Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur les expériences de développement durable, à Paris le 12 décembre 2005.

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Circonstance : Remise du prix littéraire des droits de l'homme à Mathieu le Roux et Sylvain Darnil, à Paris le 12 décembre 2005

Texte intégral


Monsieur le Président,
Monsieur l'Ambassadeur,
Messieurs les Lauréats,
Mesdames et Messieurs,
J'ai beaucoup de plaisir à vous accueillir aussi nombreux aujourd'hui dans ce ministère, pour un événement un peu particulier, et qui me tient à coeur. Je suis en effet très heureuse de remettre ce soir le 22ème prix littéraire des Droits de l'Homme à Sylvain Darnil et Mathieu Le Roux pour leur ouvrage "80 hommes pour changer le monde. Entreprendre pour la planète".
Je voudrais remercier Pierre Bercis, président de l'association "Nouveaux Droits de l'Homme", pour tout le travail accompli par son association, qui est à l'origine de ce prix.
Hasard du calendrier, ce lundi 12 décembre est aussi la journée de l'installation par le Premier ministre de la nouvelle Commission consultative des Droits de l'Homme. J'étais à ses côtés ce matin à Matignon pour cette cérémonie, au cours de laquelle ont également été décernés les prix des Droits de l'Homme de la République française.
Je me réjouis donc de cette coïncidence, qui illustre l'engagement de ce gouvernement, aux côtés d'ONG telle que la vôtre, en faveur de ces valeurs qui sont au coeur de l'action internationale de la France.
Permettez-moi à présent de me tourner vers nos deux jeunes lauréats de ce soir, pour saluer d'abord leur réelle performance physique, aujourd'hui récompensée : en 440 jours de voyage, ils ont en effet parcouru 65 000 km, et visité 38 pays différents.
En dénominateur commun des 80 destins exemplaires racontés dans leur ouvrage, c'est bien le développement durable qui s'impose.
Voilà un concept désormais bien connu dans son principe, beaucoup utilisé, parfois galvaudé, mais qui surtout peine à trouver des traductions concrètes qui puissent parler au plus grand nombre. C'est donc bien le mérite essentiel de cet ouvrage, me semble-t-il, que de fournir des illustrations bien vivantes, éprouvées sur le terrain, de la possible - et nécessaire - conciliation du progrès économique et social, avec l'équilibre naturel de la planète.
Je ne vais pas rappeler ici l'importance de cet enjeu, si nous voulons faire en sorte de léguer à nos enfants une terre qui ne soit pas devenue invivable. Pour y parvenir, les pouvoirs publics, les entreprises, et la société civile dans son ensemble doivent travailler conjointement afin de réconcilier trois mondes qui se sont longtemps ignorés : l'économie, l'écologie et les Droits de l'Homme.
Mais je veux rendre un hommage appuyé à tous les protagonistes de cette "encyclopédie" du développement durable, pour leur courage et leur créativité. Ils prouvent tous, de manière irréfutable, que le développement durable peut être compatible avec les réalités économiques, et que la mondialisation peut être une chance pour les pays du Sud dès lors qu'elle est un tant soit peu régulée.
Le développement durable n'est donc pas un effet de mode. C'est un défi. Un défi à l'égoïsme et à l'étroitesse de vue. Il ne peut s'imposer que par l'adhésion de tous, ce qui est loin d'être acquis. Pourtant, c'est aujourd'hui que presque tout se joue, et je songe en particulier à la conférence internationale sur le climat qui s'est tenue à Montréal la semaine dernière, où la France a défendu un approfondissement des engagements pris par la communauté internationale dans le cadre du Protocole de Kyoto. Le développement durable fait partie de ces défis à portée universelle, qui ne peuvent être utilement traités que dans un cadre international.
Dans votre livre, ce sont des initiatives individuelles que vous mettez en avant. Toutes prouvent par les faits qu'il est possible d'agir, qu'il est possible d'innover.
En tant que ministre de la Coopération, du Développement, et de la Francophonie, ma responsabilité est de faire en sorte que tous ces projets puissent changer d'échelle, pour passer d'initiatives individuelles à de véritables actions collectives. Tel est bien en effet le combat que mène la France dans les enceintes internationales.
Et c'est aussi ce qui inspire la réforme de notre politique de coopération qu'il m'appartient de mettre en oeuvre : longtemps orientée vers le soutien aux projets agricoles à caractère productiviste inspirés de la Révolution verte, notre aide au développement s'est aujourd'hui diversifiée et modernisée.
Nous avons, en effet, inscrit le développement durable comme fil conducteur de l'ensemble des projets et programmes que nous décidons et qui sont réalisés par notre opérateur qu'est l'Agence française de développement. Tous nos secteurs d'intervention sont concernés, qu'il s'agisse de l'éducation, de la santé, du développement social, de l'agriculture, de la protection de l'environnement, ou encore des infrastructures. Concrètement, cela signifie que chaque projet de coopération financé par notre pays doit apporter la preuve qu'il contribue bien à cette logique de développement durable, appréciée en fonction du contexte spécifique à chaque pays de notre zone de solidarité prioritaire.
Par ailleurs, vous savez que notre pays plaide pour une profonde réforme de la gouvernance mondiale, en préconisant la création d'une organisation internationale de l'environnement qui prenne véritablement en charge les objectifs du développement durable, et qui fasse contrepoids à l'OMC.
Mesdames, Messieurs,
Vous le voyez, nos combats rejoignent les vôtres, et notamment ceux de l'association "Nouveaux Droits de l'Homme". Je n'oublie pas, Monsieur le Président, que votre organisation participe à de nombreuses causes : la paix, l'intégrité physique, psychique et génétique, ou encore le respect des cultures. Je sais aussi le rôle qu'elle a notamment joué dans l'éveil de nos concitoyens à la gravité des violations de droits auxquelles se livrait la dictature argentine, voici bientôt 30 ans, ou sa contribution à la définition d'une obligation municipale de prise en charge des sans-abris en période hivernale en France. Tous ces combats que vous menez, avec enthousiasme, vous honorent. Ils nous rappellent aussi, à chacun d'entre nous, que la fraternité proclamée par notre devise nationale est un idéal que nous devons ensemble défendre, construire et mériter chaque jour.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 décembre 2005