Texte intégral
S. Baker - Le recours au couvre-feu pour ramener le calme dans les banlieues, était-ce la solution à court terme ? C'est une décision spectaculaire !
C. Vautrin - Le Premier ministre a expliqué, hier soir, la volonté de l'ensemble du Gouvernement, et en accord bien évidemment avec le président de la République, d'une réponse qui soit une réponse ferme et juste...
Q- On imagine que le Gouvernement espère rassurer. Mais ne craignez-vous pas d'inquiéter ?
R- Je crois que nos concitoyens attendaient, dans leur immense majorité, une réponse. Ils l'avaient exprimé. Chacun est conscient des difficultés qu'il y a pour un certain nombre de jeunes, pour les habitants des quartiers. Pour autant, cela n'excuse pas tout. Et on a vu, ces derniers jours, une escalade de violences - cette dame agressée dans l'autobus, ce monsieur qui est mort hier à Stains -, des choses qui sont absolument inacceptables.
Q- Il va falloir que ce couvre-feu ramène effectivement le calme. Comment les maires pourront-ils faire respecter cette mesure, sans aides supplémentaires ?
R- Aujourd'hui, nous sommes dans une volonté qui est celle de l'esprit républicain. Chacun souhaite effectivement un rétablissement de l'ordre. Le Premier ministre a rappelé hier les moyens en terme de sécurité publique, qui ont été mis à disposition, l'appel des réservistes. Le Premier ministre a également souhaité tendre une main : vous avez vu qu'après cette nécessité absolue de maintien de l'ordre public, il y a derrière des mesures d'accompagnement, pour reconstruire, renouer le dialogue.
Q- Quand vous dites que chacun souhaite le rétablissement de l'ordre et du calme, y compris dans les banlieues, le moment n'est-il pas venu d'avoir une lecture peut-être un peu plus fine ? Ce n'est pas l'ensemble de la banlieue qui brûle, ce sont des délinquants...
R- Bien sûr, vous avez parfaitement raison. D'ailleurs, vous avez pu voir, depuis le début du week-end, des initiatives tout à fait intéressantes, des habitants des quartiers eux-mêmes qui ont commencé à s'organiser, qui ont commencé à se mobiliser...
Q- Etes-vous favorable à cette "veille citoyenne", telle que par exemple elle a été décrétée hier à Asnières ?
R- Dans ce genre de situation, toute initiative qui veille à ramener l'ordre républicain et à ramener le calme est un sujet important. Vous savez, la ministre de la Parité n'a pas manqué de remarquer qu'il y avait également des associations de femmes, de mères, qui s'étaient également mobilisées. Toutes les initiatives sont importantes, parce qu'il ne faut jamais oublier que dans les quartiers, il y a aussi des gens qui font des parcours absolument admirables, qui sont des gens qui, aujourd'hui, ont une activité professionnelle. Et ce sont les premières victimes. Vous avez vu comme moi différents reportages de personnes, dont les voitures ont été brûlées et qui sont très ennuyées pour aller ne serait-ce que travailler. Donc on le voit bien, ce n'est pas l'immense majorité des banlieues.
Q- Vous avez certainement raison de souligner ces efforts des individus ou des associations, mais n'est-ce pas un aveu d'échec finalement des autorités et du Gouvernement dans l'ensemble, de devoir recourir à ces solutions-là ?
R- Aujourd'hui, ce qui est important, ce n'est pas l'échec ou le succès : c'est la mobilisation d'un pays. Nous ne sommes pas en guerre civile. Il y a des émeutes dans certains quartiers, il convient, le Premier ministre l'a rappelé hier soir, d'apporter une réponse qui soit juste, une réponse qui soit ferme. Et tous ceux qui veulent y contribuer sont les bienvenus.
Q- Aujourd'hui, 1.173 voitures brûlées très précisément, 330 interpellations, hier, 1.400 voitures brûlées. Ce décompte n'a-t-il pas un effet d'entraînement ?
R- Cela fait partie des réflexions que l'on peut se poser : est-ce qu'il n'y a pas une espèce de concours extrêmement malsain de celui qui aura brûlé le plus de voitures...
Q- Certains médias ont annoncé cesser ce décompte. Trouvez-vous que cela va aider le Gouvernement ?
R- Aujourd'hui, le Gouvernement, je vous le répète, est tout entier mobilisé. Le Premier ministre a fait état, hier soir, des mesures qui sont mises en place. A partir de là, l'objectif est bien évidemment le retour à l'ordre public dans les meilleurs délais. Evidemment, je ne vais pas dire que parce qu'il y a plusieurs dizaines de voitures de moins de brûlées, c'est une grande victoire. Mais l'objectif est bien évidemment, dans les meilleurs délais, que tout cela cesse.
