Déclaration de Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable, sur les actions prévues et engagées pour lutter contre la production des déchets, Paris le 20 octobre 2005.

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Circonstance : Deuxièmes rencontres nationales de la prévention de la production des déchets à Paris le 20 octobre 2005

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Permettez-moi de vous dire tout le plaisir que j'ai de vous rejoindre pour ces deuxièmes rencontres nationales de la prévention de la production de déchets.
Les premières rencontres, en février 2004, avaient marqué la relance de l'action des pouvoirs publics en matière de prévention. Le plan national de prévention de la production de déchets vous avait été présenté. Il est essentiel, comme vous le faîtes lors de ces deux jours, de prendre le temps pour tirer les enseignements de la période qui s'est écoulée et dégager de nouvelles pistes d'action.
Vous avez tous en tête les deux chantiers phares qui avaient alors été évoqués, le STOP PUB et les sacs de caisse. Vous avez débattu de ces questions hier et je n'y reviendrai que très brièvement.
On a beaucoup parlé de la vertu pédagogique de ces deux actions. C'est effectivement un point essentiel.
Nous avons tous été surpris par la vitesse à laquelle les Français s'habituent à utiliser moins de sacs de caisse, voire à s'en passer. Cela signifie que la méthode choisie par la grande distribution, dont je salue l'engagement sur ce dossier, était la bonne.
Le dossier des sacs de caisse recouvre différents aspects. A l'heure où le débat sur les sacs biodégradables bat son plein, je veux rappeler que le premier objectif est bien de diminuer les quantités de sacs de caisses distribuées.
Bien entendu, s'il est nécessaire d'utiliser des sacs jetables, l'emploi d'un matériau biodégradable constitue une avancée notable. Mais ne nous trompons pas de priorité !
Rappelons qu'au delà de l'économie de ressources naturelles, l'utilisation de sacs réutilisables, est une première façon d'appréhender une consommation plus responsable, une consommation qui prend aussi en compte l'environnement.
C'est pour cette raison que je souhaite que les quantités de sacs de caisse distribuées diminuent de 50 % entre 2003 et 2006. Je sais pouvoir compter sur l'engagement de chacun pour atteindre cet objectif.
S'agissant de STOP PUB, j'ai relancé l'impression d'autocollants. Je souhaite en effet que les Français puissent s'en procurer facilement, en pleine cohérence avec la campagne de communication que nous lançons. Le STOP PUB est, vous le savez, un des neufs gestes proposés.
En outre, les discussions au sujet de la diffusion de l'information des collectivités ont abouti et une offre devrait être généralisée en début d'année prochaine. Un des freins actuels à la diffusion de l'autocollant serait alors levé.
Si ces deux chantiers sont importants, un écueil serait de croire que la prévention se ramène aux seuls sacs de caisse ou aux imprimés sans adresse.
Le sujet est heureusement beaucoup plus vaste et il est au centre des orientations que j'ai annoncées, il y un mois, en clôture des assises nationales des déchets à La Baule.
J'ai alors défini un principe, mettre les Français au cur de la gestion des déchets, et chacun sait que nous arriverons à stabiliser, puis à diminuer les quantités de déchets produites seulement si les Français agissent.
J'ai aussi fixé un objectif : les 290 kg de déchets que chacun envoie chaque année en décharge ou en incinérateur doivent être ramenés à 250 kg dans cinq ans et 200 kg dans dix ans. Deux priorités permettront d'atteindre cet objectif, le recyclage bien sûr, mais aussi et surtout la prévention.
J'ai enfin rappelé deux conditions essentielles pour atteindre ces objectifs, mieux accepter la gestion des déchets d'une part et partager l'information d'autre part.
Permettez-moi de détailler devant vous les actions prévues pour aller encore plus loin en matière de prévention.
Il y a deux ans, la prévention était un terme souvent mal compris. Beaucoup pensaient, en fait, au tri sélectif. Il était également souvent dénigré : la hausse de la production de déchets était jugée inéluctable quoi que l'on fasse. Toute action pour tenter de la réduire serait, de toute façon, vouée à l'échec.
Les actions engagées ont permis d'initier un changement dans la bonne direction. Le discours a heureusement changé. Nous pouvons nous en réjouir. La campagne de communication qui démarre aujourd'hui, permettra de sensibiliser plus largement encore à la prévention.
Il faut apprécier cette campagne à sa juste mesure : alors que des campagnes ont souvent été faites pour développer le tri sélectif, c'est la première fois en France qu'une telle campagne est faite sur la prévention, sur l'importance de la réduction de déchets.
