Déclaration de Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés, sur les orientations du Gouvernement dans le domaine du handicap, notamment l'aide aux enfants handicapés, l'accompagnement en milieu ordinaire et scolaire, l'éducation spécialisée et les handicapés agés, Paris le 25 septembre 2000.

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Circonstance : Journées parlementaires sur le handicap à Lyon le 25 septembre 2000

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Bonjour à tous.
Les journées parlementaires nous donnent l'occasion de nous retrouver ce soir pour un échange avec vous sur les orientations menées par le Gouvernement dans le domaine du handicap et de l'évolution du secteur médico-social.
C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai répondu à l'invitation des organisateurs, ici à Lyon. Je les remercie de leur accueil chaleureux et de l'occasion qui m'est ainsi donnée de mieux vous informer sur nos projets.
Mon action au Gouvernement s'inscrit clairement, comme mon engagement de longue date, dans le respect constant des personnes, de leur dignité, de leur identité et de leur participation citoyenne.
Vous avez été nombreux à noter l'attention déterminée à désigner clairement, en mars dernier, dans le champ de mes compétences ministérielles, la responsabilité de la politique en direction des personnes handicapées.
Cela confirme la volonté du Gouvernement de poursuivre l'engagement qu'il a pris de garantir à chacun les droits de tous et d'assurer notamment aux personnes handicapées la place qui leur est due dans notre société.
Une politique globale
Je sais que rompre avec des situations aussi douloureuses qu'inacceptables, reconnaître à chacun une égale dignité, exige une attention permanente, une politique globale, ambitieuse et déterminée, cohérente et équilibrée, que le Premier ministre a lui-même présenté devant le Conseil national consultatif des personnes, le 25 janvier dernier. Nous allons donc poursuivre avec tous les partenaires pour créer les conditions d'un vrai choix de vie qui repose sur l'autonomie, l'intégration ou l'accueil protégé. Le Gouvernement y engage un effort financier sans précédent, mobilisant 2,5 Mds sur la période 99/2003.
En complément d'une volonté d'intégration clairement définie dans l'article 1er de la loi d'orientation du 30 juin 1975, les actions conduites par les pouvoirs publics ont contribué pendant de nombreuses années au développement de la prise en charge en institutions spécialisées essentiellement.
Si elles étaient tout à la fois nécessaires et demandées par les associations représentatives des personnes handicapées, si elles se révèlent encore indispensables pour celles et ceux qui sont le plus lourdement handicapés ou isolés, où en situation de vulnérabilité temporaire, ces solutions n'en ont pas moins pris le pas sur celles qui auraient pu favoriser le maintien en milieu de vie ordinaire, ignorant cette aspiration légitime des personnes handicapées et de leurs familles qui expriment de plus en plus souvent et de plus en plus véhémentement le désir, la volonté de garder leur parent handicapé près d'eux pour lui offrir cette affection, cette attention qui fait la qualité d'une vie.
Un vrai choix de vie
Pour répondre aux attentes et aux besoins de tous, en permettant une individualisation des réponses, il faut créer les conditions d'un vrai choix de vie. C'est pourquoi:
*en privilégiant résolument l'autonomie des personnes et leur intégration dans le milieu ordinaire,
*en répondant aussi aux besoins de prise en charge et d'accueil protégé des personnes les plus lourdement handicapées,
*en assurant la modernisation des instruments sur lesquels s'appuie son action,
*enfin, en inscrivant dans la durée cette politique avec des objectifs financés à échéance pluriannuelle.
La politique que le Gouvernement entend mener durablement marque un infléchissement et une orientation nouvelle par rapports à celles qui l'ont précédée.
A - Pour les jeunes
C'est d'abord en direction des plus jeunes et de leurs parents que notre action se renforce par des mesures spécifiques pour les jeunes.
L'aide précoce
Pour assumer pleinement leur rôle et leurs responsabilité à l'égard de leur enfant handicapé, les parents ont besoin de lieux où on les écoute, où on les soutient et où on les accompagne sitôt faite l'annonce du handicap, où, enfin, ils peuvent, au contact d'autres parents, accepter leur enfant tel qu'il est et investir pleinement leur rôle de parents.
