Conférence de presse de M. Pierre Moscovici, ministre délégué aux affaires européennes, sur l'état des négociations sur la réforme des institutions communautaires (format de la Commission européenne, pondération des voix, extension du vote à la majorité qualifiée, coopérations renforçées,...), l'action de la présidence en matière de sécurité alimentaire et de sécurité maritime.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Tout d'abord, merci à vous d'être à nouveau présents à ce rendez-vous auquel j'attache beaucoup d'importance, car il est l'occasion de faire un point régulier sur le déroulement de notre Présidence, qui entre désormais dans une phase décisive.
1. Je vais commencer, si vous le voulez bien, par faire le point sur la Conférence intergouvernementale sur la réforme des Institutions. Lors de notre dernière rencontre, le 23 octobre, je vous ai rendu compte des travaux du Conseil européen informel de Biarritz. Comme je vous l'avais indiqué, ce Conseil, qui était la première occasion pour les chefs d'Etat et de gouvernement de reparler des questions institutionnelles, au fond, depuis Amsterdam, est arrivé à point nommé pour donner une impulsion politique aux travaux.
Dans les jours qui ont suivi Biarritz, et pour profiter de l'impulsion donnée par cette rencontre, j'ai entrepris, à la demande du président de la République et du Premier ministre, des visites dans certaines capitales, je me suis rendu en Belgique, au Luxembourg, en Finlande, au Danemark, au Portugal, j'ai rencontré mes homologues Grec, bientôt Néerlandais, afin d'écouter mieux les demandes de nos partenaires et de commencer à rassembler les éléments qui nous permettront d'esquisser le compromis final.
Contrairement à ce que certains ont pu dire ou écrire, la volonté de la Présidence française n'est en rien d'imposer ses vues, mais de faire son travail du mieux possible. Cela signifie qu'un pays comme le nôtre peut avoir sa conception, doit avoir un niveau élevé d'ambitions, mais en même temps le travail de la Présidence est de trouver des compromis et non pas de passer en force sur telle ou telle question.
C'est une négociation difficile, car les enjeux sont très importants. Je rappelle que c'est sur ces mêmes questions que la précédente CIG a échoué, or l'échec n'était en aucun cas imputable à la Présidence néerlandaise, qui avait remarquablement travaillé, mais qui n'a pu que constater qu'il n'y avait pas de consensus pour conclure. La raison de cet échec se situait bien dans la difficulté même des questions posées.
Aujourd'hui, sans doute parce que la perspective de l'élargissement se rapproche, tous les Etats membres mesurent pleinement les enjeux et la nécessité de parvenir, à Nice, à un résultat substantiel. Mon appréciation de la situation, c'est qu'il existe partout une volonté d'aboutir, c'est ce que j'avais appelé "l'esprit de Biarritz", et je crois que tous, une fois levés certains malentendus, certaines incompréhensions sont prêts à contribuer à la recherche de compromis. Je n'aurai garde, d'ailleurs d'oublier, dans la fabrication de ce compromis, le récent sommet franco-allemand de Vittel au cours duquel nous avons bien sûr longuement parlé de la CIG.
Ceci posé, nous savons que, sans vouloir rien imposer, nous devrons à un moment donné, présenter des options et donner des impulsions. Je pense notamment au conclave ministériel organisé ce dimanche 19 novembre. C'est également ce que j'ai fait au cours des deux dernières semaines.
Ainsi, sur la question très sensible du format de la Commission, nous voyons bien que de nombreux Etats membres sont dans l'impossibilité de renoncer, dès Nice, à "leur" commissaire. Mais ils admettent aussi que l'efficacité de la Commission risque d'être affectée par un fort élargissement du collège. Il me semble aujourd'hui qu'il y a une forte disponibilité pour aboutir à une solution intermédiaire qui pourrait être celle d'une réforme par étapes, qui verrait la Commission plafonnée lorsque l'élargissement de l'Union sera intervenu. Le schéma d'une telle solution reste à préciser. Nous y travaillons. Mais vous comprendrez que je n'entre pas dans le détail des différentes options, qui n'ont même pas encore été examinées à Quinze. Je dirai toutefois qu'il y a peut-être là un chemin pour sortir de l'opposition entre deux solutions qui veulent soit une solution tout de suite, soit une Commission qui ne le soit jamais et qui reste désorganisée. J'ajoute qu'il me semble qu'il y a maintenant un consensus général, non pas pour une hiérarchisation de la Commission, qui fait penser à l'idée de commissaire sans droit de vote qui ne plaît à personne, mais pour une réorganisation interne de la Commission, qui viserait notamment à renforcer les pouvoirs du président et à augmenter le nombre de vice-présidents.
Sur la question de la pondération des votes au sein du Conseil, également très sensible et qui ne pourra se régler qu'en liaison étroite avec celle de la Commission, nous poursuivons l'examen des deux options qui sont sur la table : double majorité ou repondération simple, sur la base de propositions chiffrées.
