Texte intégral
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,
Je voudrais d'abord vous dire ma satisfaction - partagée, je pense par les ministres - d'être devant l'Assemblée nationale pour reprendre le dialogue démocratique avec les députés, et puis bientôt avec les sénateurs. Je ne dirais pas que pour les ministres et pour moi-même, au mois de juillet, lorsque la session s'est arrêtée, nous n'avons pas éprouvé pendant quelques instants un peu de soulagement, en disant : le mardi, le mercredi, on pourra être à sa tâche, on n'aura plus ces questions, ces interpellations. Je vais vous dire très sincèrement, que les uns et les autres nous sommes heureux de revenir devant vous, pas seulement pour trouver la majorité - son soutien, ses questions - mais aussi pour trouver les interpellations de l'opposition, car ce dialogue démocratique, écouté par les Français, nous a manqué au cours des dernières semaines et nous a certainement manqué sur la Corse.
Si je prends les choses de façon large et globale comme elles méritent de l'être, je dirais que tous les gouvernements se sont heurtés depuis 25 ans à de très graves difficultés en Corse. Ils ont eu à faire face à la violence. Et je constate que souvent, en dialogue avec des élus qui n'étaient pas dans cette île de notre sensibilité politique - c'est à l'honneur de ministres et de gouvernements de gauche, autour de G. Defferre d'abord, de P. Joxe ensuite, d'avoir fait tout de même des pas en avant et des évolutions qui ont sans doute évité des drames plus graves que ceux que nous avons eu à affronter. Alors effectivement, j'ai conduit une démarche de discussion en Corse. Je l'ai fait parce qu'il me paraissait nécessaire et responsable d'éviter que se noue davantage une situation de blocage et de tension. Je l'ai fait parce que je souhaitais savoir comment, dans une discussion sérieuse avec le Gouvernement, les élus de l'Assemblée territoriale de Corse, les parlementaires, les présidents de conseils généraux, pouvaient suggérer des démarches utiles et qui rassemblent pour l'évolution de l'île et le traitement de ses problèmes. Je l'ai fait dans une transparence et une clarté absolues.
En nouant le dialogue avec les élus représentatifs de l'île. Vous savez très bien que la majorité territoriale en Corse n'est pas liée à la majorité mais appartient au contraire aux partis de l'opposition. Ce n'est pas un hasard, et je les remercie pour cela, si le président de l'Assemblée territoriale, monsieur Rossi, si le président de l'exécutif territorial, monsieur Baggioni, du RPR, et d'autres élus qui appartiennent à l'opposition se sont engagés dans ce dialogue.
Je remercie aussi, ici, sur ces bancs, des hommes ou des femmes, et notamment des hommes, qui ont eu des responsabilités éminentes dans les affaires de l'Etat, qui appartiennent à l'opposition et qui ont porté sur la démarche que j'ai engagée un jugement équilibré parce qu'ils savent à quel point les choses sont difficiles. En tout cas cette démarche a été menée de façon claire et ouverte. Il n'y a eu aucun conciliabule secret. Il n'y a eu aucune organisation de conférence de presse clandestine en commun. Il n'y a eu aucune instruction d'indulgence à la justice telle que vous en avez donné par le passé. Comprenez donc que je défende la clarté de la démarche qui a été la mienne, qui a été celle du Gouvernement.
Et quant à la question que vous abordez, c'est vrai qu'au moment où le Gouvernement a fait ses propositions, un certain nombre d'élus de l'Assemblée territoriale de Corse parmi lesquels, pas seulement un représentant des mouvement nationaliste M. Quastana, mais M. Baggioni, M. Rossi, M. Rocca Serra, et quelques autres élus encore appartenant à l'opposition sont venus voir, non pas clandestinement mais ouvertement le préfet qui, à mon cabinet, suit ces questions, le directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur de l'époque, le préfet de la région Corse. Ils sont venus dire qu'ils souhaitaient - sans nous demander d'engagement quelconque - que dans la démarche positive que nous essayons d'engager, cette question d'un rapprochement pour des détenus soit abordée.
