Texte intégral
Comme pour tout un chacun, mon activité se partage entre des tâches heureuses et d'autres qui le sont moins. Ma présence parmi vous relève à l'évidence des tâches heureuses, mais il est parfois des évidences qu'il est bon de souligner.
Tâche heureuse, car vous m'avez demandé de conclure vos journées consacrées à un thème qui m'est cher, celui de la création d'entreprise.
Tâche heureuse, car en m'associant à ce projet, vous soulignez la nécessité de construire sur ce thème un dialogue entre les pouvoirs publics, les individus qui créent, et les associations d'accompagnement.
Depuis mon arrivée au Ministère, je me suis efforcée d'être autant que possible présente sur le terrain, de rencontrer les chefs d'entreprise, les acteurs du développement local. Je l'ai fait car je suis convaincue depuis toujours que, derrière les concepts économiques, il y a des femmes et des hommes qui travaillent, investissent et consomment. Je suis convaincue également qu'il est nécessaire d'intervenir dans le domaine de la micro-économie, c'est à dire sur les déterminants des décisions des individus et qu'une action macro-économique pourtant nécessaire et indispensable ne peut pas suffire.
Je voudrais aujourd'hui évoquer trois éléments :
- l'apport de la création d'entreprise à l'économie,
- le rôle des structures d'accompagnement,
- les propositions que vous avez annoncées.
1°) Faut-il aider pour elle-même la création d'entreprise ?
Ce débat est ancien : faut-il aider les créations ou bien vaut-il mieux favoriser la naissance d'activités nouvelles à l'intérieur des entreprises existantes ? La théorie économique n'apporte pas sur ce point de réponse absolue : si Schumpeter fait de la création - destruction le moteur du développement économique, d'autres préfèrent privilégier les dépenses porteuses l'avenir comme celles liées à l'innovation. Il ne m'appartient pas de régler des problèmes théoriques, et je bornerai mon propos à quelques observations.
- Je suis préoccupée tout d'abord du repli ininterrompu depuis 1990 des créations et reprises d'entreprises qui ont diminué de 18 % depuis cette date. Ce repli a même provoqué une baisse nette du nombre d'entreprises : près de 20 000 entreprises en moins entre 1990 et 1997.
Cette baisse est faible en valeur absolue. Elle n'en est pas moins inquiétante, alors que dans d'autres pays le phénomène est généralement inverse. Rapporté à la population active, le stock d'entreprises françaises correspondrait à 3,4 millions d'entreprises si notre pays avait la même densité entrepreneuriale que la Grande Bretagne, alors qu'il n'est aujourd'hui que de 2,35 millions.
- Il est indéniable que la création d'emplois est largement lié à la création et reprise d'entreprises : 500 000 emplois environ en 1997 sont liés aux entreprises nouvelles, soit 60000 de moins qu'au début de la décennie. Même s'il est difficile de consolider ces non-créations et d'affirmer que nous avons perdu depuis 1990 environ 400 000 emplois, je suis convaincue que ces non-créations pèsent lourd dans le chômage actuel.
En effet, la création d'entreprises permet d'explorer de nouvelles activités, de répondre à de nouveaux besoins, et donc de dessiner l'économie de demain. Faute de cela, ce seront d'autres acteurs notamment étrangers qui se positionneront sur ces nouveaux produits et services.
- Contrairement à une idée trop répandue, les aides existantes sont peu nombreuses, concentrées sur un très petit nombre d'entreprises (4 à 5 000 sur 160 000 créations) et les créations de très petites entreprises sont très peu aidées.
Exception faite pour l'ACCRE et dans les zones d'aménagement du territoire pour certaines charges fiscales, les aides sont concentrées sur les projets les plus voyants qui empilent les aides. Ces aides qui se rattachent à des objectifs différents de la création d'entreprise bénéficient par ricochet aux créateurs.
Toute réflexion sur la définition d'une politique d'aide doit également tenir compte des besoins des créateurs et de leur solitude. L'accompagnement, non seulement en amont mais également en suivi de la création, renforce considérablement les chances de réussite du créateur. Mieux assurer cet accompagnement de la création ou plus précisément le rendre possible, doit devenir l'un des axes majeurs de l'action publique.