Cette campagne est l'occasion de présenter des gestes simples pour produire moins de déchets et c'est important, car une des premières questions que l'on pose quand on parle prévention est : oui, mais comment faire ?
Pour répondre plus complètement à cette dernière interrogation, il nous faut maintenant passer à une étape nouvelle : la mise en place effective d'actions, sur le terrain.
J'ai annoncé une série de mesures à La Baule. Permettez-moi de vous les rappeler.
Des moyens, et notamment des moyens humains sont nécessaires pour cela. J'ai demandé à l'ADEME de créer un nouveau régime d'aides : un soutien financier sera versé pour l'embauche de 100 chargés de mission par les collectivités. Je pense en particulier à un Conseil Général, qui, dans le cadre de la planification, souhaite lancer des projets en matière de prévention, ou à une intercommunalité qui veut mener des actions en la matière.
Beaucoup d'actions peuvent en effet être engagées au niveau local. Les fiches pratiques et concrètes élaborées par le comité de suivi du plan prévention en donne un bon aperçu. Je vous incite à les consulter car elles constituent un outil de travail précieux pour lancer des actions. Je suis convaincue que la série d'ateliers que vous avez eue sur le sujet a également été féconde.
Je souhaite insister devant vous également sur la notion de réparation. Voilà un sujet dont on ne parlait plus depuis longtemps. D'aucuns jugent même cette idée désuète estimant que les gens préfèrent jeter pour avoir du neuf.
Réparer un appareil, c'est pourtant prolonger sa période d'utilisation et réduire, de ce fait, la production de déchets. Il s'agit aussi d'une action qui peut être créatrice d'emplois dans les petites entreprises.
Enfin, les moyens d'actions sont évidents, car combien d'entre nous jettent des appareils, tout simplement parce qu'ils ignorent où les faire réparer.
La réparation présente un potentiel intéressant et des perspectives d'actions s'ouvrent. Je souhaite que nous réalisions un répertoire des métiers de la réparation, en partenariat avec des structures, notamment les chambres des métiers, afin de mieux faire connaître les activités concernées.
Le réemploi de produits dont on se défait est un autre moyen d'actions. Rappelons en particulier qu'il y a là matière à utiliser pleinement les outils du plan de cohésion sociale du gouvernement, avec des aides notables pour les embauches réalisées. Ce soutien à la réparation peut se faire par l'intermédiaire des ressourceries-recycleries ou d'autres structures.
Le développement du compostage individuel constitue un axe de progrès fort. J'ai ainsi annoncé que l'ADEME triplera ses efforts par rapport au niveau prévu dans le contrat de plan Etat-ADEME, et je souhaite insister sur l'intérêt d'une telle gestion des déchets.
C'est en effet une action qui permet de détourner des quantités importantes de déchets de la gestion traditionnelle. Vous savez tout l'intérêt que cela représente en terme de maîtrise des coûts et d'impact environnemental évité, à commencer par une moindre consommation de carburant pour la collecte.
Des premiers retours d'expérience mettent en évidence un gain de 65 kg par habitant et par an. C'est tout à fait considérable. Cela montre le potentiel qu'il y a à développer cette pratique d'autant plus que les évolutions de la société vont dans ce sens.
Le rôle des nouveaux modes de vie et la réduction de la taille des foyers sont souvent évoqués pour expliquer la hausse de la production de déchets. Sachons profiter du développement de l'habitat individuel pour développer le compostage individuel !
La prévention consiste aussi à réduire la toxicité des déchets. Des progrès sont à faire pour mettre en place des filières spécialisées. La mise en place de la filière des déchets d'équipements électriques et électroniques en est un premier exemple. Rappelons qu'ils contiennent de nombreuses substances toxiques
J'ai beaucoup parlé des particuliers, mais la prévention concerne aussi les entreprises. Elle les concerne même doublement : pour les produits qu'elles conçoivent et pour les déchets qu'elles produisent.
Un travail important a déjà été fait au cours des quinze années qui se sont écoulées. Je pense notamment à la réalisation d'études déchets par les plus gros producteurs de déchets. Je crois maintenant que c'est vers les petites et moyennes entreprises qu'il faut se tourner.
Aussi, l'ADEME renforcera également le soutien technique et financier en direction des petites et moyennes entreprises afin de les aider à réduire leur production de déchets.