L'importance du dépistage, du diagnostic, de la prévention et de l'intervention précoce auprès de l'enfant et auprès de sa famille n'est plus à démontrer. C'est souvent déterminant pour l'avenir. Les réponses apportées à ce besoin étaient encore loin d'être satisfaites. C'est pourquoi le Gouvernement, dès 1998, a décidé d'amplifier l'action engagée en faveur du développement des centres d'action médico-sociale précoce.
Ainsi, 24 CAMSP ont été créés ou étendus entre 1998 et 1999. A l'exception de huit d'entre eux, tous les départements métropolitains et d'outre-mer disposent aujourd'hui d'au moins un de ces centres.
Les mesures nouvelles de cette année, et celles du plan pluriannuel qui prendront le relais jusqu'en 2003, vont permettre de doter les départements non pourvus dès lors qu'ils nous présenteront un projet, et de renforcer les départements les moins bien équipés au regard de leurs besoins.
La scolarisation
Je n'ignore pas le combat des parents soutenus par leurs associations pour que soit reconnu le droit à la scolarisation de ces enfants et surtout, mises en uvre les conditions d'une scolarité la meilleure possible pour tous les enfants handicapés sans rupture de parcours, respectant leurs aptitudes, leurs potentialités et leurs aspirations individuelles.
C'est dans la logique de la loi d'orientation du 30 juin 1975 que la scolarisation en milieu ordinaire aurait dû, à ce jour, devenir la solution majoritairement proposée aux jeunes élèves en situation de handicap. Force est de constater que nous sommes actuellement dans la situation où un tiers d'entre eux seulement peuvent utiliser de telles opportunités.
Ce combat, le combat de ces familles, le Gouvernement le fait sien: améliorer l'éducation spécialisée ne suffit pas, la priorité nationale, c'est la scolarisation dans l'école. Le droit à une scolarisation adaptée aux aspirations et aux aptitudes, au potentiel de chaque enfant doit être garanti.
Je sais que les grands principes sont parfois difficiles à respecter sur le terrain pour de nombreuses raisons: manque de personnel, de moyens et parfois de locaux, insuffisance de l'offre d'accompagnement en intégration par les SSESAD et de place en établissement spécialisé pour les plus lourdement handicapés.
Les orientations
Cependant, nous ne pouvons accepter ces réponses d'impuissance. Donc pour améliorer les conditions d'orientation et le service rendu aux usagers, notamment en termes de délais et de qualité d'accueil - nous savons bien que la scolarisation d'un enfant, cela n'attend pas, cela ne souffre pas de délai d'attente - il faut développer les capacités d'expertise des commissions départementales de l'éducation spéciale; nous nous en sommes donné les moyens et une enveloppe de 15 millions de francs sera consacrée à cet effet sur la période 2001-2003.
Il s'agit aussi de faire en sorte que les décisions d'orientation dites "par défaut" deviennent à terme exceptionnelles grâce au développement cohérent des moyens diversifiés nécessaires à la scolarisation des enfants handicapés.
L'accompagnement en milieu ordinaire
Ainsi, lorsque l'intérêt de l'enfant impose une intégration en milieu ordinaire, il est indispensable d'assurer les prestations d'aide et de soutien éducatif, thérapeutique ou rééducatif définis par les commissions d'orientation.
C'est pourquoi le Gouvernement a déjà mobilisé 40 millions de francs en 1999, 60 millions de francs cette année et 300 millions de francs sur la période 2001-2003 pour le développement des services médico-sociaux d'accompagnement des familles et d'appui à l'intégration scolaire.
Par ailleurs, de nombreux enfants handicapés relevant de l'enseignement du premier degré sont d'ores et déjà scolarisés dans les classes spécialisées dites d'intégration scolaire (CLIS). Il convient de poursuivre cet effort et d'accueillir désormais au collège des jeunes présentant des déficiences intellectuelles. Nous savons que des efforts sont à accomplir dans ce domaine car les unités pédagogiques d'intégration (UPI) expérimentées à cet effet depuis 1995 ont fait la preuve de leur efficacité. C'est pourquoi Jack Lang et moi-même, devons signer prochainement une circulaire qui généralise ces dispositifs. Cela permettra à ces jeunes de poursuivre en milieu ordinaire, des apprentissages adaptés à leurs possibilités et leur garantira la mixité de leur vie et de leur développement scolaire.