- Enfin le soutien à la création d'entreprise et le développement d'entreprises existantes ne m'apparaissent pas contradictoires. Je n'ai sur ce point aucun instinct de propriété et je me réjouis chaque fois qu'une entreprise quitte la catégorie des PME pour rejoindre le champ de responsabilité de l'un de mes collègues du Gouvernement. Je dirai même que j'aimerais avoir à m'en réjouir plus souvent. Il y a là deux éléments essentiels à la croissance de notre économie, à sa capacité à créer de la richesse et de l'emploi. Je me sens responsable des deux défis : celui de la création, celui du développement.
Finalement, dans ce débat quelque peu rhétorique, j'ai choisi - comme vous à votre manière - de mettre en oeuvre une véritable politique de la création d'entreprise.
2°) Je partage le diagnostic que vous avez porté les premiers : les structures d'accompagnement sont un élément essentiel de la politique de soutien aux créateurs d'entreprises.
Nous sommes tous comptables de la réalité actuelle de la création.
Les chefs d'entreprises que j'entends toujours évoquer les difficultés de leur métier, les charges dont ils sont écrasés, le poids des administrations etc..., ne donnent pas envie de choisir - pour utiliser un terme cher à mes enfants - cette galère. Je ne cherche pas à nier les difficultés évoquées, mais il me semble que les chefs d'entreprises sont également les seuls à pouvoir parler des joies de ce métier, des possibilités de réalisation qu'il offre, en un mot d'en faire un avenir désirable pour nos jeunes. Certes le système de formation peut sans doute s'ouvrir davantage à cette réalité, former mieux à la création, mais il ne peut pas davantage qu'une campagne d'information valoriser un acte dont se plaignent sans cesse ceux qui l'ont effectué.
Les pouvoirs publics : il leur appartient d'abord de fixer un cadre législatif et réglementaire favorable à la création d'entreprise - J'y reviendrai. Il leur appartient également de conduire une politique globale et cohérente de soutien aux créateurs.
Cela ne peut passer par la constitution d'une administration nationale chargée d'aider les créateurs. Je ne suis sur ce point ni étatiste, ni jacobine. Il est souhaitable toutefois que sur certains points l'Etat se dote d'outils nationaux ou facilite leur constitution.
Le Gouvernement de Lionel JOSPIN a fait un choix important : celui de construire sa politique d'appui aux créateurs d'entreprise sur les acteurs d'accompagnement que vous êtes. Vous avez inventé un mode d'intervention fait de proximité, d'exigences et d'appui, qui permet à ceux qui ont envie de créer de passer à la réalisation de leurs projets et de renforcer très sensiblement leurs chances de réussite. Je ne vous citerai pas tous, car j'aurai trop peur d'oublier l'un d'entre vous. Il me semble qu'en ce domaine il n'y aura jamais trop de monde. Il faut toutefois veiller à ce que cette pluralité d'acteurs permette avant tout d'éviter un parcours long et difficile au créateur, un parcours qui le conduirait à renoncer à son projet. Tous vous partagez les mêmes convictions, tous vous travaillez dans le même sens, tous vous pouvez, vous devez, travailler ensemble.
La politique du Gouvernement répond à certaines de vos propositions. Je voudrais simplement montrer en quoi elle est cohérente et complète :
- d'abord les pouvoirs publics ont fait le choix de faire gérer l'aide aux jeunes créateurs et l'aide aux créateurs demandeurs d'emploi par les structures d'accompagnement. Le projet de décret a appelé quelques remarques du Conseil d'Etat et un nouveau projet est en cours de rédaction.
Associée à l'aide financière destinée au créateur lui-même, l'aide de l'Etat comportera la prise en charge des frais d'accompagnement, sur une base forfaitaire dont je sais que vous l'estimez réaliste. Il y a bien là reconnaissance du rôle de l'accompagnement.