Q- Parmi les autres mesures annoncées hier par le Premier ministre, il y a une volte-face assez spectaculaire concernant les moyens donnés aux différentes associations de terrain, ces moyens qui avaient été considérablement allégés et qui, là, vont de nouveau être accrus.
R- Evidemment, je ne peux pas accepter cette terminologie de "considérablement allégés", parce que je crois que ce que l'on peut dire, c'est qu'il y avait eu des choses, on ne peut pas dire qu'il ne s'est rien passé. Il y a eu trois choses importantes qui ont été faites depuis 2002. La première chose, cela a été le texte sur l'intégration, on est passé d'une situation d'indifférence à une situation de contrat pour les primo arrivants. Il y a ensuite eu le texte de rénovation urbaine, et on voit bien aujourd'hui, ce que d'ailleurs le Premier ministre a annoncé hier soir, qu'il faut aller plus vite. Parce que l'on a vu aussi, au cours de ces week-ends, des reportages sur certaines cités, où des habitants exprimaient combien leur habitat avait changé grâce aux opérations de renouvellement urbain. Le renouvellement urbain, c'est aujourd'hui 14 milliards d'euros, c'est donc quand même un vrai effort. Alors, par contre, c'est vrai que l'on avait évolué différemment sur le fonctionnement, sur l'accompagnement des associations, avec cette réforme qui n'est probablement pas assez visible aujourd'hui, qui est celle de la dotation de solidarité urbaine, une dotation qui allait vers les communes. On sent aujourd'hui la nécessité qu'il y a à aller au plus près du maillage, c'est-à-dire vers les associations. Et c'est le sens de ce que le Premier ministre a annoncé hier soir.
Q- Si tout a été fait depuis 2002, comment explique-t-on ce qui est en train de se passer aujourd'hui ?
R- Evidemment, tout n'est jamais fait. Mais ce que je voulais simplement dire, c'est qu'on ne peut pas accréditer l'idée selon laquelle il ne se serait rien passé...
Q- C'étaient des orientations, qui vont être revues...
R- Je crois qu'aujourd'hui, il y avait donc nécessité de renouer, et on le sent bien, plus fortement le lien social. C'est pour cela que le Gouvernement a décidé de revenir sur des subventions et un complément d'accompagnement pour les associations, parce que je voudrais souligner tout le travail fait par ces associations, en terme de maillage du territoire, en terme de lien social. Et la volonté du Gouvernement, comme l'a redit le Premier ministre hier soir, c'est qu'à côté de cette nécessité de retour à l'ordre public, il y a derrière une immense volonté de renouer le dialogue.
Q- Là aussi, ce qu'a annoncé hier le Premier ministre, est assez spectaculaire : la fin de ce que l'on appelle le collège unique, pour permettre aux jeunes de quitter l'école dès quatorze ans pour l'apprentissage. Là aussi, c'est très différent de ce que prévoyait la loi Fillon, adoptée au printemps dernier, par exemple ?
R- Il y a une vraie volonté de se dire que l'on ne doit pas avoir de jeunes qui soient en situation d'inoccupation dans les quartiers et qu'il y a un certain nombre de jeunes qui ont besoin qu'on les accompagne au plus près. Pour cela, on avait mis, et on va continuer et renforcer - c'est que le Premier ministre a annoncé hier soir - les équipes de réussite éducative, pour avoir une approche la plus individualisée possible, parce qu'il y a une nécessité, dans les quartiers, de suivre chaque famille, de mettre en place un accompagnement personnalisé. Et puis ily a des jeunes qui, dès quatorze ans, savent qu'ils n'ont pas envie de poursuivre des études longues, qui ont envie d'avoir des métiers qui soient des métiers manuels, véritable ascenseur social s'il en est. Eh bien, pourquoi attendre ? Autant les accompagner au plus tôt, d'où l'idée de l'apprentissage dès quatorze ans.
Q- Mais c'est quelque chose qui avait été évalué différemment au moment de la loi Fillon par exemple ?
R- Vous savez, il est logique, en fonction des évolutions... C'est ça aussi, l'accompagnement politique : c'est la capacité à réagir et, en discutant avec l'ensemble des acteurs, de prendre des décisions qui correspondent à un certain nombre d'attentes. Là, il y a une nécessité d'accompagner ces jeunes. Et je voudrais surtout dire qu'il faut les accompagner à un moment où l'on peut leur permettre de construire un projet...
Q- Dès quatorze ans, dès le plus jeune...