L'éducation spécialisée
Réaffirmer le principe de l'ouverture de l'école républicaine à tous les jeunes handicapés ne signifie pas pour autant nier ou dévaloriser le rôle des établissements et des services spécialisés.
Je répète régulièrement cette affirmation car je connais leurs apports décisifs en matière de soutien à l'intégration scolaire en matière d'éducation et d'instruction. Je sais aussi qu'une prise en charge spécialisée dans un environnement institutionnel peut et doit être pour les personnes les plus lourdement handicapées, facteur d'épanouissement et d'ouverture aux autres.
Je n'ignore pas non plus que dans un grand nombre de départements, certains de ces jeunes sont encore en attente d'admission dans un de ces établissements. Cette situation n'est pas tolérable et je m'attache avec pugnacité à y remédier.
Avec mes services, nous tenons une comptabilité précise des places au regard des demandes non satisfaites de manière à planifier au mieux les réponses adaptées.
Le programme pluriannuel présenté par le Premier ministre va relayer pendant trois ans les mesures déjà prises ces deux dernières années pour un montant de 220 millions de francs. Il permettra la création de places supplémentaires pour les personnes les plus lourdement handicapées.
C'est ainsi que 120 millions de francs sont consacrés à l'accueil des enfants polyhandicapés et 150 millions de francs à celui des autistes.
Mais puisqu'il faut parler de chiffres, soyons réalistes: 50 millions, c'est 200 places supplémentaires. Je pense déjà que nous devrons aller plus loin pour satisfaire à la demande qui s'exprime, mais là, il s'agit de la prochaine législature! Nous devons tous nous mobiliser pour continuer cet effort, pour préserver l'équilibre de notre politique (forcément évolutive) de la scolarisation et ajuster l'offre à la demande. A cet effet, les groupes HANDISCOL, mis en place par l'instruction ministérielle conjointe que Ségolène Royal et moi-même avons signé le 19 novembre dernier, seront précieux.
Dans le cadre d'un partenariat désormais formalisé ces groupes ont notamment la charge d'évaluer les besoins et de proposer les dispositifs scolaires ou médico-sociaux qu'il convient de mettre en place pour y répondre.
Ils constitueront les outils d'une action cohérente et coordonnée en direction des jeunes élèves handicapés et recevront prochainement une assise juridique par le biais des comités départementaux consultatifs des personnes handicapées ( CDCPH) auxquels ils seront rattachés.
B - Pour les adultes
La politique gouvernementale comporte également des mesures favorisant la vie des personnes handicapées en milieu ordinaire et leur autonomie. Je le souligne, et je souhaite que vous le fassiez connaître autour de vous.
C'est le volet le plus innovant de la politique gouvernementale qui réside dans ces mesures nouvelles prises pour favoriser le maintien ou le retour à domicile des personnes qui le souhaitent en développant et garantissant ainsi leur autonomie, donc le respect de leur dignité et de leurs aspirations.
Là aussi, je sais combien les associations représentatives des personnes handicapées ont déjà uvré pour mettre en place des prestations répondant à cette aspiration.
Mais nous le savons, beaucoup reste à faire.
* Les aides techniques
Cependant, pour la première fois, l'Etat va dégager des moyens conséquents sur trois ans afin de faciliter l'accès aux aides techniques et humaines ainsi qu'aux adaptations des logements. Cet effort de 430 millions de francs sur trois ans aura, j'en suis convaincue, un effet d'entraînement que nous suivrons avec attention.
- Les sites pour la vie autonome
A propos de l'accès aux aides techniques et à l'aménagement des lieux ordinaires de vie, l'expérimentation menée depuis 1997 sur quatre sites (Isère, Morbihan, Saône et Loire) a confirmé l'utilité pour la personne handicapée, de pouvoir disposer en un même lieu, des fonctions d'accueil, d'information, d'orientation et d'évaluation des besoins.
La préconisation par une équipe pluridisciplinaire, d'aides techniques, d'aides humaines, d'aménagements ou d'adaptations du lieu de vie, est aussi apparue de nature à améliorer la qualité et l'adaptation de ces aides, leur synergie, tout en facilitant la mobilisation des différents financeurs
Au regard de son efficacité et de l'évaluation des services rendus aux personnes handicapées, le dispositif sera étendu à l'ensemble du territoire d'ici à 2003.