Il m'a semblé personnellement que les pays favorables à la double majorité, qui en même temps souhaitaient conserver leur commissaire, pourraient être ouverts à des schémas de repondération simple, dès lors qu'ils conserveraient pour un temps leur commissaire. La majorité, légère, constatée en faveur de la repondération simple pourrait, sait-on jamais, s'amplifier.
Sur l'extension du vote à la majorité qualifiée, qui est, à mon sens la plus importante, nos partenaires sont conscients de la nécessité de faire des efforts sur les points les plus sensibles, qui sont aussi les plus emblématiques. Ils approuvent donc la méthode retenue par la Présidence, qui consiste à procéder à un traitement fin de chacun des articles concernés, pour parvenir, au total, au résultat le plus substantiel possible. Je n'entre pas dans le détail, nous pourrons y revenir si vous le souhaitez.
En ce qui concerne les coopérations renforcées, qui constituent un outil indispensable pour permettre à l'Europe élargie de fonctionner, comme nous l'avions noté à Biarritz, un large accord devrait être possible sur de réelles mesures d'assouplissement de cet instrument indispensable au fonctionnement d'une Europe élargie. Des interrogations demeurent toutefois sur les modalités de mise en oeuvre de coopérations renforcées en matière de politique étrangère et de sécurité commune. Nous devrons donc poursuivre nos travaux.
Un dernier mot sur l'article 7 du TUE : je pense qu'un consensus devrait être possible, à Nice, sur la mise en place d'une procédure de surveillance préventive, en cas de risque d'atteintes aux Droits de l'Homme dans un Etat membre.
Voilà où nous en sommes. Vous le voyez, nous n'avons pas perdu de temps depuis Biarritz, - y compris, vendredi dernier au Sommet franco-allemand - et je pense que la prochaine réunion au niveau ministériel, en conclave, le dimanche 19 novembre prochain, sera très fructueuse. Il nous en restera ensuite une, le 3 décembre.
Au total, je suis assez résolument optimiste et assez confiant sur la perspective d'obtenir à Nice un accord substantiel sur la réforme des institutions. La négociation reste délicate, des solutions doivent être encore formalisées, des efforts doivent être faits pour aller au compromis, mais nous restons dans cette direction. Depuis Biarritz, aucun élément de blocage n'est intervenu.
2. Je dirai, si vous le voulez bien, un mot sur l'élargissement pour saluer la remise par la Commission, du "composite paper" au Conseil ainsi que des rapports de progrès sur chaque pays candidats, avec, pour la première fois, un rapport sur la Turquie.
Nous allons étudier en détail tous ces documents qui serviront de base au débat qu'auront les ministres au Conseil Affaires générales, sur la base des propositions de la Commission le 20 novembre.
Je profite de cette occasion pour rappeler l'échéance suivante, s'agissant de l'élargissement, qui sera la réunion ministérielle de la Conférence européenne, à Sochaux, le 23 novembre. Cette réunion nous permettra d'aborder avec l'ensemble des pays candidats, la question des réformes institutionnelles en cours, mais également celle du fonctionnement de l'Europe élargie.
J'ajouterai ici un mot sur les Balkans, car lorsqu'on parle élargissement, même si la perspective est encore lointaine, il faut penser aussi aux pays de cette région qui ont vocation à rejoindre, un jour, la famille européenne.
Un mot donc, pour mentionner le Sommet de Zagreb, qui sera un des événements marquants des prochaines semaines. Il se tiendra d'ailleurs le lendemain de la réunion ministérielle de la Conférence européenne, le 24 novembre. Un projet de déclaration est en cours de finalisation. Il s'articule autour de deux idées fondamentales, d'une part, la réaffirmation de notre volonté de rapprocher tous les pays de la région de l'UE, sans exclusive, dans le cadre du processus de stabilisation et d'association ; d'autre part, la nécessité d'établir un nouveau type de relations au niveau régional (je pense notamment aux conventions de coopération régionale, au respect des droits des minorités, ou encore à la question des réfugiés, ainsi qu'à l'ouverture des frontières).
3. J'aimerais évoquer maintenant, si vous le voulez bien, deux sujets majeurs de la Présidence : la sécurité alimentaire et la sécurité maritime. Je les ai mentionnés brièvement lors de notre dernière rencontre le 23 octobre en rappelant notre volonté, au cours de cette Présidence, d'aller à la rencontre, des préoccupations concrètes de nos concitoyens.
L'actualité nous invite aujourd'hui à redoubler d'efforts pour faire face à des événements d'une ampleur nouvelle qui, à juste titre, préoccupent beaucoup nos concitoyens et, bien sûr, aussi les autorités françaises. Mais j'aimerais souligner que l'émotion que suscitent aujourd'hui ces événements - je pense, vous l'avez compris, d'une part aux nouveaux cas de vache folle, d'autre part à l'accident du "Ievoli Sun" - ne doivent pas masquer le travail accompli depuis plusieurs mois au sein de l'Union.