Signalons aussi les initiatives prises par Eco-emballages pour accompagner des PME à réduire les quantités d'emballages qu'elles utilisent. Il y a une grande marge de progrès dans ce domaine. Les ateliers que vous avez consacrés à ce sujet ont sans doute permis de dégager d'autres pistes d'actions.
Montrons que ce n'est pas seulement aux particuliers qu'il incombe de faire des efforts, mais à tous.
Pour mieux faire connaître les différentes actions engagées, j'ai demandé au comité de pilotage du plan national de prévention d'attribuer un label aux actions les plus significatives.
Il manque cependant un volet dans le dispositif annoncé à La Baule. J'avais en fait tenu à vous en réserver la primeur. Beaucoup de particuliers avaient réagi à la consultation lancée à la fin du printemps, avec une idée forte : nous avons trop d'emballages.
Chacun sait le caractère symbolique de cette question, car les déchets d'emballages sont ceux que nous voyons le plus dans nos poubelles. Au-delà du symbole, les quantités en jeu sont tout de même très importantes et le potentiel de réduction est important.
Soyons honnêtes : des efforts ont déjà été réalisés. Chacun a en tête la réduction de masse enregistrée pour les bouteilles d'eau. Globalement, la masse des déchets d'emballages est revenue à son niveau de 1994. Même si ce résultat est aussi dû à une réduction de l'emploi des matériaux les plus pondéreux comme le verre et l'acier, c'est le résultat des efforts engagés.
Tout cela est important. Mais on ne peut s'empêcher de dire que l'on n'a pas entièrement répondu à l'attente des Français. Comment être insensible aux nombreuses remarques sur tel emballage dont le volume est vingt fois supérieur à celui du produit emballé ? Comment être insensible aux remarques sur les emballages dont la conception rend le recyclage impossible ?
Je souhaite avancer de façon raisonnable mais déterminée. Je souhaite que différents emballages soient évalués par un comité réunissant, sous l'égide de mes services, les différentes parties concernées : industriels, fabricants de matériaux et associations de protection de l'environnement et de consommateurs. Cette évaluation pourra en particulier être réalisée à la lumière des principes avancés par le décret du 20 juillet 1998
J'attends plus particulièrement de leurs travaux que l'intérêt écologique de l'emballage considéré soit étudié, notamment le rapport entre le volume de l'emballage et le volume du produit emballé ainsi que le caractère recyclable des matériaux utilisés.
Je souhaite que ce comité travaille dans la plus grande transparence et que les résultats de ses travaux soient largement relayés. Il est en effet important de mettre en avant des exemples qui ont réussi, mais aussi des pratiques à améliorer.
L'objectif que j'en attends est que ce travail incite davantage les producteurs à mieux concevoir leurs emballages. Chacun comprend le souci de faire un emballage qui plaise aux gens. Mais n'oublions pas l'environnement ! Cette action contribuera à le rappeler.
C'est aussi une nouvelle occasion de faire comprendre que c'est dès l'acte d'achat que l'on peut agir en matière de prévention de la production de déchets.
Avant de vous laisser, permettez-moi d'insister sur une notion importante : la meilleure consommation. C'est la clé de toute action en matière de prévention.
Une nouvelle campagne de promotion des Eco-labels débute cette semaine à l'initiative de mon ministère. Je tiens à saluer les quatre enseignes de la distribution qui y participent : Monoprix, Carrefour, Auchan et Cora.
L'éco-label est certes plus vaste que la simple gestion des déchets, mais acheter des produits dotés d'un tel éco-label signifie qu'une démarche a été faite pour limiter l'impact environnemental du produit, notamment en terme de consommation de matières.
Or, qu'est-ce que la réduction de la production de déchets sinon une utilisation plus efficace des matières premières ?
Une meilleure information permet également de mieux consommer. Je souhaite sur ce point que les travaux visant à définir une norme sur la durée de vie prévisible des produits puissent aboutir.
Il est en effet important, quand on achète un bien, de savoir pour combien de temps il est conçu. Il s'agit simplement de choisir en connaissance de cause. J'ai la conviction que ce sera une information appréciée des Français.
Je vous remercie en tout cas vivement pour votre participation à ces rencontres. Je suis convaincue qu'elles vous donneront des idées d'actions à mettre en uvre. Le contenu des troisièmes rencontres nationales de la prévention, dans deux ans, sera ainsi encore plus riche.
Je vous remercie de votre attention et bonne continuation.
(Source http://www.ecologie.gouv.fr, le 24 octobre 2005)