D'ores et déjà, dès 2000, onze nouveaux sites départementaux pour la vie autonome seront implantés dans le Nord, la Gironde, le Bas-Rhin, le Calvados, la Meurthe et Moselle, la Guadeloupe, l'Hérault, le Val-d'Oise, l'Indre et Loire, la Haute Saône et les Bouches du Rhône.
Un travail de préfiguration de nouveaux sites est par ailleurs en cours en Auvergne, dans le Limousin, en Midi-Pyrénées et en Picardie.
- Le droit à compensation
Parallèlement, le groupe projet, présidé par Mme Lyazid, conduit une réflexion sur la formalisation de la reconnaissance d'un droit à la compensation des incapacités des personnes handicapées, quels que soient leur âge et l'origine de leur handicap.
Je rencontre régulièrement Mme Lyazid. Le travail qu'elle conduit est d'une grande qualité et nous attendons les résultats de cette réflexion pour cet automne.
Les problèmes posés par la faiblesse et l'inégalité des prises en charge de ces aides entre les principaux financeurs, à savoir l'Etat, l'assurance maladie, et les conseils généraux devront être abordées, progressivement améliorées et résolues.
A cet effet, une première rencontre technique à mon cabinet, le 5 mai dernier a préparé la rencontre sur ce sujet réunissant notamment la Caisse Nationale d'Assurance maladie, l'Assemblée des Départements de France et les services de l'Etat.
Mais il faut revoir aussi la liste des matériels et équipements remboursés au titre de l'assurance maladie. Le progrès technique nous offre des matériels plus performants et plus esthétiques, indispensables à la vie autonome des personnes mon équipe et moi-même y travaillons avec acharnement.
Déjà, à l'occasion de la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale, Martine Aubry et moi-même avons annoncé des mesures d'amélioration de la prise en charge des audioprothèses. Dans les semaines qui viennent, l'âge limite de prise en charge quasi totale de l'appareillage stéréophonique sera portée de 16 à 20 ans; les conditions de remboursement des embouts auriculaires seront modifiées, par une revalorisation des tarifs et du nombre d'embouts pris en charge; les personnes sourdes et aveugles adultes bénéficieront des modalités de prise en charge applicables aux jeunes sourds.
Ces mesures, qui concernent 6000 personnes faisaient partie des 115 propositions du rapport sur l'accès des personnes sourdes et malentendantes, aux droits fondamentaux et à la pleine citoyenneté.
S'agissant de la participation de l'Etat au fonctionnement des sites départementaux pour la vie autonome, le Gouvernement s'est engagé, à assurer une contribution de 185 MF étalée sur trois ans.
*Les aides humaines
La possibilité de recourir à une aide humaine conditionne, dans de nombreux cas, le maintien ou le retour en milieu ordinaire de vie. L'insuffisance des moyens pour couvrir les besoins des personnes concernées en ce domaine, n'est pas à démontrer. Elle guide l'action du Gouvernement qui entend, dans les trois année à venir, poursuivre deux objectifs:
-d'une part, ouvrir les prestations des services de soins infirmiers à domicile - SSIAD - aux personnes handicapées,
-d'autre part, augmenter le nombre d'auxiliaires de vie.
Pour atteindre le premier, un décret, qui sera publié en fin d'année, permettra la mise en place de services polyvalents d'accompagnement et de soins à domicile.
Ceux-ci pourront intervenir aussi bien auprès des personnes âgées malades ou dépendantes, qu'auprès des personnes handicapées adultes.
Parallèlement, 45 MF seront spécifiquement consacrés sur la période 2001-2003, à la création de places dans ces services, au profit de personnes handicapées.
Comme je vous le disais, un effort significatif sera engagé pour développer le nombre d'auxiliaires de vie. Stabilisé autour de 1800 postes depuis de nombreuses années, celui-ci atteindra 5000 à l'échéance 2003, grâce à 200 MF de mesures nouvelles.
Parmi toutes les aides humaines, il en est une, qui me tient particulièrement à cur. Vous l'avez compris, il s'agit de celle apportée par ces couples, qui ont choisi de maintenir leurs enfants lourdement handicapés dans leur milieu familial, assumant d'une manière exemplaire leur devoir, par une attention et un amour de tous les instants.