Tout d'abord, sur la sécurité alimentaire. Je m'exprime ici d'abord en tant que représentant de la Présidence en exercice de l'Union européenne et je ne m'attarderai donc pas, du moins dans cette introduction, sur la situation en France.
Ce que je veux rappeler c'est que, premièrement, nous avons permis l'entrée en vigueur dès septembre, du règlement relatif au système d'identification et d'enregistrement des bovins. Deuxièmement, la Commission a présenté le 12 janvier dernier un ensemble de 96 propositions visant à renforcer la sécurité alimentaire dans l'Union. Le Parlement européen vient seulement de rendre son avis sur ces propositions et le Conseil va pouvoir organiser un débat d'orientation, voire - nous l'espérons et ferons tout pour y parvenir- dégager un accord politique sur des propositions concrètes au Conseil Marché intérieur - consommateurs du 30 novembre prochain, que je présiderai avec François Patriat.
Nous souhaitons notamment que le règlement créant la nouvelle autorité alimentaire européenne soit adopté le plus rapidement possible. L'autorité alimentaire européenne pourra être saisie par la Commission, le Parlement européen, un Etat membre ou s'auto-saisir. Elle sera indépendante. Elle travaillera en réseau avec les agences nationales chargées de la sécurité alimentaire. Ses missions seront centrées sur l'évaluation des risques, les Etats membres et la Commission étant responsables des dispositifs de gestion des risques.
Avant de passer au sujet suivant, j'ajouterai un dernier mot concernant l'attention que nous portons aux attentes des consommateurs, pour vous rappeler que la Présidence française organise, conjointement avec la Commission et le Parlement européen, le premier forum du marché intérieur au service des citoyens et des consommateurs, les 28 et 29 novembre à Bruxelles. J'y serai moi-même aux côtés de mon collègue François Patriat, secrétaire d'Etat aux PME et à la Consommation et du commissaire Bolkestein.
4. Un mot à présent sur la sécurité maritime.
Là encore, permettez-moi de dire que la nouvelle catastrophe que représente, pour les côtes françaises, le naufrage du "Ievoli Sun" au large du Cotentin, ne doit pas faire oublier les initiatives prises après la tragédie de l'Erika.
Un premier paquet de mesures a été adopté par le Conseil Transports du 2 octobre : suppression des navires à simple coque d'ici 2015, renforcement des contrôles par l'Etat du port et contrôle des sociétés de classification.
La France proposera que ces mesures entrent en vigueur dès le début de 2001 sans attendre l'avis du Parlement européen. Il est exact que les propositions de la Commission étaient un peu plus ambitieuses. Mais elles ont rencontré l'opposition du Royaume-Uni, du Danemark, des Pays-Bas et de la Grèce, mais aussi de l'Allemagne et de la Belgique. Ces deux derniers pays ont accepté de se rallier au compromis de la Présidence, qui a pu être adopté. Un paquet plus ambitieux n'aurait malheureusement pas permis de réunir la majorité qualifiée, voilà la vérité. La commissaire Mme Loyola de Palacio a indiqué qu'elle encouragerait le Parlement européen à revenir au plus près des propositions initiales de la Commission. Cela ne nous gêne pas et je peux tout à fait comprendre cette position car la plus grande fermeté est de mise en pareilles circonstances. Mais il y a aussi une réalité dont il faut tenir compte, surtout quand on exerce la Présidence : c'est que nous sommes quinze à décider, et qu'un accord n'est pas toujours possible aux conditions idéales. Ainsi, le problème demeurera en deuxième lecture au Conseil de réussir à faire évoluer certains pays. Dans tous les cas, nous voulons une entrée en vigueur rapide, la plus rapide, du compromis déjà obtenu, quitte à le renforcer ensuite si la procédure de codécision permet de se rapprocher des propositions initiales de la Commission qui, je le rappelle, souligne la nécessité de normes de vérification, aboutissant à 5 500 contrôles au lieu de 3 000 prévus dans le paquet adopté, et aussi le retrait plus rapide des simples coques, que nous souhaitons, nous aussi, en 2010.
Un deuxième paquet de mesures sera discuté lors du Conseil transports du 21 décembre prochain. Il devrait notamment comporter la création d'une agence de sécurité maritime incluant un système commun de contrôle de l'état des navires et d'échange d'informations.
Soyez assurés que nous ne ménageons pas nos efforts sur ce point.
5. Enfin un dernier mot sur un autre sujet majeur de notre Présidence : ce qui concerne le domaine de l'éducation.
Le Conseil des ministres de l'Education vient d'approuver, le jeudi 9 novembre, à Bruxelles, le Plan d'action pour la mobilité. Ce Plan, élaboré par la Présidence française, vise, en complémentarité avec la Recommandation proposée par la Commission - qui a été également approuvée par le Conseil du 9 novembre - à fournir aux Etats membres une sorte de "boite à outils" destinée à favoriser la mobilité, en Europe, des étudiants, des enseignants, des chercheurs et des jeunes en formation et à lever tous les obstacles qui s'y opposent encore.