- Ensuite, le projet de loi de Finances pour 1999 crée une réduction d'impôt pour les dons aux organismes sans but lucratif ayant pour objet de participer à la création d'entreprises, à travers un apport de financements aux créateurs, généralement sous forme de prêts d'honneur. Ainsi, comme les entreprises, les particuliers pourront exprimer leur solidarité dans des conditions fiscalement avantageuses en soutenant la création d'emplois.
- Enfin le projet de loi portant réforme de l'intervention économique des collectivités locales donnera une base légale aux subventions des collectivités locales à vos associations.
Toutes vos ressources potentielles ont fait l'objet d'un traitement juridique ou fiscal. Il ne reste plus qu'à leur donner une plus grande ampleur. Certains acteurs sont déjà fortement présents sur ce terrain : je tiens à remercier publiquement la Caisse des Dépôts qui à travers son programme PME vous apporte une aide considérable. Cela est aussi vrai de certaines entreprises qui m'ont fait connaître leurs projets en ce domaine.
Mais ce choix ne doit pas conduire à des rivalités stériles entre acteurs, ni à offrir des services médiocres aux créateurs.
Il est essentiel que lorsqu'un créateur potentiel rencontre l'un d'entre vous nous soyons certains qu'il sera accompagné efficacement. La qualité de vos actions est essentielle pour moi. Je sais que le Conseil National de la Création d'Entreprise va créer un groupe de travail sur ce thème. C'est une proposition opportune et adaptée et j'attends avec intérêt ses conclusions. Sur la base de ce travail, il nous sera possible de voir dans quelles conditions pourront être mis en oeuvre des contrats qualité avec vous.
Mais il est également essentiel pour moi que tous les créateurs puissent avoir où qu'ils se trouvent l'appui de l'un d'entre vous.
Cela passe par des coopérations entre vous dans le respect de l'identité de chacun. Je sais que plusieurs d'entre vous ont engagé des démarches de coopération et je ne saurai trop vous engager à poursuivre en ce sens.
Cela passe par une couverture satisfaisante de l'ensemble du territoire. La DATAR qui joue un rôle essentiel dans le développement de nouvelles structures à travers le FNDE partage et soutient cette préoccupation.
La mise en place de l'aide jeunes et l'aide aux chômeurs créateurs va jouer le rôle d'un révélateur en ce domaine. Je souhaite qu'elle soit l'occasion d'une structuration de l'accompagnement plus forte et plus complète sur le territoire.
3°) Cette complémentarité dans l'action d'accompagnement n'est pas suffisante ; il me parait essentiel que vous organisiez une expression collective, je dirai en forçant le trait, votre représentation.
Je préside, vous le savez, le Conseil National de la Création d'Entreprise qui rassemble l'ensemble des acteurs intéressés à la création d'entreprise. J'ai élargi sa composition afin de l'ouvrir à l'ensemble des réseaux. Ce Conseil doit être un lieu de discussion, de proposition, le forum naturel de la création d'entreprise. Il n'est pas le lieu du débat entre les seuls acteurs de l'accompagnement.
La manifestation d'aujourd'hui constitue sans aucun doute un pas important, un premier geste que j'espère fondateur en ce domaine. Cette attente d'expression de votre part que j'exprime peut vous semblez curieuse. Elle indique simplement que l'on ne peut construire ma politique de la création d'entreprise qu'avec vous.
Cette manifestation a été précédée d'un travail important de réflexion formalisé dans 39 propositions. Ce travail est extrêmement utile, comme cela a été dit ce matin, car il permet de faire progresser les diagnostics et de préciser les propositions. Je crois avoir répondu à toutes celles qui concernent l'accompagnement. Toutes les autres méritent d'être examinées attentivement, et un nombre important d'entre elles vont dans le sens de mes préoccupations.
Il m'importe de rendre aussi simple que possible et aussi conforme à la réalité économique les conditions du démarrage d'une activité. Les mesures de simplification comme l'aménagement des règles fiscales ont déjà été prises en ce sens. J'espère que nous pourrons parvenir à de nouveaux progrès en matière sociale. J'ai annoncé cette semaine un ensemble de propositions qui seront de nature à rendre moins pesante aux PME la question des délais de paiement.
