Déclaration de M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme, sur l'investissement des collectivités locales dans l'industrie du tourisme, enjeu du développement des territoires, Paris le 23 novembre 2005.

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Circonstance : 88e congrès des maires et des présidents de communautés de France à Paris, du 22 au 24 novembre 2005

Texte intégral

Je voudrais donc saluer, en premier lieu mon ami Didier BOROTRA, votre président, saluer toutes les personnalités qui se trouvent autour de la table, les parlementaires qui sont dans la salle et bien entendu les maires au féminin comme au masculin et adresser un salut tout à fait particulier pour mes amis qui sont de l'Outre mer et que je retrouve avec beaucoup de plaisir. Je voudrais vous dire que je suis vraiment très heureux de vous retrouver pour ce 88ème congrès des maires de France et des présidents de communautés de France.
Vous avez été nombreux encore cette année à répondre à l'invitation de Didier BOROTRA pour évoquer le rôle du maire en matière de tourisme et je m'en réjouis. C'est le signe d'une prise de conscience nouvelle de l'enjeu touristique pour le développement des territoires.
Lorsque j'ai reçu il y a quelques mois le président Jacques PELISSARD au cours d'un déjeuner au ministère, je lui ai fait part de mon souhait d'une approche plus large de la thématique du tourisme. Je suis donc là devant vous et bien entendu je ne peux que le remercier.
Le tourisme ne doit pas demeurer une affaire de spécialistes même si au regard de la concurrence accrue entre les destinations mondiales, l'amateurisme n'est plus de mise. Parmi les nombreux objectifs que je me suis fixés depuis 3 ans, celui d'une plus grande diffusion de la fréquentation touristique sur le territoire doit constituer en effet une vraie priorité. Pour gagner ce pari je souhaite convaincre les élus que la donne a changé. Les facteurs d'attractivité touristique classique perdent progressivement du terrain et permettent de dessiner une nouvelle carte de la France touristique de demain. 60 ans bientôt après l'instauration des congés payés, la France des vacances se réorganise au gré des attentes en perpétuelle évolution d'une clientèle plus mobile et plus volatile.
Comme je l'indiquais en préambule, si les facteurs classiques de l'attractivité, comme par exemple la renommée, le patrimoine naturel, le climat, la présence de l'eau, la qualité des infrastructures d'hébergement conservent leur importance, de nouvelles aménités, de nouveaux atouts émergent. Cette évolution est très largement due à la révolution de l'accessibilité.
Accessibilité physique par exemple, après le raccourcissement continu des distances permis par le parachèvement de l'équipement du territoire français ? en disant cela je pense bien entendu au réseau routier, je pense au TGV, je pense aussi à l'évolution de la desserte aérienne avec ce nouveau modèle qui est celui des compagnies « low cost ».
Accessibilité de l'offre via Internet bien entendu, avec une information beaucoup plus rapide, des réservations qui peuvent se faire en quelques clics, et qui donnent une plus grande visibilité à des territoires moins connus, à tel point que l'on peut dire aujourd'hui que les derniers peuvent être les premiers, et puis d'autres facteurs plus sociétaux, qui prennent une importance croissante.
Je pense à l'accélération des temps : le raccourcissement et la fragmentation des séjours, qui impliquent de nombreux changements dans la conception et la commercialisation des produits.
Je pense aussi à l'événementiel : les festivals qui dopent la fréquentation des arrière pays comme en Provence par exemple. Je pense au tourisme culturel : le vieillissement de la population, la quête de sens dopent la demande de vacances intelligentes.
Cette quête de sens, la recherche d'authenticité créent de nouvelles filières : on parle maintenant de tourisme industriel, on parle de tourisme gastronomique, de tourisme rural, de loisirs sportifs de pleine nature : toutes ces évolutions sociétales et technologiques offrent aujourd'hui à chaque portion de territoire ? j'ai envie de dire presque à chaque commune ? la possibilité d'une « mise en désir » touristique de ses atouts. Or le développement des territoires dépend de manière croissante de la qualité de leur fonction résidentielle et de leur attractivité touristique.