Le Plan d'action va maintenant être transmis aux chefs d'Etat et de gouvernement, pour approbation lors du Conseil européen de Nice.
Je crois que c'est une avancée dont nous pouvons nous féliciter car je crois qu'elle répond à une véritable attente de nos concitoyens.
Voilà ce que je souhaitais vous dire en introduction. Vous aurez sans doute relevé que je n'ai pas évoqué nombre de réunions importantes, par exemple celle de l'UEO, qui se tient aujourd'hui même à Marseille, ou encore le prochain Sommet Euromed, mais il est impossible d'être exhaustif. Il y a tout de même une manifestation que je voudrais mentionner, c'est la réunion, le 27 octobre dernier, par Nicole Pery, des ministres en charge de l'Egalité hommes-femmes, de la réunion aussi des ministres des Sports.
Mais je ne veux pas être plus long et je suis prêt maintenant à répondre à vos questions.
Q - Au sommet franco-allemand de Vittel, avez-vous avancé sur certains points, si oui lesquels ?
R - Nous avons eu des échanges approfondis. Je pense que les différents thèmes de la CIG ne poseront pas de problèmes entre la France et l'Allemagne. Nous avons ainsi confirmé une attitude que nous avions adoptée ensemble à Rambouillet, au début de l'été. Dans la CIG, l'Allemagne a affirmé avec beaucoup de clarté sa volonté de soutenir les travaux de la Présidence française, et c'est pour nous très important.
Q - L'Allemagne a laissé entendre qu'elle souhaitait une seconde CIG en 2004, pour préciser les compétences entre les Etats "fédérés", l'Etat "fédéral" et les régions. Quelle est la position de la France là-dessus ?
R - Vous avez raison de souligner qu'il faut penser aussi à l'après-Nice, dans lequel peuvent surgir plusieurs types de questions : le statut juridique de la Charte, cette question de la répartition des compétences, celle, qui lui est liée, de la réécriture des traités, voire l'hypothèse d'un processus constitutionnel. Tout cela fait partie du "paquet". Nous avons pris bonne note des préoccupations allemandes, que nous connaissions, en la matière. Cela figurera dans l'accord d'ensemble, sans aucun doute, mais il faut auparavant qu'il y ait accord d'ensemble.
Q - Vous avez visité quelques capitales européennes ces dernières semaines, parmi lesquelles Lisbonne. Je voudrais d'abord savoir comment vont les relations avec le Portugal. Deuxièmement, pourriez-vous faire un bilan de ces visites ? Avez-vous réussi à convaincre ces capitales du bien-fondé des réformes que la France veut mener à bout à Nice ?
R - Je suis mal placé pour vous répondre car je ne connais que mon point de vue, même si j'ai lu les comptes-rendus de la presse portugaise après ce voyage. Je peux seulement dire c'est que j'ai eu un entretien de plus d'une heure, en tête-à-tête strict, avec le Premier ministre Antonio Guterres, qui a été très amical et substantiel. C'est peut-être un signe que l'on arrive à bien se parler. J'ai, en fait, indirectement résumé ce que je pensais de ces visites dans les capitales. Je crois qu'il fallait effectivement lever un certain nombre de malentendus. Il y avait peut-être un sentiment exacerbé que la France était une Présidence partiale, qu'elle voulait imposer un point de vue, ou qu'il y avait une coupure entre les grands et les petits pays. Je me suis efforcé de m'exprimer là-dessus. La France n'est pas partiale. En tant que Présidence, elle tiendra évidemment compte des problèmes de l'ensemble de ses partenaires. Il n'y a pas de coupure entre les grands et les petits pays. A cet égard, la proposition qui posait le plus de problèmes, celle du plafonnement de la Commission avec rotation égalitaire, est, à la limite, une formule qui désavantage plus les "grands" que les "petits". Nous sommes prêts, par exemple en France, à renoncer non seulement à un commissaire tout le temps, mais éventuellement à deux, quelque temps. Je crois que là, cette critique était particulièrement mal fondée. C'est vrai qu'ensuite, il y a des pays qui ont des conceptions différentes de l'Europe, qui ont des populations plus ou moins importantes, mais pas des pays qui ont des droits inégaux. Nous voulons respecter les droits de chacun. Cela, je dirais, est pour le contexte psycho-politique, mais je sais que cela compte beaucoup.