Ce que souhaitent ces parents, c'est de la compréhension, oserais-je dire de l'humanité dans la considération et l'accompagnement de leur choix.
*L'A.E.S.
Au regard des disparités rencontrées dans l'application de la réglementation et des injustices flagrantes qui ont été portées à ma connaissance, j'ai souhaité qu'une réflexion soit menée entre mon cabinet, la DGAS et la DSS. Je suis personnellement l'évolution de ce dossier pour revoir les modalités d'attribution du troisième complément de l'allocation spéciale d'éducation. Cette mesure, en coordination avec l'allocation présence parentale qui prendra effet dès janvier, sera une aide plus efficace pour les familles dans la souffrance.
Ce travail, qui doit aboutir prochainement, permettra de clarifier les conditions d'attribution du complément de 3ème catégorie de l'allocation d'éducation spéciale, afin que les
parents d'enfants handicapés confrontés aux graves difficultés d'organisation de vie avec leur enfant puissent recevoir l'aide à laquelle ils aspirent légitimement.
L'accès à l'emploi, vecteur d'autonomie et d'insertion sociale.
L'accès à l'emploi demeure, pour de nombreuses personnes handicapées, un objectif majeur, porteur de plus d'autonomie et d'une intégration sociale plus forte.
Vous le savez, Martine AUBRY a relancé d'une manière déterminée la politique de l'emploi des personnes handicapées en s'appuyant sur un partenariat rénové.
Convention AGEFIPH
La convention quinquennale entre l'Etat et l'association de Gestion du Fonds d'Insertion Professionnelle des Handicapés (AGEFIPH) mobilise 1,5 milliards de francs sur trois ans, dans le cadre d'un programme exceptionnel d'action qui concerne tant l'accès à l'emploi que la formation professionnelle.
Les premiers résultats seront engrangés. Plus de 40.000 travailleurs handicapés ont bénéficié l'an dernier du dispositif "nouveau départ". Près de 80.000 autres ont bénéficié d'un contrat aidé. Les premiers chiffres de 2000 sont porteurs d'espoir.
Nous relançons actuellement avec la Fonction Publique une action concentrée afin que, dans un premier temps, les 6 % de travailleurs handicapés soient réellement partout la règle, et, au delà, pour sensibiliser toutes les fonctions publiques à plus d'ouverture.
Les CAT
S'agissant du travail en milieu protégé, et plus particulièrement des centres d'aide par le travail (CAT), ceux-ci ont vocation à offrir une prise en charge de longue durée à des personnes lourdement handicapées mais aussi à permettre aux travailleurs handicapés d'améliorer leurs compétences professionnelles, y compris en accompagnant ceux qui le peuvent vers une sortie en milieu ordinaire. Il n'est pas inutile de rappeler régulièrement ce principe.
Le taux de sortie des CAT vers le milieu ordinaire était de 4 % en 1997 et il n'a guère évolué depuis. J'entends que nous soyons dorénavant plus ambitieux, plus créatifs et plus confiants dans les réelles capacités d'évolution des travailleurs handicapés.
J'ai visité dernièrement en région parisienne un CAT dépendant d'une association nationale bien connue pour son action en faveur de l'intégration où 11 % des travailleurs réintègrent le milieu ordinaire. C'est possible, il y faut de la volonté. Je pense qu'à Lyon aussi, vous avez des scores excellents.
Les COTOREP
Quelques mots sur les commissions d'orientation (CDES et COTOREP) dont le fonctionnement doit être mieux coordonné. 45 millions de francs sont consacrés à leur modernisation, à la formation des secrétariats et au recrutement de médecins. Ainsi les données statistiques en provenance du terrain pourront être croisées avec l'enquête INSEE "Handicap, Incapacité, Dépendance" ce qui permettra de mieux connaître la diversité des handicaps des personnes mais surtout de mieux connaître la réalité individuelle des situations.
Il n'est pas tolérable qu'un travailleur handicapé voit son dossier traité au bout de plusieurs mois sans jamais avoir été reçu par quiconque d'une COTOREP.