En effet, les retraités et les touristes choisissent leur lieu de séjour selon les mêmes critères. Ils sont devenus les vecteurs majeurs de la redistribution des richesses entre territoires productifs, au premier rang desquels l'Ile de France bien entendu, et les territoires « réceptifs » comme la région PACA, le Languedoc-Roussillon, l'Aquitaine ou la Bretagne.
L'attractivité des territoires est donc une donnée essentielle de leur avenir et le maire aujourd'hui joue un rôle central car il est devenu l'organisateur de la destination touristique. Les différentes vagues de décentralisation depuis 1982 n'ont fait que confirmer ce rôle. L'implication du maire doit être d'autant plus forte que les retombées économiques du tourisme sur la commune sont importantes. Les maires des stations classées le savent très bien. Mais c'est aussi au premier édile de donner l'impulsion nécessaire pour que sa commune s'ouvre au tourisme.
Il peut s'appuyer, pour ce faire, sur des acteurs de terrain tels que les offices de tourisme, sur lesquels repose la stratégie nationale de développement d'une offre de qualité accessible à tous. Les OTCI sont en première ligne pour observer les évolutions et les nouvelles tendances aux quatre coins de France, et en Outre-mer bien entendu. Ils sont souvent la plus belle vitrine de l'ensemble de l'offre touristique locale.
Pour aider les maires dans leur mission, pour faciliter ce génie local, l'Etat a largement rénové son fonctionnement et ses structures. Ainsi la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales donne aux communes ou aux intercommunalités la possibilité de choisir entre le statut associatif, les SEM, les régies dotées de la personnalité morale et l'EPIC, qui était réservé jusqu'à présent aux stations classées ou aux communes littorales.
Cet assouplissement permet de gérer plus efficacement la relation avec l'Office de tourisme. De même, nous sommes en train de réformer la taxe de séjour pour étendre son assiette et redéfinir la destination de son produit afin que la promotion touristique en soit la principale bénéficiaire.
D'autres initiatives ont été prises depuis trois ans, par exemple pour simplifier la réglementation et mieux accompagner le développement touristique local, la réforme de notre pôle ingénierie avec ODIT France, dont je salue le Président Christian MANTEI ? je rappelle que cet organisme est au service des collectivités.
La publication prochaine d'un code du tourisme sera aussi un outil très efficace pour les principaux opérateurs. Tout cela, Mesdames et Messieurs, mes chers amis, pour vous dire que le développement touristique est aujourd'hui au coeur des stratégies de développement des territoires.
Les pôles d'excellence ruraux pourront largement s'appuyer sur cette compétitivité touristique et sur la richesse patrimoniale des communes. Nous serons en première ligne aux côtés de Christian ESTROSI, ministre délégué à l'Aménagement du territoire, sur ce dossier très stimulant car le développement touristique, en ralentissant voire en inversant le processus de désertification de certaines communes rurales, permet de contrer la fermeture de services publics, dénoncée bien entendu par les élus autant que par les populations locales.
Les retombées économiques du tourisme peuvent enrayer également la paupérisation de certaines communes, comme l'atteste le récent rapport du Conseil National du Tourisme qui définit « le tourisme, outil de revitalisation des territoires ruraux et de développement durable ».
Je souhaite enfin, pour conclure, vous rappeler l'importance de l'accessibilité des communes touristiques pour les personnes en situation de handicap. Je remettrai dans quelques instants, avec mon collègue Philippe BAS, ministre délégué à la Sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, les premiers prix « action innovation, accessibilité des communes ». Ces prix récompensent des initiatives originales pour intégrer les handicaps dans le quotidien en aménageant l'espace ou en formant les personnels communaux à l'accueil. Cette mesure du premier Comité interministériel du tourisme prolonge notre action vis-à-vis des professionnels engagés dans la Charte nationale de l'accessibilité. Les personnes en situation de handicap constituent, je vous le rappelle, un marché de 37 millions de personnes en Europe et nous devons aujourd'hui adapter sans tarder nos infrastructures à leurs déficiences. J'espère bien entendu pouvoir compter là aussi sur votre soutien et sur votre esprit d'initiative.
Voilà mes chers amis les quelques mots que je voulais prononcer à votre intention.