Pour le reste, nous avons traité au fond des différentes questions : par exemple, sur la Commission, je vous ai répondu que nous étions bien conscients que pour un certain nombre de pays, de chefs de gouvernements, il était difficile de revenir dans leur capitale en disant : "Le Sommet de Nice a eu lieu, notre pays n'a plus de commissaire" - c'est le cas du Portugal. C'est pour cela que s'esquisse peut-être l'idée d'une troisième solution qui serait ce plafonnement par étapes. Cette réforme à étapes, encore une fois, n'est pas encore écrite noir sur blanc. Nous allons en parler, mais c'est une idée qui m'a paru émerger de plusieurs des contacts que j'ai eus. Quant à l'autre sujet difficile qui émergeait de Biarritz, celui de la double majorité et de la pondération, j'ai eu le sentiment qu'il y avait là une disponibilité de la plupart de mes interlocuteurs, à évoluer soit dans un sens, soit dans l'autre. Il n'y avait plus d'obstacle, du coup, à une avancée vers une repondération simple des voix. Nous allons là dessus, "faire des tests". Voilà les grandes lignes. Il y a bien sûr des éléments plus détaillés, notamment sur les préoccupations de chacun en matière de vote à la majorité qualifiée. Le travail continue sur ces sujets. J'en tire une appréciation plutôt positive. D'après ce que j'ai lu dans les différentes presses des différentes capitales, cette explication n'a pas été inutile. En tous cas, pour la Présidence, elle aura été très utile.
Q - Le chancelier allemand a dit à Vittel que ce sera le passage à la majorité qualifiée qui déterminera le succès ou l'échec de Nice. Pourriez-vous préciser sur quels points vous avez fait des progrès dans le couple franco-allemand ?
R - En ce qui concerne le couple franco-allemand - le Premier ministre et le ministre des Finances en ont tous deux rendu compte à l'issue du sommet lui-même - nous avons fait des progrès sur nos conceptions du vote à la majorité qualifiée en matière fiscale. Je crois qu'il restait, à la sortie de Biarritz, quatre grands domaines - le fiscal, le social, la politique commerciale extérieure, les questions de visas, d'asile et d'immigration - je peux vous assurer que sur chacun des points, nous tâchons d'avancer. Avec l'Allemagne, nous avons spécifiquement parlé de la fiscalité. Nous avons sur ce point des visions extrêmement proches. Les ministres de l'Economie et des Finances défendront là-dessus des thématiques communes. Cela avance, c'est du tricotage assez fin.
Q - Au sujet des repondérations des voix, avez-vous eu l'impression, à Vittel, que l'Allemagne serait disposée à abandonner sa demande de double majorité ?
R - La position allemande est ouverte, je m'en réfère à la lettre de ce que nous nous étions dit à Rambouillet. Mais elle considère que la double majorité est toujours sur la table. La Présidence va explorer chaque solution dans les jours qui viennent.
Q - Il parait que vous avez suggéré, lors de votre voyage en Finlande, le besoin d'un médiateur entre les soi-disant "grands" et "petits" pays. Qu'en dites-vous ?
R - Ce n'est pas exactement cela. Je l'ai lu dans les comptes-rendus qui m'ont été faits de la presse finlandaise, et je sais que cela a irrité certains de mes amis suédois, qui assureront la prochaine présidence. On ne va pas désigner un médiateur, nous sommes la Présidence, c'est à nous de faire la médiation. Ensuite, ce sera la Présidence suivante. J'ai dit que puisqu'il nous paraissait stérile d'opposer les "grands" et les "petits" pays, nous serions très ouverts à ce que des propositions viennent de pays qui justement sont considérés comme petits. J'ai dit à MM. Lipponnen, Rasmussen, Verhofstadt, Juncker, Guterres, que toutes les propositions qui émanaient de ces pays étaient recevables et pouvaient aider à la fabrication d'un compromis. Je l'ai dit notamment à certains tels Paavo Lipponnen, qui sort d'une Présidence récente, qui a très bien travaillé et dont la voix est écoutée. Dans chaque pays de l'Union, pour moi, il y a un fantasme des petits contre les grands, parce que nous sommes des nations qui successivement présidons l'UE, qui avons les uns et les autres des histoires importantes, et chacun peut apporter quelque chose à l'Union européenne.
Ce que j'ai voulu dire, c'est que la Présidence française ne serait pas une Présidence impérialiste, mais voulait écouter, retenir et prendre en compte les propositions que d'autres pouvaient faire. Voilà ce que j'ai dit au Premier ministre finlandais. Nous n'avons pas délégué une partie de notre Présidence. Les médiations, les compromis, c'est à nous de les fabriquer. Les idées, c'est à chacun des les apporter, qu'elles soient finlandaises, belges, portugaises, etc. Je pourrais multiplier les exemples, comme celui du plafonnement par étapes, une idée qui vient de certains pays du Bénélux. C'est à la Présidence de faire en quelque sorte son miel de toutes ces suggestions. Elle transmettra à la Présidence qui lui succédera, la suédoise, un dossier qui, je l'espère et nous y travaillons, sera en bon état, c'est-à-dire réglé.
Q - Mis à part les mécanismes de vote majoritaires ou autres, si j'ai bien compris, la position française est de cibler une vingtaine de zones et de sujets qui pourraient être soumis à un vote majoritaire - c'était l'accord fait à Biarritz. Pouvez-vous nous indiquer ces zones et sujets que la France souhaite voir soumis au vote majoritaire et s'il y a déjà accord, en particulier pour ce qui a trait au commerce international ? Pourriez vous nous indiquer également si vous avez le sentiment que le Conseil des ministres va appliquer leur décision de déclencher des mesures de rétorsion contre les Etats-Unis pour l'histoire des "foreign sales corporation", cette grande histoire fiscale pour laquelle l'Europe demande quatre milliards de dollars de pénalités contre les importations américaines, qui est évidemment très mal vue et considérée comme un danger pour les relations transatlantiques par l'administration sortante de Washington ?