Il m'importe enfin de faire entrer dans le champ du crédit la création d'entreprise. Or la difficulté d'étude des projets comme l'importance du risque associé à la création limitent nécessairement l'engagement des banques. Elles constituent trop souvent sur ces points des boucs émissaires confortables.
Néanmoins, je crois qu'elles pourraient s'impliquer davantage au titre du mécénat comme viennent de l'annoncer quelques réseaux.
Elles pourraient aussi s'impliquer davantage encore si une partie du risque était prise en charge par la collectivité. C'est déjà le cas avec SOFARIS pour ce qui concerne les fonds d'Etat. La loi sur l'intervention économique des collectivités locales leur permettra de participer à ces dispositifs.
Nous pourrions multiplier les exemples. Ce n'est ni le moment ni sans doute le lieu. Je saisirai le Conseil National de la Création d'Entreprise de vos propositions pour qu'elles puissent être débattues. Je sais que vous en serez les ardents défenseurs.
Il me semble que nous disposons aujourd'hui de beaucoup des éléments d'une politique active d'appui à la création d'entreprise. Sa mise en oeuvre ne repose pas que sur la définition de mesures nouvelles, nécessaires, sans doute sur certains points. Elle repose aussi sur l'action des acteurs, en particulier ceux que vous représentez. Albert OLLIVIER ce matin vous appelait à la patience et soulignait qu'au total beaucoup de choses avancent. Je partage ce point de vue, même si je m'associe volontiers à certaines de vos impatiences.
Tout cela permettra à davantage d'entreprises de se créer chaque année, à des entreprises nouvelles de se développer et franchir avec succès le cap du premier âge. Cela permettra aussi de compenser l'inégalité des chances face à la création entre les territoires. Tous ne disposent pas de services de proximité et d'accompagnement pour les créateurs. Il faut qu'à côté des hommes et du capital émerge ce troisième facteur de production que sont les territoires. C'est ainsi que nous réaliserons, comme l'a dit Lionel JOSPIN à l'occasion du mouvement des chômeurs, cette société du travail que nous voulons et non pas une société d'assistance, à laquelle certains nous demandent de nous résigner.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 27 septembre 2001)
Tâche heureuse, car vous m'avez demandé de conclure vos journées consacrées à un thème qui m'est cher, celui de la création d'entreprise.
Tâche heureuse, car en m'associant à ce projet, vous soulignez la nécessité de construire sur ce thème un dialogue entre les pouvoirs publics, les individus qui créent, et les associations d'accompagnement.
Depuis mon arrivée au Ministère, je me suis efforcée d'être autant que possible présente sur le terrain, de rencontrer les chefs d'entreprise, les acteurs du développement local. Je l'ai fait car je suis convaincue depuis toujours que, derrière les concepts économiques, il y a des femmes et des hommes qui travaillent, investissent et consomment. Je suis convaincue également qu'il est nécessaire d'intervenir dans le domaine de la micro-économie, c'est à dire sur les déterminants des décisions des individus et qu'une action macro-économique pourtant nécessaire et indispensable ne peut pas suffire.
Je voudrais aujourd'hui évoquer trois éléments :
- l'apport de la création d'entreprise à l'économie,
- le rôle des structures d'accompagnement,
- les propositions que vous avez annoncées.
1°) Faut-il aider pour elle-même la création d'entreprise ?
Ce débat est ancien : faut-il aider les créations ou bien vaut-il mieux favoriser la naissance d'activités nouvelles à l'intérieur des entreprises existantes ? La théorie économique n'apporte pas sur ce point de réponse absolue : si Schumpeter fait de la création - destruction le moteur du développement économique, d'autres préfèrent privilégier les dépenses porteuses l'avenir comme celles liées à l'innovation. Il ne m'appartient pas de régler des problèmes théoriques, et je bornerai mon propos à quelques observations.
- Je suis préoccupée tout d'abord du repli ininterrompu depuis 1990 des créations et reprises d'entreprises qui ont diminué de 18 % depuis cette date. Ce repli a même provoqué une baisse nette du nombre d'entreprises : près de 20 000 entreprises en moins entre 1990 et 1997.