En arrivant, j'ai entendu quelques questions. Je ne suis pas en mesure de répondre à toutes vos interrogations. Mais pour avoir entendu, il y a quelques instants, madame le maire de Rocamadour qui évoquait la problématique des grands sites, je vais à travers cette réponse, vous donner un point de vue un peu plus précis. En rappelant d'ailleurs que j'ai eu l'occasion de recevoir, il y a à peine quelques semaines, la présidente des Grands Sites de France, j'ai pris un engagement qui consiste à faire se rencontrer à la fois ces responsables, ODIT France dont j'évoquais le nom tout à l'heure, mais aussi la direction du Tourisme, de façon à voir comment nous pouvons ensemble, croiser à la fois les moyens financiers qu'il faudra rechercher mais aussi croiser une certaine méthodologie.
Quand on parle de grand site il y a également, et tous les maires le savent bien, l'équilibre intelligent à trouver entre une demande de fréquentation de plus en plus forte, dont on sait malheureusement qu'elle exerce une pression importante, et en même temps la protection du patrimoine qui justement correspond à l'élément essentiel d'attractivité. Et c'est là que nous devons, dans un esprit de partenariat, mettre en place, en synergie, des méthodes pour répondre à ces deux impératifs : recevoir une masse touristique importante mais en même temps faire que le patrimoine soit malgré tout protégé.
Cette démarche a été engagée et je pense, en vous répondant madame le maire, que nous allons élaborer une méthode qui sera bénéfique à tous, sachant que pour nous, et cela correspond d'ailleurs à notre nouveau plan de marketing, les grands sites en France doivent être considérés comme des grandes portes d'entrée de la clientèle touristique. N'oublions pas que la richesse de la France, c'est la possibilité qu'elle a de pouvoir offrir au moins une trentaine d'identités culturelles, qui forment une mosaïque extraordinaire et qui correspondent à autant de portes d'entrée permettant d'attirer la clientèle, qui ensuite peut être diffusée sur l'ensemble du territoire. A chaque fois que nous ferons des efforts pour valoriser un grand site, c'est une chance supplémentaire que nous nous donnons bien entendu pour développer le tourisme en France.
Voilà quelques réflexions que je voulais faire à chaud mais, simplement et en terminant, je voudrais vraiment m'adresser à chaque maire ici présent. Beaucoup de maires l'ont déjà compris, et ils sont déjà autour de cette table ; en tenant ces propos, je pense par exemple à Didier BOROTRA mais je pense aussi à Philippe AUGIER et à Marc FRANCINAT qui ont bien compris que le tourisme pouvait être un élément formidable de développement économique. Le tourisme aujourd'hui est peut être l'activité générant le plus rapidement des recettes au sein du périmètre communal et pour cela il faut véritablement s'impliquer.
Pendant longtemps beaucoup de maires ont considéré que le tourisme était une activité très secondaire et beaucoup ne comprenaient pas, par exemple, la nécessité qu'il y avait de s'investir dans la mise en place d'un syndicat d'initiatives ou bien d'un office de tourisme. Eh bien c'est tout simplement la première étape qu'il faut déjà franchir pour pouvoir accueillir le visiteur. Lorsqu'il vient vous voir dans votre commune, il a besoin de trouver un lieu où il peut échanger, s'informer, revenir après de bonnes informations et cet investissement représente un moyen extraordinaire de fidéliser une clientèle, faire en sorte qu'elle revienne et vous savez que lorsque le nombre de visiteurs augmente, comme c'est le cas de la France qui est, je le rappelle, la première destination du monde, cela se traduit tout simplement par des recettes supplémentaires. Qui dit recettes supplémentaires dit richesses, .Ces richesses, c'est la création d'activités, la création d'emplois .Par conséquent, c'est tout à fait simple, mais il faut le vouloir et il faut le comprendre. Chaque maire, à son niveau, a un rôle à jouer et l'Etat est là pour l'accompagner avec les différents outils que nous avons mis en place depuis un certain temps.
Mesdames et Messieurs, je voulais vous remercier et remercier Didier BOROTRA de m'avoir permis de venir parler de tourisme. Pour terminer je voudrais simplement vous dire que notre ministère se tient à votre disposition.
Merci à tous en tout cas. Surtout, merci de votre contribution sur le plan local.
(Source http://www.tourisme.equipement.gouv.fr, le 29 novembre 2005)