R - Sur le vote à la majorité qualifiée, il y a quarante cinq questions sur la table. Un accord existe déjà pour une vingtaine d'entre elles. Il y en a quinze à vingt sur lesquelles je pense que nous pouvons parvenir à un accord maintenant facilement. Et puis, il en reste entre cinq et dix sur lesquelles l'accord n'est pas encore élaboré et sur lesquelles nous travaillons. Parmi ces matières, certaines sont très sensibles. J'en ai cité quatre tout à l'heure, qui sont les matières principales. Au sein de ces quatre matières, il reste la politique commerciale extérieure, sur laquelle nous, notamment, la délégation française, nous avons des interrogations. Nous pensons notamment qu'il est très important pour l'Europe de pouvoir conserver un mécanisme qui permette de préserver son identité culturelle - je parle d'identité, et pas d'exception. Il est très important que nous ayons des garanties à ce sujet-là. Nous sommes en train d'essayer d'examiner des compromis qui iraient dans ce sens-là. Sur le deuxième thème, il n'y a pas de décision prise à ce jour, me semble-t-il. La situation américaine, de toute façon, n'est pas extrêmement simple en ce moment.
Q - Qu'entendez-vous aujourd'hui par résultat substantiel ? On a l'impression qu'on s'oriente à la Commission vers un "left-over" qui serait décidé en 2004.
R - Non pas du tout. Ce n'est pas cela. Je vais bien me faire comprendre. S'il y a une réforme qui précise un plafonnement par étapes qui dit par exemple : jusqu'en 2004 on conserve l'actuelle commission, ensuite on a un nombre x à définir qui est supérieur à 20, qui croît avec l'élargissement et puis ensuite il y a une décroissance. Ce mécanisme lui-même doit être inclus dans le traité. Nous ne voulons pas d'une simple déclaration politique ou d'un nouveau protocole. Cela n'aurait aucun intérêt. Il faut que la question soit réglée. Elle peut être réglée par étapes, dans le temps, c'est une possibilité. Mais nous ne pouvons en aucun cas avoir un nouveau left-over à Nice. Cela signifierait que nous ne sommes pas parvenus à nos fins. A tout prendre, je crois qu'il vaudrait mieux en rester avec la situation antérieure, qui n'est satisfaisante en rien. Cela poserait un problème d'évaluation politique des résultats de Nice : considérerait-on que cela est suffisant ou pas ? Donc, il faut absolument que le nouveau mécanisme, quel qu'il soit, soit inscrit dans le traité. C'est fondamental. Nous révisons les traités, nous ne reposons pas devant nous les poussières laissées par le passé.
Q - Monsieur le Ministre, je vais revenir à la Conférence Euromed, même si vous n'avez pas les détails sur la réunion. Quelles sont, en général, les attentes de la France, en tant que présidente de l'Union européenne, de ce genre de forum ? Est-ce que, par ricochet, vous pouvez nous dire si la volonté des pays arabes d'introduire une requête sur la question du Proche-Orient rentre dans ce cadre ?
R - Dans la Présidence, il y a des rôles de coordination, des rôles particuliers. C'est surtout le ministre des Affaires étrangères qui suit cela. Il s'agit d'une conférence qui aura lieu les 15 et 16 novembre prochains et qui devrait aborder plusieurs sujets. Mais je ne peux pas vous dire encore, comme la préparation de la conférence se poursuit, l'état dans lequel les dossiers seront examinés. Un premier sujet concernera la réforme des procédures d'aide et de coopération avec la zone euro-méditerranéenne. C'est essentiellement le programme MEDA II qui sera évoqué à cette occasion. Nous examinerons les moyens de le rendre plus efficace. Nous pourrons aussi examiner les différentes coopérations dans les différents domaines, économiques, audiovisuel, etc. Enfin, il faudra bien sûr traiter la dimension financière de ce programme - c'est ce que nous sommes en train d'essayer de faire, en tant que Présidence. Il y aura aussi un enjeu implicite mais important, qui concernera les contacts politiques, relatifs aux conflits dans la zone euro-méditerranéenne, et bien entendu, au Proche-Orient. Sans vouloir entrer dans le détail de votre question, les réunions Euromed sont toujours l'occasion d'avoir des contacts privilégiés sur ces questions et de les discuter - donc ce ne sera pas à l'écart. Enfin, la question de la Charte pourrait être évoquée sous une forme ou sous une autre, mais je ne sais pas si ce dossier-là sera suffisamment mûr. Voilà ce que je peux vous dire sur Euromed.