La réponse que nous avons donnée à ce moment-là, que ces représentants ont donné - tout en disant que ce serait à la Chancellerie de se prononcer a été faite, non pas clandestinement, mais devant les élus dont je viens de vous citer les noms et qui représentent l'ensemble des sensibilités de cette assemblée ; elle a été de dire : pour ceux qui sont en détention provisoire, un rapprochement ne peut pas être envisagé parce qu'ils doivent être à la disposition des juges pour les enquêtes et que ces juges sont à Paris. Pour ce qui concerne ceux qui ont été condamnés, nous ne prendrons pas la décision de mettre l'ensemble de ces condamnés à la prison de Borgo en Corse parce que cela ne nous paraît pas possible et souhaitable. Par contre, si les avocats en font la demande, des rapprochements - parce qu'il y a des problèmes de transport, de coûts, en tout cas dans le midi de la France - peuvent être envisagés individuellement. Et c'est la réponse que nous avons donnée.
Pour le reste, messieurs les députés, nous avons engagé une démarche transparente. Dans une première étape, le ministre de l'Intérieur, D. Vaillant, présentera d'abord au Conseil des ministres et peut-être devant l'Assemblée nationale à la fin de l'année ou dans les premiers mois de 2001, un projet concernant la Corse, c'est-à-dire que l'ensemble de l'Assemblée nationale et du Sénat seront juges des propositions du Gouvernement.
Ces propositions toucheront à la langue corse, à l'identité culturelle corse. Il n'y aura pas - parce que ce n'est pas dans les textes dont on a parlé - d'enseignement obligatoire du corse. Il y aura un enseignement dans le cadre des programmes officiels de l'Education nationale, comme cela existe déjà maintenant, et les parents seront libres ou non d'envoyer leurs enfants à cet enseignement.
Actuellement, là où cet enseignement existe, je peux vous dire que 20 % des enfants auxquels il pourrait s'appliquer n'y vont pas, parce que les parents ne le souhaitent pas. Parmi ces 20 %, il y a beaucoup de parents qui sont des Corses, des corsophones, et qui ne souhaitent pour autant - peut-être parce qu'ils pensent que ce n'est pas nécessaire - que leurs enfants assistent à leur enseignement. Mais je pourrais vous dire aussi que parmi ceux qui assistent à cet enseignement, les 80 %, il y a beaucoup de garçons ou de filles de militaires, de fonctionnaires, qui sont en Corse, qui y passeront plusieurs années et qui pensent que cela peut être intéressant pour leurs enfants de d'imprégner de cette culture qui les formera en plus à la langue italienne.
Identité et défense de l'enseignement en corse, respect d'un certain nombre de spécificités fiscales corses qui existent depuis deux siècles, programme de rattrapage des équipements, transfert de certaines capacités réglementaires en faveur de la Corse sous le contrôle du Parlement, voilà en gros les mesures qui vous seront proposées, qui sont parfaitement compatibles avec la Constitution actuelle, et c'est seulement dans une deuxième étape, si la violence a cessé en Corse, que nous pourrons essayer d'aller plus loin, si un consensus se dégage entre nous pour modifier et simplifier les structures administratives, pour envisager qu'un certain pouvoir d'adaptation législatif soit donné effectivement à l'Assemblée territoriale de Corse et non pas le pouvoir législatif.
Nous avons choisi de nous adresser aux élus. Nous avons choisi, tout en continuant à combattre la violence - la justice et la police y procèdent - une démarche qui permette d'espérer d'échapper à la violence. Ce n'est pas par hasard si sur 51 élus territoriaux de Corse, 44 ont voté en faveur des propositions du Gouvernement, 5 se sont abstenus et 2 seulement ont voté contre. Ces hommes et ces femmes qui appartiennent à vos formations politiques, je pense qu'ils sont représentatifs. Nous voulons un respect de l'identité de la Corse dans la République, nous voulons offrir une perspective historique pour sortir de la violence. C'est la cessation de la violence et la conquête de la paix civile qui permettront d'avancer davantage. Vous devriez, comme certains de vos amis, nous accompagner dans cette démarche plutôt que de rendre les choses plus difficiles. C'est un appel à la responsabilité que je vous adresse et, pour le reste, vous serez juges de chacune des propositions que le Gouvernement vous fera.
(Source : http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 04 octobre 2000).
