Texte intégral
Q - Il y a donc eu cette nuit à Bruxelles un accord sur le budget. M. Tony Blair accepte un rabais de 10 milliards et demi d'euros sur la ristourne britannique. L'invité de "c'est arrivé cette semaine" est le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, qui était à Bruxelles aux côtés du président Chirac.
M. Philippe Douste-Blazy, bonjour. Nous avons su qu'il y avait eu un accord à Bruxelles à trois heures du matin. Dites-nous tout : qu'est-ce qui a permis cet accord ?
R - D'abord, il faut replacer le contexte. Pourquoi voulions-nous trouver un accord et pourquoi avions-nous vraiment besoin d'un budget entre 2007 et 2013, c'est tout simplement pour financer l'élargissement aux dix nouveaux pays membres. Depuis cette nuit, le mot solidarité est un mot qui veut dire quelque chose en Europe, parce que nous avions perdu ce sentiment là. Il est normal de faire une place à ces dix nouveaux Etats, d'abord parce que c'est une chance pour nous. Regardez ce qui s'est passé il y a trente ans avec l'Espagne, quand on voit aujourd'hui ce qu'est l'Espagne, ce que représente l'Espagne pour nous d'ailleurs, c'est pareil pour la Pologne, pour la Lituanie, pour l'Estonie. Nous vendons, nous investissons là bas. Il fallait leur donner les moyens, d'abord, d'avoir les mêmes chances que nous pour leur développement.
Q - Le Premier ministre polonais dit que ce sommet marque une victoire "bonne comme du champagne français". Et il précise que, pour un euro que la Pologne donnera à l'Europe, elle en recevra trois. Ce sont ces pays là qui sont les vrais vainqueurs de ce sommet.
R - C'est l'Europe qui est le vrai vainqueur. C'est majeur pour nous, d'avoir d'abord historiquement gommé ce qui s'était passé après la Deuxième Guerre mondiale. Ces pays qui s'étaient retrouvés dans le totalitarisme, dans le communisme, sous le joug totalitaire, sont revenus d'abord dans l'Union européenne au prix de réformes considérables et de courage considérable. Maintenant nous avons besoin d'eux pour la stabilité, pour la paix, mais aussi pour le développement.
Q - Monsieur le Ministre, avant le sommet, vous disiez : "j'invite Tony Blair à penser plus à l'Europe qu'à son pays." En acceptant que la ristourne, le chèque que reçoit le Royaume-Uni, diminue de 10 milliards et demi, est-ce qu'il le montre ?
R - Tony Blair a montré hier à quel point il était courageux. C'est un Premier ministre britannique, qui a préféré affronter un combat interne sur une idée, l'Union européenne, plutôt que de faire tranquillement son bon travail de simple Premier ministre britannique. Il a dépassé cela. Il a été au rendez-vous de l'Union européenne. Il a été intelligent, courageux. Il a remis en cause des avantages indiscutables dans un climat politique interne qui n'est pas facile. Je tiens à le dire ce matin : oui, nous avons obtenu cette diminution du chèque britannique qui datait de 1984, à un moment où la Politique agricole commune représentait 70 % du budget européen, à l'époque où le Royaume-Uni était moins riche qu'aujourd'hui, Mme Thatcher avait obtenu cela. Nous n'avons pas remis en cause le chèque britannique, nous avons dit : "on ne peut pas continuer à traiter les Britanniques de manière particulière avec un chèque, avec un rabais, pour les dépenses d'élargissement. Il n'y avait aucune raison que le Royaume-Uni s'exonère de cette aide. Oui, nous faisons entrer les nouveaux, nous payons tous quelque chose.
Q - Pour préparer son opinion publique à la diminution du chèque, M. Tony Blair disait quand même cette nuit qu'en terme de contribution nette - ce que les pays donnent par rapport à ce qu'ils reçoivent - pour la première fois, la France et la Grande-Bretagne sont à égalité.
R - Oui, c'est vrai. C'est ce qui s'est passé hier qui est à mon avis le plus important. Nous avons le sentiment que nous nous sommes tous mis ensemble autour de la table, d'abord pour que le niveau du budget soit satisfaisant. 1,045 % du PNB européen, c'est en nette augmentation par rapport aux premières propositions britanniques. Je vous rappelle que le Royaume-Uni avait proposé au début 1,03 %. Justement, cela faisait porter de manière injuste l'essentiel des économies sur les pays les plus pauvres de l'Union. Donc nous avons un budget satisfaisant. Ensuite, c'est un budget solidaire.