Q - La semaine dernière, devant le mouvement des jeunes européens, vous avez évoqué le terme d'un traité "honorable". Pourriez-vous m'indiquer la différence entre un traité "honorable" et un traité "au rabais" ?
R - L'un est honorable et l'autre au rabais !
Q - Une Commission à 20 ou 22 membres plafonnée, des accords sur les gros sujets en matière de majorité qualifiée, est-ce que cela vous parait être quelque chose d'honorable et de suffisant pour dire que c'est un bon traité ?
R - Nous évaluerons cela à la fin, je le répète. Mon appréciation de la négociation c'est que nous sommes en plein dedans en ce moment. Nous ne sommes plus dans des postures figées, chacun recherche un compromis. Chacun aussi a ses contraintes, je prends un exemple : nous pouvons continuer à dire que la Commission doit être composée, pour l'éternité, de quatorze membres, et être plafonnée immédiatement. Je suis pour ma part toujours persuadé que c'est une formule meilleure que toutes les autres. En même temps, je constate que cela n'est pas possible, parce que, dans toutes les capitales que j'ai visitées par exemple, c'est non. C'est non pour des raisons qui ne sont pas insignifiantes. Je me mets à la place des Premier ministres portugais, finlandais, belges ou luxembourgeois. Ce ne sont pas exactement nos positions à nous, Français, par rapport aux différents postes dans la Commission, par rapport à leur influence globale sur la mécanique européenne. Je comprends cela.
Si nous disons qu'un traité honorable serait un traité qui passerait en force, en imposant exactement nos idées tout de suite, cela reviendrait à dire "pas de traité du tout". Il faut donc chercher des compromis. Qui dit compromis dit aussi que les autres doivent comprendre ces préoccupations d'efficacité pour l'avenir de la Commission. Je prends cet exemple là car c'est vrai qu'il s'agit de celui dont on parle le plus. Ils doivent comprendre que l'on ne va pas dire que la Commission va continuer tranquillement à s'élargir au fur et à mesure que de nouveaux pays membres entreront dans l'Union européenne. Cela aboutirait, à un moment donné, à avoir une Commission pléthorique, molle et inefficace et qui disparaîtrait du système communautaire. J'essaie par là de résumer les étapes du processus intellectuel qui font que le compromis est quelque part entre les deux. D'où cette idée de réforme par étapes, inscrite dans le traité.
Je ne parle pas d'un nouveau protocole incompréhensible comme celui d'Amsterdam, qui donne lieu ensuite à toutes les interprétations et discussions. Il faut qu'il en sorte un compromis, qui soit satisfaisant pour chacun, qui fasse donc la part des contraintes des uns et des idées des autres et qui puisse être un compromis durable, tenable, qui ait de la profondeur, qui puisse aller dans la durée avec l'élargissement. Voici ce qui est honorable. En deçà, on serait en difficulté et on devrait se poser la question de savoir si on fait un traité quand même ou pas. Cette question est toujours présente au dessus de la négociation. La négociation est en pleine carburation. Elle est difficile, délicate, mais je sens, encore une fois, que chacun veut aboutir - c'est tout de même l'essentiel. Si chacun veut aboutir, on finit par aboutir, "là où il y a une volonté, il y a un chemin", c'est bien le cas.
Q - N'est-on pas bien en deçà des ambitions affichées au départ ?
R - Il faut être cohérent avec cela. On ne peut pas à la fois dire qu'il faut être ambitieux et puis ensuite constater que l'Europe est ce qu'elle est et dire qu'elle est toujours en deçà des ambitions qu'on lui souhaiterait. Je vais prendre en exemple le débat sur la Constitution : je suis pour une constitution européenne, pour une fédération d'Etats-nations, je suis pour que la Charte soit le préambule de ce traité constitutionnel, très bien. Une fois que j'ai dit cela, si je me frappe la poitrine en le répétant, je me fais un peu de beurre à peu de frais, parce que la réalité est qu'il faut aussi tenir compte des avis des uns et des autres ; ou alors on fait l'Europe à quelques-uns qui partagent exactement les mêmes idées. Ce n'est alors plus la grande Europe élargie que l'on fait. Quand elle s'élargit, elle doit tenir compte de sa pluralité. La Présidence, en quelque sorte, son travail est d'aller le plus loin possible dans l'ambition, le plus haut dans les résultats, dans la logique de la construction communautaire telle qu'elle est depuis plus de quarante ans, en tenant compte de sa réalité, c'est-à-dire de sa diversité et des contraintes que rencontrent chacun des pays membres. Voilà ce que nous essayons de faire. C'est cela le rôle de la Présidence, certainement pas de renoncer à ses ambitions, de renoncer à donner des impulsions, mais en même temps, ce n'est pas non plus de faire en sorte que ces ambitions, ces impulsions se heurtent de plein fouet aux contraintes politiques que rencontrent les uns et les autres. C'est cela l'Europe.