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,
Je voudrais d'abord vous dire ma satisfaction - partagée, je pense par les ministres - d'être devant l'Assemblée nationale pour reprendre le dialogue démocratique avec les députés, et puis bientôt avec les sénateurs. Je ne dirais pas que pour les ministres et pour moi-même, au mois de juillet, lorsque la session s'est arrêtée, nous n'avons pas éprouvé pendant quelques instants un peu de soulagement, en disant : le mardi, le mercredi, on pourra être à sa tâche, on n'aura plus ces questions, ces interpellations. Je vais vous dire très sincèrement, que les uns et les autres nous sommes heureux de revenir devant vous, pas seulement pour trouver la majorité - son soutien, ses questions - mais aussi pour trouver les interpellations de l'opposition, car ce dialogue démocratique, écouté par les Français, nous a manqué au cours des dernières semaines et nous a certainement manqué sur la Corse.
Si je prends les choses de façon large et globale comme elles méritent de l'être, je dirais que tous les gouvernements se sont heurtés depuis 25 ans à de très graves difficultés en Corse. Ils ont eu à faire face à la violence. Et je constate que souvent, en dialogue avec des élus qui n'étaient pas dans cette île de notre sensibilité politique - c'est à l'honneur de ministres et de gouvernements de gauche, autour de G. Defferre d'abord, de P. Joxe ensuite, d'avoir fait tout de même des pas en avant et des évolutions qui ont sans doute évité des drames plus graves que ceux que nous avons eu à affronter. Alors effectivement, j'ai conduit une démarche de discussion en Corse. Je l'ai fait parce qu'il me paraissait nécessaire et responsable d'éviter que se noue davantage une situation de blocage et de tension. Je l'ai fait parce que je souhaitais savoir comment, dans une discussion sérieuse avec le Gouvernement, les élus de l'Assemblée territoriale de Corse, les parlementaires, les présidents de conseils généraux, pouvaient suggérer des démarches utiles et qui rassemblent pour l'évolution de l'île et le traitement de ses problèmes. Je l'ai fait dans une transparence et une clarté absolues.
En nouant le dialogue avec les élus représentatifs de l'île. Vous savez très bien que la majorité territoriale en Corse n'est pas liée à la majorité mais appartient au contraire aux partis de l'opposition. Ce n'est pas un hasard, et je les remercie pour cela, si le président de l'Assemblée territoriale, monsieur Rossi, si le président de l'exécutif territorial, monsieur Baggioni, du RPR, et d'autres élus qui appartiennent à l'opposition se sont engagés dans ce dialogue.
Je remercie aussi, ici, sur ces bancs, des hommes ou des femmes, et notamment des hommes, qui ont eu des responsabilités éminentes dans les affaires de l'Etat, qui appartiennent à l'opposition et qui ont porté sur la démarche que j'ai engagée un jugement équilibré parce qu'ils savent à quel point les choses sont difficiles. En tout cas cette démarche a été menée de façon claire et ouverte. Il n'y a eu aucun conciliabule secret. Il n'y a eu aucune organisation de conférence de presse clandestine en commun. Il n'y a eu aucune instruction d'indulgence à la justice telle que vous en avez donné par le passé. Comprenez donc que je défende la clarté de la démarche qui a été la mienne, qui a été celle du Gouvernement.
Et quant à la question que vous abordez, c'est vrai qu'au moment où le Gouvernement a fait ses propositions, un certain nombre d'élus de l'Assemblée territoriale de Corse parmi lesquels, pas seulement un représentant des mouvement nationaliste M. Quastana, mais M. Baggioni, M. Rossi, M. Rocca Serra, et quelques autres élus encore appartenant à l'opposition sont venus voir, non pas clandestinement mais ouvertement le préfet qui, à mon cabinet, suit ces questions, le directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur de l'époque, le préfet de la région Corse. Ils sont venus dire qu'ils souhaitaient - sans nous demander d'engagement quelconque - que dans la démarche positive que nous essayons d'engager, cette question d'un rapprochement pour des détenus soit abordée.