Cette baisse est faible en valeur absolue. Elle n'en est pas moins inquiétante, alors que dans d'autres pays le phénomène est généralement inverse. Rapporté à la population active, le stock d'entreprises françaises correspondrait à 3,4 millions d'entreprises si notre pays avait la même densité entrepreneuriale que la Grande Bretagne, alors qu'il n'est aujourd'hui que de 2,35 millions.
- Il est indéniable que la création d'emplois est largement lié à la création et reprise d'entreprises : 500 000 emplois environ en 1997 sont liés aux entreprises nouvelles, soit 60000 de moins qu'au début de la décennie. Même s'il est difficile de consolider ces non-créations et d'affirmer que nous avons perdu depuis 1990 environ 400 000 emplois, je suis convaincue que ces non-créations pèsent lourd dans le chômage actuel.
En effet, la création d'entreprises permet d'explorer de nouvelles activités, de répondre à de nouveaux besoins, et donc de dessiner l'économie de demain. Faute de cela, ce seront d'autres acteurs notamment étrangers qui se positionneront sur ces nouveaux produits et services.
- Contrairement à une idée trop répandue, les aides existantes sont peu nombreuses, concentrées sur un très petit nombre d'entreprises (4 à 5 000 sur 160 000 créations) et les créations de très petites entreprises sont très peu aidées.
Exception faite pour l'ACCRE et dans les zones d'aménagement du territoire pour certaines charges fiscales, les aides sont concentrées sur les projets les plus voyants qui empilent les aides. Ces aides qui se rattachent à des objectifs différents de la création d'entreprise bénéficient par ricochet aux créateurs.
Toute réflexion sur la définition d'une politique d'aide doit également tenir compte des besoins des créateurs et de leur solitude. L'accompagnement, non seulement en amont mais également en suivi de la création, renforce considérablement les chances de réussite du créateur. Mieux assurer cet accompagnement de la création ou plus précisément le rendre possible, doit devenir l'un des axes majeurs de l'action publique.
- Enfin le soutien à la création d'entreprise et le développement d'entreprises existantes ne m'apparaissent pas contradictoires. Je n'ai sur ce point aucun instinct de propriété et je me réjouis chaque fois qu'une entreprise quitte la catégorie des PME pour rejoindre le champ de responsabilité de l'un de mes collègues du Gouvernement. Je dirai même que j'aimerais avoir à m'en réjouir plus souvent. Il y a là deux éléments essentiels à la croissance de notre économie, à sa capacité à créer de la richesse et de l'emploi. Je me sens responsable des deux défis : celui de la création, celui du développement.
Finalement, dans ce débat quelque peu rhétorique, j'ai choisi - comme vous à votre manière - de mettre en oeuvre une véritable politique de la création d'entreprise.
2°) Je partage le diagnostic que vous avez porté les premiers : les structures d'accompagnement sont un élément essentiel de la politique de soutien aux créateurs d'entreprises.
Nous sommes tous comptables de la réalité actuelle de la création.
Les chefs d'entreprises que j'entends toujours évoquer les difficultés de leur métier, les charges dont ils sont écrasés, le poids des administrations etc..., ne donnent pas envie de choisir - pour utiliser un terme cher à mes enfants - cette galère. Je ne cherche pas à nier les difficultés évoquées, mais il me semble que les chefs d'entreprises sont également les seuls à pouvoir parler des joies de ce métier, des possibilités de réalisation qu'il offre, en un mot d'en faire un avenir désirable pour nos jeunes. Certes le système de formation peut sans doute s'ouvrir davantage à cette réalité, former mieux à la création, mais il ne peut pas davantage qu'une campagne d'information valoriser un acte dont se plaignent sans cesse ceux qui l'ont effectué.
Les pouvoirs publics : il leur appartient d'abord de fixer un cadre législatif et réglementaire favorable à la création d'entreprise - J'y reviendrai. Il leur appartient également de conduire une politique globale et cohérente de soutien aux créateurs.