Ceux qui parlent autrement en mettant en avant de grandes idées, comme s'ils ne savaient pas tous les obstacles qu'on rencontre, sont dans un autre domaine, celui de l'idéologie ou du projet politique, mais pas forcément dans le domaine de la réalité politique qui suppose que l'on confronte son idéologie à l'existant.
Q - Vous avez dit que vous alliez faire des propositions à vos partenaires : ce sera quand ? Allez-vous les faire en bloc ou bien par petits morceaux ?
R - Nous faisons passer continûment nos propositions à nos partenaires. Le Groupe préparatoire se réunit chaque semaine, il ne se réunit pas pour rien. C'est là que se fait l'essentiel de la discussion. Il reste deux conclaves ministériels, le 19 novembre et le 3 décembre. J'ai bien l'intention qu'à l'occasion de ces deux conclaves, nous allions au fond politique des questions soulevées, que nous entrions maintenant dans le cur de la négociation. Si nous voulons que les ministres jouent un rôle utile, il faudra alors qu'à une de ces deux occasions, avant Nice, on ait évoqué toutes les questions les plus délicates : les différentes formules sur la Commission, sur la pondération des voix. Je sais très bien que ce n'est pas là que l'on parviendra à l'accord, ce n'est d'ailleurs pas le rôle. Mais il faut que toutes les pistes aient été bien explorées avant Nice, et qu'à Nice, le chemin soit bien tracé, que les chefs d'Etat et de Gouvernement aient le choix entre un petit nombre d'options claires sur lesquelles ils puissent concentrer leurs discussions. Si nous avons bien défriché le chemin de la décision, je pense que nous aurons bien joué notre rôle - je parle à la fois du groupe préparatoire, des conclaves et de la CIG. Attendez-vous à ce que dès ce dimanche, il y ait des avancées dans les propositions.
Q - A propos de l'accord de partenariat de la Turquie et dans la déclaration du Quai d'Orsay, la France dit que : "s'agissant du cadre des relations entre l'Union européenne et la Turquie, nous avons pris acte de la proposition de la Commission. La France, de son côté, s'en tient strictement au cadre définit par le Conseil européen d'Helsinki." Cela veut-il dire que la proposition de la Commission ne peut pas dépasser le cadre définit par le Conseil européen, notamment à propos de Chypre ?
R - Nous travaillons sur la même base avec la Commission. Il faut que les conclusions d'Helsinki concernant Chypre mais aussi d'autres problèmes, soient reprises dans le partenariat pour l'adhésion. Ensuite, se pose la question de savoir où, avec quel statut, etc. C'est là-dessus que nous sommes en train de travailler. Mais les conclusions d'Helsinki seront reprises dans le partenariat pour l'adhésion, ce qui est logique.
Q - Donc le problème de Chypre ne peut pas être pris comme une priorité à court terme ?
R - Nous sommes en train de discuter de tout cela avec la Commission, les Grecs et les Turcs.
Q - Considérez-vous qu'il est de votre rôle de préparer l'opinion publique française à quelques sacrifices que la France est prête à faire pour le bien commun de l'Europe ? Considérez-vous que les Français sont préparés à faire des sacrifices pour l'Europe, par exemple avec la repondération des voix ?
R - La France est un pays qui s'est toujours inscrit dans la poursuite d'une certaine conception de l'Europe. La France est un pays fondateur de l'Union européenne, elle contribue avec d'autres, l'Allemagne notamment, aux progrès de l'Union européenne. Je n'ai pas le sentiment que nos opinions publiques soient hérissées par ces questions. Nous voulons en même temps définir des conditions de compromis qui soient les plus conformes à cette vision. Si faire des concessions revient à accepter des mécanismes absurdes ou inopérants, nous ne sommes pas prêts à les faire. Si faire des sacrifices c'est prendre en compte l'intérêt de l'Union européenne, alors là oui, nous sommes prêts à avancer.
Q - Vous n'avez pas l'impression que donner n'entre pas dans la conception française de l'Europe ?
R - Honnêtement, si je vous écoute, entre ceux qui disent que nous renonçons à une certaine ambition et ceux qui disent que cela n'entre pas dans notre conception de donner, j'en déduis que nous sommes en train de faire un compromis qui ne correspond pas exactement à nos idées. Quand on fait un compromis qui ne correspond pas exactement à ses idées, c'est qu'on a tout de même donné. La Présidence française est une présidence qui fait son travail, de deux façons : en donnant des idées - si elle ne les donnait pas, elle se situerait en dessous de son travail de Présidente -, et en fabriquant des compromis - si elle ne les fabriquait pas, elle se comporterait effectivement comme un pays arrogant, ce que nous ne voulons pas être. J'ai le sentiment que parfois, ici où là, on nous fait de mauvais procès. Nous faisons notre travail de Présidence, l'histoire ensuite jugera de ce Traité de Nice. Si la France a permis d'avancer dans sa Présidence sur l'éducation, la sécurité alimentaire, la sécurité maritime, sur les problèmes sociaux à travers la Charte et avec un bon Traité de Nice, nous pourrons regarder tranquillement les critiques..
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 novembre 2000)