La réponse que nous avons donnée à ce moment-là, que ces représentants ont donné - tout en disant que ce serait à la Chancellerie de se prononcer a été faite, non pas clandestinement, mais devant les élus dont je viens de vous citer les noms et qui représentent l'ensemble des sensibilités de cette assemblée ; elle a été de dire : pour ceux qui sont en détention provisoire, un rapprochement ne peut pas être envisagé parce qu'ils doivent être à la disposition des juges pour les enquêtes et que ces juges sont à Paris. Pour ce qui concerne ceux qui ont été condamnés, nous ne prendrons pas la décision de mettre l'ensemble de ces condamnés à la prison de Borgo en Corse parce que cela ne nous paraît pas possible et souhaitable. Par contre, si les avocats en font la demande, des rapprochements - parce qu'il y a des problèmes de transport, de coûts, en tout cas dans le midi de la France - peuvent être envisagés individuellement. Et c'est la réponse que nous avons donnée.
Pour le reste, messieurs les députés, nous avons engagé une démarche transparente. Dans une première étape, le ministre de l'Intérieur, D. Vaillant, présentera d'abord au Conseil des ministres et peut-être devant l'Assemblée nationale à la fin de l'année ou dans les premiers mois de 2001, un projet concernant la Corse, c'est-à-dire que l'ensemble de l'Assemblée nationale et du Sénat seront juges des propositions du Gouvernement.
Ces propositions toucheront à la langue corse, à l'identité culturelle corse. Il n'y aura pas - parce que ce n'est pas dans les textes dont on a parlé - d'enseignement obligatoire du corse. Il y aura un enseignement dans le cadre des programmes officiels de l'Education nationale, comme cela existe déjà maintenant, et les parents seront libres ou non d'envoyer leurs enfants à cet enseignement.
Actuellement, là où cet enseignement existe, je peux vous dire que 20 % des enfants auxquels il pourrait s'appliquer n'y vont pas, parce que les parents ne le souhaitent pas. Parmi ces 20 %, il y a beaucoup de parents qui sont des Corses, des corsophones, et qui ne souhaitent pour autant - peut-être parce qu'ils pensent que ce n'est pas nécessaire - que leurs enfants assistent à leur enseignement. Mais je pourrais vous dire aussi que parmi ceux qui assistent à cet enseignement, les 80 %, il y a beaucoup de garçons ou de filles de militaires, de fonctionnaires, qui sont en Corse, qui y passeront plusieurs années et qui pensent que cela peut être intéressant pour leurs enfants de d'imprégner de cette culture qui les formera en plus à la langue italienne.
Identité et défense de l'enseignement en corse, respect d'un certain nombre de spécificités fiscales corses qui existent depuis deux siècles, programme de rattrapage des équipements, transfert de certaines capacités réglementaires en faveur de la Corse sous le contrôle du Parlement, voilà en gros les mesures qui vous seront proposées, qui sont parfaitement compatibles avec la Constitution actuelle, et c'est seulement dans une deuxième étape, si la violence a cessé en Corse, que nous pourrons essayer d'aller plus loin, si un consensus se dégage entre nous pour modifier et simplifier les structures administratives, pour envisager qu'un certain pouvoir d'adaptation législatif soit donné effectivement à l'Assemblée territoriale de Corse et non pas le pouvoir législatif.
Nous avons choisi de nous adresser aux élus. Nous avons choisi, tout en continuant à combattre la violence - la justice et la police y procèdent - une démarche qui permette d'espérer d'échapper à la violence. Ce n'est pas par hasard si sur 51 élus territoriaux de Corse, 44 ont voté en faveur des propositions du Gouvernement, 5 se sont abstenus et 2 seulement ont voté contre. Ces hommes et ces femmes qui appartiennent à vos formations politiques, je pense qu'ils sont représentatifs. Nous voulons un respect de l'identité de la Corse dans la République, nous voulons offrir une perspective historique pour sortir de la violence. C'est la cessation de la violence et la conquête de la paix civile qui permettront d'avancer davantage. Vous devriez, comme certains de vos amis, nous accompagner dans cette démarche plutôt que de rendre les choses plus difficiles. C'est un appel à la responsabilité que je vous adresse et, pour le reste, vous serez juges de chacune des propositions que le Gouvernement vous fera.
(Source : http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 04 octobre 2000).