Cela ne peut passer par la constitution d'une administration nationale chargée d'aider les créateurs. Je ne suis sur ce point ni étatiste, ni jacobine. Il est souhaitable toutefois que sur certains points l'Etat se dote d'outils nationaux ou facilite leur constitution.
Le Gouvernement de Lionel JOSPIN a fait un choix important : celui de construire sa politique d'appui aux créateurs d'entreprise sur les acteurs d'accompagnement que vous êtes. Vous avez inventé un mode d'intervention fait de proximité, d'exigences et d'appui, qui permet à ceux qui ont envie de créer de passer à la réalisation de leurs projets et de renforcer très sensiblement leurs chances de réussite. Je ne vous citerai pas tous, car j'aurai trop peur d'oublier l'un d'entre vous. Il me semble qu'en ce domaine il n'y aura jamais trop de monde. Il faut toutefois veiller à ce que cette pluralité d'acteurs permette avant tout d'éviter un parcours long et difficile au créateur, un parcours qui le conduirait à renoncer à son projet. Tous vous partagez les mêmes convictions, tous vous travaillez dans le même sens, tous vous pouvez, vous devez, travailler ensemble.
La politique du Gouvernement répond à certaines de vos propositions. Je voudrais simplement montrer en quoi elle est cohérente et complète :
- d'abord les pouvoirs publics ont fait le choix de faire gérer l'aide aux jeunes créateurs et l'aide aux créateurs demandeurs d'emploi par les structures d'accompagnement. Le projet de décret a appelé quelques remarques du Conseil d'Etat et un nouveau projet est en cours de rédaction.
Associée à l'aide financière destinée au créateur lui-même, l'aide de l'Etat comportera la prise en charge des frais d'accompagnement, sur une base forfaitaire dont je sais que vous l'estimez réaliste. Il y a bien là reconnaissance du rôle de l'accompagnement.
- Ensuite, le projet de loi de Finances pour 1999 crée une réduction d'impôt pour les dons aux organismes sans but lucratif ayant pour objet de participer à la création d'entreprises, à travers un apport de financements aux créateurs, généralement sous forme de prêts d'honneur. Ainsi, comme les entreprises, les particuliers pourront exprimer leur solidarité dans des conditions fiscalement avantageuses en soutenant la création d'emplois.
- Enfin le projet de loi portant réforme de l'intervention économique des collectivités locales donnera une base légale aux subventions des collectivités locales à vos associations.
Toutes vos ressources potentielles ont fait l'objet d'un traitement juridique ou fiscal. Il ne reste plus qu'à leur donner une plus grande ampleur. Certains acteurs sont déjà fortement présents sur ce terrain : je tiens à remercier publiquement la Caisse des Dépôts qui à travers son programme PME vous apporte une aide considérable. Cela est aussi vrai de certaines entreprises qui m'ont fait connaître leurs projets en ce domaine.
Mais ce choix ne doit pas conduire à des rivalités stériles entre acteurs, ni à offrir des services médiocres aux créateurs.
Il est essentiel que lorsqu'un créateur potentiel rencontre l'un d'entre vous nous soyons certains qu'il sera accompagné efficacement. La qualité de vos actions est essentielle pour moi. Je sais que le Conseil National de la Création d'Entreprise va créer un groupe de travail sur ce thème. C'est une proposition opportune et adaptée et j'attends avec intérêt ses conclusions. Sur la base de ce travail, il nous sera possible de voir dans quelles conditions pourront être mis en oeuvre des contrats qualité avec vous.
Mais il est également essentiel pour moi que tous les créateurs puissent avoir où qu'ils se trouvent l'appui de l'un d'entre vous.
Cela passe par des coopérations entre vous dans le respect de l'identité de chacun. Je sais que plusieurs d'entre vous ont engagé des démarches de coopération et je ne saurai trop vous engager à poursuivre en ce sens.
Cela passe par une couverture satisfaisante de l'ensemble du territoire. La DATAR qui joue un rôle essentiel dans le développement de nouvelles structures à travers le FNDE partage et soutient cette préoccupation.