R- Et surtout, l'apprentissage n'est pas une situation d'échec, comme on le dit trop souvent. L'apprentissage est une voie pleine et entière, qui permet d'obtenir un métier, et qui est un véritable ascenseur social. Je ne voudrais surtout pas que l'on associe l'apprentissage et une situation d'échec : c'est tout sauf un échec.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 novembre 2005)
C. Vautrin - Le Premier ministre a expliqué, hier soir, la volonté de l'ensemble du Gouvernement, et en accord bien évidemment avec le président de la République, d'une réponse qui soit une réponse ferme et juste...
Q- On imagine que le Gouvernement espère rassurer. Mais ne craignez-vous pas d'inquiéter ?
R- Je crois que nos concitoyens attendaient, dans leur immense majorité, une réponse. Ils l'avaient exprimé. Chacun est conscient des difficultés qu'il y a pour un certain nombre de jeunes, pour les habitants des quartiers. Pour autant, cela n'excuse pas tout. Et on a vu, ces derniers jours, une escalade de violences - cette dame agressée dans l'autobus, ce monsieur qui est mort hier à Stains -, des choses qui sont absolument inacceptables.
Q- Il va falloir que ce couvre-feu ramène effectivement le calme. Comment les maires pourront-ils faire respecter cette mesure, sans aides supplémentaires ?
R- Aujourd'hui, nous sommes dans une volonté qui est celle de l'esprit républicain. Chacun souhaite effectivement un rétablissement de l'ordre. Le Premier ministre a rappelé hier les moyens en terme de sécurité publique, qui ont été mis à disposition, l'appel des réservistes. Le Premier ministre a également souhaité tendre une main : vous avez vu qu'après cette nécessité absolue de maintien de l'ordre public, il y a derrière des mesures d'accompagnement, pour reconstruire, renouer le dialogue.
Q- Quand vous dites que chacun souhaite le rétablissement de l'ordre et du calme, y compris dans les banlieues, le moment n'est-il pas venu d'avoir une lecture peut-être un peu plus fine ? Ce n'est pas l'ensemble de la banlieue qui brûle, ce sont des délinquants...
R- Bien sûr, vous avez parfaitement raison. D'ailleurs, vous avez pu voir, depuis le début du week-end, des initiatives tout à fait intéressantes, des habitants des quartiers eux-mêmes qui ont commencé à s'organiser, qui ont commencé à se mobiliser...
Q- Etes-vous favorable à cette "veille citoyenne", telle que par exemple elle a été décrétée hier à Asnières ?
R- Dans ce genre de situation, toute initiative qui veille à ramener l'ordre républicain et à ramener le calme est un sujet important. Vous savez, la ministre de la Parité n'a pas manqué de remarquer qu'il y avait également des associations de femmes, de mères, qui s'étaient également mobilisées. Toutes les initiatives sont importantes, parce qu'il ne faut jamais oublier que dans les quartiers, il y a aussi des gens qui font des parcours absolument admirables, qui sont des gens qui, aujourd'hui, ont une activité professionnelle. Et ce sont les premières victimes. Vous avez vu comme moi différents reportages de personnes, dont les voitures ont été brûlées et qui sont très ennuyées pour aller ne serait-ce que travailler. Donc on le voit bien, ce n'est pas l'immense majorité des banlieues.
Q- Vous avez certainement raison de souligner ces efforts des individus ou des associations, mais n'est-ce pas un aveu d'échec finalement des autorités et du Gouvernement dans l'ensemble, de devoir recourir à ces solutions-là ?
R- Aujourd'hui, ce qui est important, ce n'est pas l'échec ou le succès : c'est la mobilisation d'un pays. Nous ne sommes pas en guerre civile. Il y a des émeutes dans certains quartiers, il convient, le Premier ministre l'a rappelé hier soir, d'apporter une réponse qui soit juste, une réponse qui soit ferme. Et tous ceux qui veulent y contribuer sont les bienvenus.
Q- Aujourd'hui, 1.173 voitures brûlées très précisément, 330 interpellations, hier, 1.400 voitures brûlées. Ce décompte n'a-t-il pas un effet d'entraînement ?
R- Cela fait partie des réflexions que l'on peut se poser : est-ce qu'il n'y a pas une espèce de concours extrêmement malsain de celui qui aura brûlé le plus de voitures...
Q- Certains médias ont annoncé cesser ce décompte. Trouvez-vous que cela va aider le Gouvernement ?
R- Aujourd'hui, le Gouvernement, je vous le répète, est tout entier mobilisé. Le Premier ministre a fait état, hier soir, des mesures qui sont mises en place. A partir de là, l'objectif est bien évidemment le retour à l'ordre public dans les meilleurs délais. Evidemment, je ne vais pas dire que parce qu'il y a plusieurs dizaines de voitures de moins de brûlées, c'est une grande victoire. Mais l'objectif est bien évidemment, dans les meilleurs délais, que tout cela cesse.