Q - La France aussi a fait un effort.
R - Oui, 11 milliards d'euros sur la période 2007-2013. Nous avons montré l'exemple et surtout nous avions demandé qu'on ne remette pas en cause les politiques communes, dont la Politique agricole commune parce qu'en 2002, il y a eu une réforme. Le Royaume-Uni l'avait d'ailleurs votée. La parole donnée, c'est la parole donnée.
Q - Mais est-ce que la Politique agricole commune ne pourrait pas être remise en cause en 2008-2009 quand on re-examinera l'ensemble des dépenses ? C'est aussi une des conclusions du sommet.
R - Comme vous voyez, nous sommes tout à fait d'accord pour qu'en 2008, 2009, 2010, nous puissions préparer le budget qui aura lieu en 2014. Il est normal de remettre à plat les recettes, les dépenses. Il est vrai que nous avons besoin de plus de politique de recherche, de système structurant...
Q - Et peut-être moins de politique agricole ?
R - C'est la Commission qui fera un rapport. Puis c'est le Conseil qui, à l'unanimité, doit l'accepter. Mais en aucun cas, même si nous réfléchissons à un nouveau budget en 2009, 2010, la France a obtenu qu'on ne touchera pas à ce budget là avant le 31 décembre 2013.
Q - L'accord conclu jusqu'en 2013 sera de toute façon respecté.
R - Oui, absolument. Il sera respecté jusqu'en 2013, c'est une décision qui a été prise par la France, mais aussi par les 25 autres pays hier. C'est un des vrais objectifs que la France avait : ne pas toucher aux politiques communes jusqu'en 2013, préparer par contre un budget sans aucun tabou pour après 2013, disons le premier janvier 2014 et en même temps demander aux Britanniques d'arrêter avec cette anomalie qu'est le rabais britannique.
Q - Juste encore deux petites questions : qu'est-ce que vous aviez préparé avec l'Allemagne ? Aviez-vous effectivement préparé ce sommet, la France et l'Allemagne ensemble ?
R - Oui, nous avons une réunion, toutes les six semaines, à quatre : la chancelière allemande, le président de la République et les deux ministres des Affaires étrangères. Ce sont des réunions qui permettent d'aller au fond des choses. Et on s'aperçoit que le couple franco-allemand est un élément majeur de la construction européenne. Bien sûr, il ne doit pas être exclusif. Hier nous avons beaucoup parlé avec des Polonais, avec des Espagnols, des Italiens, le Bénélux, qui nous ont beaucoup aidé. Mais c'était à propos d'une proposition franco-allemande. Cette solidité, cette confiance, cette manière de nous parler comme des amis, et des partenaires, c'est quelque chose qui a été absolument fondamental dans cette discussion...
Q - Sauf pour la TVA. Cela n'a pas marché sur la TVA. Angela Merkel vous dit non sur la TVA.
R - Sur la TVA, il y a le problème du bâtiment et des aides à la personne handicapée et personne âgée dépendante. Je peux déjà dire ce matin à votre antenne : cela continuera en France comme avant. Nous avons un rendez-vous le 24 janvier au Conseil des ministres de l'Economie et des Finances qui s'appelle Ecofin, et tout porte à penser que cela continuera comme avant avec une baisse de la TVA à 5,5 % pour le bâtiment et les travaux publics et pour l'aide à la personne. C'est important pour l'emploi.
Q - Et la restauration ? M. André Daguin vous écoute, Monsieur le Ministre.
R - On voit que le chômage baisse. Sur la restauration, M. André Daguin, et M. Jean-Pierre Rafarin avec lui il y un an, ont demandé cela et cela a été décidé. Le gouvernement va tout faire pour que nous puissions avoir un accord là aussi le 24 janvier. Imaginez que dans l'ambiance des perspectives financières, on ne pouvait absolument pas mélanger les perspectives financières et la TVA. Cela donnait une impression qui n'était absolument pas normale et qui n'était pas saine. Nous allons faire cela le 24 janvier. Nous allons tout faire pour que nous ayons un accord le 24 janvier; c'est vrai que les Allemands disent : "si nous disons oui aux Français, tous les restaurateurs allemands vont nous demander la même chose, et ça nous fait tant de milliards dans le budget et nous ne pouvons pas nous le permettre". Nous discutons avec eux, de toute façon, nous trouverons des solutions pour aider les restaurateurs parce que c'est important pour l'emploi, c'est important pour notre pays et c'est important pour la parole donnée.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 décembre 2005
M. Philippe Douste-Blazy, bonjour. Nous avons su qu'il y avait eu un accord à Bruxelles à trois heures du matin. Dites-nous tout : qu'est-ce qui a permis cet accord ?