La mise en place de l'aide jeunes et l'aide aux chômeurs créateurs va jouer le rôle d'un révélateur en ce domaine. Je souhaite qu'elle soit l'occasion d'une structuration de l'accompagnement plus forte et plus complète sur le territoire.
3°) Cette complémentarité dans l'action d'accompagnement n'est pas suffisante ; il me parait essentiel que vous organisiez une expression collective, je dirai en forçant le trait, votre représentation.
Je préside, vous le savez, le Conseil National de la Création d'Entreprise qui rassemble l'ensemble des acteurs intéressés à la création d'entreprise. J'ai élargi sa composition afin de l'ouvrir à l'ensemble des réseaux. Ce Conseil doit être un lieu de discussion, de proposition, le forum naturel de la création d'entreprise. Il n'est pas le lieu du débat entre les seuls acteurs de l'accompagnement.
La manifestation d'aujourd'hui constitue sans aucun doute un pas important, un premier geste que j'espère fondateur en ce domaine. Cette attente d'expression de votre part que j'exprime peut vous semblez curieuse. Elle indique simplement que l'on ne peut construire ma politique de la création d'entreprise qu'avec vous.
Cette manifestation a été précédée d'un travail important de réflexion formalisé dans 39 propositions. Ce travail est extrêmement utile, comme cela a été dit ce matin, car il permet de faire progresser les diagnostics et de préciser les propositions. Je crois avoir répondu à toutes celles qui concernent l'accompagnement. Toutes les autres méritent d'être examinées attentivement, et un nombre important d'entre elles vont dans le sens de mes préoccupations.
Il m'importe de rendre aussi simple que possible et aussi conforme à la réalité économique les conditions du démarrage d'une activité. Les mesures de simplification comme l'aménagement des règles fiscales ont déjà été prises en ce sens. J'espère que nous pourrons parvenir à de nouveaux progrès en matière sociale. J'ai annoncé cette semaine un ensemble de propositions qui seront de nature à rendre moins pesante aux PME la question des délais de paiement.
Il m'importe enfin de faire entrer dans le champ du crédit la création d'entreprise. Or la difficulté d'étude des projets comme l'importance du risque associé à la création limitent nécessairement l'engagement des banques. Elles constituent trop souvent sur ces points des boucs émissaires confortables.
Néanmoins, je crois qu'elles pourraient s'impliquer davantage au titre du mécénat comme viennent de l'annoncer quelques réseaux.
Elles pourraient aussi s'impliquer davantage encore si une partie du risque était prise en charge par la collectivité. C'est déjà le cas avec SOFARIS pour ce qui concerne les fonds d'Etat. La loi sur l'intervention économique des collectivités locales leur permettra de participer à ces dispositifs.
Nous pourrions multiplier les exemples. Ce n'est ni le moment ni sans doute le lieu. Je saisirai le Conseil National de la Création d'Entreprise de vos propositions pour qu'elles puissent être débattues. Je sais que vous en serez les ardents défenseurs.
Il me semble que nous disposons aujourd'hui de beaucoup des éléments d'une politique active d'appui à la création d'entreprise. Sa mise en oeuvre ne repose pas que sur la définition de mesures nouvelles, nécessaires, sans doute sur certains points. Elle repose aussi sur l'action des acteurs, en particulier ceux que vous représentez. Albert OLLIVIER ce matin vous appelait à la patience et soulignait qu'au total beaucoup de choses avancent. Je partage ce point de vue, même si je m'associe volontiers à certaines de vos impatiences.
Tout cela permettra à davantage d'entreprises de se créer chaque année, à des entreprises nouvelles de se développer et franchir avec succès le cap du premier âge. Cela permettra aussi de compenser l'inégalité des chances face à la création entre les territoires. Tous ne disposent pas de services de proximité et d'accompagnement pour les créateurs. Il faut qu'à côté des hommes et du capital émerge ce troisième facteur de production que sont les territoires. C'est ainsi que nous réaliserons, comme l'a dit Lionel JOSPIN à l'occasion du mouvement des chômeurs, cette société du travail que nous voulons et non pas une société d'assistance, à laquelle certains nous demandent de nous résigner.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 27 septembre 2001)