Déclaration de Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, sur le bilan du Plan global d'action contre les violences faites aux femmes et les nouveaux axes d'action de son ministère, Paris le 24 novembre 2005.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion de la Commission départementale d'action contre les violences faites aux femmes à Paris le 24 novembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Monsieur le Procureur,
Mesdames et Messieurs,
A la veille de la célébration de la Journée internationale pour l'élimination des violences faites aux femmes, j'ai souhaité participer à la réunion plénière de votre Commission départementale d'action contre ces violences, car ces commissions jouent un rôle essentiel dans cette action, en mettant en réseau l'ensemble des acteurs concernés.
Cette journée doit être l'occasion de sensibiliser la population à cette réalité qui tend à s'aggraver.
Les derniers chiffres publiés sur les violences conjugales en France métropolitaine sont, en effet, accablants. Le recensement national des morts violentes survenues au sein du couple en 2003 et 2004, que j'ai présenté hier publiquement, révèle qu'en moyenne une femme meurt tous les quatre jours des suites de violences au sein du couple.
Et une enquête réalisée en 2000 a montré qu'une femme sur dix était victime de violences conjugales.
La totalité des catégories socioprofessionnelles sont touchées par le phénomène mais sont plus particulièrement concernées les couples dont l'un ou les deux membres sont sans profession.
A Paris, de janvier à septembre 2005, 2 096 faits de violence conjugale exercés à l'encontre de femmes ont été portés à la connaissance de la Direction de la police urbaine de proximité. On y recense 10 décès sur les deux années 2003, 2004.
Cette aggravation nécessite une mobilisation renouvelée de l'ensemble des acteurs concernés.
J'ai présenté hier, en conseil des ministres, une communication dressant, un an après son lancement, le bilan du Plan global d'action contre les violences faites aux femmes, et donnant une nouvelle impulsion à cette politique.
I. Ce plan a apporté des avancées notables.
1. Des progrès ont été accomplis en matière d'hébergement.
Pour l'hébergement :- Dans la plupart des départements, les préfets ont nommé un référent « violences/hébergement », à même de proposer une place à toute femme qui vient de déposer plainte ou qui est engagée dans cette démarche.
- Des diagnostics territoriaux en matière d'offres et de besoins ont été entamés. La réponse sur les offres d'hébergement vient de parvenir à mes services pour Paris. L'ensemble des données territoriales feront l'objet très prochainement d'une analyse détaillée.
- Enfin, les femmes victimes de violences figurent parmi les publics prioritaires pour l'accès aux nouvelles places de CHRS prévues dans le plan de cohésion sociale, au nombre de 800 pour 2005.
Pour mener à bien ces actions, nous avons augmenté le financement alloué aux associations et renforcé le partenariat entre les acteurs : - En 2005, le soutien financier accordé au secteur associatif spécialisé dans la lutte contre la violence a été augmenté de près de 20 %.
- Au niveau local, les Commissions départementales d'action contre les violences faites aux femmes ont été relancées et réunies dans la grande majorité des départements au moins une fois durant l'année écoulée.
Je souhaite que soient signés, d'ici 2006, dans l'ensemble des départements des protocoles de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.
2. Des efforts ont également été faits pour sensibiliser le public et les professionnels.
De nombreuses actions de sensibilisation du grand public ont été menées :- Nous avons lancé le 25 novembre 2004 une campagne nationale avec pour slogan « STOP VIOLENCE ? AGIR, C'EST LE DIRE ».
- Le ministère de la Justice a fait diffuser sur les chaînes hertziennes, à l'occasion de la Journée internationale de la femme, le 8 mars 2005, le film « Plus d'une femme par jour », qui contenait des images choc et un message engagé (« Réagissons avant qu'il ne soit trop tard »).
- Un film documentaire intitulé « SOS femmes battues : pour en finir avec les violences conjugales » sera diffusé demain sur France 5.
La sensibilisation des professionnels a été renforcée.- S'agissant des forces de l'ordre, la création récente de la Délégation aux victimes par le Ministère de l'Intérieur favorisera une véritable professionnalisation des policiers et des gendarmes dans l'accueil des victimes de violences.
- La Justice se mobilise également. Outre la publication, en septembre 2004, du guide de l'action publique relative à la lutte contre les violences au sein du couple, l'Ecole Nationale de la Magistrature a instauré une formation pour sensibiliser les futurs magistrats à la situation au plan pénal des femmes victimes de violences et aux aides qui peuvent leur être apportées.
- Enfin, la lutte contre les comportements sexistes a été inscrite dans les plans de formation de plusieurs académies.
Le rapport d'accompagnement à la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005 rappelle que l'éducation des jeunes au respect de l'autre sexe fait pleinement partie des missions du système éducatif.
L'association Ni putes, ni soumises, a reçu le soutien financier de l'État pour l'élaboration en direction des jeunes du Guide de l'éducation au respect.
Je salue à Paris les nombreuses formations réalisées en direction des fonctionnaires de police, des professionnels de santé, des travailleurs sociaux, des personnels de l'Éducation nationale.
II. Malgré l'importance de ces actions, l'aggravation du phénomène m'a conduite à lancer une impulsion nouvelle : trois axes forts d'actions vont être développés, en direction des victimes, des auteurs, et des professionnels.
1. Nous allons encore améliorer la prise en charge des femmes victimes de violences.
- En matière d'hébergement : la palette des possibilités d'hébergement va être élargie : les femmes victimes de violences pourront bientôt être accueillies à titre onéreux dans des familles, à l'instar des personnes âgées ou handicapées.
- En matière de santé : les parcours de soins des femmes victimes de violences vont être améliorés grâce à une meilleure coordination des différents professionnels de santé.
Pour cela, le Ministère de la santé et le Ministère dont j'ai la charge soutiennent la mise en place, à compter de janvier 2006, de réseaux d'accueil dans huit sites hospitaliers dont trois (Créteil, Nantes et Clermont-Ferrand) concernent plus précisément les femmes victimes de violences.
2. Nous allons aussi renforcer les sanctions contre les auteurs de violences.
Des mesures permettant une répression accrue des auteurs de violences faites aux femmes seront introduites dans un prochain projet de loi :
- La circonstance aggravante liée à la qualité de conjoint de la victime sera tout d'abord étendue aux anciens conjoints, concubins ou pacsés.
- Elle s'appliquera également en cas de meurtre, de viol et d'agression sexuelle.
La proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales, adoptée ce mois-ci, facilite l'éloignement du conjoint ou concubin du domicile de la victime ou de la résidence du couple.
3. Enfin, nous concevons de nouveaux outils pour aider les professionnels.
Une brochure destinée aux intervenants sociaux, aux professionnels de santé, aux policiers et aux gendarmes sera diffusée début 2006.
Je présiderai la semaine prochaine la Commission nationale de lutte contre les violences faites aux femmes, dont je viens de renouveler les membres. J'y lancerai une réflexion sur les démarches à conduire, à développer ou à soutenir, en direction des hommes violents.
Un groupe de travail va être constitué, présidé par le docteur Roland Coutanceau.
Il me paraît en effet essentiel de prévenir les violences subies par les femmes, au-delà du repérage et de la lutte proprement dite contre ces violences.
L'ensemble de ces actions seront accompagnées en 2006 par une campagne de communication à destination du grand public.
J'espère puiser dans certaines expériences parisiennes matière à réflexion.
En retour, je souhaite que votre partenariat dans la lutte contre les violences faites aux femmes se poursuive de la façon la plus active possible au cours de l'année à venir.(Source http://www.femmes-egalite.gouv.fr, le 28 novembre 2005)