R - D'abord, il faut replacer le contexte. Pourquoi voulions-nous trouver un accord et pourquoi avions-nous vraiment besoin d'un budget entre 2007 et 2013, c'est tout simplement pour financer l'élargissement aux dix nouveaux pays membres. Depuis cette nuit, le mot solidarité est un mot qui veut dire quelque chose en Europe, parce que nous avions perdu ce sentiment là. Il est normal de faire une place à ces dix nouveaux Etats, d'abord parce que c'est une chance pour nous. Regardez ce qui s'est passé il y a trente ans avec l'Espagne, quand on voit aujourd'hui ce qu'est l'Espagne, ce que représente l'Espagne pour nous d'ailleurs, c'est pareil pour la Pologne, pour la Lituanie, pour l'Estonie. Nous vendons, nous investissons là bas. Il fallait leur donner les moyens, d'abord, d'avoir les mêmes chances que nous pour leur développement.
Q - Le Premier ministre polonais dit que ce sommet marque une victoire "bonne comme du champagne français". Et il précise que, pour un euro que la Pologne donnera à l'Europe, elle en recevra trois. Ce sont ces pays là qui sont les vrais vainqueurs de ce sommet.
R - C'est l'Europe qui est le vrai vainqueur. C'est majeur pour nous, d'avoir d'abord historiquement gommé ce qui s'était passé après la Deuxième Guerre mondiale. Ces pays qui s'étaient retrouvés dans le totalitarisme, dans le communisme, sous le joug totalitaire, sont revenus d'abord dans l'Union européenne au prix de réformes considérables et de courage considérable. Maintenant nous avons besoin d'eux pour la stabilité, pour la paix, mais aussi pour le développement.
Q - Monsieur le Ministre, avant le sommet, vous disiez : "j'invite Tony Blair à penser plus à l'Europe qu'à son pays." En acceptant que la ristourne, le chèque que reçoit le Royaume-Uni, diminue de 10 milliards et demi, est-ce qu'il le montre ?
R - Tony Blair a montré hier à quel point il était courageux. C'est un Premier ministre britannique, qui a préféré affronter un combat interne sur une idée, l'Union européenne, plutôt que de faire tranquillement son bon travail de simple Premier ministre britannique. Il a dépassé cela. Il a été au rendez-vous de l'Union européenne. Il a été intelligent, courageux. Il a remis en cause des avantages indiscutables dans un climat politique interne qui n'est pas facile. Je tiens à le dire ce matin : oui, nous avons obtenu cette diminution du chèque britannique qui datait de 1984, à un moment où la Politique agricole commune représentait 70 % du budget européen, à l'époque où le Royaume-Uni était moins riche qu'aujourd'hui, Mme Thatcher avait obtenu cela. Nous n'avons pas remis en cause le chèque britannique, nous avons dit : "on ne peut pas continuer à traiter les Britanniques de manière particulière avec un chèque, avec un rabais, pour les dépenses d'élargissement. Il n'y avait aucune raison que le Royaume-Uni s'exonère de cette aide. Oui, nous faisons entrer les nouveaux, nous payons tous quelque chose.
Q - Pour préparer son opinion publique à la diminution du chèque, M. Tony Blair disait quand même cette nuit qu'en terme de contribution nette - ce que les pays donnent par rapport à ce qu'ils reçoivent - pour la première fois, la France et la Grande-Bretagne sont à égalité.
R - Oui, c'est vrai. C'est ce qui s'est passé hier qui est à mon avis le plus important. Nous avons le sentiment que nous nous sommes tous mis ensemble autour de la table, d'abord pour que le niveau du budget soit satisfaisant. 1,045 % du PNB européen, c'est en nette augmentation par rapport aux premières propositions britanniques. Je vous rappelle que le Royaume-Uni avait proposé au début 1,03 %. Justement, cela faisait porter de manière injuste l'essentiel des économies sur les pays les plus pauvres de l'Union. Donc nous avons un budget satisfaisant. Ensuite, c'est un budget solidaire.
Q - La France aussi a fait un effort.