C - Les handicapés âgés
Il faut poursuivre les efforts engagés pour répondre de façon satisfaisante aux demandes d'accueil en établissements des personnes les plus lourdement handicapées.
Il importait aussi de poursuivre et d'amplifier le plan quinquennal 1999-2003, en répondant aux besoins des personnes handicapées vieillissantes et de celles qui sont le plus lourdement atteintes.
Conscient de la nécessité d'anticiper les effets du phénomène démographique du vieillissement des personnes handicapées, le Gouvernement mobilisera, sur la période 2001-2003, une enveloppe de 45 MF pour développer leur prise en charge institutionnelle et proposer des solutions qui sont de nature à éviter toute rupture brutale avec le milieu ordinaire de vie.
Des solutions diversifiées sont d'ores et déjà mises en uvre par les associations dans un grand nombre de départements, le plus souvent avec l'aide des Conseils généraux. Il s'agit d'unités spécifiques pour personnes handicapées âgées dans les établissements pour adultes handicapés, ou en maison de retraite, ou encore en accueil conjoint de parents âgés avec leur enfant handicapé vieillissant. Autant de formules qu'il nous faut évaluer avant de les généraliser.
Leur mise en uvre impliquera la nécessaire adaptation de ces structures aux besoins des personnes handicapées âgées
et à leur exigence de qualité de vie. Des recommandations qualitatives d'équipement seront faites pour ces établissements, à l'instar de celles qui existent pour les établissements pour enfants handicapés.
Il n'y a pas de réponse simple aux problèmes posés par le statut juridique et les modes de prises en charge les mieux adaptés aux personnes handicapées vieillissantes.
Mais la complexité, la difficulté à aborder cette question ne doit pas servir d'alibi à l'immobilisme. C'est pourquoi, une réflexion approfondie est en cours avec les associations représentatives, notamment dans le cadre du comité national consultatif des personnes handicapées.
Le 4 juillet, lors d'une séance de travail fructueuse, ce comité a ouvert le débat sur ce problème de société que nous devons régler ensemble. Ses premières propositions me seront transmises au mois de janvier et nous aurons un débat public sur le sujet.
S'agissant des personnes les plus lourdement handicapées, le plan quinquennal 1998-2003 sera utilement complété par les mesures qui vont prolonger et renforcer les efforts engagés depuis 1995 pour la prise en charge des personnes autistes et des personnes cérébro-lésées ou atteintes d'un traumatisme crânien grave. Ce sont 300 MF supplémentaires qui seront mobilisés à cet effet sur la période 2001-2003.
L'action concentrée au sein du Gouvernement
Quelques mots sur les travaux que nous menons en collaboration avec les autres responsables ministériels, car je le dit nettement, ce travail interministériel est devenu la règle.
Les personnes handicapées ont rappelé avec force ces derniers temps par des opérations coup de poing dans les transports et au cur des villes qu'il y avait à faire, et à faire vite, dans le domaine de l'accessibilité. Ils ont raison, je soutiens leur détermination.
C'est pourquoi, a été créé un organisme fédérateur: le COLIAC (Comité de Liaison pour l'Accessibilité) dont les compétences s'étendent à tous les transports, mais aussi à l'espace public et au cadre bâti.
Parallèlement, Mme Bachelier a été nommée déléguée interministérielle auprès du ministre de l'équipement, des transports et du logement - Une politique d'incitation à l'accessibilité est à l'uvre pour les transports, nous venons de signer un code de bonne pratique au printemps avec les principales compagnies aériennes. Nous ne pouvons pas accepter que des personnes handicapées aient été laissées, en guise de vacances, sur le tarmac des aéroports!
De même j'ai soutenu la nécessité d'intégrer dans la formation des architectes un module obligatoire sur l'accessibilité.
Mais l'Etat ne peut pas tout faire - Les lois existent, les incitations sont mises en place pour le transport, mais aussi pour le logement, à tous de les faire vivre sur le terrain.
L'accessibilité c'est l'affaire de tous.
Nous avons besoin de responsables municipaux, de responsables départementaux (pour les collèges) et de responsables régionaux (pour les lycées) qui s'engagent dans cette voie - ce qui est bon pour les personnes handicapées est bon pour tous - C'est bon pour les parents de jeunes enfants avec les poussettes, c'est bon pour les personnes victimes d'un accident passager, c'est bon pour les anciens qui ont du mal à marcher -
Aujourd'hui, vous l'avez compris, une grande politique, ambitieuse, répondant aux préoccupations des personnes handicapées et de leurs familles est à l'uvre.