Q- Parmi les autres mesures annoncées hier par le Premier ministre, il y a une volte-face assez spectaculaire concernant les moyens donnés aux différentes associations de terrain, ces moyens qui avaient été considérablement allégés et qui, là, vont de nouveau être accrus.
R- Evidemment, je ne peux pas accepter cette terminologie de "considérablement allégés", parce que je crois que ce que l'on peut dire, c'est qu'il y avait eu des choses, on ne peut pas dire qu'il ne s'est rien passé. Il y a eu trois choses importantes qui ont été faites depuis 2002. La première chose, cela a été le texte sur l'intégration, on est passé d'une situation d'indifférence à une situation de contrat pour les primo arrivants. Il y a ensuite eu le texte de rénovation urbaine, et on voit bien aujourd'hui, ce que d'ailleurs le Premier ministre a annoncé hier soir, qu'il faut aller plus vite. Parce que l'on a vu aussi, au cours de ces week-ends, des reportages sur certaines cités, où des habitants exprimaient combien leur habitat avait changé grâce aux opérations de renouvellement urbain. Le renouvellement urbain, c'est aujourd'hui 14 milliards d'euros, c'est donc quand même un vrai effort. Alors, par contre, c'est vrai que l'on avait évolué différemment sur le fonctionnement, sur l'accompagnement des associations, avec cette réforme qui n'est probablement pas assez visible aujourd'hui, qui est celle de la dotation de solidarité urbaine, une dotation qui allait vers les communes. On sent aujourd'hui la nécessité qu'il y a à aller au plus près du maillage, c'est-à-dire vers les associations. Et c'est le sens de ce que le Premier ministre a annoncé hier soir.
Q- Si tout a été fait depuis 2002, comment explique-t-on ce qui est en train de se passer aujourd'hui ?
R- Evidemment, tout n'est jamais fait. Mais ce que je voulais simplement dire, c'est qu'on ne peut pas accréditer l'idée selon laquelle il ne se serait rien passé...
Q- C'étaient des orientations, qui vont être revues...
R- Je crois qu'aujourd'hui, il y avait donc nécessité de renouer, et on le sent bien, plus fortement le lien social. C'est pour cela que le Gouvernement a décidé de revenir sur des subventions et un complément d'accompagnement pour les associations, parce que je voudrais souligner tout le travail fait par ces associations, en terme de maillage du territoire, en terme de lien social. Et la volonté du Gouvernement, comme l'a redit le Premier ministre hier soir, c'est qu'à côté de cette nécessité de retour à l'ordre public, il y a derrière une immense volonté de renouer le dialogue.
Q- Là aussi, ce qu'a annoncé hier le Premier ministre, est assez spectaculaire : la fin de ce que l'on appelle le collège unique, pour permettre aux jeunes de quitter l'école dès quatorze ans pour l'apprentissage. Là aussi, c'est très différent de ce que prévoyait la loi Fillon, adoptée au printemps dernier, par exemple ?
R- Il y a une vraie volonté de se dire que l'on ne doit pas avoir de jeunes qui soient en situation d'inoccupation dans les quartiers et qu'il y a un certain nombre de jeunes qui ont besoin qu'on les accompagne au plus près. Pour cela, on avait mis, et on va continuer et renforcer - c'est que le Premier ministre a annoncé hier soir - les équipes de réussite éducative, pour avoir une approche la plus individualisée possible, parce qu'il y a une nécessité, dans les quartiers, de suivre chaque famille, de mettre en place un accompagnement personnalisé. Et puis ily a des jeunes qui, dès quatorze ans, savent qu'ils n'ont pas envie de poursuivre des études longues, qui ont envie d'avoir des métiers qui soient des métiers manuels, véritable ascenseur social s'il en est. Eh bien, pourquoi attendre ? Autant les accompagner au plus tôt, d'où l'idée de l'apprentissage dès quatorze ans.
Q- Mais c'est quelque chose qui avait été évalué différemment au moment de la loi Fillon par exemple ?
R- Vous savez, il est logique, en fonction des évolutions... C'est ça aussi, l'accompagnement politique : c'est la capacité à réagir et, en discutant avec l'ensemble des acteurs, de prendre des décisions qui correspondent à un certain nombre d'attentes. Là, il y a une nécessité d'accompagner ces jeunes. Et je voudrais surtout dire qu'il faut les accompagner à un moment où l'on peut leur permettre de construire un projet...
Q- Dès quatorze ans, dès le plus jeune...
R- Et surtout, l'apprentissage n'est pas une situation d'échec, comme on le dit trop souvent. L'apprentissage est une voie pleine et entière, qui permet d'obtenir un métier, et qui est un véritable ascenseur social. Je ne voudrais surtout pas que l'on associe l'apprentissage et une situation d'échec : c'est tout sauf un échec.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 novembre 2005)