005 ?
Pour 2006, je vous demande de faire taire les rumeurs sur une possible suppression de l'une ou l'autre ligne dont nous venons de parler et mettons nous autour d'une table pour discuter de notre projet commun de renouvellement des générations.
Je vous rappelle par ailleurs l'importance des prêts bonifiés pour les jeunes installés. Ce dispositif est un outil fondamental à l'installation, qui assure et conforte la pérennité des projets d'installations. Nous voulons le conserver mais pour cela, il doit rester attractif. Les taux des prêts " classiques " pratiqués sur les marchés par les banques concurrencent .fortement ceux des prêts bonifiés. Vous devez y remédier, Monsieur le Ministre, pour renforcer la crédibilité des aides à l'installation. Nous attendons de votre part, une révision à la baisse de 1,5 point des taux des prêts bonifiés. Cela constitue une de nos priorités et irait dans le sens de la baisse des charges que nous réclamons.
Un autre sujet nous tient à coeur, Monsieur le Ministre, la défiscalisation de la Dotation Jeunes Agriculteurs : la DJA n'est plus soumise aujourd'hui à cotisations sociales. Par souci de cohérence et de simplification administrative, nous vous demandons de nouveau à ce qu'elle ne soit plus incluse dans l'assiette fiscale.
Un autre souci majeur aujourd'hui concerne les charges qui pèsent sur nos exploitations. Il est vrai, Monsieur le Ministre, que nombreuses sont les professions qui sont étranglées par ces hausses qui n'en finissent plus. Sachez, Monsieur le Ministre, que la colère gronde dans les campagnes, et y compris chez les Jeunes. Les situations que j'ai décrites pour chaque filière sont autant de motifs d'indignation. Nous vous demandons des faits. Des actes !
Pour que notre agriculture soit compétitive et demeure un des fleurons de l'économie française (je vous cite bien volontiers les chiffres rappelés par le Premier Ministre mardi l'industrie agroalimentaire a rapporté l'année dernière 8 milliards d'euros d'excédents et représente près de 15 % de l'emploi en France), nous devons nous attaquer à la baisse des charges en agriculture. Nous sommes prêts pour cela à vous faire des propositions sérieuses et qui méritent toute votre attention.
La réduction des cotisations sociales patronales, la modification de l'assiette de calcul des cotisations sociales visant à ne plus imposer socialement et fiscalement les agriculteurs sur leur capital, sont de " vraies bonne idées ". Quant à la TVA sociale, elle mérite mieux que d'être écartée d'un revers de main par le rapport Le Guen quand d'autres pays comme l'Allemagne s'y intéressent de près. Nous attendons de votre part une étude précise sur l'impact et la faisabilité de ce mécanisme.
Pour ce qui est du fioul, directement dans nos cuves et indirectement avec tous les produits que nous devons acheter, il est l'une des causes majeures de cette insupportable hausse des charges... En 2 ans, il a augmenté de 32 centimes d'euros. En clair, son prix a doublé depuis 2003, tandis que nous n'avons pu obtenir qu'une exonération partielle à hauteur de 4 centimes d'euros sur 8 mois - à la demande des JA d'ailleurs - et de 5 centimes sur 4 mois en 2005. C'est encourageant mais pas suffisant. C'est donc au minimum d'un carburant professionnel totalement détaxé dont nous avons besoin pour 2006 pour redonner un peu de souffle aux exploitations.
Et l'on revient au thème de notre finale de labour. Les biocarburants et toutes les bioénergies en général - car il ne faut négliger aucune ressource bioénergétique - constituent une solution, aussi, pour ces charges. Nous nous félicitons du plan gouvernemental de développement des biocarburants, qui prévoit l'incorporation de 5,75 % de biocarburants dès 2008, 7 % en 2010 et 10 % en 2015. Sachez, Monsieur le Ministre, que les JA ne demandent qu'à relever ce défi, à faire pousser l'énergie verte !
Mais nous attirons votre attention sur la déclinaison de ce plan, pour qu'il conserve toute son ambition. Les modalités d'application doivent être précisées sans retard, notamment la révision annoncée de la fiscalité. La détaxation des biocarburants est devenue indispensable. Ensuite, il convient d'encourager la contractualisation entre usines et producteurs à travers un cadre incitatif Nous avons des idées, consultez-nous
Enfin, ce plan d'avenir ambitieux ne nous empêche pas de réfléchir au présent, et à l'indispensable baisse des charges. Sur ce point, une solution nous convient tout à fait l'autoconsommation de carburant vert, à travers des filières courtes et structurées.
L'actualité ce sont aussi les attaques dont nous avons été victimes pendant l'été. Ainsi donc, les agriculteurs, et notamment les maïsiculteurs, seraient à l'origine de la sécheresse ! Une accusation intolérable, irresponsable, qui ne repose sur aucun argument qui puisse tenir la route et que j'ai déjà contestée et condamnée ! Il nous faut un plan national de gestion de la ressource en eau. Depuis plus de 30 ans, les agriculteurs créent des retenues pour capter l'eau abondante en hiver et l'utiliser en période de rareté en été. Il est indispensable de conforter ces investissements.
D'une manière plus générale, nous pouvons évoquer ici l'environnement. Il ne s'agit pas de votre ministère, Monsieur le Ministre, mais rien ne vous empêche de vous exprimer pour nous aider à arrêter cet effet de mode qu'est l'empilement croissant des contraintes environnementales.
Je ne voudrais pas conclure cette intervention, Monsieur le Ministre, sans évoquer l'Europe et l'international. D'abord, concernant la Politique agricole commune, avec la mise en place des Droits à paiement unique. Je me permets d'insister sur le gros travail de communication qu'il convient de réaliser auprès des paysans pour que nous puissions bien appréhender les nouvelles règles, entre autres sur les clauses de transfert. Il est indispensable que ces nouvelles règles garantissent à chaque agriculteur un montant de DPU, et donc un niveau de revenu, le plus proche de la réalité de son exploitation en 2006. J'insiste également sur la nécessité de ne pas aller au-delà des réglementations communautaires dans la mise en oeuvre de la conditionnalité. Je pense notamment au " paquet hygiène ". N'allons pas accroître la lourdeur du dispositif quand tant d'autres pays le contestent ! D'une manière générale, nous suivons avec intérêt, Monsieur le Ministre, vos intentions de simplifier toutes les procédures.
Je réitère mes encouragements à vous voir défendre notre modèle agricole à Hong Kong. Ne laissez pas l'agriculture devenir une monnaie d'échange ! L'Organisation mondiale du commerce a toute son utilité si elle régule les marchés entre les continents et les pays. Sachez lui rappeler sa fonction, et sa raison d'exister.
Je n'oublierai pas enfin que nous sommes ici à une finale de labour. Je veux donc féliciter tous nos laboureurs pour leurs sillons si droits. La finale nationale du championnat de labour est la juste conclusion d'un grand nombre de finales départementales et régionales, elles aussi organisées par le réseau des Jeunes agriculteurs. Au total, chaque année, tous ces événements Terre Attitude rassemblent près d'un million de visiteurs, et prouvent, si besoin est, que nos campagnes sont vivantes et dynamiques.
Plus qu'une profession, Monsieur le Ministre, c'est tout un public qui attend votre intervention. Je vous cède la parole.
(Source http://www.cnja.com, le 21 septembre 20005)