Sans attendre plus longtemps les précisions statistiques qui tardent à venir sur le nombre de personnes vivant en situation de handicap, nous voulons agir dans la transparence et en un dialogue avec la responsabilité, la représentation nationale.
Nous en avons clairement défini les objectifs; nous avons prévu les moyens; le reste est question de volonté, de détermination et de conscience partagée. Je peux vous assurer que sur ce dossier, l'ensemble du Gouvernement et moi-même sommes déterminées à faire avancer les choses et que nous apprécions toutes les initiatives qui participent à interpeller la société civile dans sa propre responsabilité.
Le projet de loi rénovant l'action sociale
Le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale sera l'une des étapes dans les mois qui viennent pour apprécier cette avancée. Le Premier ministre s'était solennellement engagé le 25 janvier dernier à ce que ce projet de révision de la loi de 1975 débouche.
J'ai donc présenté le fruit d'un intense travail de concertation au conseil de ministres le 26 juillet dernier. Le texte est désormais déposé au Parlement. Il ouvre le champ des missions et assouplit les réponses institutionnelles afin de pouvoir multiplier les passerelles entre vie institutionnelle et vie à domicile ou en milieu ordinaire. Ce texte permet d'aborder des thèmes entièrement nouveaux comme celui de l'évaluation et de la qualité. Il confirme aussi la nécessité d'une planification équilibrant l'offre d'institutions et de services sur tout le territoire. Enfin et surtout, il donne une véritable place aux usagers en garantissant leur droit à la dignité, à l'information et à la participation à la vie des établissements qui les accueillent.
Avec le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale, avec le projet de loi de modernisation du système de santé promouvant le droit des malades, lui aussi déposé prochainement au Parlement, avec la loi bioéthique, j'ai le sentiment que nous sommes en train de faire progresser l'idée de démocratie dans le monde de la santé et dans celui du handicap. Cette cause nourrit l'enthousiasme des gens qui partagent mon engagement et mes valeurs, vous le savez.
Le handicap ne doit pas conduire à une mise à part. La personne handicapée demeure une personne à part entière, avec sa pleine humanité et sa pleine citoyenneté.
Elle ne doit pas être exclue de la société commune. Par contre, cette société doit lui être rendue accessible par des dispositifs répondant à ses besoins réels, qui peuvent être d'accueil en établissement avec d'éventuelles antennes, d'éventuelles avancées vers la personne, d'accompagnement par des services ou des aides techniques de tous ordres mises à disposition pour garantir l'autonomie de la vie.
Pour prendre tout son sens, cette politique doit être diffusée, relayée, soutenue, accompagnée. Un récent rapport du Conseil économique et social vient confirmer les principales options engagées par le Gouvernement, il vient stimuler notre énergie.
Mais promouvoir l'intégration des personnes handicapées, leur participation citoyenne n'est pas le seul fait de l'Etat. Les collectivités publiques, les professionnels, les organismes de protection sociale, la société dans son ensemble doivent s'y engager plus fort.
"Il est indispensable que les personnes handicapées soient mises en situation de participer pleinement à la maîtrise de leur vie et au débat social, par une présence effective, sous des formes diverses, à tous les niveaux de réflexion, de concertation et de décision".
A des camarades, je tiens à dire : lors des élections municipales, débattons de ce projet de société, faisons aussi une place sur les listes à ceux d'entre eux qui voudront se présenter.
J'aimerais conclure en vous faisant part de ma conviction profonde : la politique que nous menons vise à changer durablement et profondément le regard que porte notre société sur la personne handicapée, à changer durablement et profondément la place qu'elle lui fait dans tous les secteurs d'activité humaine, qu'elle soit culturelle, économique, sociale, sportive, solidaire.
Ma détermination ajoutée à la vôtre, à celle qui partage cet engagement sans faille nous permettra de faire progresser encore cette idée pour qu'elle soit à l'image de ce que nous voulons de ce troisième millénaire.
(source http://www.social.gouv.fr, le 27 octobre 2000)