R - Oui, 11 milliards d'euros sur la période 2007-2013. Nous avons montré l'exemple et surtout nous avions demandé qu'on ne remette pas en cause les politiques communes, dont la Politique agricole commune parce qu'en 2002, il y a eu une réforme. Le Royaume-Uni l'avait d'ailleurs votée. La parole donnée, c'est la parole donnée.
Q - Mais est-ce que la Politique agricole commune ne pourrait pas être remise en cause en 2008-2009 quand on re-examinera l'ensemble des dépenses ? C'est aussi une des conclusions du sommet.
R - Comme vous voyez, nous sommes tout à fait d'accord pour qu'en 2008, 2009, 2010, nous puissions préparer le budget qui aura lieu en 2014. Il est normal de remettre à plat les recettes, les dépenses. Il est vrai que nous avons besoin de plus de politique de recherche, de système structurant...
Q - Et peut-être moins de politique agricole ?
R - C'est la Commission qui fera un rapport. Puis c'est le Conseil qui, à l'unanimité, doit l'accepter. Mais en aucun cas, même si nous réfléchissons à un nouveau budget en 2009, 2010, la France a obtenu qu'on ne touchera pas à ce budget là avant le 31 décembre 2013.
Q - L'accord conclu jusqu'en 2013 sera de toute façon respecté.
R - Oui, absolument. Il sera respecté jusqu'en 2013, c'est une décision qui a été prise par la France, mais aussi par les 25 autres pays hier. C'est un des vrais objectifs que la France avait : ne pas toucher aux politiques communes jusqu'en 2013, préparer par contre un budget sans aucun tabou pour après 2013, disons le premier janvier 2014 et en même temps demander aux Britanniques d'arrêter avec cette anomalie qu'est le rabais britannique.
Q - Juste encore deux petites questions : qu'est-ce que vous aviez préparé avec l'Allemagne ? Aviez-vous effectivement préparé ce sommet, la France et l'Allemagne ensemble ?
R - Oui, nous avons une réunion, toutes les six semaines, à quatre : la chancelière allemande, le président de la République et les deux ministres des Affaires étrangères. Ce sont des réunions qui permettent d'aller au fond des choses. Et on s'aperçoit que le couple franco-allemand est un élément majeur de la construction européenne. Bien sûr, il ne doit pas être exclusif. Hier nous avons beaucoup parlé avec des Polonais, avec des Espagnols, des Italiens, le Bénélux, qui nous ont beaucoup aidé. Mais c'était à propos d'une proposition franco-allemande. Cette solidité, cette confiance, cette manière de nous parler comme des amis, et des partenaires, c'est quelque chose qui a été absolument fondamental dans cette discussion...
Q - Sauf pour la TVA. Cela n'a pas marché sur la TVA. Angela Merkel vous dit non sur la TVA.
R - Sur la TVA, il y a le problème du bâtiment et des aides à la personne handicapée et personne âgée dépendante. Je peux déjà dire ce matin à votre antenne : cela continuera en France comme avant. Nous avons un rendez-vous le 24 janvier au Conseil des ministres de l'Economie et des Finances qui s'appelle Ecofin, et tout porte à penser que cela continuera comme avant avec une baisse de la TVA à 5,5 % pour le bâtiment et les travaux publics et pour l'aide à la personne. C'est important pour l'emploi.
Q - Et la restauration ? M. André Daguin vous écoute, Monsieur le Ministre.
R - On voit que le chômage baisse. Sur la restauration, M. André Daguin, et M. Jean-Pierre Rafarin avec lui il y un an, ont demandé cela et cela a été décidé. Le gouvernement va tout faire pour que nous puissions avoir un accord là aussi le 24 janvier. Imaginez que dans l'ambiance des perspectives financières, on ne pouvait absolument pas mélanger les perspectives financières et la TVA. Cela donnait une impression qui n'était absolument pas normale et qui n'était pas saine. Nous allons faire cela le 24 janvier. Nous allons tout faire pour que nous ayons un accord le 24 janvier; c'est vrai que les Allemands disent : "si nous disons oui aux Français, tous les restaurateurs allemands vont nous demander la même chose, et ça nous fait tant de milliards dans le budget et nous ne pouvons pas nous le permettre". Nous discutons avec eux, de toute façon, nous trouverons des solutions pour aider les restaurateurs parce que c'est important pour l'emploi, c'est important pour notre pays et c'est important pour la parole donnée.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 décembre 2005